I - PETIT RECIT
REFLEXIF
Quel parcours initiatique !
Le mémoire est presque terminé ! Qu'il est
bon parfois de se poser et de regarder en arrière...
Après la réussite du concours cadre de
santé, mon collègue, formateur chevronné, m'a
régulièrement incitée à commencer quelques
recherches sur un sujet éventuel que je souhaitais traiter dans mon
mémoire. J'y avais donc réfléchi, trouvé quelques
documentations, discuté. Puis, on nous demande d'écrire
(enfin !) notre constat. Après quelques dizaines de versions, j'en
arrive à un constat traitant de la perception du rôle du
formateur. Finalement, il fût différent de ce que je pensais
traiter quelques mois auparavant. Si je recherche la raison de ce changement,
les remaniements successifs de l'écrit m'ont, dans le fond, emmener sur
un terrain qui était plus ou moins toujours présent dans mon
esprit, qui me tient à coeur, qui me guide dans la vie
professionnelle.
La première idée se voulait finalement
très cadrée, dans les clous comme on dit, pour faire bien. Mieux
comprendre les autres et mieux se comprendre soi, base de relations de
confiance, de partage et de projection vers l'avant. Voilà ce que m'a
apporté non seulement ce travail mais aussi tout ce qui s'est
passé autour : les démarches, les entretiens, les
échanges avec mes pairs. Quels apprentissages !
Jamais je n'aurai pensé approfondir à ce point
un concept sociologique tel que les représentations sociales. Jamais
encore, je n'aurais imaginé qu'il puisse engendrer une réflexion
si importante sur ma fonction de cadre de santé ou même mieux,
qu'il puisse m'être aussi utile dans mes pratiques professionnelles.
Puis me voilà plongée dans les méandres
complexes et sans fins de la professionnalisation ou de l'acquisition des
compétences professionnelles. Certes, l'année
préparatoire, l'année de faisant fonction font aborder ces
concepts sur leur intérêt pour les étudiants
bien-sûr, sur leur appropriation par le formateur quelques peu, sur le
besoin de les approfondir à peine. Ces passages de vie professionnelle
auront tout juste servi à alimenter des représentations de ces
concepts solidement défendues par les éléments
périphériques.
D'un constat et de nombreux échanges avec mes
collègues étudiants cadres, je me pose une question : qu'est
ce qui fait dire toutes ces choses aux personnes avec qui on travaille dans un
même but, porter des soins aux patients. Qu'est ce qui leur fait dire
« ils sont complètement à côté de la
plaque », « ils ne sont pas dans la
réalité » ? J'ai une réponse : la
représentation sociale. La même que je me faisais sur ces concepts
développés dans ce travail. J'oserai dire peu importe les
concepts traités ici. S'il y a bien une chose que je retiens de ce
parcours initiatique à la recherche, c'est que l'on n'apprend pas en
lisant, en écoutant les paroles d'Hommes d'expériences ou plus
cultivés. On ne réfléchit pas pour
réfléchir. On apprend en faisant, en tâtonnant, en
confrontant notre réflexion à celle des autres. Là
interviennent le directeur de mémoire et la formatrice
référente, même LES formatrices. Apporter des
réponses sans les donner, tel a été leur rôle
d'accompagnateur dont j'espère m'inspirer. On bouscule nos
représentations en faisant. - Que de représentations j'ai
bousculées ! - On réfléchit dans et sur l'action pour
mieux se connaître soi et développer ce qui fait de nous un
professionnel capable d'amélioration et d'ouverture.
Prendre conscience de ses représentations est un point
de départ essentiel à toute progression sociale. Toute une vie ne
sera pas suffisante à cela car les représentations, tenaces, nous
guident, elles nous résistent. Ce travail ou devrais-je dire cette
oeuvre (sans aller jusqu'à chef d'oeuvre !) m'a conforter dans mes
valeurs. Nous ne pouvons forcer les gens à changer, le cadre de
santé ne peut forcer les gens à changer, d'ailleurs, qui est-il
pour prétendre à cela ? , mais nous pouvons nous regarder et
plutôt que de dire « tu ne comprends pas ce que je veux
dire », pourquoi ne pas se dire « comment je peux
m'y prendre pour que tu comprennes ce que je veux dire ? »
C'est dans la co-construction des relations avec l'autre que l'on parviendra
à répondre à nos questions.
Travail de mémoire, passage obligatoire pour un
diplôme, certes. Mais au-delà, c'est un moment de vie,
d'apprentissage sur soi même, ses compréhensions, ses
incompréhensions, ses doutes, ses fiertés. J'aurais pu aborder
les compétences sous leur aspect individuel et collectif, les principes
en long et en large des systèmes d'alternance, l'entretien
d'explicitation, l'universitarisation des diplômes paramédicaux
(s'il n'est pas encore un concept, il pourrait le devenir) ou encore la
responsabilité dans la formation, le principe d'autonomie, le
partenariat, l'accompagnement, la motivation, etc. j'en passe et des
meilleures. Mais voilà tout l'intérêt de la méthode
empirique. Elle m'a guidée, je me suis laissée entrainer tout en
affirmant mon appétence pour telle ou telle voie. Peut-on m'en vouloir
pour cela ? Comme je le disais, à la limite, peu importe des
concepts traités, ce travail est soi sans aller de soi, il est
réflexion sur la profession sans prétendre dévoiler toutes
les réponses, il n'est pas tout mais que parti des compétences
professionnelles du cadre de santé, en clair, il est la prémisse
de l'acquisition d'une posture de praticienne réflexive visant à
accompagner vers la voie difficile de la professionnalisation.
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