Chapitre 3. Cas du Programme Concerté Maroc :
la
recherche action réalisée sur les projets
de
développement
Section 1 : PCM 2 et constats des entretiens
effectués sur terrain
I. Qu'est ce que la Capitalisation
Avant tout nous devons tout d'abord définir la
Capitalisation. C'est un thème récurrent dans le milieu des
organisations de solidarité internationale. On ne cesse de le
répéter : « il faut capitaliser ! ». Pourquoi ? Comment
? Ce n'est pas toujours bien clair.
Paradoxalement, il n'existe pas beaucoup de documents de
référence sur la capitalisation, et ceux qui existent proposent
des réflexions particulièrement intéressantes sur l'enjeu
de valoriser les expériences, mais manquent peut-être des
repères méthodologiques pratiques47.
Selon Pierre de Zutter (1994) : « la Capitalisation,
c'est le passage de l'expérience à la connaissance partageable
».
Dans ce qui suit nous allons présenter quelques
caractéristiques de la capitalisation :
· Capitaliser, c'est prendre du recul par rapport à
une expérience ;
· Se poser la question, comment dans une expérience,
on est passé d'un niveau à un autre ?
· Questionner une expérience, la discuter, voir la
remettre en cause ;
· C'est tirer des enseignements de l'expérience qui
pourraient servir de modèles de réussite pour une utilisation
ultérieure ;
47 Philippe Villeval (Handicap International) et
Philippe Lavigne Delville (Groupe de Recherche et d'Échanges
Technologiques), Capitalisation d'expériences... expériences
de capitalisations Comment passer de la volonté à l'action,
Traverses n° 15, 2004, 49 p.
II. Quelques constats préliminaires
Un constat majeur, c'est que le PCM a changé sa
philosophie, tout d'abord la focalisation sur les jeunes contrairement à
la première phase qui était large et portait sur la question de
la pauvreté. Ensuite la métamorphose de sa gouvernance, en
instaurant un organe unique qui représente les deux pays dans les
principales décisions stratégiques à savoir le
comité de pilotage. Dans ce dernier siègent les associations des
deux pays, et également les pouvoirs publics afférents
(Ministère des Affaires Etrangères Français,
Ministère Marocain de Développement Social et de la famille...),
et les jeunes, élément incontournable dans la prise de
décision.
D'autre part, les visites sur le terrain pour interroger les
acteurs du PCM situés un peu partout sur le territoire marocain, ont
révélé des constats probants quant à
l'efficacité de ce programme d'aide au développent. Dans ce qui
suit nous allons dégagés quelques constats selon les trois axes
de Capitalisation.
1. La concertation pluri-acteurs
Une identité pour les associations : D'après les
questions posées à certains acteurs dans les projets du PCM, les
associations ont trouvé dans le PCM une vraie identité,
vis-à-vis des acteurs publics et des bailleurs de fonds internationaux,
ce qui leur a donné un plus et une force de conviction48.
Dans sa conception des projets, le PCM exige une véritable
démarche de concertation, non seulement entre associations du Nord et
associations du Sud, mais également, une implication des pouvoirs
publics, que ce soit dans les projets, ou dans le pilotage et la gouvernance du
programme lui-même.
Rappelons que le Ministère du Développement
Social, siège au comité de pilotage, ainsi que l'Entraide
Nationale. Ce dernier est un partenaire stratégique, qui a mis en place
ses locaux et ses délégations à la disposition des
activités du PCM à destination des jeunes. Un autre point plus
important, c'est que dans les projets concertés provinciaux (PCP), pour
réunir les acteurs d'une même province, le PCM a mis en place une
étape préalable à la concertation, qu'il finance et
organise, l'objectif étant de faire connaissance entre les acteurs de la
société civile et les pouvoirs publics, ainsi que les
collectivités locales. Dans l'élaboration du PCP, il y'a des
48 Entretien avec Zoubir Chatou, coordinateur du
projet Cré'Acteurs.
conditions à remplir, premièrement il faut une
présence obligatoire des jeunes, deuxièmement une présence
d'au moins une collectivité locale, et quelques associations locales.
2. L'implication de la jeunesse
Il faut rappeler que le but ultime du PCM est d'enclencher une
dynamique qui permet à la jeunesse de s'ouvrir sur son environnement et
la situe au sein de partenariats multiples. Cette approche est importante car,
en favorisant le développement du tissu associatif marocain, le PCM
évite l'enfermement étroit des jeunes dans leur propre
association. C'est cela qui fait qu'on peut parler d'une démarche qui
contribue à l'installation de relations entre les jeunes et les adultes,
et donc assurer un transfert de savoir faire de génération en
génération, ainsi entre les associations de jeunes et les autres
partenaires actifs dans le développement communautaire.
Le PCM compte environ 20 000 jeunes, entre jeunes
bénéficiaires des activités du programme, et les jeunes
membres des associations du PCM.
Suivant les entretiens avec les acteurs du PCM, ce dernier a
offert :
- Un espace d'expression : les jeunes
associatifs du programme, sont invités à toutes les
manifestations organisées, autour des quatre thématiques, ils ont
l'occasion de rencontrer d'autres acteurs associatifs ou publics... ce qui leur
donnent l'occasion de s'exprimer et d'échanger des idées et des
ambitions...
- Une plateforme de rencontre entre les jeunes et
d'autres acteurs... : dans sa deuxième phase le PCM a choisi
comme volet d'action la dynamique de la jeunesse, avec une double ambition :
faire bénéficier les jeunes du fruit des projets
réalisés sur terrain, et plus particulièrement les rendre
des acteurs, qui réfléchissent, prennent des initiatives et
agissent indépendamment. Sous l'égide du PCM, les jeunes
effectivement sont devenus des acteurs : en premier lieu, l'accès des 4
jeunes au comité de pilotage pour représenter les jeunes de leur
territoire, leur a donné l'opportunité d'être à
égalité avec les autres dans les propositions et les prises de
décision, de se confronter aussi avec les pouvoirs publics. En second
lieu, la participation des jeunes aux rencontres nationales organisées
par le PCM leur a permis de tisser des liens et des connaissances avec des
acteurs de grande importance, tel que les ONG internationales, les ONG et
associations nationales,
d'échanger des idées de projets, l'objectif
étant de « travailler ensemble ». En troisième lieu,
pour les projets du PCM qui sont portés par ses associations membres,
une condition incontournable est à retenir, c'est que pour valider un
projet, il faut qu'il soit fait pour et par les jeunes : des
bénéficiaires jeunes, et des associations de jeunes qui portent
les projets.
- Une base d'encouragement à la participation
des jeunes à la gestion des affaires locales : Au cours de la
deuxième phase du programme, 4 conférences régionales, ont
étés organisées dans quatre régions du pays, et une
conférence nationale, autour de la participation des jeunes à la
gestion de la chose publique : Ces conférences se sont traduites par une
invitation non seulement des acteurs du programme mais, au-delà, des
acteurs hors du programme, qui étaient également
intéressés par ces manifestations.
Sur la base de ces conférences plusieurs jeunes ont
été ciblés, 400 jeunes ont participé aux 4
conférences régionales, et 180 jeunes ont participé
à la conférence nationale. En plus des conférences
régionales, 3 universités de jeunes sont venues dans leur
continuité, et leur complémentarité, le but étant
de former et informer les jeunes sur leur rôle dans la gestion des
affaires locales. Au total 290 jeunes ont participé aux
universités de jeunes. L'ensemble de ces conférences s'est
traduit par l'implication de certains jeunes bénéficiaires dans
les élections de 2009, à titre d'exemple : des jeunes se sont
présentés aux élections dans leurs communes, il faut
signaler également que d'autres se sont inscrits pour la première
fois dans les listes électorales49.
A noter que ce sont des premiers constats d'après les
entretiens effectués avec les membres du Programme. Le volet jeunesse
sera traité et analysé sur la base de quelques
projets50 spécifiques que nous avons choisis.
49 Entretien avec B.Boukhsimi, président de
l'Association Mouvement Twiza, porteuse du Projet Jeunesse Territoires
Citoyenneté.
50 Vu l'importance des projets du PCM, nous avons
choisi de travailler sur trois projets.
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