Le brevet européen unitaire:l'utopie deviendra-t-elle réalité ?( Télécharger le fichier original )par Myriam AL-MALLH Université de Genève - Maà®trise universitaire en droit 2011 |
B. La coopération renforcée en ce qui concerne les modalités applicables en matière de traduction70. L'un des obstacles au développement de l'innovation en Europe réside dans le coût élevé à payer pour obtenir une protection par brevet. Quand une entreprise fait le dépôt d'une demande de brevet européen, elle doit effectivement le valider dans tous les Etats désignés pour lesquels la protection est recherchée. Au moment de la validation, une traduction dans la ou les langues officielles desdits Etats peut être exigée de la demanderesse si la législation nationale le prévoit46(*). En conséquence, si cette procédure est multipliée par le nombre d'Etats désignés, les frais à débourser atteignent rapidement des sommes considérables et pèsent lourd dans le budget des entreprises. Raison pour laquelle la Commission a élaboré une proposition de règlement pour la création d'un brevet européen unitaire. Mais cela n'est pas suffisant. En vérité, il est important de réduire les coûts au niveau des traductions. Malheureusement, cette solution ne peut être incorporée dans le même instrument que celui relatif au brevet unitaire ; il est nécessaire d'en avoir un autre, comme l'énonce l'article 118, deuxième alinéa, du TFUE, adopté selon la procédure spéciale. 71. De cette façon la Commission a-t-elle décidé d'élaborer, le 30 juin 2010, la « Proposition de règlement (UE) du Conseil sur les dispositions relatives à la traduction pour le brevet de l'Union européenne »47(*). Aucune majorité n'a toutefois pu être recueillie au sein du Conseil, c'est pourquoi ledit règlement n'a pas été adopté48(*). Puisqu'il était impossible pour tous les Etats membres de tomber d'accord, un certain nombre d'entre eux a pris les devants en vue de réaliser une coopération renforcée. 72. Une fois que la décision 2011/167/UE du Conseil autorisant une coopération renforcée en matière de protection par brevet unitaire a été avalisée, la Commission, conjointement à sa proposition de règlement pour ladite protection, a adopté la « Proposition de règlement du Conseil mettant en oeuvre la coopération renforcée dans le domaine de la création d'une protection par brevet unitaire, en ce qui concerne les modalités applicables en matière de traduction » (ci-après proposition en matière de traduction)49(*), le 13 avril 2011. La proposition en matière de traduction a pour objectif de compléter les instruments juridiques relatifs au brevet européen à effet unitaire. 73. De cette manière, au sens de l'article 1 du règlement envisagé (ci-après règlement en matière de traduction), est-il prévu de mettre en oeuvre la coopération renforcée en ce qui concerne les modalités de traduction applicables à la protection par brevet unitaire. 74. L'article 3, paragraphe 1, du règlement en matière de traduction précise, en outre, les modalités de traduction en ce qui concerne le brevet européen à effet unitaire. Il n'est ainsi pas nécessaire de traduire le fascicule de brevet dans d'autres langues que celles énoncées à l'article 14, paragraphe 6, de la CBE, lequel explique que « les fascicules de brevet européen sont publiés dans la langue de la procédure et comportent une traduction des revendications dans les deux autres langues officielles de l'Office européen des brevets ». Par ailleurs, les demandes d'effet unitaire sont présentées dans la langue de la procédure initiée devant l'OEB, au sens de l'article 3, paragraphe 2, du règlement en matière de traduction. Cependant, l'article 4 dudit règlement prévoit des exceptions. En cas de litige concernant le brevet européen unitaire, ce dernier doit effectivement être traduit dans sa totalité par le titulaire dans une autre langue : soit la langue officielle de l'Etat participant sur le territoire duquel la contrefaçon présumée a eu lieu, soit la langue du domicile du contrefacteur présumé. Ce choix est laissé au contrefacteur. Il s'agit aussi d'une faculté, en ce sens que, si le défendeur n'en fait pas usage, le demandeur n'est pas tenu de fournir une traduction. De surcroît, le titulaire du brevet n'est pas dans l'obligation de s'exécuter si la juridiction compétente ne lui demande pas de traduction intégrale du brevet dans la langue utilisée pour la procédure judiciaire. Dans les deux cas de figure, l'article 4, paragraphe 3, du règlement en matière de traduction stipule que les frais sont à la charge du demandeur. 75. Aux termes de l'article 5 du règlement en matière de traduction, la gestion d'un système de compensation est prévue pour le cas où le demandeur déposerait sa demande de brevet auprès de l'OEB dans une langue officielle de l'Union européenne autre qu'une des langues officielles précisées à l'article 14, paragraphe 1, de la CBE. Il est donc possible au déposant d'obtenir le remboursement de ses frais de traduction jusqu'à un certain plafond. 76. Finalement, l'article 6 du règlement en matière de traduction instaure une période transitoire d'une durée de douze ans, s'il n'y est pas mis fin avant sur proposition de la Commission. La disposition précise, à son paragraphe 1, que toute demande d'effet unitaire, au sens de l'article 12, paragraphe 1, lettre (a), du règlement en matière de création d'une protection, doit être accompagnée « (a) d'une traduction en anglais de l'intégralité du fascicule du brevet européen, si la langue de la procédure est le français ou l'allemand ; ou (b) d'une traduction de l'intégralité du fascicule du brevet européen dans une langue officielle des États membres participants qui soit une langue officielle de l'Union, si la langue de la procédure est l'anglais ». Par ailleurs, l'article 6, paragraphe 3, du règlement en matière de traduction prévoit qu'un comité d'experts indépendants, à partir de la sixième année depuis l'entrée en vigueur dudit règlement, et ce, tous les deux ans, évalue de façon objective s'il est possible de disposer de traductions automatiques de grande qualité, à partir du système mis au point par l'OEB, dans toutes les langues officielles de l'Union. Sur la base de cette évaluation, la Commission remet un rapport au Conseil et propose de mettre fin à la période de transition. 77. Pour l'heure, le règlement en matière de traduction n'a pas encore été adopté. * 46 Proposition de règlement du Conseil mettant en oeuvre la coopération renforcée dans le domaine de la création d'une protection par brevet unitaire, en ce qui concerne les modalités applicables en matière de traduction, (COM(2011) 216 final) du 13 avril 2011, p. 2. * 47 COM(2010) 350 du 30 juin 2010. * 48 COM(2011) 216 final du 13 avril 2011, p. 3. * 49 COM(2011) 216 final du 13 avril 2011. |
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