L'attitude de l'enseignant institutionnalisé
C'est la première fois que cette étudiante
effectue les transmissions orales dans le service et l'infirmière lui
donne les consignes avant qu'elle ne s'adresse à moi.
-« Donc, en fait, là, l'infirmière
ne connait pas du tout les patients, alors il va falloir que tu lui donne comme
une vidéo de ce que tu sais sur les patients depuis leur entrée
dans le service jusqu'à aujourd'hui. En gros, tu résumes dans les
grandes lignes en parlant de tout ce qui est important pour arriver à ce
matin et les problèmes du jour. C'est comme une présentation d'un
patient en MSP (mise en situation professionnelle) mais t'as 2 minutes pour le
faire. Vas-y, c'est à toi. »
L'étudiante commencera par faire un exposé
long, très long, trop long qui sera repris par l'infirmière pour
lui montrer comment elle aurait dû synthétiser. Ensuite,
l'exposé du jour sera repris également car comportant des
manques. Par la suite, l'infirmière ne devra reprendre
l'étudiante que de loin en loin et n'apportera que quelques ajouts
relevant plus des spécificités du service que des
capacités de synthèse et d'analyse de la situation
médicale des patients. Enfin, l'étudiante sera
félicitée et encouragée à poursuivre dans ce sens
pour les jours suivants.
« L'enseignante» a beau être une
professionnelle de l'éducation, le premier jour est un jour à
part où maîtresses comme élèves attendent beaucoup
l'un de l'autre. Dans la situation qui suit, il semble que la
cérémonie de la rentrée ait été
tronquée, mettant « l'enseignante » dans une
situation éprouvante et in fine déteignant sur
l'étudiante. L'infirmière doit en effet à la fois
évaluer les acquisitions et à la fois enseigner le plus possible
de nouveaux actes à l'actif de l'étudiante. Le fait de demander
directement à l'étudiante ce qu'elle sait ou ne sait pas est
abrupte et peut biaiser la relation en mettant l'étudiante en port
à faux mais, sans autre moyen, il semble difficile que le contact
s'établisse autrement. C'est donc dans la peur que l'étudiante
effectue un nouvel acte, apprenant ainsi également, mais de
manière informelle, la gestion du stress. La difficulté
liée à l'impossibilité d'effectuer un accueil suffisant
à sept heures ajoute à l'effet tronqué que donne cette
situation si nous l'apposons à une rentrée des classes
institutionnelle d'école.
La rentrée des classes
C'est le premier jour de cette étudiante en
début de deuxième année et cela fait à peine une
heure qu'elle est dans le service. L'infirmière qui la prend en charge
ce matin-là, lui demande si elle sait préparer des perfusettes de
traitement intraveineux. Devant la réponse négative, elle lui
propose donc de lui montrer une fois en lui expliquant ce qu'elle doit faire
puis elle essayera ensuite :
« Alors, comme pour tout soin, l'hygiène
est essentielle et ici il s'agira de garder le produit stérile
jusqu'à l'injection au patient. Pour cela, l'essentiel à retenir
est de ne toucher à rien ! Regarde ! »
L'infirmière montre alors les gestes de sa pratique
courante en précisant à chaque geste les raisons qui la poussent
à manipuler précisément ainsi en raison des risques
liés à l'aspect stérile de la préparation :
rester loin des points d'injection, poser les mains le plus loin possible des
produits, ouvrir les produits sans toucher l'intérieur, éviter
à l'air de rentrer dans le système clos de transfert du produit
reconstitué par l'utilisation de la double membrane de la chambre
implantable de la solution de perfusion... Après quelques minutes, elle
demande à l'étudiante d'essayer.
Celle-ci tremble, commence à essayer de reproduire
les gestes vus, mais commet des erreurs. Elles sont reprises par
l'infirmière, corrigées, expliquées et, après deux
essais, l'étudiante a réussi la reconstitution du produit sans
erreur rédhibitoire et semble soulagée, émettant un grand
soupir à l'assentiment de l'infirmière.
L'éducation par les pairs n'est pas oubliée,
lorsque la seule différence se situe sur une pratique gestuelle à
transférer un peu comme un élève montre à un autre
ce qu'il doit faire dans le self car il vient juste d'arriver et ne connait que
la cantine où il n'avait pas à se servir jusqu'ici. Dans
l'exemple qui suit, l'étudiante semble avoir acquis la maîtrise
des gestes d'hygiènes requis en troisième année et
l'infirmière se place plutôt dans une attitude de tutorat telle
qu'elle pourrait l'adopter avec un nouveau membre de l'équipe pour lui
apporter une expertise sur un soin acquis dans la plupart des situations mais
demandant des spécificités dans ce cas précis :
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