3.2.2.3. Gestion de la fertilité des sols
Si en zone de bas-fonds, les producteurs n'ont pas recours
à la fumure (fertilité naturelle des sols), ce n'est pas le cas
pour la conduite de leurs cultures en zone côtière et urbaine. Les
fumures utilisées par les maraîchers sont de deux types : la
fumure organique et la fumure minérale.
Les fientes de volaille (Photos N°4 et N°5) seraient
la forme d'engrais organique la plus utilisée par les maraîchers
de la zone urbaine (100%) et ceux de la zone côtière (56%). Elle
est généralement appliquée en fumure d'entretien. Cette
préférence pour les fientes de volaille s'expliquerait par le
fort degré de minéralisation de la fiente, produisant ainsi sur
les cultures, un « coup de fouet » rapide notamment pour le chou
et la tomate (Tokanou et Quenum, 2007). Cependant, les multiples arrosages
favorisent le lessivage accéléré des
éléments minéraux en profondeur. L'apport en fientes de
volaille est en moyenne de 16,91 t/ha (#177; 8,06 t/ha) pour la tomate en zone
côtière et de 32, 39 t/ha (#177; 15,35 t/ha) en moyenne pour le
chou. Le prix du sac de 50 kg de fientes de volaille varie de 1000 FCFA
à 1200 FCFA.
L'apport de bouse de vache (matière organique à
décomposition plus lente) en fumure de fond a certes une action plus
tardive, mais a un effet plus durable. Elle se pratique uniquement à
Grand-Popo (44% des maraîchers de la zone côtière). La dose
est de 12,94 t/ha (#177;5,07 t/ha) pour les exploitations de tomates
enquêtées. Elle coûte moins chère (500 FCFA le sac de
50 kg) et permet d'apporter des éléments minéraux
progressivement assimilables par la plante, d'améliorer la structure du
sol et d'augmenter la capacité de rétention en eau du sol,
réduisant ainsi les pertes par infiltration et évaporation.
Toutefois, les maraîchers lui reprochent d'être une source
d'adventices (du fait des graines consommées par les bovins) et
d'attirer certains insectes ravageurs de cultures (PADAP, 2003).
Photo N°4 : Fiente de
volaille en vrac Photo N°5 :
Fiente de volaille en sac de 50 kg
Source : Données de
l'enquête, Juillet - Septembre 2008
La disponibilité de ces produits constitue une
contrainte majeure. Cette contrainte se pose en terme d'accessibilité de
ces produits (fermes situées à plusieurs dizaines de km) et de
transport, ce qui augmente le coût de revient du produit. De plus, le
prix étant régi par la loi de l'offre et la demande, les fermes
pratiquent fréquemment de la surenchère face à la demande
de plus en plus croissante des maraîchers. Certaines stratégies
comme des commandes groupées ou l'achat par camion (ou un autre
véhicule) sont utilisées par les maraîchers pour
réduire le coût d'acquisition de ces engrais organiques.
La fumure minérale quant à elle, est uniquement
pratiquée en zone côtière et urbaine. Deux formules sont
essentiellement utilisées : l'Urée et le NPK de formulation
variable (10 - 20 - 20 ou 15 - 15 - 15 ou 14 - 23 - 14). Ces formulations,
plus utilisées par les maraîchers sont en fait destinées
à la culture du coton. Parfois, les maraîchers utilisent des
engrais dont ils ne maîtrisent pas la formulation. Il est fréquent
que les sacs d'engrais ne portent aucune indication sur le type d'engrais
minéral et la composition en éléments minéraux.
Les doses moyennes apportées sont de 0,84 t/ha (#177;
0,53 t/ha) pour le NPK, 0,29 t/ha (#177;0,24 t/ha) pour l'urée et de
0,12 t/ha (#177; 0,06 t/ha) pour la potasse en culture de tomate. Elles sont
par contre en moyenne de 0,53 t/ha (#177; 0,25 t/ha) de NPK et 0,65 t/ha (#177;
0,39 t/ha) d'urée en culture de chou.
Par ailleurs, il n'existerait pas d'engrais spécifiques
maraîchers disponibles sur le marché. Une investigation
auprès de la société SDI montre une volonté de
mettre au point une formulation spécifique aux cultures
maraîchères. Il s'agit de l'engrais NPK maraîcher
12N + 11P + 18K + 20 SO3 + 2,7 MgO + 0,015 B + 0,02 Zn + 0,2 Fe + 0,02
Mn conditionné en sac de 25 kg et vendu à 8.500 F
CFA/sac. Cependant, l'absence de demande (contrat de commandes) des
maraîchers en ce produit limite sa disponibilité sur le
marché.
D'autre part, nous avons constaté que
l'approvisionnement en engrais varie d'une zone à l'autre et même
d'une commune à l'autre.
A Sèmé Kpodji, les producteurs s'approvisionnent
souvent dans les magasins de Cotonou, ou de la société SDI, qui
vend de l'engrais non exonéré de droits et taxes à
17 500 FCFA le sac de 50 kg de NPK et 16 000 FCFA le sac de 50 kg
d'Urée. Le coût de revient bord champ est
généralement prohibitif variant de 15000 à 21000 FCFA le
sac. En effet, quelques maraîchers arrivent à avoir à
travers le circuit informel de l'engrais destiné au coton dont le prix
de cession aux producteurs de coton était fixé pour cette
campagne à 11 500 FCFA le sac de 50kg.
A Grand-Popo, l'achat se fait généralement
individuellement au Togo voisin et parfois au CeCPA et à l'UCP. La
préférence pour le marché togolais s'expliquerait par la
disponibilité en tout temps des intrants, même si le produit
revient plus cher (entre 13.500 et 15.000 F CFA/sac de 50 kg).
A Cotonou et Porto-Novo, l'approvisionnement se fait
essentiellement auprès des vendeurs ambulants, de façon
individuelle et souvent en détail au prix de 350 F CFA par kg. Si les
maraîchers arrivent à faire la distinction entre l'urée et
le NPK conditionné en sachet de 1 kg, ils ne peuvent pas connaître
la composition des engrais acquis. Toutefois, certaines coopératives
maraîchères de Cotonou s'approvisionnent auprès des
distributeurs d'intrants et les revendent à leurs membres afin de
faciliter l'accès des membres de leur association à des engrais
plus sûrs.
Les maraîchers s'approvisionnent donc là
où ils peuvent sans trop s'attacher à la
spécificité des produits qu'ils acquièrent. Il n'existe
aucun circuit formel d'approvisionnement en engrais maraîchers. Ceci pose
le problème de la qualité des intrants utilisés sur les
cultures maraîchères et de l'impact de leur utilisation sur les
sols et l'eau.
Par ailleurs, la plupart des maraîchers applique mal les
engrais. Cette utilisation non raisonnée des engrais n'est pas seulement
due au manque de connaissances de nombreux maraîchers sur les besoins des
cultures pratiquées, mais également au manque de moyens
financiers et aux fréquentes ruptures de stocks d'engrais auprès
des sources d'approvisionnement. Cette non maîtrise de la qualité
des engrais acquis essentiellement auprès des sources informelles
conjuguée à une utilisation mal raisonnée des engrais
minéraux (surdoses des apports) peut causer une dégradation des
sols (acidification, salinisation, déstabilisation structurale), une
pollution de la nappe phréatique, une intoxication des plantes et une
perte de qualité des productions. Toutefois, les initiatives
d'approvisionnement en engrais des UCP (Grand-Popo, Cotonou, Sèmé
Kpodji) et des associations de maraîchers (UMALGA à Grand-Popo,
UCOMAC à Cotonou) en collaboration avec les CeCPA des différentes
communes sont encourageantes et sans aucun doute, à consolider. Elles
pourraient faire davantage si leur autonomie financière était
renforcée.
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