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La preuve sur internet: le cas de la vente en ligne

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par Kouadio Pacôme FIENI
Université de Cocody-Abidjan - D.E.A. 2006
  

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SECTION 2 : LA LOI APPLICABLE AUX REGLES DE PREUVE DE NATURE SUBSTANTIELLE

369. Précision terminologique. Avant tout développement, une précision d'ordre terminologique s'impose, à l'effet de cerner les contours de la nature substantielle des règles de preuve. En effet, le terme de « substance » n'a pas le même sens en droit civil et en droit international privé. En droit civil, la notion de « substance » désigne généralement le fond du droit.

370. En droit international privé, par contre, la notion renvoie aussi bien au fond du droit stricto sensu qu'à la forme262(*). De fait, il s'oppose à la procédure263(*). Les règles de procédure, par essence, ont vocation à déterminer les formalités à suivre pour soumettre une prétention au juge.

371. A la différence des règles de nature processuelle, les règles de nature substantielle déterminent les conditions d'existence, le domaine et les causes d'extinction des droits subjectifs. Aussi, les deux catégories de règles ne sauraient-elles faire l'objet de confusion.

372. Caractère substantiel des règles de preuve. Cependant, il peut paraître surprenant, au regard de la finalité reconnue aux règles de nature substantielle, que les règles de preuve puissent elles-mêmes revêtir un caractère substantiel. N'affirme-t-on pas souvent que la preuve d'un droit se distingue du droit lui-même ?

373. Cette distinction ne doit pas faire illusion ; car même si elle s'en distingue, la preuve sert incontestablement à établir le fond du droit264(*). Ainsi, aussi bien pour les dispositions relatives à l'admission des procédés de preuve, dans une certaine approche du moins, que pour les principes régissant la charge de la preuve, les règles de preuve se trouvent intimement liées au fond du droit. La détermination de la loi applicable sera fonction de l'étendue du lien qui unit la preuve au droit265(*). Dans cette perspective, la charge de la preuve dépendra, par principe, de la loi du fond (I), et l'admission des modes de preuve, sous réserve de ce qui a été énoncé précédemment, de la loi de la forme (II).

I : L'application de la loi du fond à la charge de la preuve

374. Certaines règles de preuve apparaissent comme « le complément indispensable de la règle de fond »266(*). La preuve apparaît, à cet égard, comme une modalité du droit chaque fois qu'il s'agit de déterminer le plaideur sur lequel pèse la charge de la preuve. Se rattachant de très près à la substance du droit, cette question relève également, en cas de litige se rapportant à la matière comportant un élément d'extranéité, à la loi du fond. L'application de la loi du fond s'appréciera tant au regard de la distribution de la preuve (A) qu'au regard de sa redistribution (B).

A- Le rattachement de la distribution de la preuve à la loi du fond

375. C'est l'article 14 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles qui appelle les présomptions légales et règles répartissant la charge de la preuve à être assujetties à la loi du contrat267(*). La doctrine dominante semble approuver ce rattachement du fardeau de la preuve à la loi régissant le fond de la question litigieuse268(*).

376. Analyse d'Eric FONGARO. Reprenant à notre compte les développements d'Eric FONGARO, dans son ouvrage sur la loi applicable à la preuve en droit international privé, nous pouvons énoncer que, traditionnellement, la doctrine internationaliste, analysant la charge de la preuve comme un aménagement du droit, estime que la matière doit être rattachée à la loi régissant le fond de la question litigieuse. De ce fait, les auteurs semblent adopter une vision réductrice de la charge de la preuve, limitée à la seule notion de risque de la preuve.

377. M. FONGARO indique qu'une explication téléologique des dispositions de l'article 1315 du Code civil permet de justifier le rattachement de la matière à la loi du fond. Instrument privilégié de la technique au service de la politique juridique du législateur, l'infléchissement de la règle de preuve, accessoire et complément indispensable de la règle de fond, permet de poursuivre en douceur les fins du droit. Il en découle qu'il appartient à la loi du fond de désigner le plaideur devant perdre le procès faute d'éléments suffisants de conviction pour le juge.

378. M. FONGARO constate, cependant, que « cette vision de la charge de la preuve est quelque peu réductrice ». En effet, préalablement à la détermination du plaideur devant perdre le procès si la vérité n'est pas établie, il est nécessaire de savoir qui, du demandeur, du défendeur ou du juge, doit réunir les divers éléments de preuve ; ce que certains ont pu désigner sous le vocable de « charge positive de la preuve ». Or, conclut-il, tant la charge pesant sur le demandeur à la preuve, que celle pesant sur le défendeur à la preuve, sous-tendue par l'idée de la recherche de la vérité, sont de nature procédurale.

379. Application de la solution à la vente en ligne. En définitive, et adhérant à la thèse d'Eric FONGARO, la conclusion suivante s'impose s'agissant des conflits de lois relatifs à la charge de la preuve : s'il revient à la lex fori de déterminer qui, de l'acheteur ou du vendeur dans le litige à propos d'une vente en ligne, doit réunir les divers éléments de preuve, il appartient à la loi du fond de désigner le plaideur qui perdra le procès faute d'éléments suffisants de conviction pour le juge.

Intéressons-nous, à présent, à l'analyse des règles relatives à la redistribution du fardeau de la preuve.

B- Le rattachement de la redistribution de la preuve à la loi du fond

380. La redistribution de la charge de la preuve s'opère par le biais des présomptions légales. En principe, la charge de la preuve pèse sur le demandeur à l'instance. Nous ne rappellerons pas la règle universelle actori incumbit probatio qui consacre cette idée. Cette règle, bien assise, peut être parfois remise en cause par l'effet de présomptions instituées par la loi. Ces présomptions vont opérer une «redistribution des cartes». Ainsi, la charge de la preuve, au lieu de peser sur le demandeur à l'instance, va se transporter sur le défendeur.

381. Critères proposés pour la détermination de la loi applicable. Traditionnellement, la charge de la preuve est rattachée à la loi du fond. Cependant, en ce qui concerne les présomptions légales, des critères sont énoncés pour déterminer la loi applicable. Certains mettent en avant le critère de la finalité de la présomption, d'autres celui de la portée de ladite présomption.

382. Selon le critère choisi afin de déterminer la nature des présomptions légales, les résultats obtenus sont diamétralement opposés. Si, compte tenu de leur finalité, celles-ci s'avèrent de nature substantielle et devraient, en conséquence, être rattachées à la lex causae, en raison de leur portée, c'est au contraire un rattachement de principe à la loi du for qui devrait s'imposer. Partant, la question se pose de savoir lequel de ces deux critères doit emporter la préférence.

383. Critère retenu. Nous penchons pour la détermination de la nature des présomptions légales en raison de leur finalité, car ce critère a le mérite de la cohérence. Prenant en compte l'ensemble des présomptions, il fait l'économie de subtiles distinctions entre présomptions irréfragables et présomptions simples. Il faut en conclure, qu'en raison même de sa finalité, toute présomption légale, « quelle que soit sa résistance à la contestation »269(*) ne peut relever que de la loi du fond.

384. La conséquence majeure de ce rattachement s'exprime au regard de la qualification des présomptions. Régies toutes par la même loi, c'est la lex causae qui dira si les présomptions légales qu'elle institue sont irréfragables, simples, ou succombent devant certains moyens de preuve déterminés270(*). C'est d'ailleurs sur cette voie que s'engage la jurisprudence271(*), n'admettant l'empire de la loi du juge saisi que si la loi du fond normalement compétente heurte l'ordre public international de ce dernier272(*).

385. Si dans le cadre de la détermination de loi applicable aux règles de preuve de nature substantielle, la loi du fond gouverne la charge de la preuve, la loi de la forme, pour sa part, va régir l'admission des procédés de preuve.

* 262 André HUET, Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., p. 9, n° 1.

* 263 Eric FONGARO, La loi applicable à la preuve en droit international privé, Paris, LGDJ, 2004, p. 9, n° 13.

* 264 Ibidem. Un droit qui ne pourrait être prouvé parce qu'un moyen de preuve ne serait pas admissible ou n'aurait pas force probante, serait privé de toute effectivité. En outre, certaines règles de preuve, bien que ne servant pas directement à établir un droit, constituent des aménagements de ce droit ; il en va de la sorte lorsque la loi délimite les faits qu'une personne doit prouver afin de se prévaloir d'un droit subjectif, ou lorsque le législateur détermine le plaideur qui devra succomber si la preuve d'un tel droit n'est pas établie.

* 265 André HUET, Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n° 9.

* 266 Jean DEVEZ, « Contribution à l'étude de la charge de la preuve en matière civile », thèse, Toulouse, 1980, p. 596, n° 456.

* 267 Jacques FOYER, « Entrée en vigueur, de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles », JDI 1991, p. 618, n° 51 et s.

* 268 Pierre ARMINJON, Répertoire de droit international (de LAPRADELLE et NIBOYET), t. X, p. 310 et s., V° Preuves ; Bernard AUDIT, op. cit., n° 706 ; Yvon LOUSSOUARN et Pierre BOUREL, Droit international privé, op cit.

* 269 André HUET, Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., p. 164, n° 129.

* 270 Ibidem, p. 165, n° 130.

* 271 TGI de Paris, 12 juillet 1982, D. 1983, p. 200, note AUDIT ; Rev. Crit. DIP 1983, p. 461, note SANTA-CROCE ; JDI 1983, p. 374, note HUET - Civ. 1re, 4 novembre 1958, Rev. Crit. DIP 1959, p. 303, note FRANCESCAKIS ; JDI 1959, p. 788, note AP.

* 272 André HUET, « Procédure civile et commerciale dans les rapports internationaux (DIP) », J-Cl. International, Fasc. 582-20, n° 45 et les références.

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