I - 3. Les activités
Les Dioula sont considérés comme un peuple
marchand ; ils sont à l'origine de certaines activités
socioéconomiques qu'ils ont développées dans leur
environnement. Au nombre de celles-ci nous pouvons retenir : le commerce,
l'agriculture, le métier de tisserand12, la consultation du
marabout13 et la pratique de l'islam. La religion musulmane a
été un facteur déterminant dans le développement
socioéconomique des Dioula pour qui Dieu est au coeur de toute
entreprise.
I- 3 - 1. Le commerce
Le commerce constitue l'activité principale des Dioula
En effet, ce sont eux qui ont développé l'activité
commerciale en Afrique de l'Ouest. Ils étaient à la
croisée des grands axes routiers appelés routes commerciales de
l'Afrique de l'Ouest, partant de la Côte d'Ivoire au Ghana en passant par
le Mali. Sur le plan commercial, il existait des échanges entre autres
les produits, la vente de kola (= wóro), les tissus, le sel (= k<g]),
du poisson séché (=»j&g[ wála ») etc. C'est
la création de ce carrefour commercial qui a fait de Bobo- Dioulasso la
capitale économique de la Haute Volta14. Ces échanges
commerciaux
12 Le métier de tisserand est une pratique qui
consiste à fabriquer les pagnes à partir de la cotonnade. On
retrouve des gens qui font les fils et d'autres assurent le tissage de ces fils
en pagne.
13 La consultation du marabout consiste à aller
vers un »homme de science» pour demander bénédiction et
force pour réussir ou réaliser quelque chose.
14 Actuel Burkina Faso
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favorisaient également des échanges
d'idées et créaient une sorte de transmission de culture et de
civilisation.
Ce carrefour a permis des échanges économiques
et culturels et a créé une certaine unité autour du
concept »dioula ». C'est cette activité qui a donné
lieu à l'appartenance à ce groupe ethnique que constituent les
Dioula. Ils parcourraient toute la semaine les marchés des
différents villages (Péni, Toussiana, Bérégadougou,
Tagalédougou, Bobo...) pour écouler leurs produits. Ce sont eux
qui détenaient les boutiques dans ces villages et dans les
marchés.
Les femmes qui vendaient au marché ou dans les villages
étaient appelées »júla múso»
(=»femme dioula»), pour traduire l'activité commerciale de
celles-ci. L'idée du développement du secteur du commerce par les
dioula a été attestée par BARRO Tiémogo Mignougou
en ces termes : « c'est nous les Dioula qui avons apporté le
commerce »sáfariya» chez les Bobo,
les Tiéfo et partout ici. Donc tous ceux qui pratiquent le commerce sont
des dioula »15. Cette activité commerciale a eu
donc le nom de »sáfariya» (=commerce) reconnu
de tous les Dioula.
Si nous nous intéressons à la situation
géographique même de Darsalamy, ce village, comme bien d'autres
villages dioula, s'est érigé autour d'un grand axe routier de
Bobo - Abidjan (Côte d'Ivoire). Au cours de nos séjours, les
entretiens aidant, nous avons constaté que c'est à cause du
commerce que le village s'est installé en amont et en aval du goudron.
Juste au bord de la route, se dresse le marché pour faciliter son
accès à tout passant. De plus, nous nous sommes
intéressé à la gare ferroviaire qui traverse
également Darsalamy. De nos informateurs, il ressort que les Dioula ont
très peu exploité le train ; ils étaient distants de la
gare ferroviaire et pour certains, ils étaient plus proches
15 Propos recueillis auprès de Barro
Tiémogo Mignougou, notable à la cour royale, lors de l'entretien
du 4 janvier 2007 à Darsalamy.
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du goudron et à tout moment il y avait le commerce du
fait du passage des voitures à la différence du train qui ne
passait pas tous les jours.
Mais au-delà de cet avis, on pourrait explorer
l'hypothèse de l'école moderne. En effet, ceux qui travaillaient
au chemin de fer étaient avec des blancs qui parlaient
français16 et n'étaient pas des musulmans. Comme
Darsalamy a été longtemps réticent à la
pénétration de l'école française et pieu pratiquant
de l'islam, il était difficile de collaborer avec ceux-ci. Et même
on a entendu dire souvent »túbab machine» (= machine du blanc)
pour designer le train, cette machine que le blanc a inventée. Cela peut
être considéré comme une raison qui marque le
désintéressement des Dioula de Darsalamy au train.
A côté de ce commerce comme activité
principale, les Dioula de Darsalamy ont développé d'autres
activités secondaires. Il s'agit de l'agriculture, de métier de
tisserand. En effet, Darsalamy était un centre important où
l'activité du tisseur a été développée.
De nos jours certaines familles perpétuent ces
activités aux abords du goudron non loin du marché17.
Ils font le fil et le tissage. Pendant longtemps ils ont produit des pagnes
qu'on appelle »túntun » (= pagne fait de fil de coton à
coloration multiple).
En outre, avec le temps, les Dioula ont
développé l'agriculture. Ils cultivaient entre autre le
maïs, le petit mil, le bissap18. Mais il faut noter que ces
cultures étaient pratiquées sur de petites superficies. De nos
jours ce sont de grandes superficies cultivables surtout avec la famille
royale19.
16 Le français ou d'autres langues
européennes.
17 De passage à Darsalamy, on peut apercevoir
ces tisserands sur la rive gauche du goudron en allant à Banfora sous
des manguiers.
18 Selon nos informateurs, la culture du bissap est
partie de Darsalamy pour se rependre dans les autres villages par l'action du
commerce.
19 Beaucoup de familles s'adonnent à
l'agriculture. En exemple, le chef du village est lui-même un brave
cultivateur. Son champ est à 17km du village comme bien d'autres
foyers.
12
D'autres ont développé la mécanique au
profit des voitures et motos des commerçants qui animaient les
marchés. Ils avaient des voitures de transport en commun qui faisaient
le tour des différents marchés20, des vélos et
des motocyclettes. Selon les informations que nous avons reçues, les
premières voitures de transport en commun entre les marchés ont
été acquises par les Dioula de Darsalamy, qui en avaient
l'habitude à Kong. Ce sont là des activités dites
économiques qui accompagnent le commerce.
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