2. LES ASPECTS SOCIO-DÉMOGRAPHIQUES ET
ÉCONOMIQUES.
a). Population
Le Département de Toma compte 17 villages. Il totalise,
selon les résultats du Recensement Général de la
Population et de l'Habitat de 1996, une population résidente de 22 946
habitants, dont 11 460 hommes et 11 486 femmes, soit une densité de 38
hts/km2. Le recensement administratif de 1998 donne également
des chiffres du même ordre : une population totale de 22 613 habitants
dont 11 333 hommes et 11 280 femmes.
Nous donnons ici une idée de la répartition de
la population des villages où nous avons mené nos enquêtes,
pour l'ensemble des villages du département, on se
référera à l'annexe n°2.2.
Tableau 2: Répartition de la population des
villages de notre enquête.
Villages
|
Tranches d'âges
|
Total
|
|
0 - 3 ans
|
4 -15 ans
|
16 - et +
|
|
1. KOIN
|
326
|
1 074
|
1 412
|
2 812
|
2. NIEME
|
60
|
195
|
300
|
555
|
3. SAWA
|
76
|
262
|
372
|
710
|
4. SIEN
|
78
|
246
|
331
|
655
|
5. TOMA
|
866
|
3 247
|
4 879
|
8 992
|
6. ZOUMA
|
283
|
982
|
1 160
|
2 425
|
|
Total
|
1689
|
6 006
|
8 454
|
16 149
|
Source : Recensement administratif 1998.
45
Dans le département de Toma, comme d'ailleurs dans
toute la province du Nayala, le groupe ethnique majoritaire et autochtone est
constitué des Sanan (couramment appelés
Samo)7 dont la langue parlée est le San.
L'histoire révèle que les Sanan sont un groupe
mandé descendu du Mali avec qui le pays san fait d'ailleurs
frontière. Ce groupe d'agriculteurs se subdivise en trois principaux
sous-groupes à variances linguistiques : le premier groupe, celui de la
région de Kiembara se signale par l'expression "maya" en début
d'expression verbale. Le second groupe est celui de Tougan usant du terme
"makya". Ces deux groupent forment, de par leur position géographique
les Sanan du Nord, tandis que le troisième, celui de la région de
Toma constitue les Sanan du Sud qui se signalent par l'usage du terme "maka" en
début de phrases. Notre étude sur le moulin à grains se
situe dans cette région sud du pays san. (Cf. carte n°3
ci-dessous).
7 Le mot san
désigne le groupe social et la langue. Les membres de ce
groupe se désignent au singulier par san (ex. "Je suis un
san") et au pluriel par sanan (ex. "Nous sommes des
sanan"), contrairement à l'usage courant en français qui
les nomme "samo". Ce terme de samo est, il nous semble, une transcription du
terme samogo ou samogho (en dioula "gens de san") par lequel
les Mossi et les Dioula appellent les Sanan.
Carte 3 : Carte du pays san
46
Source : Héritier F. (1981 : 83).
47
b). Organisation socio-politique.
Les sociétés dont l'organisation socio-politique
diffère de celles dotées d'un gouvernement central sont
généralement considérées comme des
sociétés anarchiques ou sociétés
acéphales8. Mais, en réalité, il s'agit de
sociétés segmentaires à hiérarchie diffuse,
c'est-à-dire sans regroupement général autour d'un roi,
sans gouvernement central. Certaines de ces sociétés sont
à base villageoise comme les Sanan et les Bwa du Burkina et d'autres
à base lignagère comme les Lobi (Burkina) et les Nuer du
sud-Soudan à propos desquels Evans-Pritchard (éd 1994 : 22)
écrit :"En vérité, les Nuer n'ont point de gouvernement et
l'on pourrait caractériser leur Etat comme une anarchie
ordonnée". On peut aussi faire un rapprochement identique avec les Sanan
au sujet de qui Maurice Ky ( cité par Kaba A. et Toé R. M., 1998
: 37), écrit : "Les Samogho constituent une population agraire,
indépendante, belliqueuse et autosuffisante. Ils n'ont jamais
réussi à s'unir même devant un ennemi commun. A quelque
niveau que l'on observe cette société, il apparaît qu'elle
fait montre dans ses moindres comportements d'une méfiance instinctive
voire d'une allergie à toute hiérarchie autoritaire, à
tout système à caractère contraignant et unitaire,
à tout pouvoir qui ne peut être contrôlé à
tout instant et remis en cause. Ainsi donc tout l'édifice politique
repose-t-il sur l'autorité des villages. En effet, les Samogho vivent
dans des villages dont les familles se regroupent en quartiers plus ou moins
proches les uns des autres".
L'organisation sociale des Sanan révèle
cinq principaux groupes horizontaux de parenté dans chaque village san..
Chaque groupe, formant un quartier, est repérable à son patronyme
: Ki, Toé, Sô, Go, Parè. Chaque groupe exerce une fonction
sociale reconnue par les autres : les chefs de village (Ki), les chefs
de terre (Toé), les griots (Sô), les forgerons
(Go) et les juges (Parè). La place de la femme dans la
société san reste encore, comme dans la plupart des
sociétés villageoises africaines, celle de mère au foyer,
abandonnant la vie politique à l'homme.
Il est important de préciser ici que c'est le
sous-groupe des forgerons qui a la maîtrise de la fabrication des outils
de production agricole et de cuisson des aliments. Tandis que les
8 A propos des expressions « anarchique »
et « acéphale », Cf. Fortes (M.) , Evans Pritchard (E.E.),
1964, Systèmes politiques africains, Paris, éd. PUF,
1ère éd. en anglais 1940, 302 p. ;Clastres
(P.), 1974, La société contre l'Etat, Paris, éd.
Minuit, 188 p. ; Collectif, 1982, Nature et formes de pouvoir dans les
sociétés dites acéphales. Exemples camerounais,
Paris, ORSTOM, 172 p. ; Gresle (F.) et al., 1990, Dictionnaire des
sciences humaines. Sociologie, psychologie sociale, anthropologie, Paris,
Nathan, 384 p.
48
hommes s'attèlent à la forge, leurs femmes
maîtrisant l'art de la poterie fabriquent jarres, canaris, tasses et
pots.
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