· B- Khartoum et les rebelles tchadiens.
Qui mieux que Déby peut comprendre que toutes les
rebellions ayant conquis le pouvoir de N'djamena, à l'exception de
Malloum, doivent leurs victoires au Soudan59(*). Et la situation dans laquelle il se trouve avec la
solidarité Béri ne peut contribuer qu'à
l'éloigner de Khartoum son ancien mentor. Khartoum ne tarde pas à
entrevoir le remplacement de Déby.
Dés l'été 2004, Khartoum change de
perception par rapport au régime de N'djamena. Ce changement
s'opère en faveur des groupes des rebelles tchadiens qui trouvent enfin
des interlocuteurs du côté soudanais.
Pour ce faire, Khartoum tente d'organiser les rebelles
tchadiens, d'abord pour leur cantonnement, puis l'armement et le financement.
Ce renforcement des rebelles obéit à deux logiques :
prêter mains fortes à Khartoum contre les insurgés
darfouriens d'une part, et évincer Déby du pouvoir afin que
cessent tous liens financiers entre les Beri d'autre part. Le soutien
permet la mobilisation des opposants en quête de soutien populaire,
d'argent, et d'une légitimité qui leur permettrait de faire
valoir leur ambition un jour au Tchad. Et les coalitions d'avril 2006 ou de
février 2008 sont les traductions concrètes de la volonté
de Khartoum.
Le choix de Khartoum est fait en tenant compte de
paramètres sociologiques tels que les rivalités entre les
Zaghawa et les Tama ou encore Arabes. Ce savant
dosage a permis à Khartoum de soutenir Mahamat Nour, chef de la
formation front uni pour le changement qui avait échoué aux
portes de N'djamena en avril 2006. C'est aussi le cas de la coalition qui, en
février 2008, a failli prendre le pouvoir n'eut été les
dissonances entre les chefs rebelles. Depuis, par rebelles interposés,
Khartoum et N'djamena se livrent une guerre par procuration aux
conséquences désastreuses pour les populations civiles tant
côté tchadien que soudanais.
* 59 Cf. Buijtenjhuis
,Robert, Frolinat et les guerres civiles au Tchad, op.cit.
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