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La primauté des tribunaux pénaux internationaux ad hoc sur la justice pénale des états.

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par Gérard MPOZENZI
Université du Burundi - Licence en Droit 2003
  

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II.4.1. Notions

Il y a compétences concurrentes lorsque deux ou plusieurs tribunaux se déclarent compétents

pour les mêmes faits. De telles situations sont favorisées par la compétence égale reconnue à plusieurs juridictions321(*), telles celle du lieu de commission de l'infraction et celle du lieu d'arrestation du coupable.

Dans le cadre du Rwanda et de l'ex- Yougoslavie, les Statuts des deux TPI ad hoc reconnaissent une compétence concurrente entre le Tribunal international et les juridictions nationales322(*), ce qui signifie que toute juridiction nationale est compétente.

Les juridictions nationales sont compétentes sur la base des critères (traditionnels) suivants : le principe de la territorialité, le principe de la personnalité active ou passive, la compétence réelle. Les tribunaux étatiques sont également compétents en vertu de la compétence universelle323(*).

La concurrence de compétences a pour conséquence que le tribunal international peut renoncer à sa compétence prioritaire et laisser aux juridictions nationales le soin de juger un accusé.

Quid de la concurrence de compétences avec les juridictions internationales ? A propos de cette question, il faut déjà écarter la CIJ dans la mesure où les TPI ad hoc connaissent des affaires relatives à la responsabilité individuelle et non des différends entre Etats324(*). Dans un cas pratique, le TPIY a déjà pris soin de rappeler l'absence de la hiérarchie entre lui et la CIJ dans l'affaire Celebici. Dans cette affaire, la chambre d'appel du TPIY a estimé qu' « il n'existe aucun lien hiérarchique » entre la CIJ et le Tribunal international et qu'il n'existe aucun fondement juridique justifiant que le « Tribunal se dessaisisse au profit de la CIJ et soit, en conséquence, tenu par les décisions de cette dernière »325(*) .

Dans l'affaire Kvacka326(*), un des accusés a présenté une motion aux fins de suspendre la procédure devant le TPIY en raison d'une concurrence en pratique avec la CIJ (Bosnie- Herzégovine c. Yougoslavie)327(*). La chambre de 1ère instance a rejeté la demande au motif que « (...) Considering that the ICJ, the principal judicial organ of the UN, deals with state responsibility, while the tribunal, established by the Security Council on the basis of chapter VII of the UN Charter, deals with individual criminal responsibility ». Ce qui signifie que la CIJ, organe principal des NU, s'occupe de la responsabilité des Etats alors que le Tribunal international, établi par le CS des NU sur base du Chapitre VII de la Charte des NU, s'occupe de la responsabilité pénale des individus.

La chambre d'appel a confirmé la position de la chambre de Ière instance le 25 mai 2001 en notant entre autre que: «(...) none legal basis exists for suggesting that the international tribunal must defer to the international court of justice such that the former would be legally bound by decisions of the later328(*)». Ce qui veut dire qu`il n`existe aucune base juridique pouvant suggérer que le tribunal international doit déférer à la Cour internationale de justice tel que le premier devrait être lié par des décisions de la dernière.

S'agissant des juridictions internationales à caractère régional, la concurrence de compétences avec les TPI ad hoc ne s'est jamais posée329(*). Quant à la CPI, la concurrence de compétence entre elle et les TPI ad hoc ne se pose pas du fait que la Cour n'a compétence, en général, qu'à l'égard des crimes commis après la date de son entrée en vigueur, c'est-à-dire à partir de 2002.

Ainsi, telle que détaillée, la concurrence de compétences entre les juridictions nationales et les TPI ad hoc engendrerait des conflits fâcheux de compétence. Les Statuts des deux TPI y ont, cependant, prévu un remède que voici.

II.4.2. La priorité du TPI ad hoc

En cas de concurrence de juridictions, le Tribunal pénal international a priorité sur les juridictions nationales dans la mesure où celles-ci peuvent connaître des faits en cause, mais doivent se dessaisir en faveur du Tribunal international si celui-ci le leur demande330(*). Ce point n'était pas clairement réglé dans les Statuts des TMI de Nuremberg et de Tokyo331(*). Contrairement aux TPI ad hoc, la nouvelle CPI ne jouit d'aucune priorité pour la poursuite et le jugement des suspects visés par son Statut. C'est même l'inverse332(*).

Il convient enfin d'analyser la primauté des deux TPI ad hoc sur les juridictions des Etats en termes de rapport entre ces Tribunaux internationaux ad hoc et la justice pénale étatique.

* 321 CONTE (Philippe) et MAISTRE DU CHAMBON (Patrick), Procédure pénale, 4ème éd., Paris, Armand Colin, 2002, p. 88.

* 322 Statuts, TPIY, art. 9 §1; TPIR, art. 8 §1.

* 323 Supra, p.35 ss.

* 324 ADJOVI (Rolant) et DELLAMORTE (Gabriel), « La notion de procès équitable devant les TPI », in RWIZ Fabri (Hélène) (dir.) Procès équitable et enchevêtrement des espaces normatifs, Paris, Société de législation comparée de Paris, 2002, p. 7 consulté sur http://www. penal. org/pdf/notproaqui_1. pdf, le 12 avril 2009.

* 325 TPIY, Chambre d'appel, affaire n° IT-96-21-A, le Procureur c. zejnil Delalic, Zdravko Mucic, Hazim Delic et Esad Landzo, dite « Affaire Celelic », Arrêt du 20 février 2001, §4.

* 326 TPIY, Chambre de 1ère instance I, affaire Kvacka n° IT-98-30/1, Decision on the Defense Motion regarding concurrent procedures before International Criminal tribunal for the Former Yugoslavia and I.C.J. on the same questions, 5 december 2000.

* 327 La Bosnie- Herzégovine avait saisi la CIJ par une requête du 20 mars 1993 contre la Yougoslavie (Serbie et Monténégro), pour faire reconnaître la violation par cette dernière, de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide mais aussi des quatre Conventions de Genève et de la Charte des NU, sans compter d'autres dispositions du droit international général et coutumier.

* 328 TPIY, Chambre d'appel, affaire Kvacka, N° IT-98-30/1- AR 73 ; 5, Decision of Interlocutory Appeal by the accused Zoran Zigic against the decision of trial chamber I dated 5 december 2000, 25 mai 2001.

* 329 ADJOVI (Rolant) et DELLAMORTE (Gabriel), op. cit. p. 8.

* 330 Statuts, TPIY, art. 9 §2 ; TPIR, art. 8 §2 ; Règlement de procédure et de preuve (art. 9-12).

* 331 DAVID (E.), Principes de droit des conflits armés, op. cit., p. 783.

* 332 DAVID (E.), Principes de droit des conflits armés, op. cit., p. 78 ;, Voy. aussi supra, p.21.

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