I - 2. Organisation sociale et familiale à
Darsalamy
Chez les Dioula de Darsalamy, on observe deux types
d'organisation que sont : l'organisation sociale et l'organisation
familiale.
I - 2 - 1. L'organisation sociale
L'organisation sociale des Dioula est faite en fonction des
familles. Ce sont des familles originaires de Kong : Barho11,
Traoré, Touré, Cissé, Magan, Coulibaly, Saganogho,
Djané, Sérissouma (Cessouma), Diabatè, Tanou,
Konatè, Seriba, Dagnogon, Bamba, Dembelé, Diaby, Wattara.
Darsalamy repose sur deux organisations essentielles, deux
grands ensembles qui ont en charge l'organisation sociale du village. Nous
avons d'une part la famille royale, les Barro (Barho) avec le chef, et d'autre
part, la famille de l'Imam que sont les Sanogo. Cette organisation sociale se
fonde sur deux pouvoirs : le pouvoir traditionnel et le pouvoir religieux. En
effet, comme les Sanogo sont détenteurs du pouvoir religieux (islam)
coranique, ils ne pouvaient pas assurer la chefferie royale qui
nécessite des sacrifices aux ancêtres. Ils ont donc pris les Barro
qui étaient les chefs coutumiers à Kong pour assurer la chefferie
royale à Darsalamy. Ce sont donc ces deux instances qui assurent
l'harmonie du village.
11 »Barho» est devenu »Barro» ou
»Baro», mais c'est le même nom.
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Les problèmes d'ordre coutumier sont résolus
chez le chef du village et les préoccupations religieuses chez l'Imam.
Lors de notre séjour dans le village, nous avons été
d'abord accueilli chez le chef et ensuite conduit chez l'Imam pour saluer et
lui faire part de l'objet de notre visite. Un étranger qui arrive dans
ce village doit passer dans la cour royale et ensuite chez le chef religieux
avant d'entreprendre quoi que ce soit.
Nous avons assisté à des sacrifices
(»sáraka ») qui ont lieu à la mosquée. Ce fut le
premier jour de notre visite dans le village. Il s'agit de l'accueil d'un
étranger ou d'un membre du village qui s'est absenté pendant
longtemps. On le conduit à la mosquée pour faire des
prières et bénédictions et prendre les offrandes qu'il
apporte.
Un fait marquant est qu'il n'y a pas une organisation
administrative à Darsalamy. Cela s'explique du fait que ce village
relève de la commune de Konsa de la ville de Bobo Dioulasso. Pour tout
besoin administratif, les populations se dirigent vers Bobo d'où ils
sont partis.
I - 2 - 2 L'organisation familiale
Sur le plan familial, on parle de »guá» (= le
»foyer», la »famille»). Chez les Dioula, chaque famille a
un patronyme (Barro, Sanogo, etc.). Ce sont ces noms que l'on évoque
pour dire l'appartenance à un groupe social donné. Au-delà
donc du patronyme, »Jámu», qui marque le groupe social, nous
avons le
»guá» qui est la cellule familiale.
Quand on parle de »guá », on se
réfère à la femme, car c'est elle qui veille sur le foyer
à travers l'éducation des enfants, la cuisine. Mais chez les
Dioula,
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la société n'a pas accepté mettre la
femme au premier plan en dépit de cette considération. Les vieux
ont longtemps été réticents à cela. Pour eux, la
femme doit rester au »guá» (= foyer), soumise à son
mari. De ce fait, elle n'avait pas droit à l'école coranique qui
était un cadre d'éducation formelle et d'acquisition de la
sagesse et de maturité. De nos jours, cette pratique a positivement
changé. On retrouve les filles à l'école moderne et
même dans les écoles coraniques. Mais la femme demeure la
responsable du foyer et doit observer un respect pour son mari.
Dans chaque famille, particulièrement chez les Barro,
il y a un vieux (=»kí[m]g]ba») qui est forcément le
descendant des aïeuls. Relevant du côté paternel, il est
l'aîné de la famille. Personne âgée et pétrie
de sagesse, il est le pilier ou le patriarche de la famille ; il est la
référence vivante de la famille, le grenier de la famille en ce
sens qu'il a les sources d'information de la famille.
A côté de ce vieux, nous avons une vieille femme
»sótigi » (propriétaire de la maison). Elle est le plus
souvent la femme du vieux ou un des parents de la famille d'un certain
âge. Ces deux constituent le fondement de la famille malgré leurs
âges avancés.
Quand on dit »guá», c'est le
»foyer», c'est la »famille», c'est la »femme ».
Dans ce sens, la femme devrait avoir une place de choix, cependant, elle est
reléguée au second plan et a obligation de soumission et respect
à l'homme.
La famille chez les Dioula a une connotation assez forte. Elle
est le lieu de la formation et de la cohésion sociale, l'expression de
la fraternité et de la solidarité. C'est ce qui soutient le fait
qu'on mange toujours ensemble en famille et c'est aussi ce qui explique la
raison de se laver les mains ensemble avant le repas : si on se lave les mains,
on garde les liens de solidarité et de fraternité. Cela signifie
également qu'on se reconnaît frère et qu'on s'accepte.
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Toute décision se prend en famille. Par exemple, le
mariage est une question de famille. Et la famille est l'unité de base
de la société, d'où le caractère collectif et
communautaire du mariage. Un tel fonctionnement maintient la cohésion
entre les membres de la famille et partant, la société
entière.
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