C/ Intérêt du sujet
Etablie dans l'optique d'une géographie volontaire, notre
recherche présente une importance à la fois scientifique et
pratique.
Scientifique, car notre recherche va fournir un document dont
on se servira dans le cadre de travaux de recherche à caractère
théorique, académique et universitaire. Elle doit aussi permettre
de disposer des données et des outils de base sur la manutention au
PAL.
Pratique, car notre travail permettra de mieux connaître
les activités de manutention des conteneurs, les innovations
apportées, de même que les activités connexes au
développement de la conteneurisation.
D/ Revue de la littérature
Le transport n'est pas un domaine nouveau pour la recherche.
Plusieurs recherches ont été faites sur les transports, cependant
peu portent sur les activités portuaires en Afrique Occidentale.
Les mutations induites par l'introduction des conteneurs dans
les activités au PAL n'ont pas fait l'objet d'études
approfondies. Cependant des mémoires et rapports ont été
établis sur le PAL et sa zone d'influence. La manutention maritime des
conteneurs au PAL reste donc un domaine vierge qui doit faire l'objet de
recherche pour en déterminer ses influences sur le développement
des transports et des activités portuaires. Les manutentionnaires et
les
établissements portuaires qui sont naturellement les
acteurs clés dans les mutations des transports maritimes sont contraints
à s'adapter aux nouvelles donnes.
Pour notre recherche littéraire, nous nous sommes donc
basés sur les ouvrages, mémoires, publications, rapports, qui
sont relatifs aux transports et aux activités portuaires et surtout sur
la thèse de doctorat effectuée sur le PAL par VIMENYO M.
(2006).
Les transports constituent un élément de
première importance qui concrétise l'emprise de l'homme et des
systèmes économiques et politiques sur l'espace, (RITTER
J. 1971).
Pour WOLKOWITSCH M. (1982), « les
transports sont des activités fondamentales pour la survie des individus
et des états car, ils permettent d'assurer le déplacement des
personnes et l'acheminement des biens >>.
Les ports de commerce étant l'expression des liens
entre les grandes routes maritimes commerciales et les activités
économiques sur les continents, la fonction portuaire devient alors une
des formes les plus caractéristiques des relations de l'homme et de la
mer. Ainsi, CELERIER P. (1957) pense que « les ports,
points de jonction entre la terre et la mer, éléments
indispensables à la navigation, constituent les marques de cette emprise
dans l'espace géographique >> .
FREMONT A. (1998) affirme que « L'espace
maritime est défini comme un système géographique dont la
finalité consiste à relier les espaces continentaux >>.
DEZERT (1976), quant à lui, à
propos de la concurrence entre les différents modes de transports trouve
que « le trafic maritime est le meilleur marché pour les
marchandises car depuis quelques années, le navire, pour ce qui le
concerne, tend vers une nette adoption du transport de marchandises face
à la concurrence de l'avion pour le transport des passagers
>>19. Abondant dans le même sens, VIMENYO M.
(2006) affirme que : « de tous les axes de recherche de la
géographie des mers et exploitation des océans, c'est
l'économie maritime et portuaire qui nous a le plus marqué par
ses défis et enjeux au triple plan urbain, national, et international
>>.
Cependant bien souvent qualifié de non productifs
puisqu'ils ne créent pas à proprement parler de biens
réels, les transports sont indispensables à toutes
activités de production : mainsd'oeuvre, matières
premières, énergie doivent être réunies au lieu de
production et les produits portés sur le marché (RITTER
J. 1971).
A travers ces auteurs nous pourrions dire qu'il est impossible
de nos jours de parler du transport maritime sans faire
référence aux activités et à l'aménagement
de l'espace portuaire de même
19Cf. AKOUSSAN K. F. 1996, Contribution à la
géographie des transports : Etude géo-économique du Port
de Lomé. Lomé : UB, 109p (Mé : Géographie des
transports : UL).
qu'à l'influence de l'arrière pays, car pour
VIGARIE A. (1968) << l'animation des routes est
commandée par des centres d'impulsion. Ce sont de grands centres de
consommation et de production, organisant la mise en mouvement des masses de
marchandises, des carrefours humains desquels, partent ou vers lesquels,
convergent les flux de passagers. Ils peuvent être des ports, des
aérogares, des villes industrielles, des métropoles, des centres
de tourisme ou de pèlerinage ».
WOLKOWITSCH M. (1982) pour montrer
l'importance d'une infrastructure de transport dans l'aménagement de
l'espace, affirme : << c'est à travers la construction d'une route
que se traduit la volonté d'aménager et de peupler les espaces
disponibles ».
Cependant les transports maritimes tout comme les autres modes
de transports ont subi de profondes mutations tout au long de l'histoire. La
structure profonde du bateau a évolué à cause de
l'introduction de nouvelles méthodes de transport par mer des
marchandises, en vue d'améliorer les conditions d'acheminement, en
diminuant le temps d'arrimage, en économisant sur les emballages, sur
les avaries et pertes dues à la manutention, et en
accélérant la rotation des bâtiments.
DOUMENGE (1965) trouve que <<
L'apparition puis le développement rapide des nouveaux types de navires
gros porteurs ont apporté des changements profonds dans les exigences de
l'aménagement portuaire ». Ainsi l'introduction des conteneurs dans
la deuxième moitié du 20ième siècle dans le
transport maritime et les activités portuaires, ouvrent des perspectives
réellement révolutionnaires.
Selon VIGARIE A. (1968) << la
conteneurisation part cependant de l'idée simple qu'il faut que le
navire passe le moins de temps au port, et soit utilisé essentiellement
en mer ; elle conduit au procédé, connu et appliqué depuis
longtemps, qui consiste à faire voyager les marchandises dans les
conteneurs en forme de parallélépipède. Cette
méthode évite la manutention fragmentée ; le logement en
cales est plus aisé ; on peut charger en pontée ; le
transbordement avec les modes de circulation terrestre est facile ».
ADIKO J. (1998) dans son mémoire de
maîtrise en gestion des transports sur l'évolution, les
incidences, les problèmes et perspectives nés de l'introduction
du conteneur dans la chaîne béninoise des transport,
affirme : << aujourd'hui, le conteneur est l'emballage le
plus efficace, le plus économique pour le transport maritime, routier et
ferroviaire car il favorise la promotion du transport multimodal. Depuis son
introduction dans la chaîne des transports, le conteneur a résolu
l'épineux problème des armateurs à savoir la
rapidité des manutentions et par conséquent la réduction
du temps de séjour à quai des navires ».
CUSSET J. (2003) affirme que : <<
pendant longtemps, la gestion des infrastructures et des services portuaires
était contrôlée par des monopoles publics plus les
autorités portuaires. Or, depuis le début des années 1990,
on assiste à un désengagement plus ou moins poussé, selon
les régions du monde, des pouvoirs publics, et à l'ouverture au
secteur privé de cette gestion portuaire. La manutention portuaire n'est
plus l'apanage d'entreprises nationales mais elle tend de plus en plus à
être concentrée aux mains d'opérateurs de taille
continentale>>.
Allant dans le même sens, le Capitaine BAH Abdou
Rahman, directeur général adjoint de l'Autorité
Portuaire de Gambie, représentant Monsieur GULBA
Muhamed, directeur général de l'Autorité
Portuaire de Gambie, président de l'AGPAOC (2008)
affirme que << les ports de l'Afrique de l'Ouest et du Centre
connaissent des changements rapides dus aux nouveaux défis de
l'environnement commercial mondial, la viabilité de nos ports passe par
la conception de nouvelles stratégies avec des mesures
spécifiques. Ces mesures consistent à la facilitation de
l'accès à nos ports par les bateaux spécialisés de
plus en plus grands et profonds, à l'amélioration des
installations de réception et à l'acquisition de matériels
pour le traitement efficient des conteneurs >>20.
RAJAONARISON V. (2005) dans son
mémoire pour le master II Droit maritime et des transports
pense que << Les exploitants portuaires doivent investir des
capitaux importants pour des installations et des équipements de
manutention spécialisés (grues, portiques à conteneurs,
nouveau terminal etc.). La concurrence de plus en plus vive entre les terminaux
explique entre autres la modification du paysage portuaire des conteneurs. On
assiste à l'émergence de groupes de manutention internationaux
spécialisés dans le conteneur. Les Asiatiques se taillent une
place de choix dans ce domaine et cette expansion géographique
s'accompagne d'une réorganisation de la profession >>.
GBAGUIDI M. (2007) dans son mémoire de
master sur Les performances des sociétés de manutention
portuaire dans les ports Ouest Africains: Cas de la société
béninoise de manutention portuaire au port autonome de Cotonou
trouve que : << si le marché de la manutention portuaire,
dans la plupart des pays occidentaux tels que la France s'est reformé
depuis les années quatre vingt douze, ce fut pendant longtemps le
monopole de l'Etat dans les ports africains, mais il a fallu les années
quatre vingt dix pour que le secteur soit à nouveau
réorganisé. En effet, par l'arrêté
ministériel n°12 MTPT/DC/SG/SA, du 24 mars 1999, la manutention des
conteneurs fut libéralisée au port de Cotonou. Cette
libéralisation a favorisé l'entrée en activité de
deux sociétés privées, la société de
manutention du terminal à conteneurs (SMTC) du groupe Bolloré et
la société Cotonou manutention (COMAN) détenue par la
société
20Rapport final du 31ème Conseil et
7ème Table ronde de l'AGPAOC (Association de Gestion des
Ports de l'Afrique de l'Ouest et du Centre), Abidjan du 21 au 25 Avril 2008
Maersk sealand. Ainsi, le groupe Bolloré, à
travers sa filiale SMTC, détient 40% du marché des conteneurs; le
groupe Maersk Sealand, 32% et la Sobémap, le reste de la part du
marché soit 28% ». L'exemple de réforme portuaire dans un
autre pays Ouest Africain a été aussi donné en occurrence
celui du Ghana. Ainsi selon le CNUCED (2003), la Ghana Ports
and Harbours Authority (GPHA) a lancé, en septembre 2001, la
première phase de son programme de privatisation qui implique le
transfert d'une partie des services de manutention à des compagnies
privées, sur la base de la concession. Une seconde phase
s'étalera de juillet à décembre 2002 et la GPHA aura le
statut de "port propriétaire foncier" et d'autorité de
régulation en assurant aussi la collecte des paiements versés par
les concessionnaires. A la fin de cette phase, le port de Tema sera totalement
privatisé.21
Cependant une telle ouverture du marché portuaire
africain à ces entreprises internationales peut-elle favoriser leur
développement. C'est en ce sens que BATANDEO B. (1985)
dans son mémoire de maîtrise en gestion portuaire se demande si
<< les ports de l'Afrique de l'Ouest particulièrement Lomé
et Cotonou peuvent-ils surmonter leurs déficiences d'infrastructures par
une meilleure stratégie de gestion et d'exploitation ».
Les réformes portuaires s'avèrent
nécessaires pour faire face aux flux de plus en plus soutenus entre les
ports africains et ceux de l'Extrême-Orient car pour
RAMANDIMBIARISON Z. (2007) responsable du programme
SSATP << Les réformes portuaires sont toujours
difficiles. Alors qu'autrefois elles servaient souvent à
améliorer la productivité dans un contexte strictement national,
les réformes sont de plus en plus incontournables pour assurer tout
simplement que les ports ne restent pas en marge des progrès
technologiques et des tendances mondiales. Les compagnies maritimes font face
à une augmentation des coûts lorsqu'ils accostent dans les ports
d'Afrique de l'Ouest et du Centre surtout à cause de
l'inefficacité de ces ports, du faible volume de trafic et des
équipements portuaires inadéquats ou insuffisants». Une
desserte assurée par un réseau dense et varié, de vastes
zones de stockage et de distribution, une sécurité
renforcée et des équipements modernes et performants sont autant
de gages auxquels fait référence GIGNOUX M.
(2005) dans son mémoire de master sur l'implication
juridique du transport multimodal en parlant << du
développement, du traitement informatique et télématique
des flux de marchandises, la sécurité renforcée par la
réalisation d'enceintes protégés, la mise en place de
contrôle des mouvements de conteneurs assistés par informatique et
de contrôle d'accès améliorent l'efficacité et la
sécurité portuaire tout en permettant la réduction des
coûts »
21Réformes et place du secteur privé
dans les ports africains, Rapport du secrétariat de la CNUCED,
UNCTAD/SDTE/TLB/5, 31 mars 2003.
PETCHELEBIA A. (1981) dans son mémoire
en Droit privé sur Le Port de Lomé trouve que <<
les ports jouent également un rôle très important dans
l'économie mondiale. En effet, les établissements portuaires sont
indispensables aux transports maritimes. Il est absolument nécessaire
que les navires, surtout les navires de commerce, puissent disposer de ports
bien équipés où ils seront à même de charger
ou de décharger leurs marchandises >>. Plus loin, il ajoute que
<< de nos jours il existe une orientation nouvelle des transports
maritimes (accroissement des tonnages unitaires, containérisation), les
établissements portuaires sont donc continuellement obligés
d'investir des sommes énormes pour aménager les accès,
accroître le nombre et les dimensions de leurs postes à quais,
augmenter le nombre et la puissance de leurs engins de manutention >>.
Pour VIMENYO M. (2006), << la gestion
de l'outillage de manutention semble également être l'un des
domaines les moins maîtrisés au Port de Lomé. Depuis sa
création, les postes à quai du port restent encore non
équipés de grues de quai. La manutention des navires se fait au
moyen de leurs mâts de charges alors que le rythme des opérations
de chargement, et de déchargement dépend de la vitesse et du
rendement de ses moyens >>. Ainsi selon l'analyse de l'état de
l'outillage faite par un expert en mécanique dans le cadre de
l'étude du cabinet HPC sur l'analyse de la gestion
du PAL, en Septembre 1992, << tous les engins
concernés ont été soigneusement visités, et
analysés pour la plupart des cas dans les moindres détails. Les
résultats obtenus considérés comme fiables portent sur
deux points essentiels à savoir l'âge et la fiabilité des
engins de manutention, en règle général l'outillage du
port est plutôt vétuste, amorti ou hors d'usage
>>22.
Dans le même ordre d'idée, ADZA K. (1992)
dans sa thèse en gestion et administration portuaire, le
marketing portuaire élément de développement du Port de
Lomé pense << qu'une meilleure compétitivité du
port passe par une politique globale basée sur le marketing visant la
promotion de l'image du port, l'amélioration des installations et une
meilleure administration >>. Les changements intervenus dans le domaine
du transport maritime et les avantages des réformes qui s'en sont
suivies surtout dans les pays de l'Afrique de l'Ouest ont fait l'objet
d'études approfondies.
Selon le Document de travail du SSATP
No.84F, Ports et transport maritime en Afrique
de l'Ouest et du Centre les défis à relever, << La
taille des navires, en particulier celle des porteconteneurs, continuera
probablement de croître dans la région Ouest Africaine, ce qui
fait nécessairement appel à l'efficacité et à
l'infrastructure portuaire, de même l'application de mesures visant
à améliorer la sécurité, et notamment du Code
international pour la sûreté des
22HPC (Hambourg Port Consulting), Etude sur l'analyse
de la gestion du PAL (Phase A), Lomé, PAL, 265p, 1992.
navires et des installations portuaires (ISPS) requiert une
attention soutenue ». Plus loin un exemple réussi de réforme
portuaire a été décrit, « celle du secteur portuaire
du Nigeria car à peine quelques mois après que la gestion du
terminal à conteneurs de Lagos ait été prise en main par
des opérateurs privés, la productivité s'est accrue. Les
retards chroniques imputables aux aires de stationnement ont presque disparu,
ce qui a permis aux compagnies maritimes de réduire leur surtaxe de
congestion de 525 EUROS juste avant la concession en mars 2006 à 75
EUROS en janvier 2007. Les estimations approximatives montrent que la seule
réduction de la taxe de congestion permet à l'économie
nigériane de réaliser des économies de l'ordre de 200
millions de dollars par an ».
De même cette ouverture aux opérateurs
privés, nationaux et étrangers, a permis aux ports de
bénéficier du savoir-faire du secteur privé,
essentiellement des grands opérateurs multi-ports, en matière de
gestion, de modernisation du système d'information et d'apports de fonds
pour l'investissement et l'entretien des infrastructures. D'après la
Banque mondiale, pour la seule année 2000, les investissements du
secteur privé dans les projets portuaires dans les pays en
développement ont été de 2 milliards 632 millions de
dollars E-U, contre 304 millions de dollars E-U en 1992. Les principales
conséquences de la coopération entre le secteur privé et
le secteur public sont essentiellement l'amélioration de la performance
des opérations, l'augmentation du trafic, la diminution des charges
portuaires, etc. CNUCED (2003).
Mais pour que ces réformes soient efficaces, il
s'avère essentiel de disposer d'un arrière pays conséquent
et d'en faciliter les liaisons avec les ports, condition sine qua non si l'on
veut augmenter le trafic.
Dans cette optique AKOUSSAN F. (1996), dans
son mémoire de maîtrise sur l'étude
géoéconomique du Port de Lomé, estime que le port
fait bénéficier le trafic transit de certains avantages
tarifaires par rapport aux tarifs généralement appliqués.
Selon lui ce trafic détermine le résultat économique de
l'exploitation portuaire, surtout que sans lui, les importations et les
exportations ne suffiraient pas à réaliser un résultat
positif. Cette pensée se retrouve chez TOUSSA (1993)
qui pense que « seules la qualité et l'efficacité
du service offert peuvent créer un avantage différentiel en
faveur des ports plus opportunistes et mieux organisés
»23 car le Port Autonome de Lomé, se pose en concurrent
sérieux des ports d'Abidjan et de Cotonou qui servent aussi de porte
maritime pour le Burkina Faso, le Niger, et le Mali, SEGBOR P. (1997).
Ces différentes études menées sur le transport,
et surtout sur les activités de manutention des conteneurs au PAL et
dans les autres ports de la sous région Ouest Africaine, montrent que
les réformes portuaires sont indispensables au développement des
activités portuaires. Notre
23Cf. VIMENYO M., Le Port Autonome de Lomé et
son arrière-pays. Lomé, UL, 2006, 344p (Thèse de doctorat
en géographie des transports, 2006)
recherche se veut un complément à cette panoplie
de publications et une réponse aux interrogations sur les
activités de la SE2M TOGO et leurs apports au développement du
PAL et du TOGO.
|