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Approche ethnolinguistique des formules de salutation chez les Dioula de Darsalamy au Burkina Faso

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par Ignace SANGARE
Université de Ouagadougou Burkina Faso - Diplôme d'études approfondies option littérature orale 2008
  

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CONCLUSION

A l'issue de cette étude qui nous a permis de mieux découvrir les Dioula de Darsalamy à travers leurs formules de salutation, nous ne pouvons pas prétendre avoir perçu toute la quintessence des salutations. Il reste des points à découvrir ou à approfondir. Il s'agit notamment des questions liées à la langue proprement dite, aux terminologies, à certains us et coutumes qui vont de pair avec les salutations. Egalement dans ces préoccupations s'inscrivent les pratiques culturelles.

C'est le début d'une étude qui va s'étendre sur d'autres groupes sociaux en vue d'aboutir à un cadre formel qui confirmera les formules de salutations comme des éléments de la littérature orale.

A travers cette étude, nous avons pu découvrir le village de Darsalamy, les habitants et leurs pratiques. Nous avons appris que la tradition orale ou la littérature orale dépasse le cadre habituel identifié par les contes, légendes, épopées, proverbes, devinettes... pour prendre en charge les préoccupations de la société. Elle constitue ainsi un chaînon lié à un ensemble de pratiques socioculturelles.

Du point de vue de la méthodologie, nous avons appris comment approcher une société. Nous retenons que l'approche de nos sociétés à tradition orale requiert de la patience et de la courtoisie surtout quand on a à faire à des personnes âgées ou illettrées. Patience dans la mesure où les informations livrées peuvent subir des influences ou des modifications d'un informateur à l'autre. Et nous avons appris à nos dépends que seul le recul permet une analyse efficace et efficiente des sociétés africaines qui subissent au quotidien des mutations.

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Notre analyse s'est étendue sur trois chapitres. Dans le premier chapitre nous nous sommes intéressé à la présentation du terrain. En effet, ce chapitre a pris en compte l'origine des Dioula, leurs pratiques et activités, et leur religion. Les dioula de Darsalamy sont venus de Kong (Côte d'Ivoire) et se sont installés là au 19ème siècle. Sur le plan social, ils sont organisés en deux grands groupes à savoir : les Barro qui détiennent la chefferie traditionnelle (famille royale) et les Sanogo qui managent le pouvoir religieux (avec l'Imam). Fait marquant, le village de Darsalamy n'est doté d'aucune structure administrative. La raison évoquée est que ce village est rattaché à la commune urbaine de Konsa à Bobo Dioulasso.

Au niveau de l'organisation sociale et familiale, nous retrouvons le patriarche de la famille qui est le plus ancien, l'aîné qu'on appelle » ki&m]g]ba '' ;

avec lui une vieille femme qui est »sótigi » (=» gardienne de la maison » ou '' propriétaire de la maison »). Chez les Dioula, la notion de famille est importante. Elle est la cellule sociale. On ne fait pas de différence entre les familles car tout le village constitue une grande famille du fait de la communauté de langue.

Quant aux activités, nous avons identifié le commerce comme activité principale des Dioula ; ensuite nous avons la consultation du marabout et l'agriculture. L'agriculture est très récente et est exploitée par les Barro (protecteurs de la tradition).

L'islam est la religion des Dioula de Darsalmay. Ils sont à 100% islamisés. Selon nos informateurs, ce sont eux qui ont amené l'islam en Afrique de l'Ouest.

Nous nous sommes également intéressé à la place de la parole dans la société à travers la notion de parole chez les Dioula et les types de paroles qu'on y

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trouve. En effet, elle occupe une place de choix. On la retrouve à tous les niveaux de la vie sociale. Elle sert de lien social à travers la communication. Les salutations se fondent sur cette parole pour être effectives. Nous avons identifié plusieurs paroles en fonction de leurs contenus : la bonne parole (=»Kóma díman »), la belle parole (=»Kóma %úman»), la parole de vérité

ou parole vraie (=»tiy[n kóma»), la parole sensée (=»hákili Kóma»), la grande parole (=»Kóma bá »), la parole ancienne ou la vieille parole (=» Kóma k<r] »), la parole de l'ancien (=»Ti&m]g]ba Kóma»), la parole d'enfant (=»dénmis[n Kóma »), la parole importante (=»náfa Kóma»), la mauvaise parole (=»Kóma júgu »), le mensonge (= »gálon Kóma»).

A partir de la parole, nous avons abordé les textes oraux qui sont en usage dans cette communauté. Il s'agit des textes connus et utilisés par la population : le conte (= le »tálen»), la légende (= le »kóma k<r]»), la

devinette (= le »tálen k<r]b]»), le proverbe (= le »kóma k<r]tig[») , le chant (= le »d<nkiri»), les paroles des jeux de plaisanterie(=»sináguya»), les salutations(=»fóri»), ...

Dans le deuxième chapitre, qui traite des salutations, nous avons évoqué la langue chez les Dioula, les systèmes de transcription et de traduction avant de présenter les formules de salutation. Nous avons également abordé la définition de la salutation et sa place dans la société.

La salutation est un facteur social qui permet aux hommes d'échanger. Elle est capitale.

S'agissant des formules, nous avons identifié deux catégories : les formules en fonction du temps de la journée (matin, midi et soir) et les formules en fonction des événements (baptême, mariage, visite d'un étranger, les funérailles, les fêtes).

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Dans la présentation des formules, nous avons d'abord donné la transcription phonétique, ensuite la traduction juxtalinéaire, enfin la traduction littéraire suivi d'un commentaire.

Il ressort de cette analyse qu'à travers ces différentes formules de salutation transparaissent les préoccupations de la société. Au delà du » bonjour » ou du '' bonsoir », c'est toute une représentation de la société qui se manifeste : le bien-être, la paix, la santé, les activités, la famille, le rang social, le respect, la compassion, la joie, l'harmonie...

A ce niveau, on a une certaine catégorisation dans les salutations. En effet, un enfant ne salue pas de la même manière qu'un adulte, une femme ne salue pas de la même manière que l'enfant ou l'homme. Chacun a sa manière proprement dite que la société établit et transmet d'âge en âge par le biais de la parole. Ces formules recouvrent des notions diversifiées et propres à la société (paix, santé, douleur, joie et peines...).

A travers les souhaits, les bénédictions, les formules prennent en compte les valeurs sociales, culturelles et même religieuses. Dieu est au coeur des salutations. Tout cela s'accompagne de la parole, de la langue. La particularité de la langue confère aux formules une spécificité, faisant d'elles le signe distinctif de la communauté dioula de Darsalamy avec les autres.

Notre troisième chapitre a consisté à montrer en quoi ces formules de salutations sont de la littérature. A partir des différentes définitions de la littérature orale, nous avons identifié des facteurs textuels et des aspects sociologiques pour aborder la littérarité des formules de salutation.

S'agissant des éléments textuels, nous avons constaté que la longueur des formules a pour but de favoriser l'interaction dans l'échange.

La place des mots dans les salutations est remarquable. En effet, les salutations débutent par l'interpellation de celui à qui on s'adresse (Papa, père, maman...). C'est le signe du respect, de la politesse et même d'une certaine

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sympathie, car on ne saurait saluer par '' Papa'' quelqu'un qu'on ne connaît pas.

Ensuite nous avons le deuxième mot qui est la marque du temps ou de l'événement. Cela traduit les habitudes de la population.

L'affirmation de la foi, la croyance en l'islam se trouvent dans les bénédictions où la principale référence est ''Dieu'' (=''Allah '').

Au niveau des métaphores, on peut retenir que la longévité domine les salutations à travers les souhaits de paix, de santé...

Des mots et réseaux de sens sont perceptibles. Nous avons '' díyÐ '' et ''

#úman ''. Au- delà de leur sens habituel de ''bien, bon'', ils renvoient à une multitude de sens orientés vers les préoccupations sociales.

En ce qui concerne les éléments sociologiques, nous avons identifié la structure sociale : l'individu, la famille. Chacun occupe une place précise et sait comment se comporter ; la répartition du temps et des activités dans la salutation, l'origine des salutations et le protocole des salutations. Le découpage du temps des salutations est le suivant : matin, midi et soir. Nous avons également découvert qu'elles expriment les activités de la communauté. En formulant un souhait par la salutation ou lorsque des adultes se saluent, au delà de la paix et de la santé, ils évoquent les activités, la famille. Cela montre jusqu'à quel point les salutations prennent en compte les préoccupations sociales.

La présence de ces éléments textuels et sociologiques prouve que les formules de salutation sont littéraires.

Cette étude des formules de salutation est valable pour une communauté donnée, celle des Dioula de Darsalamy. On pourrait l'étendre à d'autres sociétés pour en savoir davantage sur les préoccupations sociales et les aspects littéraires liés aux salutations.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius