La protection de l'intérêt des créanciers
est une condition préalable à la continuation en droit positif
ivoirien. En effet, l'article 470 du code de commerce relatif à la
faillite stipule que la continuation ne s'effectue que lorsque
l'intérêt des créanciers du failli l'exige
impérieusement. Cela signifie que le défaut de prise en compte de
cet intérêt est un cas de refus d'autorisation. Une fois de plus,
l'exigence de cette condition restreint les opportunités de poursuite de
l'exploitation en droit ivoirien.
L'intérêt des créanciers c'est de
poursuivre l'activité pour donner ou maintenir la valeur du fonds de
commerce qui se vendra mieux et générera des fonds pour les
désintéresser. Il s'agir en ce qui les concerne que la poursuite
de l'activité permettra qu'ils soient
désintéressés.8
S'il apparait que l'intérêt de l'entreprise
prend le pas sur celui des créanciers au point de lui nuire, la
continuation ne sera pas autorisée dans la liquidation des biens et elle
sera arrêtée dans le redressement judiciaire.
L'existence des conjonctions de coordination «ou» en
droit positif ivoirien et dans
8 Il faut éviter la dépréciation du fonds
duquel les créanciers ne tireraient qu'un faible prix de vente. Ainsi,
l'autorisation peut être donnée si elle est de nature a accroitre
l'assiette de paiement des créanciers.
le projet OHADA introduit une notion d'alternative, ceci,
pour dire qu'il n'est pas nécessaire que ces intérêts
(intérêts des créanciers et l'intérêt public)
soient pris en compte de façon concomitante. L'existence de l'un de ces
intérêts doit suffire pour autoriser la continuation de
l'activité en droit ivoirien ou encore pour arrêter ou refuser la
continuation dans le projet OHADA. Si l'un ou l'autre des intérêts
est exigé pour l'autorisation de poursuivre, il faut dire que lorsqu'ils
sont tous les deux favorisés par cette poursuite, cela ne pose pas de
problèmes. De même, dans le projet de réforme OHADA, si la
continuation nuit à ces deux intérêts, elle sera
interrompue ou refusée s'il s'agit de la liquidation des biens.
Il faut cependant souligner qu'en droit positif ivoirien, un
problème peut se poser. Que déciderait le tribunal s'il advenait
que l'intérêt des créanciers est en contradiction avec
l'intérêt public? Faut-il poursuivre l'activité en
favorisant un seul intérêt?
Vouloir poursuivre l'activité en ne prenant en compte
que l'intérêt public signifierait par exemple poursuivre une
activité déficitaire parce qu'il serait inopportun de
congédier un personnel trop nombreux. Il est évident que
continuer une telle activité serait néfaste pour la survie de
l'entreprise. L'intérêt public ne peut jamais, à lui seul,
justifier la poursuite de l'exploitation. Cela engendrerait la non
viabilité de l'entreprise. L'on accumulerait alors les pertes sans
intérêts pour personne, pas même pour le personnel qui
serait inévitablement licencié et par conséquent
obligé de se reconvertir lorsque les disponibilités de
l'entreprise seraient épuisées.
En principe, l'intérêt public lorsqu'il se
révèle contraire à l'intérêt des
créanciers ne devrait pas être pris en compte pour autoriser la
continuation. La solution selon nous, consiste en un examen des
intérêts en présence et non pas à trancher la
question de façon absolue. Il appartiendra au juge d'analyser et de
confronter les intérêts en présence et de décider
utilement.
S'il apparait par exemple que le matériel (qui est le
seul élément conférant au fonds de commerce sa valeur)
risque d'être détruit par la cessation de l'activité et que
les créanciers refusent la continuation, le tribunal sera presque
obligé d'autoriser la poursuite de l'activité. Loin de
généraliser les solutions, l'on devrait étudier de
façon spécifique chacun des cas, en mettant en relation les
intérêts en présence et en les évaluant afin de
déterminer lesquels justifient ou motivent une continuation.