Section 2 : Analyse des Projets de Développement
du PCM 2
Les Projets de développement du Programmes
Concerté Maroc, ont été conçus dans un cadre local
et régional, suivant différents champs d'action, répondant
à des besoins spécifiques des populations de plusieurs
régions du pays, et en rassemblant acteurs de la société
civile et pouvoirs publics, pour une cause commune qui est la
réhabilitation de la situation des jeunes marocains. En ce qui suit,
nous allons analyser quelques projets dont le choix a été
établi à l'avance. Les projets qui vont faire l'objet de cette
analyse sont :
- Le Projet Cré'Acteurs du Moyen Atlas, (Fiche en Annexe
4) ;
- Le Projet Jeunesse Territoire et Citoyenneté (JTC),
(Fiche en Annexe 5) ;
- Le Programme Concerté Provincial (PCP) de Jerada, (Fiche
en Annexe 6) ; L'analyse portera sur l'impact des projets sur les jeunes
ciblés, notons de plus que cette analyse se focalisera sur plusieurs
critères. En premier, l'action sur la jeunesse par une approche
concertée, ensuite sur l'implication des jeunes ciblés par les
projet, de façon à déterminer dans quelle mesure les
jeunes ont été bénéficiaires, et dans quelle mesure
ces mêmes jeunes ont été impliqués en tant
qu'acteurs dans le développement de leur localité, et enfin sur
l'impact du cofinancement des projets.
I. Agir sur la jeunesse par une approche
concertée
Dans le cadre des interventions des ONG dans les pays du Sud,
l'aide au développement était perçue par les associations
nationales ou locales comme étant concurrentielle, ou en d'autres
termes, prédominantes, puisque le rôle des ONG du Nord
était limité aux donations financières. Dans le cas du
Maroc, les associations réclamaient donc un réel partenariat avec
un réel partage des responsabilités. L'avènement de la
notion du Programme Concerté Pluri Acteurs (PCPA) a donné un
autre sens au paysage associatif avec plus de rééquilibrage. Le
Programme Concerté Maroc dans sa forme pluri-actrice défend le
rééquilibrage Nord-Sud. Cela réside dans le passage en
premier lieu d'un PCM fondé sur la coopération entre une
association française et marocaine, avec une prédominance des
associations du Nord dans le pilotage et la prise de décision, à
un PCM fondé sur le pluri acteurs. En d'autres termes, la
nécessité de travailler en consortiums, ce dernier exige un
réel partage des actions, et une mise en commun des expériences,
d'où la mise en place
de la charte des valeurs, qui incite les signataires ou
partenaires de projets, à s'engager dans le respect des valeurs en
vigueur à savoir (la coresponsabilité, réciprocité,
démocratie, transparence, parité, exemplarité et
autonomie). En second lieu, l'instance de prise de décision du PCM est
un comité de pilotage transnational, qui réunit à la fois
des associations françaises, et marocaines, des pouvoirs publics
français et marocains, ainsi que les représentants des jeunes, et
le plus important dans cette instance c'est que les parties prenantes
travaillent en concertation, et ont des voix égales et participent
ensemble à l'élaboration des stratégies par consensus.
D'autre part, force est de constater l'ébauche
d'appropriation du terrain par les associations marocaines membres du PCM,
à tous les niveaux. Au comité de pilotage, les 2/3 des
représentations sont marocaines, et le 1/3 concerne la
représentation française. Sur les projets FAP, les associations
marocaines bénéficiaires commencent à prendre place, les
2/3 sont des associations marocaines, et le 1/3 est composé par des
associations françaises. Egalement, les visites croisées se sont
faites dans les deux sens, non seulement les associations marocaines ont
bénéficié de leur visites au Nord, mais aussi celles du
Nord sont venues pour voir et tirer profit des évolutions associatives
marocaines.
Cette logique a été projetée sur les
projets du programme. Pour servir la jeunesse marocaine, les porteurs des
projets ont entamé la même philosophie. Ils se sont
constitués en consortium rassemblant les associations marocaines et les
associations françaises. Tel est le cas du projet Cré'Acteurs qui
a réuni en son sein 4 associations marocaines (l'association Yannor de
Khénifra, l'association Ait Bourzouine d'El Hajeb, l'association Tazouta
de Séfrou et l'association Ain Bechar de Taza), et seulement 2
associations françaises à savoir ESF et CEFIR. La majorité
a été donnée aux associations marocaines parce qu'elles
sont des associations locales qui connaissent les spécificités de
leurs territoires, le tissu institutionnel local, et plus
particulièrement les projets et les aspirations des jeunes de la
région. En outre, l'implication des ONG françaises, est due
à l'apport du savoir faire, du fait que le projet opte pour le tourisme
rural, et que les deux ONG travaillaient déjà sur la même
dynamique avec les acteurs locaux du Moyen Atlas. De même pour le projet
JTC, il a été conçu de façon concertée entre
le CCFD, le CNLRQ et le Carrefour Associatif avec cinq de ses associations
membres.
Le PCP de Jerada s'est lancé dans une optique
provinciale, vu que c'est la décomposition du territoire la plus
pertinente pour nouer une concertation efficace, en raison du rapprochement des
acteurs locaux et associatifs, ce qui facilite leur rassemblement autour de la
question des jeunes. Le PCP, contrairement aux deux autres projets a
réuni seulement des acteurs marocains (associations, conseil provincial,
communes, délégation de l'éducation nationale, l'entraide
nationale ...).
Les réunions des consortiums ont constitué un
réel échange d'expérience et de mutualisation des efforts.
Il faut noter que la démarche de concertation était
présente dans toutes les étapes de la construction des projets et
leur mise en oeuvre. Ceci a permis aux jeunes associatifs et aux jeunes
ciblés par les projets, d'acquérir un esprit de concertation,
dans la mesure où ils ont commencé à chercher des
partenaires pour leurs projets d'avenir, et également élaborer
des plans d'action concertés pour chercher des opportunités de
financement complémentaire.
De même les ateliers de réflexion et les visites
entre membres des consortiums ont permis aux jeunes de faire connaissance avec
d'autres jeunes du territoire national, pour partager et transmettre les bonnes
pratiques. Dans une autre optique, les visites croisées Nord-Sud, et
Sud-Nord qui ont été réalisées dans le cadre des
projets, ont constitué pour les jeunes une opportunité
d'échanger et d'apprendre des expériences de leurs homologues
français. Tel que l'exemple du projet Cré'Acteurs dans le quel
une visite a été effectuée entre les jeunes de
l'association Ait Bourzouine et les jeunes de l'ONG Belge (Landes de
Gascogne).
Dans ce qui va suivre, nous allons voir quel a été
l'impact des projets sur l'implication des jeunes en tant qu'acteurs dans le
développement de leur entourage.
II. Impliquer les jeunes dans le processus du
développement humain
L'objectif spécifique du PCM a été non
pas de faire des jeunes une population bénéficiaire d'actions
ponctuelles, mais de vrais acteurs impliqués dans le
développement de leur localité. De ce fait, il a instauré
la même démarche au sein de ses projets.
La notion de jeunes acteurs et développeurs consiste en
la construction de leurs capacités et compétences pour prendre
part dans le développement local. Il est donc important de s'engager
dans l'action collective au sein du territoire, contribuer à la gestion
durable du partenariat et participer à la construction de la
démocratie locale. Dans le tableau ci-après nous allons donner un
aperçu sur les jeunes bénéficiaires des trois projets
objet de ce mémoire.
Nombre de jeunes bénéficiaires
Projet Cré'Acteurs
131 jeunes51
164 jeunes52
PCP Jerada
80 jeunes53
Projet JTC
On se basant sur la dynamique des quatre projets on remarque
qu'ils ont un résultat attendu commun, qui est celui de l'implication
des jeunes dans les actions des projets et faire d'eux des acteurs autonomes.
Ceci a été concrétisé sur deux volets, par le
renforcement des capacités et par l'accompagnement et la mise à
disposition des jeunes d'outils et de méthodologies de travail.
Sur le projet Cré'Acteurs, il était question de
focaliser l'action sur les leviers qui caractérisent la région et
qui peuvent donner un champ porteur en matière d'emploi aux jeunes. On
peut citer des exemples tel que le tourisme rural, l'Apiculture, la
Cuniculture... D'après les entretiens effectués avec les membres
du projet, il est certain que les jeunes ont constitué la partie majeure
des bénéficiaires. En outre, la dynamique instaurée par le
PCM dans ses projets a fait que les jeunes après avoir
51 Entretien avec S. Boulomor, président de
l'association Aitbourzouine, El hajeb.
52 Entretien avec M.Hamzaoui, Référent
jeune du PCM et membre de l'association Gafait, Jerada.
53 Entretien avec A. Amziane, Trésorier du
Carrefour Associatif, Rabat.
suivi des formations diverses devaient pendre l'initiative et
s'impliquer dans leurs propres projets d'avenir. On peut évoquer
l'exemple de la coopérative Ourthou d'Apiculture créée par
7 jeunes de l'association Yannor54. Il faut
préciser que ce sont ces mêmes jeunes qui ont suivi une formation
en Apiculture. De même une autre coopérative a été
créée par 10 jeunes femmes de l'association
Tazouta, ces dernières avaient suivi une formation au métier de
tissage.
Dans le cadre du PCP de Jerada, il est question
d'intégrer les attentes et besoins des jeunes de la région dans
les Plans de Développement Communaux (PDC) et chercher à
impliquer les jeunes dans la prise de décision au niveau de la gestion
des affaires locales. Ce constat est tiré de la situation difficile
liée à la marginalisation et au manque d'opportunité
d'emploi. Une partie importante des jeunes travaillent dans des conditions
lamentables dans des « Cendriers »55 en vue d'avoir un
petit revenu journalier. Il faut signaler que plusieurs jeunes lycéens
ont subit la mort dans ces mines.
Le PCP de Jerada se veut un regain de confiance chez les
jeunes en les sensibilisant sur le rôle qu'ils peuvent jouer dans la
gestion des affaires locales. D'un coté par la participation aux listes
électorales et de voter sur les personnes qui vont les
représenter dans les instances législatives, et d'un autre par la
présentation de ces jeunes aux élections en vue de devenir des
acteurs locaux et représenter leurs communes. L'implication des jeunes
réside dans la constitution des conseils de jeunes issus de trois
communes de la province de Jerada. Ces jeunes ont pu créer une charte de
la participation à la gestion des affaires locales (Annexe 4).
Les conseils de jeunes de Jerada ont constitué une
force de conviction vis-à-vis des pouvoirs publics, des élus
locaux et des associations. Grâce à l'implication et la
volonté des jeunes, les présidents de 6 communes, la
municipalité de Jerada à coté de 10 associations et 110
jeunes ont signé la dite charte56. Ceci montre que les
pouvoirs publics sont convaincus du rôle et de la place des jeunes dans
l'élaboration participative des PDC.
54 Entretien avec M. Bobot, président de
l'association Yannor, Khénifra.
55 Des puits d'extraction du charbon qui ont
été abandonné par la société
d'exploitation.
56 Entretien avec M.Hamzaoui, Référent
jeune du PCM et membre de l'association Gafait, Jerada.
Au niveau du projet JTC, l'échelle prise en compte est
le quartier. L'objectif était d'ancrer les valeurs de citoyenneté
dans l'esprit des jeunes et faire d'eux des acteurs à part
entière dans les activités visées par le projet. Comme le
cas du PCP de Jerada, les jeunes du projet JTC ce sont constitué en 4
conseils de jeunes (le conseil de Rabat Yaacoub el Mansour, le conseil de
Khemisset, le conseil de Khénifra et le conseil de la commune de
Tendrara). Ces 4 conseils ont été composé de 20 jeunes
chacun représentant leurs confrères des 4 provinces.
Les jeunes du JTC ont suivi des formations dans plusieurs
domaines à savoir la sensibilisation à la préservation de
l'environnement, les effets de la drogue, l'animation culturelle et sportive.
Les 80 jeunes du projet ont acquis les outils nécessaires en vue
d'être eux même des acteurs dans leurs quartiers et procéder
à la sensibilisation de la population des quartiers à travers des
ateliers de formation et des soirées culturelles. Les résultats
sont appréciables, on peut citer comme exemple les jeunes du conseil de
Khénifra qui ont crée un club de jeunes lycéens pour la
sensibilisation contres les effets dangereux de la drogue. De même pour
les jeunes du conseil de la commune Yaacoub el Mansour de Rabat qui ont
réaménagé 4 jardins au niveau de 4 quartiers. Il faut
signaler que les jeunes de ce conseil ont mobilisé près
80057 personnes entre jeunes et adultes.
Il est force de constater que l'impact et la philosophie du
PCM a été d'une grande portée sur les jeunes. Ces derniers
ont appris à s'organiser en conseils et à approcher les pouvoirs
publics en vue de réfléchir ensemble sur les
préoccupations des jeunes. De même ils ont acquis des outils et
des méthodes pour pouvoir créer leurs propres projets.
Nous allons voir ci-après la question du cofinancement et
son impact sur les projets et les jeunes.
57 Entretien avec M.Azim, Responsable Administratif et
Financier du Carrefour Associatif.
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