2.3 Discussion
Les résultats obtenus après l'analyse
bactériologique sont comparés d'une part avec les
critères microbiologiques de référence
(arrêté ministériel français du 21
décembre 1979 abrogé en 2004), et d'autre part entre l'eau et les
huîtres et entre les huîtres vivantes non traitées et celle
des huîtres vivantes traitées avec de l'eau de javel.
Ces comparaisons portent sur la flore d'altération, la
flore de contamination fécale et sur la flore pathogène. Elles
permettent d'apprécier la qualité de l'eau, ainsi que celle des
huîtres vivantes dégorgées à Katacalousse.
L'appréciation des échantillons est interprétée
selon un plan à trois classes à l'exception des Staphylocoques
Salmonelles :
· les résultats inférieurs à la
norme microbiologique traduisent un résultat satisfaisant ;
· les résultats inférieurs ou égaux
à la norme microbiologique mettent en évidence un produit
acceptable ;
· les résultats largement supérieurs
à la norme microbiologique correspondent à des huîtres non
satisfaisantes.
Le tableau 6 montre que l'échantillon analysé
(eau) est non satisfaisant du fait de la présence de Staphylocoques qui
s'élèvent à 30 par rapport à la norme
microbiologique qui indique une absence/100ml, et un nombre ASR (>1/20)
supérieur à la norme microbiologique qui préconise
1/20/ml. Le tableau 7 montre que le résultat des huîtres non
traitées est non satisfaisant du fait des valeurs supérieures
(8.103 pour Staphylocoques et 1,2.102 pour ASR) à
la norme microbiologique 102/g pour la première valeur et
10/g pour la dernière valeur. Le tableau 8 montre un résultat non
satisfaisant des huîtres traitées avec l'eau de javel
· Comparaison entre les résultats de l'eau et les
huîtres :
- la flore d'altération
Elle correspond à la flore mésophile
aérobie totale à 30°C. La flore mésophile
aérobie totale (FMAT) est utilisée comme un indicateur de
pollution global. Elle englobe l'ensemble de microorganismes capables de se
multiplier à l'air aux températures moyennes, surtout à
une température optimale de croissance située entre 25 et
40°C. Sa présence dans les échantillons traduit toute la
gamme de germes non spécifiques contenus dans les produits. Le nombre de
bactéries mésophiles aérobies totales est
supérieur dans les huîtres traitées et non traitées
(14,4.104 cumule) par rapport à l'eau de Katacalousse
(84/20/ml, 85/102/ml), ce cumule est largement supérieur
à la normale et inférieur à celui des résultats
précédents (Océanium 2008) ce qui indique donc une charge
importante de flore totale dans les huîtres dont l'origine est à
chercher dans l'eau du milieu de dégorgement, car cette pollution peut
être liée aux rejets d'eaux usées sans traitement de
l'hôtel non loin des tables de dégorgement, mais aussi aux zones
de productions.
- La flore de contamination
fécale
La flore de contamination fécale recherchée au
cours de l'étude, correspond aux coliformes fécaux
(Escherichia coli, Klebsiella, Citrobacter,
Hafnia, et Entérobacter). Leur résistance dans
le milieu extérieur a permis à Berrada SUNI d'affirmer qu'ils
peuvent contaminer les aliments indépendamment de la souillure
fécale. Leur présence en nombre élevé peut se
relever très dangereuse, notamment E. coli.
En comparant les résultats des huîtres par
rapport à l'eau, on note une absence des coliformes dans l'eau de
Katacalousse qui peut être liée à la durée de vie
très courte dans l'eau de mer, mais aussi de l'auto-épuration de
l'eau de mer. Donc, la présence dans le produit (huîtres) de
coliformes peut être liée aux zones de productions.
- La flore pathogène
La flore pathogène considérée durant
l'étude de la qualité bactériologique est composée
de Staphylocoques, d'Anaérobies Sulfito-Réducteurs, de Salmonelle
et de Vibrio.
L'existence de Staphylocoques 8.103 dans les
huîtres peut être expliquée par la présence de
Staphylocoques 30 dans l'eau du milieu où la normale est l'absence dans
l'eau, ce qui explique la pollution du milieu de dégorgement par ces
bactéries pathogènes.
La présence des ASR dans l'eau qui est
supérieure à 1/20/ml dépassant la normale,
détermine leur détection dans les produits (huîtres) avec
1, 2.102. Cette charge importante peut être expliquée
par l'activité de l'hôtel, mais aussi des rejets d'eaux
usées du village (Ourong) qui, malgré son éloignement peut
être source de pollution dans cette zone liée au
phénomène de la marée.
Mais, on note une absence des Salmonelles et des Coliformes
fécaux dans tous les échantillons traités qui peut
être expliquée par un mauvais choix du moment de
l'échantillonnage, puisque les collectes sont réalisées
lorsque les conditions climatiques sont favorables. Alors que d'autres travaux
tels que ceux de Bosch (1995), ont montré que la
diminution de la température d'eau entraîne la diminution de
l'activité biologique des coquillages.
- Comparaison entre huîtres traitées
et non traitées :
Les résultats des analyses bactériologiques sur
les huîtres ont permis d'observer l'efficacité du chlore (javel)
utilisée pour le traitement des huîtres.
Ces résultats montrent qu'au cours du
dégorgement on note une réduction de la flore totale de
8,4.104 des huîtres non traitées à
6.104 pour les huîtres traitées ; de la flore
pathogène de 8.103 huîtres non traitées à
4.102 huîtres traitées, des ASR de
1,2.102 huîtres non traitées à 102
huîtres traitées. Ces résultats sont supérieurs
à ceux de Dramé (1994) pour une étude similaire sur les
huîtres de Joal. La flore fécale quant à elle reste
invariable malgré le traitement effectué. Ceci peut être
expliqué par la résistance des spores.
Cette réduction est liée à
l'efficacité du chlore (javel) dans le traitement. Mais malgré le
traitement, on dénote toujours une contamination des huîtres qui
conduit à déduire un résultat non satisfaisant des
huîtres dégorgées à Katacalousse.
En conclusion, on peut déduire que ces résultats
issus des analyses bactériologiques au laboratoire d'HIDAOA ne
permettent pas d'affirmer ou de confirmer la propreté des huîtres
produites dans l'AMPc du Petit Kassa et dégorgées à
Katacalousse.
Ces résultats ont permis de déduire
l'insalubrité (non satisfaisant) des huîtres produites dans l'AMPc
du Petit Kassa en Casamance.
Pour contribuer à l'amélioration de la
qualité bactériologique des huîtres, des recommandations
ont été apportées dans le cadre de cette
étude :
- Mise en place impérative de bassins
d'épuration ou de dégorgement des huîtres :
L'épuration est un procédé qui
consiste à mettre les coquillages vivants initialement contaminés
dans les conditions agréées et contrôlées de
façon à les rendre propres à la consommation humaine sans
traitement ultérieur.
Cette définition montre que les bassins
d'épuration constituent le maillon essentiel pour l'obtention de produit
de qualité. Quelque soit le degré de contamination initiale de
ces bivalves, au niveau des sites de production ou au cours du transport, des
améliorations notables peuvent être apportées lorsqu'on
dispose des bassins adéquats. Ceci exige que l'on soit intransigeant en
ce qui concerne leur emplacement, leur installation et leur utilisation.
La gestion des bassins d'épuration concerne surtout une
meilleure planification des approvisionnements. L'épuration doit se
faire par lots successifs en évitant de réunir les huîtres
en stockage et celles en épuration.
- Reprendre les analyses bactériologiques avec le
même procédé de traitement, mais en augmentant la dose de
chlore (javel) soit 5 ppm à 10 ppm et la durée de traitement de
sept jours à douze jours, car le traitement antérieur avec 3 ppm
a eu un effet avec une réduction de la flore mésophile totale de
8,4.104 à 6.104, les Staphylocoques de
8.103 à 4.102, les ASR de 1,2.102
à 102.
- Poursuite des analyses microbiologiques sous l'égide
des laboratoires agrées tels que HIDAOA, ITA, Institut Pasteur... pour
la recherche microbiologiques des productions halieutiques et en particulier de
la microbiologie alimentaire des huîtres produites au
Sénégal.
- Mettre en place un programme de surveillance, de
contrôle sanitaire des huîtres, de leurs zones de
dégorgement et de leurs zones de production. Pour cela un système
de surveillance microbiologique du milieu marin (environnement) doit être
instauré.
Les principaux points du programme devront
être :
- mise en place de normes microbiologiques de
salubrité spécifiquement adaptées au contexte
Sénégalais. L'autorité compétente doit dans ce
cadre élaborer un certain nombre d'amendements relatifs à la
salubrité des zones de production, à la détermination des
critères microbiologiques des eaux et des huîtres au niveau des
zones de production et commercialisation, au transport des huîtres et
à leur commercialisation ; pour cela une révision du
décret 69-132 du 12 février 1969 relatif au contrôle de
salubrité des produits halieutiques est nécessaire.
- le recensement et le classement de toutes les zones
conchylicoles du Sénégal selon les normes de microbiologie
adaptées
- la sensibilisation des populations riveraines
sur la relation qualité de l'eau et qualité des huîtres,
mais aussi sur les Bonnes Pratiques d'hygiènes (BPH)
- Favoriser dans cette zone le
développement de l'ostréiculture :
Les huîtres exploitées en Casamance proviennent
en majeure partie de la cueillette. Cette technique artisanale par coupure des
rhizophores garnis d'huîtres ou par blessure des rhizophores suite au
détroquage des huîtres, aggrave la déforestation de la
mangrove, déjà éprouvée par l'augmentation
excessive de la salinité liée aux facteurs climatiques.
Actuellement, des techniques améliorées à
savoir la pose de collecteurs artificiels sont entrain d'être
pratiquées.
- Recherche de méthodes de collecte du
naissain et de culture des huîtres adaptées au contexte local.
- Formation des cadres supérieurs
spécialisés dans l'ostréiculture pour l'encadrement des
groupements de femmes activant dans le secteur de l'ostréiculture.
- Après la cueillette, les huîtres sont
acheminées vers Katacalousse pour être dégorgées ou
épurées à l'aide d'une pirogue. Cette étape ne dure
que quelques heures. Elle peut ne pas entraîner des modifications
microbiologiques importantes.
En effet, les huîtres sont à sec et les
contaminations se limitent à la coquille. Il faut donc, renforcer la
propreté de tout le matériel rentrant en contact avec
l'huître.
- Améliorer les conditions de transport par
l'utilisation d'une source de froid. Les véhicules frigorifiques sont
les moyens de transport idéaux des lieux de dégorgement vers les
lieux de vente (zone touristique), mais compte tenu de leur coût
élevé, l'utilisation de sacs en toile de jutes mouillés
recouvrant les casiers d'huîtres semble être la proposition la plus
réaliste dans le contexte actuel dans cette zone ou en Casamance, ces
sacs maintiennent les huîtres dans un environnement de fraîcheur
par évaporation de l'eau.
- Les souillures, les manipulations malpropres, l'exposition
au soleil qui augmente l'imprégnation et la prolifération
bactérienne sont aussi à éviter.
- Les procédés de manutention doivent être
le moins brutal possible pour conserver les bivalves dans un bon état
physiologique favorable à un bon dégorgement ou à une
bonne épuration dans les bassins.
- Entreposer les huîtres dans des glacières
contenant une source de froid étanche ou dans des chambres froides
à une température d'entreposage comprise entre 12°C et
+18°C.
Cette méthode d'entreposage à sec permet de
prolonger la durée de conservation des huîtres de plusieurs jours
voire plusieurs semaines. Les huîtres Sénégalaise vivant
dans les eaux tropicales chaudes (20 à 30°C) doivent être
conservées à une température fraîche et non froide.
- Doter les femmes des pirogues pour augmenter leur production
et leur profit.
- Soutenir les femmes en leur distribuant des matériels
adéquats pour mieux développer la filière huître
dans cette zone.
- Réorganiser la commercialisation (prix) des
huîtres fraîches dans tout le Sénégal.
- Organiser des visites des installations conchylicoles et de
production, et des échanges entre les différents groupements de
femmes productrices d'huîtres.
L'insuffisance de cadres supérieurs dans
l'ostréiculture, et la rareté du financement des programmes de
recherches nationaux et de l'équipement technique des productrices sont
en réalité les vrais facteurs limitant de la production des
huîtres.
Les huîtres prolifèrent sur la petite cote
et dans les régions de Fatick et de Ziguinchor, situées au sud de
Dakar, les gisements naturels se développent dans les immenses bras de
mer abritant de vastes étendues de forêt des
palétuviers.
En dehors de ces zones de productions où elles
sont bien consommées, la place des huîtres dans nos habitudes
alimentaires et culinaires demeure modeste.
Cependant, leur goût très
appréciable attire particulièrement les touristes. Elles
constituent ainsi une source importante de revenus pour les femmes cueilleuses.
Ces dernières parviennent à les écouler au niveau des
hôtels, et des sites à forte influence touristique.
Malheureusement, les huîtres comme tous les autres
bivalves véhiculent plus facilement les germes pathogènes de
l'environnement marin.
Jusque là, très peu de travaux sur la
bactériologie de ces fruits de mer. Et c'est pour combler ce vide que
cette recherche a été menée. Elle a mis l'accent sur
l'étude de la flore pathogène (Salmonelles, Vibrio,
Staphylocoques...), la flore fécale (Coliformes fécaux).
Les analyses bactériologiques effectuées
sur les huîtres et l'eau ont montré une contamination à
100% des échantillons prélevés à Katacalousse par
les bactéries pathogènes responsables des maladies
gastro-entériques chez l'homme après consommation des coquillages
particulièrement les huîtres.
|