La problématique de la répression du crime d'agression par la Cour Pénale Internationale( Télécharger le fichier original )par Théophile NTAWIHA Université libre de Kigali Rwanda - Grade de licencié en droit 2011 |
II.4.3. Une interprétation positive de l'article 121 al. 5, du statut de RomePar ailleurs, on peut aussi soutenir une interprétation positive de l'article 121 al. 5, selon laquelle la deuxième phrase de ladite disposition signifierait que les Etats parties n'ayant pas ratifié les nouvelles dispositions relatives au crime d'agression seraient placés dans la même position que les Etats non parties pour l'application de l'article 12 al. 2 du Statut de la CPI.83(*) Cela aurait pour conséquence que la CPI ne serait pas forcément dans l'impossibilité d'exercer sa compétence contre des individus dont l'Etat d'origine n'aurait pas ratifié les dispositions en cause. Au contraire, elle pourrait se reconnaître compétente en vertu de l'article 12 al. 2 a) si l'Etat victime de l'agression a ratifié lesdites dispositions.84(*) Cette interprétation positive de la seconde phrase de l'article 121 al. 5 permet d'éviter une sévère inégalité de traitement entre les Etats parties n'ayant pas ratifié les dispositions sur le crime d'agression et les Etats non parties. Une telle discrimination apparaît criante si l'on recourt à l'interprétation négative évoquée plus haut. En effet, la seconde phrase de l'article 121 al. 5, si on l'interprète négativement, s'écarte de l'article 12 al. 2. cette interprétation ne viserait que les Etats parties, car la seconde phrase de l'art. 121 al. 5 ne vise que ceux-ci.85(*) Il n'en reste pas moins que cette «interprétation positive» paraît difficilement conciliable avec la lettre de la disposition en cause. Mais il y a plus que cette réserve d'ordre général face à l' «interprétation positive» de la seconde phrase de l'article 121 al. 5: on rencontre en réalité la même difficulté qu'avec l'utilisation de l'interprétation négative, à savoir que ni la lettre de l'art. 5 al. 2, ni celle de l'article 121 al. 5 du Statut de la CPI n'indiquent clairement l'application de cette dernière disposition dans l'hypothèse spéciale du crime d'agression. II.4.4. Interprétation «modèle de l'article 121 al. 4» Du statut de RomeEnfin, une autre interprétation pouvait être retenue, le «modèle de l'article 121 al. 4», qui considère les dispositions relatives au crime d'agression comme un amendement au Statut de la CPI, mais sans les assimiler, pour au moins une des raisons précitées, à une modification des articles 5, 6, 7 et 8 au sens de l'article 121 al. 5 du Statut, ce qui conduit à une application de l'article 121 al. 4, ainsi rédigé: Sous réserve des dispositions du paragraphe 5, un amendement entre en vigueur à l'égard de tous les États Parties un an après que les sept huitièmes d'entre eux ont déposé leurs instruments de ratification ou d'acceptation auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. On perçoit, à l'une de ce qui a déjà été dit, que cette lecture n'est pas sans poser problème dans la mesure où l'article 5 al. 2 ne parle pas d'amendement qui devrait faire l'objet, en plus de son adoption conformément à l'art. 121 al. 3, d'une disposition quant à son entrée en vigueur. De plus, les conséquences juridiques de cette lecture se révèlent curieuses, en particulier si on les compare à celles prévues à l'art. 121 al. 5 pour les incriminations nouvellement introduites. Alors que la CPI pourrait, pour ces dernières, exercer sa compétence un an après le dépôt de la première ratification en vertu de la première phrase de l'article 121 al. 5, une ratification à la majorité des 7/8ème des Etats parties serait nécessaire pour que la CPI exerce sa compétence à l'égard du crime d'agression, alors même que l'incrimination relève déjà de la compétence rationae materiae de cette juridiction en vertu de l'article 5 du Statut. Malheureusement, les travaux préparatoires ne se révèlent pas d'une grande aide pour résoudre le problème d'interprétation ainsi mis en lumière. Comme l'a montré Roger S. Clark, qui était directement impliqué dans les négociations de la partie 13 du Statut, il n'existe aucune intention claire des rédacteurs du Statut quant à la relation pouvant exister entre l'article 5 al. 2 et l'article 121 al. 5, dispositions qui ont par ailleurs été rédigées par deux groupes de travail différents à Rome. Au vu de cette impasse, il a été proposé au sein comme à l'extérieur du SWGCA d'opter pour un mécanisme spécifique d'entrée en vigueur des dispositions relatives au crime d'agression, afin de dénouer le noeud.86(*) * 83 A.Reisinger Coracini, ««Amended Most Serious Crimes»: A New Category of Core Crimes within the Jurisdiction but out of the Reach of the International Criminal Court», 21 LJIL (2008): 699-718 * 84 Article. 12 al. 2 a) du Statut de la CPI portant sur conditions préalables à l'exercice de la compétence * 85 Article 121 al. 5 ressentaient un certain malaise avec la discrimination entre les Etats parties n'ayant pas ratifié les dispositions en cause et les Etats non parties, et étaient prêts à s'accorder sur une interprétation éliminant cette discrimination * 86 Clark, op cit, pp. 421-425 |
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