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Profil de l'hémogramme chez les sujets VIH/SIDA

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par Stéphane Junior TALOM FOGUE
Université de Bamako - Doctorat en médecine 2005
  

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V. MANIFESTATIONS HEMATOLOGIQUES ET IMMUNOLOGIQUES

AU COURS DU VIH/SIDA

I. ANOMALIES HEMATOLOGIQUES

Classiquement l'évolution par le VIH s'accompagne de la diminution progressive des chiffres d'hémoglobine, de leucocytes et de plaquettes. [75] Ces anomalies sont non seulement dues à l'action directe du VIH lui-même, mais aussi à de nombreuses drogues anti-infectieuses. [75,76]

1. Anomalies sanguines périphériques liées au VIH

Manifestations spécifiques

Les cytopénies liées à l'infection VIH, sont connues et décrites dès le début de l'épidémie (SPIVAK, 1983). Elles sont dues à :

- soit à l'infection des progéniteurs médullaires

- soit à l'infection du microenvironnement médullaire

- soit à la production d'Ac et de complexes immuns circulants. [81]

1.1 Anémie

C'est la complication hématologique la plus fréquente au cours de l'infection par le VIH [77, 78,79].De nombreuses études au monde rapportent une fréquence de 63 % à 95% au stade SIDA déclaré et 15 à 20 % chez les patients séropositifs.[79,81]

Chez les patients infectés par le VIH, l'incidence de l'anémie augmente avec l'aggravation du déficit immunitaire [52]. L'anémie est habituellement normochrome normocytaire (61%), microcytaire (31%) et macrocytaire dans 6 % des cas ; et arégénérative [80,81].

Il existe de nombreuses causes d'anémie reliées à l'infection à VIH :

· Quantité insuffisante de globules rouges.

Lors d'une infection au VIH, l'organisme ne répond pas aussi efficacement en produisant plus d'érythropoïétine et de globules rouges. Le VIH peut également influer directement sur la moelle et limiter la production de globules rouges.

Une altération de l'érythropoïèse rend compte de l'anémie chez la plupart de individus infectés par le VIH. Chez les patients sans anomalies rénales, pour des raisons obscures le taux sérique d'érythropoïétine est souvent relativement bas pour le degré d'anémie.

L'atteinte de l'érythropoïèse due à l'infection à VIH elle-même pourrait être liée à la libération d'inhibiteurs et/ou à une production anormales de cytokines trophiques. [52,82]

· Infections.

Les infections bactériennes et fongiques ainsi que certains virus (parvovirus, cytomégalovirus) détruisent la moelle osseuse et peuvent nuire à la production de globules rouges. [82,83]

· Traitement.

Nombre de médicaments antirétroviraux utilisés pour traiter l'infection au

VIH peuvent affecter la moelle osseuse et provoquer l'anémie. De plus, certains antibiotiques et médicaments antifongiques peuvent contribuer à l'installation de l'anémie. [82,83]

· Cancer.

Les patients qui souffrent du VIH courent un risque élevé de contracter certains cancers, en particulier le lymphome. Ces cancers envahissent fréquemment la moelle osseuse et peuvent nuire à la production de globules rouges. [82,83]

· Malnutrition.

L'infection au VIH peut se traduire par l'absorption insuffisante d'éléments nutritifs comme le fer, l'acide folique et la vitamine B12, ce qui accroît le risque d'anémie.

Le test de Coombs (à l'antiglobuline) pourrait être positif chez la plupart des patients ayant le SIDA, et chez un tiers des individus infectés par le VIH et asymptomatiques. Bien que des anticorps spécifiques anti-i ou d'autres puissent être présents, la liaison d'anticorps antiphospholipides ou de complexes immuns à des érythrocytes est plus fréquente. [81, 83, 84, 85, 86,87]

.

1.2 Leuco-neutropénie

C'est la deuxième manifestation la plus rencontrée : 60 à 75 % des patients stade SIDA déclaré et 20 à 40% des séropositifs.[81,88,89,90]

La lymphopénie est le témoin de l'évolutivité de l'infection. Elle peut être précédée au stade de primo-infection par un syndrome mononucléosique.

La lymphopénie CD4 est un marqueur de la progression du déficit immunitaire. Elle permet de prédire la survenue d'infections opportunistes ou de néoplasies et d'orienter leur diagnostic (par exemple la toxoplasmose cérébrale ou la cryptococcose méningée apparaissent lorsque le taux de CD4 est inférieur ou égal à 100 /mm3. [91]

La neutropénie est surtout d'origine toxique médicamenteuse. Elle est sans signification clinique sauf en cas de maladie maligne associée qui nécessitera une chimiothérapie. [81]

La neutropénie peut être due à l'atteinte de la production et/ou à l'augmentation de la destruction des leucocytes. Des anticorps fixés à la membrane des granulocytes ont été observés chez près d'un tiers des individus infectés par le VIH. La présence d'anticorps liés aux neutrophiles ne permet pas d'augurer de la survenue d'une neutropénie. L'atteinte de l'hématopoïèse est présumée être la cause majeure de neutropénie due au VIH. En outre, des troubles fonctionnels des neutrophiles ont été décrits lors du SIDA. On ignore dans quelle mesure le défaut de neutrophiles contribue à l'atteinte immunologique de l'hôte, et en particulier à la mort des microbes. [52]

1.3 Thrombopénie

Fréquemment rencontrée au cours de l'infection à VIH : 5 à 15 % des patients séropositifs. [76, 89,90]

Elle apparaît très tôt au cours de l'évolution et semble cependant n'avoir pas d'influence notable sur l'évolution clinique, le sujet VIH séropositif ne présentant que cette anomalie est d'ailleurs classé dans le groupe A (Infection asymptomatique chronique) de la classification CDC modifiée.[76]

Elle est souvent isolée et peut être transitoire. Le plus souvent d'origine périphérique (auto-anticorps anti-plaquettes et complexes immuns circulants) elle est associée à la présence d'immunoglobulines liées aux plaquettes. Cependant, l'incidence non négligeable d'immunoglobulines (de classe IgG surtout) liées aux plaquettes (IgG-P) chez des patients séropositifs non thrombopéniques retire à cette anomalie biologique une partie de sa valeur diagnostique. La présence d'IgG-P en l'absence de thrombopénie rend probable l'hypothèse de l'existence et la persistance de particules antigéniques du VIH à la surface plaquettaire.

On s'accorde à penser que l'association d'IgG-P et d'une thrombopénie profonde n'est pas un argument décisif pour expliquer l'hyperdestruction plaquettaire, un effet de dilution est connu quand le chiffre des plaquettes est normal.

Les hypothèses physiopathogéniques des thrombopénies VIH+ s'orientent actuellement vers deux directions : Complexes Immuns Circulants (CIC) et autoanticorps antiplaquettaires :

· Rôle des complexes immuns

La prévalence nette des CIC au cours de l'infection par le VIH concomitamment à l'existence d'une thrombopénie avait permis d'affirmer le lien étroit entre présence de CIC et survenue d'une thrombopénie. Cependant, le fréquent état de polyinfestations rencontré chez les patients séropositifs montrant l'absence de corrélation entre CIC et thrombopénie, suggère que la présence de CIC pourrait n'être que la conséquence de la thrombopénie, les plaquettes jouant un rôle actif d'épuration des complexes immuns par le système macrophagique.[76]

· Rôle des autoanticorps antiplaquettaires

Un anticorps antiplaquettaire de 25 kDa et se fixant sur un antigène de la membrane plaquettaire a été récemment décrit. Il réagit également avec un antigène provenant de virus Herpes Simplex types I et II en culture, mais est distinct de la protéine du core du VIH. La responsabilité de cet anticorps dans la thrombopénie demande à être confirmée. Cependant la présence chez les patients atteints de SIDA d'histiocytes médullaires engagés dans un processus de phagocytose mérite d'être précisée ainsi que le rôle des infections virales associées, si fréquentes sur un tel terrain.

Un travail basé sur un modèle animal utilisant un autre rétrovirus, le RMuLV (Rausher Murine Leukaemia Virus) a proposé le rôle direct (ou indirect) du VIH lui-même dans le développement de la thrombopénie au travers de l'infection des mégacaryocytes et l'expression des antigènes viraux à la membrane plaquettaire, induisant une production significative d'anticorps antiviraux ; le rôle facilitant d'autres virus (herpes simplex types I et II) n'est cependant pas exclu. [76, 92, 93,94]

Manifestations non spécifiques

A côté des cytopénies ci-dessus, rencontrées à fréquence variable au cours de l'infection à VIH ; on a des anomalies sanguines non spécifiques du VIH, qui sont la traduction d'atteinte périphérique et/ou centrale.

Ces anomalies sont consignées dans le tableau XI.

Tableau XI. Anomalies hématologiques non spécifiques au cours du VIH [76]

ANOMALIES PERIPHERIQUES

- Bi- ou pancytopénie

- Cellules lymphoplasmocytaires

- Monocytes vacuolés

- Poïkilocytose

- Erythromyélémie

ANOMALIES MEDULLAIRES

- Hypercellularité ou hypocellularité médullaire

- Dysérythropoïèse

- Aspect mégaloblastique

- Erythrophagocytose

- Raréfaction de adipocytes

- Dilatations vasculaires

- Hyperplasie mégacaryocytaire

- Dysmégacaryocytopoïèse

- Hyperplasie plasmocytaire

- Dysgranulopoïèse

- Dysmyélopoïèse

- Aplasie médullaire (SIDA confirmé)

- Myélofibrose

- Eosinophilie

- Sidéroblastes en couronne (rarement)

- Granulomes

- Fibrose réticulinique

- Histiocytose (rare)

- Infiltrats de lymphocytes atypiques

- Aspects de nécrose.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote