SECTION II : UN CONTROLE IMPARFAIT DE L'EXECUTION
DES
ENGAGEMENTS INTERNATIONAUX PAR L'EXECUTIF.
Si comme nous l'avons précédemment écrit,
la partie la plus visible des activités parlementaires réside
essentiellement dans la fonction législative, la fonction de
contrôle de l'activité gouvernementale apparaît comme plus
importante au regard de la prééminence de l'Exécutif dans
la naissance et l'exécution des engagements internationaux. Les
parlementaires pour exercer ce contrôle disposent de moyens directs
(paragraphe I) et d'autres plus indirects (paragraphe II) par lesquels ils
peuvent tout de même contraindre le gouvernement.
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Paragraphe I- Le contrôle direct
L'on pourrait distinguer ici entre des moyens
expressément prévus par la Constitution (A) et d'autres qui sont
nés de la nécessité du travail parlementaire et
aménagés par le Règlement de l'Assemblée nationale
(B).
A- Les procédures constitutionnelles : les
questions et enquêtes.
Pour madame Tarja Halonen, les parlementaires ont ou devraient
avoir à leur disposition les moyens de poser des questions au
gouvernement, oralement ou par écrit. Ils devraient constamment garder
à l'esprit l'aspect « droits de l'homme » de l'action
gouvernementale. Dans certains cas précis, il conviendrait de recourir
à un vote de confiance afin de souligner l'importance accordée
aux droits de l'homme87. Au Cameroun cette procédure est
prévue non seulement pour l'aspect « droits de l'homme » mais
pour l'ensemble de l'activité gouvernementale y compris la mise en
oeuvre des engagements internationaux. En effet, l'article 35 de la
Constitution met à la disposition du Parlement divers instruments lui
permettant d'opérer un contrôle de l'activité
gouvernementale : les questions orales ou écrites, et les commissions
d'enquête sur des objets déterminés.
La procédure des questions est strictement
encadrée par le Règlement de l'Assemblée nationale. Les
questions écrites sont remises au président de l'Assemblée
nationale qui les transmet au ministre compétent après
communication à l'Assemblée nationale. Ce sont des questions
sommaires auxquelles les membres du gouvernement sont tenus de répondre
dans un délai de trois jours s'ils sont en session et de quinze jours
s'ils sont hors session. Un délai supplémentaire de deux et de
trois jours leur est accordé respectivement en période de session
et hors session si les réponses nécessitent des recherches
documentaires. Si la question est complexe, le président de
l'Assemblée nationale demande à son auteur de la transformer en
question orale. Si ce dernier refuse, alors le membre du gouvernement
intéressé dispose d'un délai supplémentaire de deux
jours pour répondre à la question. Même si les questions
écrites ont l'intérêt de pouvoir être posées
hors sessions, le fait que la réponse écrite soit adressée
au seul député auteur de la question de façon
privée à l'exclusion des autres députés prive
l'Assemblée nationale d'un véritable moyen de contrôle et
d'information. Les questions orales par contre une fois formulées sont
inscrites à l'ordre du jour par la Conférence des
présidents et doivent permettre un dialogue entre un parlementaire et un
membre du gouvernement sans aucune intervention extérieure. La
réponse du Gouvernement a lieu en plénière devant tous les
députés mais seuls l'auteur de la question et le membre du
gouvernement concernés
87 Le Parlement : gardien des droits de l'homme Op. Cit.
p. 23.
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prennent la parole. Toutefois, les membres du gouvernement ne
sont pas tenus de répondre, de façon automatique, à toutes
les questions. L'intérêt public, les impératifs de la
défense nationale ou de la sécurité de l'Etat sont parfois
invoqués pour refuser d'apporter une réponse ou de fournir des
renseignements au Parlement.
La constitution et le Règlement de l'Assemblée
nationale respectivement à travers leurs articles 35 alinéa 1 et
67 organisent la possibilité pour le Parlement de constituer des
commissions d'enquête pour recueillir des éléments
d'information sur des faits déterminés ou sur la gestion des
services publics. L'Assemblée nationale pourrait donc décider
d'ouvrir une enquête sur la mise en oeuvre de certains engagements
internationaux par l'Etat ou sur les motivations ayant conduit à
certains accords bilatéraux. Mais il convient de relever que
l'Assemblée nationale camerounaise fait peu d'usage de ce pouvoir
d'enquête ou ne le fait pas du tout. Toutes choses qui font dire au
docteur Kankeu que « les instruments qui permettent au Parlement de
mieux s'informer sont, soit mal utilisés, soit butent sur le monopole
gouvernemental d'accès aux dossiers ou à l'information
»88. En effet les questions au Cameroun passent par la
censure des groupes parlementaires avant d'être envoyées au
Secrétariat général de l'Assemblée nationale. Il
s'agit en réalité selon l'auteur suscité des pratiques
parlementaires non écrites ayant pour but de soumettre les
parlementaires à la discipline du parti qui les a investis et les a fait
élire. A ce titre, la tentation est trop grande de voir un
député ne pas poser des questions parce que ses électeurs,
son parti ou lui-même y trouvent leur intérêt. Monsieur
Kankeu n'hésite pas à parler des questions comme « une
véritable mise en scène théâtrale » et des
commissions d'enquête parlementaire comme « arme rarement
utilisée »89.
Cette inefficacité des procédures
constitutionnelles de contrôle semble renforcée dans le domaine
des engagements internationaux par le relatif manque d'intérêt des
députés pour ces questions comparées aux questions
économiques ou sociales qui touchent de façon plus directe
à la vie de leurs électeurs. Cet état de fait place le
véritable contrôle entre les mains de la Commission des affaires
étrangères.
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