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Perceptions, espaces urbains et gestion des ordures ménagères à  N'Djaména au Tchad

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par Emmanuel Ngueyanouba
Université catholique d'Afrique Centrale - Maà®trise en sciences sociales- socio- anthropologie 2005
  

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I. ESPACES PUBLICS : UN FAIT URBAIN EN MARGE DE
L'URBANISATION

1.1. Des espaces urbains sans aménagement

D'abord, la confusion faite entre espaces publics et espaces non habités peut résulter du fait que dans leurs définitions de l'espace public, les individus s'arrêtent au mot espace. Il est vrai que cela se comprend parce que le mot espace tout court renvoie aux grandes étendues non couvertes de construction ou au grand vide céleste. Mais ce qui peut entretenir des confusions sémantiques à propos de la définition d'espace public chez une population qui commence une expérience de l'urbanisation dans une ville, c'est le non aménagement des espaces publics. Ces espaces demeurent au stade de réserves de l'Etat destinés aux travaux d'intérêts publics. Ceci ne permet pas aux citadins d'être renseignés sur les fonctions urbaines des espaces urbains. Ces espaces sans infrastructures trouvent auprès des populations des fonctions définies tacitement par celles-ci. Ainsi, lorsqu'un espace est vide - et donc non seulement l'espace public défini ainsi mais également des domaines des particuliers non construits - il devient un champ de déploiement des comportements multiples : parking des troupeaux, défécation, décharges d'ordures comme nous l'avons vu plus haut. Selon un responsable du service d'hygiène et de santé publique de la direction technique de la voirie, il y a plus de décharges anarchiques spontanément créées par les populations de la ville sur des espaces vides qui sont en fait des réserves de l'Etat en vue de la création « des édifices publics » que des décharges autorisées ; un aveu que notre observation de la ville conforte. De façon générale lorsqu'un espace est vide et demeure ainsi pendant plusieurs années, il devient un lieu de défécation, de dépôt d'ordures pour les populations environnantes, que cet espace appartienne à l'Etat ou à un citoyen.

1.1.1. La non application de la réglementation des espaces urbains

Il y a également la faiblesse d'une organisation et d'une réglementation à travers lesquelles devraient transparaître des définitions et des fonctions urbaines précises des espaces publics. Certains espaces publics en milieu urbain n'ont pas les mêmes fonctions qu'en milieu rural. Ceci est tout particulièrement vrai des fonctions esthétiques urbaines. Les espaces qui

Les facteurs structurant les représentations des espaces urbains et rapports aux ordures

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remplissent ces fonctions sont notamment les ronds-points et les jardins publics. Et ces fonctions sont en principe définies par les autorités administratives en charge de la gestion des espaces urbains. Mais le défaut de la mise en oeuvre de ces fonctions pourtant bien définies favorise l'apparition d'autres types de représentations.

Selon un responsable du service d'hygiène et de santé publique de la commune, le problème se situe à deux niveaux : au niveau des gouvernants et au niveau de la population n'djaménoise.

Au niveau du gouvernement, il dit que : « La loi est là... mais on ne l'applique pas. Si on l'appliquait la population n'utiliserait pas les espaces publics anarchiquement. » Selon lui enfin, « le gouvernement n'aide pas la population à le comprendre (le sens du bien public, cela s'entend). Le gouvernement morcelle les espaces publics. »

Nous luis demandions ensuite : Vous parlez du gouvernement ?

Et il répondit : « mais oui ! Les personnes proches du régime au pouvoir comme les militaires par exemple. Ils occupent les espaces publics comme si c'était leurs propres espaces. Ils construisent dessus, ils s'y installent... ».

Pour ce qui concerne la population, il dit ceci : «la population n'djaménoise n'a jamais compris le sens de l'intérêt public. Quelqu'un qui a un espace devant sa maison préfère le morceler plutôt que de le conserver... Dans la ville, les réserves mêmes si elles ne sont pas morcelées, les populations ne veillent pas dessus, ça devient les lieux d'aisance33, on y jette les ordures, les arbres sont coupés etc. »

Le premier élément d'explication des comportements à l'oeuvre dans ces espaces vides provient de ce que le service n'installe pas de structures pouvant recevoir les déchets de consommation des ménages dans les quartiers de N'Djaména. En l'absence de poubelles et bacs à ordures publics etc. les ménages se résument à abandonner dans l'espace vide le plus proche leurs ordures.

Mais cette défaillance du service officiel ne suffit pas pour expliquer tous les comportements induits par la représentation de l'espace public comme espace vide. Ce qui affaiblit l'argument ci-dessus semble être la nature même des espaces vides. En effet, selon les informateurs, c'est « parce que c'est l'espace vide » qu'il est ainsi géré et non nécessairement par défaut d'infrastructures de gestion des ordures ménagères ou de w.c. C'est une chose qui va de soi. Le défaut d'une mise oeuvre de l'aménagement des espaces publics et de la

33 Le chef du service HSP nous confie, à l'occasion d'un autre entretien portant sur la gestion des ordures ménagères par les populations que « les gens préfèrent déféquer en plein aire, même ceux qui ont des latrines chez eux. Ils disent que c'est bon quand le vent fouette leur derrière. »

Les facteurs structurant les représentations des espaces urbains et rapports aux ordures

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réglementation rend possible le déploiement des comportements que l'anonymat de la ville favorise.

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