B- Le rituel Ku'ngang
Le rituel Ku'ngang est lié à son
initiation. Cependant, certains rites sont pratiqués en public à
titre démonstratif ou folklorique tandis que l'essentiel se fait
très secrètement. Parmi les rituels du Ku'ngang
pratiqué en public, l'on peut citer la fécondité, la
défense et la protection contre les esprits maléfiques et celui
de la répulsion des épidémies qui ne se pratique jamais
à visage découvert. Le costume se présente comme un
élément indispensable de la concentration des forces dont ont
besoin les officiants et les participants.
La pratique intrinsèque du rituel Ku'ngang
reste inaccessible au non initié. Cependant, il nous a été
révélé qu'en cas d'épidémie dans le village,
tous les clans se réunissent à un endroit retiré au coeur
de la forêt pour un conseil de crise. La dizaine de jours qu'ils y
passent est faite de privations, de méditation, de concertation et de
quête. Ils sont à la quête des plantes rares dont la mixture
associée à d'autres poudres magiques repoussera
l'épidémie ou la force y relative. Une fois la potion
apprêtée, les membres sortent de la forêt à la file
indienne et vont nuitamment aux limites et aux grands carrefours du village
pour asperger le produit en proférant des incantations et d'autres
paroles magiques. C'est le rite Tchoua-tcha'a à l'issu duquel
ils pratiquent la danse rituelle.
Le plus grand rite du Ku'ngang est une biennale qui
débouche sur la célébration du Ngou'
Nekang11, cérémonie pendant laquelle les
différents clans bénissent le village et le protègent des
mauvais sorts. Préalablement, chaque patriarche convoque toute sa
descendance âgée de moins de cinq ans pour les préparer. Il
s'agit de les faire asseoir tous à la manière du
Lotus12 avec les doigts croisés à la hauteur de la
poitrine. Le patriarche applique sur chaque ongle une mixture faite de plantes
séchées et d'une poudre d'écorce broyée, le tout
mélangé à de l'huile de palme. Chaque enfant doit ainsi
lécher ses ongles à tour de rôle sans décroiser les
doigts. Tous les fils du village doivent subir ce rite de
protection13 de peur d'être attaqué par les mauvais
esprits qui seront chassés pendant le rite du Nekang.
Ce rite en lui-même se prépare toujours en
forêt et chaque membre du Ku'ngang reçoit sa part de
potion magique dans un petit sac fait en fibre de raphia dont l'ouverture est
condamnée. Chacun fait serment de ne rien y ajouter, encore moins d'en
retrancher et de ne l'utiliser que pour du bien. Ce sont ces petits sacs qui,
en plus des masques cagoules revêtus, lors des sorties sur la place
publique, seront tapés sur la tête des spectateurs dans le but de
chasser les mauvais esprits et de guérir les maladies de toutes sortes.
En bref, chacun reçoit proportionnellement selon son problème et
le voeu émis. Toutefois, les spectateurs doivent absolument
éviter de rentrer en contact direct avec le costume in situ car il
regorge des forces sensibles.
Il existe pendant cette séance de guérison
publique, une autre activité menée par une classe
supérieure des membres, la classe des superviseurs
généraux. Ceux-ci, très puissants, font une percée
en forêt pour repérer les lianes magiques qu'ils enroulent autour
des reins. Il faut être doté de leur pouvoir et surtout
d'intentions positives pour les retrouver sinon, on passerait devant elles
à longueur de journée sans les apercevoir. Ces lianes leur
donnent le pouvoir, pendant la danse, de détecter les membres qui
auraient troqué leur sac à un autre ou qui y aurait ajouté
une substance maléfique. Quand un coupable est identifié, il est
immédiatement désavoué et banni du clan et de la
société secrète. Le rituel du Ku'ngang se
poursuit de manière restreinte chez chaque membre qui exerce selon son
rang et le pouvoir qu'il détient.
Il est à noter en somme qu'au sein de cette
confrérie, tout le monde n'a pas la même force ou la même
puissance, ni le même rang. Ceci nous amène à aborder
l'organisation interne de la confrérie Ku'ngang.
|