SECONDE PARTIE.
LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION RURAUX EN
CAS DE DISPARITION TOTALE OU PARTIELLE DE L'EXPLOITATION AGRICOLE
Lorsqu'il apparaît que le redressement de l'entreprise est
impossible, le tribunal prononce la liquidation judiciaire.
À l'heure actuelle la liquidation judiciaire est la
procédure la plus utilisée : le rapport de Monsieur De Roux fait
au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale
43 le démontre :
- 90 % des procédures ouvertes se soldent par une
liquidation judiciaire ; - les procédures de liquidation judiciaire
durent en moyenne 4 ans.
Ce constat a été à l'origine de la loi sur
la sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005.
La liquidation judiciaire consiste à « mettre
fin à l'activité de l'entreprise ou à réaliser le
patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée
de ses droits et de ses biens » 44.
La liquidation judiciaire a pour but d'organiser la cession des
biens du débiteur afin de tenter de réaliser le passif.
Il existe deux techniques pour céder les biens du
débiteur : - la vente des biens par un plan de cession ;
- la vente des biens en ordre dispersé.
A. LES PRINCIPAUX EFFETS DU JUGEMENT OUVRANT UNE
PROCÉDURE DE LIQUIDATION JUDICIAIRE
Afin de traiter au mieux les différentes questions de ce
mémoire, il convient de rappeler les principaux effets de la liquidation
judiciaire.
43 Rapp. X. De Roux, au nom de la commission des
lois de l'Assemblée nationale : Doc. AN 2005, n° 2095.
44
C. com., art. L. 640-1.
1. La nomination d'un liquidateur judiciaire
Le jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation
judiciaire entraine la nomination d'un administrateur judiciaire. Ce dernier
est, sauf cas exceptionnel, celui qui a exercé les fonctions de
mandataire judiciaire pendant la période d'observation.
Ses missions sont codifiées aux articles L. 641-4 et
suivants du Code de commerce, les plus importantes sont :
- la liquidation des actifs de l'entreprise ;
- la plupart des missions dévolues antérieurement
au mandataire et à l'administrateur judiciaire.
2. Le dessaisissement du débiteur de ses
pouvoirs
Le jugement de liquidation judiciaire entraîne de plein
droit un dessaisissement des droits du débiteur sur ses biens en vertu
de l'article L. 641-9-I du Code de commerce, qui dispose :
« Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation
judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement
pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens
même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que
la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et
actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés
pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur.
»
Son effet porte sur la quasi totalité des biens et
interdit le débiteur d'accomplir tout acte d'administration ou de
disposition sur ses biens.
Il est à noter que le débiteur est dessaisi
et non frappé d'incapacité. Cette différence
est fondamentale : les actes faits en violation de cette interdiction ne sont
pas nuls mais inopposable aux créanciers de la procédure
collective 45.
Le résultat peut choquer : la vente d'un immeuble
à un débiteur en liquidation judiciaire au mépris de la
règle du dessaisissement ne sera pas annulée mais l'acheteur
45
Cass. com., 19 mai 2004 : JCPE
2004 n°5, p. 1292, obs. M. Cabrillac.
ne pourra être payé sauf en cas de retour à
meilleure fortune du débiteur après la clôture de la
procédure.
Il sera intéressant de déterminer si un preneur en
liquidation judiciaire peut exercer sans l'accord du débiteur son droit
de préemption.
Pour étudier le sort des droits de préemption
nous suivrons l'ordre du Code de commerce en étudiant en premier le sort
des droits de préemption ruraux lors d'un plan de cession puis leur sort
en cas de cession en ordre dispersée des actifs immobiliers à
vocation agricole.
|