L'hospitalisation peut-elle constituer un moyen
permettant d'échapper aux contraintes sociales chez
l'enfant ?
Constat : Les difficultés scolaires,
affectives, sociales, peuvent déterminer des attitudes. La somatisation
d'un trouble peut être une réponse à l'entourage restant
sourd à un appel de détresse.
C'est le cas de Gérémi élève
de CE2. Ce dimanche il n'est guère dynamique, le soir un vomissement
déclenche l'alerte, ses parents le conduisent aux urgences du CHT. Il
sera admis en observation et ressortira deux jours plus tard (il a
manqué son contrôle scolaire). Nous estimons à 15 % le
nombre d'élèves hospitalisés pour des raisons
comparables89 .
Approche psychologique : Dans certaines
maladies (asthme, affections cardiaques, aggravation de maladies chroniques) la
contribution psychique au dérèglement physique était
une
90.
hypothèse avancée par Anna Freud
On constate que l'agressivité qui sous-tend la
relation mère-enfant est souvent annulée dès
qu'apparaissent les symptômes psychosomatiques. Chez le nourrisson, le
corps sert de base à la communication. Le symptôme psychosomatique
peut prendre une place privilégiée dans le système
d'interaction mère-enfant.
Fatigue, douleurs diverses sont des plaintes somatiques que
l'enfant use d'autant plus facilement que l'entourage est disposé
à les écouter. De nombreuses manifestations psychosomatiques
tendent à survenir à des âges spécifiques. Les
troubles doivent être mis en relation avec la maturation du
fonctionnement des organes et avec les caractéristiques du
développement psychologique.
- douleur abdominale vers 3-4 ans
- asthme du jeune enfant de 5 ans - céphalée
de l'enfant de 6-7 ans
Approche ethnologique : On constate que la
prévalence de certains troubles psychiques est dépendante de
l'aire culturelle. En Afrique on ne connaît pas la mélancolie,
elle est courante en France et plus encore en Polynésie (Fiu)
avec de multiples expressions somatiques de souffrance. La croyance
répandue considère que la maladie psychosomatique est
imaginaire.
Sigmund Freud identifie la maladie générale
à une concrétisation de fantasmes par un mécanisme de
conversion ou somatisation. Un autre modèle accepte l'idée que la
maladie psychosomatique est analogue à l'expression corporelle des
émotions, selon Franz Alexander91 toute maladie est
psychosomatique, « L'approche psychosomatique, est née de
l'étude des troubles viscéraux qui se développent dans
certains états émotionnels ».
C'est ainsi qu'à la cause organique, on peut associer une
cause émotionnelle.
Marcel Mauss n'affirmait-il pas « Rien n'est naturel
tout est social ». 92
89 En considérant 294 élèves sur 1803
qui ne purent être rangés dans l'une des catégories de la
Classification Internationale des Maladies. Le solde n'est pas
obligatoirement étranger à une pathologie de type
psychosomatique.
90 Freud A., Bergmann T., Les enfants malades, op
cit. p. 148.
91 Alexander F., Psychosomatic Medicine : its
Principles and Applications, Norton, New York, 1950.
92 Ce point de vue est contre dit par l'anthropologie cognitive
«L'esprit formate la culture et non l'inverse».
45
Approche statistique : Les données
compilées depuis 1985 à l'école
spécialisée du CHT
permettent de dégager les effectifs les plus
fréquents pour les «classes» suivantes:
- Sexe : Garçons 60% ; Filles 40 %,
- Niveau : Moyens de maternelle, Cours préparatoire, 6e
des collèges,
- Période: Rentrée scolaire
(février-mars).
La période climatérique n'est pas
caractéristique de la seule rentrée des classes, les
contrôles scolaires coïncident parfois avec des taux
d'hospitalisation plus élevés que le
standard annuel calculé dans le tableau en «annexe
2».
Une approche mensuelle souligne des faits similaires :
· Le nombre des enfants de CM2 hospitalisés en
octobre 2002 est trois fois supérieur au standard
(période coïncidant avec les contrôles scolaires, le passage
en 6e),
· La période d'évaluation de CE2 (10 au 21
mars 2002), correspond à un nombre d'hospitalisation plus
élevé que le standard. Parmi les 13 élèves
concernés du CE2, 10 feront un séjour court (2j),
· Un lundi du mois de novembre 2002, huit des dix
adolescents hospitalisés ne feront qu'un séjour bref,
coïncidant avec les «examens de passage»,
· Les effectifs diminuent généralement
à l'approche des grandes vacances (2 ado. en déc. 2002).
Questionnement : L'hospitalisation, est-elle un
moyen d'expression?
par lequel nous pourrions repérer:
- un message de fatigue scolaire
- le stress des évaluations et contrôles
- les conséquences de la pression sociale
93
- une phobie scolaire
Nous constatons que les périodes et classes
charnières (CP, 6e) impliquent une forte pression sociale, familiale et
scolaire. Elles correspondent au maximum de l'effort d'acquisition (lecture,
nouvelles disciplines) et d'adaptations (lieu, système, relationnel ;
obligation de réussite). Une étude plus approfondie permettrait
d'évaluer le niveau de «somatisation».
A titre indicatif, les effectifs recensés à
l'école spécialisée, comparée à ceux de la
population scolaire du Territoire montre que le taux d'hospitalisation peut
varier selon le niveau scolaire... (cf. annexe 2).
93 Télé NC, La phobie scolaire, dans
Envoyé spécial du 6 février 2004,
Nouméa.