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Le brevet européen unitaire:l'utopie deviendra-t-elle réalité ?

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par Myriam AL-MALLH
Université de Genève - Maà®trise universitaire en droit 2011
  

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B. Absence de garanties suffisantes quant au respect de la primauté du droit de l'Union européenne

56. La Cour de Justice rappelle que les traités de l'Union européenne, c'est-à-dire le TUE43(*) et le TFUE, ont créé un nouvel ordre juridique au sein de l'ordre juridique international. Il est ainsi doté d'institutions auxquelles les Etats membres ont volontairement transféré des compétences. Celles-ci octroient auxdites institutions une certaine autonomie. Il en résulte que les actes adoptés par les organes de l'Union jouissent de la primauté du droit de l'Union européenne de même que de l'effet direct pour certains d'entre eux, à l'image des règlements. En conséquence, les Etats membres se trouvent dans l'obligation de respecter le droit issu des traités et de l'appliquer. L'article 4, paragraphe 3, alinéas 1 et 2, du TUE rappelle le principe en ces termes :

« En vertu du principe de coopération loyale, l'Union et les États membres se respectent et s'assistent dans l'accomplissement des missions découlant des traités.

Les États membres prennent toute mesure générale ou particulière propre à assurer l'exécution des obligations découlant des traités ou résultant des actes des institutions de l'Union. »

57. Afin de contrôler le respect et l'application correcte du droit de l'Union, il importe de faire appel aux juridictions nationales et à la Cour de Justice. Ces instances ont pour mission d'interpréter et d'appliquer le droit primaire, lequel découle directement des traités, et le droit secondaire, lequel trouve son origine dans les actes adoptés en vertu des textes fondateurs. Selon l'article 19, paragraphe 1, du TUE, un système juridictionnel complet est ainsi mis en place. Or, la création de la Juridiction pour le brevet européen et le brevet communautaire ne suit pas la logique voulue par les traités institutionnels. En effet, ladite juridiction se situe en dehors du cadre prévu par l'article 19, paragraphe 1, du TUE. On lui octroie une personnalité juridique propre et des compétences exclusives au sens de l'article 15 du projet d'accord 2009. L'instance envisagée s'arroge conséquemment des attributions normalement du ressort des juridictions nationales, lesquelles en sont privées par l'accord. Au point 79 de l'avis 1/09, la Cour de Justice le stipule sans équivoque possible :

« En ce qui concerne le projet d'accord soumis à l'examen de la Cour, il importe d'observer que la JB:

- se substitue, dans le domaine de ses compétences exclusives, énoncées à l'article 15 de ce projet d'accord, aux juridictions nationales,

- prive alors ces dernières de la faculté de saisir la Cour de renvois préjudiciels dans ledit domaine,

- devient, dans le domaine de ses compétences exclusives, l'interlocuteur juridictionnel unique de la Cour, dans le cadre d'une procédure de renvoi préjudiciel, concernant l'interprétation et l'application du droit de l'Union et

- est chargée, dans le cadre desdites compétences, conformément à l'article 14 bis dudit projet d'accord, d'interpréter et d'appliquer le droit de l'Union. »

58. Mais cet aspect n'est pas le seul sujet de préoccupation de la Cour de Justice. Au cours de l'audition du 18 mai 2010, il est effectivement apparu que le fait de transférer des compétences communautaires à l'OEB posait des problèmes de conformité avec le droit de l'Union. Pagenberg l'explique ainsi : « that the Court was not interested in a virtual granting construction became clear when the Advocate General again pressed for precise answers as to whether indeed no judicial EU instance is foreseen to control the granting process of EU patents, and whether the EU Council does not see a problem concerning the jurisdiction of the EU legal system and the Court. The President of the Court was also obviously concerned about the lack of legal review and judicial control by the EU over adverse decisions by the EPO, since he expressly called this an important question. When the representative of the Commission answered that an appeal was possible (within the EPO, namely to the Appeal Board) and, as an alternative, that the Boards of Appeal could be given the right to refer questions on interpretation of EU law to the Court, the President found this «a little surprising» »44(*). D'ailleurs, Pagenberg ne manque pas de souligner, tout au long de son article, à quel point la carence au niveau du contrôle sur les décisions de l'OEB est préoccupante.

59. Pour toutes ces raisons, la Cour de Justice considère que les garanties en vue de veiller au respect du droit de l'Union ne sont absolument pas suffisantes, et ce, d'autant plus que la Commission n'a pas semblé consciente du problème soulevé au cours des auditions.

* 43 JO C 83 du 30.03.2010, p. 13ss.

* 44 PAGENBERG, p. 703.

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