B. Sur le plans socio économique et culturel
La Côte d'Ivoire a développé depuis son
indépendance une agriculture qui a longtemps constitué l'un des
piliers fondamentaux de son économie. Ce qui a été
possible grâce à une politique menée par le
Président Félix Houphouët-Boigny. Selon lui, la terre
appartient à celui qui la met en valeur.
Cependant, cette citation crée un flou juridique
concernant l'usufruit des terres. En effet, tantôt l'Etat, à
travers le décret du 20 mai 1955 et le décret de 1971
reconnaît les droits coutumiers, tantôt il s'arroge le droit de
s'approprier et de gérer toutes les terres à travers la loi de
1962 et la loi de 1964.
Le discours de Félix Houphouët-Boigny du 30
octobre 1970 soulignera ces lois antérieures sur la
propriété des terres. Il pensait que telle était la
meilleure manière de garantir l'accès à tous ceux qui
peuvent mettre la terre en valeur quelle que soit leur nationalité. Une
décision qui réconfortera les ressortissants des pays limitrophes
(Mali, Burkina en particulier) ainsi que ceux de la partie septentrionale de la
Côte d'Ivoire, venus s'installer nombreux dans les zones
forestières, à la recherche d'un mieux-être. De ce fait, de
nombreux hectares de forêt furent investis par ceux-ci dans l'optique de
les mettre en valeur.
Cependant, avec la crise économique des années
1980, l'on a assisté à un chômage grandissant, à une
inflation du coût de la vie alors que les salaires sont restés
stables. Il s'est posé un problème d'insertion
socioprofessionnelle des jeunes diplômés, ce qui incitera l'Etat
à initier une politique de retour des jeunes à la terre. Ce
retour ne s'est pas fait sans heurts.
En effet, la majeure partie des terres avait été
occupée par des ressortissants étrangers et des allochtones ; ce
qui va entraîner divers conflits entre les propriétaires des
plantations étrangères et les autochtones et entre ceux-ci et les
allochtones. Eu égard aux nombreux conflits émanant de cette
confusion liée à l'appartenance de la terre, l'Etat a opté
pour une réforme de la loi foncière en vigueur, en vue de
protéger les populations contre les risques et les opportunismes.
Dès lors une sécurisation foncière a
été envisagée dans l'objectif de prendre en compte les
pratiques coutumières réelles, qui clarifieraient les droits
existants, pour ensuite les traduire dans un langage juridique. C'est en cela
que la Côte d'Ivoire a initié un plan foncier rural à la
fin des années 80.
Quand en 2000 le FPI accède au pouvoir, il
n'hésite pas à préciser le nouveau contexte foncier en
indiquant que désormais : « la terre appartient à son
propriétaire et non à celui qui la met en valeur » comme
l'avait signifié Félix Houphouët Boigny. Cette
décision permet ainsi aux propriétaires terriens d'affirmer leur
autochtonie et leurs droits. Ils l'interprètent comme un outil juridique
permettant de chasser de leurs terres, les non-ivoiriens en
général et les Burkinabè en particulier. Petit à
petit, la « guerre foncière» est aussi orientée contre
les non nationaux et d'autres ivoiriens non ressortissants du village dont ils
exploitent les terres. Tous ceux qui vivent sur les terres des autochtones sont
assimilés à des étrangers, même les allochtones
(Baoulé, Malinké, Sénoufo, Abron, Koulango, etc.). Ils
considèrent que les allochtones, bien qu'étant ivoiriens
disposent d'un terroir dans leur milieu d'origine, alors, de leur point de vue,
allochtones et non ivoiriens = étrangers. Ainsi, le problème
foncier constituera l'un des foyers de tension entre les ivoiriens d'une part
et les étrangers d'autre part.
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