III Apport pronostique : Evaluation du risque
hémorragique et de l'évolution lésionnelle sous traitement
thrombolytique.
1) Apport pronostique de l'ADC
Les services de neurologie et d'imagerie des Cliniques
Universitaires Saint-Luc (UCL) ont également participé à
l'évaluation de l'imagerie de diffusion comparées aux autre
séquences d'IRM à la phase hyper aiguë de l'AVC (dans les 6
premières heures). A partir d'une série de 57 patients, la
précision diagnostique de l'imagerie de diffusion était de 95%
avec une sensibilité et une spécificité de 89% et 92%, des
valeurs prédictives positive et négative de 97 et 70%.
L'ADC a d'abord été mesuré dans des zones
considérées normales, controlatérale à la zone
ischémiée. Calculée à partir de 21 cas, les
valeurs moyenne de l'ADC pour les différents patient ont
été comparés. Ces mesures permettaient de mettre en
évidence de très importantes
hétérogénéités intra-lésionnelles et
de très larges écart type.
L'hétérogénéité des valeurs d'ADC pourrait
être due à des artefacts de mesure. En effet, la zone
d'intérêt peut être contaminée par la présence
de substance grise, de vaisseaux... Ainsi, dans des zones dites saines, des
écarts types de #177; 20% étaient constatées. Mais
l'hétérogénéité des valeurs de l'ADC peut
aussi être la conséquence de
l'hétérogénéité des lésions
tissulaires et de l'évolution différente des lésions dans
le temps. Les écarts types constatées pouvaient ainsi atteindre
individuellement 48%. D'autres études démontrent que la zone
ischémiée est constituée de composantes à ADC
réduit, normal mais aussi plus élevé, ces dernières
permettant de mettre en doute la notion de coeur (nécrose) et de zone de
pénombre et donc de remettre en cause le modèle
physiopathologique de l'infarctus cérébral. La mesure d'un ratio
d'ADC (appelé ADCr) entre la zone ischémiée et la zone
controlatérale apporterait plus d'informations. Ces études ont
montré chez leurs patients une évolution clinique satisfaisante
pour des valeurs d'ADCr supérieures à 0,77 et un mauvais
pronostic pour des valeurs inférieures à 0,59. La mesure de
l'ADCr serait donc le marqueur de la gravité des lésions
ischémiques et permettrait de prévoir l'évolution de la
maladie.
Une autre étude [2] cherchait à
déterminer un seuil d'hypoperfusion à partir duquel une baisse
d'ADC serait visible ainsi qu'une potentielle corrélation entre
débit sanguin cérébral relatif (DSCr) et ADC.
L'hypothèse était que la baisse d'ADC n'évolue pas de
façon linéaire avec le DSCr : l'ADC demeurant normal
jusqu'à un certain niveau d'hypoperfusion, puis étant
légèrement diminué dans la zone de pénombre, et
enfin chutant brutalement dans la zone d'hypoperfusion sévère au
dessous d'un seuil de débit. Ainsi, une relation de forme sigmoïde,
entre ADC et DSCr serait possible. Les observations réalisées au
CHU de Caen portent sur 7 patients ayant eut une IRM en moyenne 6h (min 4h -
max 10h) après les premiers signes cliniques. Pour les patients
plusieurs zone d'intérêt (ROI) ont été défini
pour la zone d'infarctus (et pour la zone de mismatch).
Cette étude prouva que la relation entre diffusion et
modification de perfusion est non linéaire et qu'une diminution d'ADC
est significativement visible pour une diminution de la perfusion d'au moins
50%. Ces résultats, bien qu'ils soient en accord avec de ceux
d'études menés sur des animaux, n'ont été obtenus
qu'à partir d'un faible échantillon de patients.
L'étude de J.B. Pialat [7] inclus 52 patients. Des IRM
ont été effectués à J0 (à moins de 7h
après les premiers symptômes) , J1 (pour contrôler l'effet
de la thrombolyse) et à J60. Tous les patients ont été
traités par un activateur recombinant du plasminogène ou rt-PA
(traitement classique de l'AVC, voir feuille annexe).
Le risque hémorragique étant majoré par
la thrombolyse, il doit être évalué avant la mise en route
du traitement. Son analyse de l'ADC a été effectuée dans
la zone de mismatch. Il a classé les pixels en plusieurs classes en
fonction de leur ADC en comptant le nombre total de pixels (nombre absolu de
pixels) et en rapportant ce nombre au nombre total de pixels dans la
lésion (pourcentage de pixels). En pourcentage de pixels il trouva une
différence significative pour les classes de pixels d'ADC <
250×10-6 mm3.s-1. Il existe donc un seuil
au dessous duquel le risque hémorragique est plus élevé en
cas de traitement (50% de transformation hémorragique). Dans ce cas
également, il n'y a pas de différence d'ADC en valeur absolu
entre les patients ayant une hémorragie et ceux n'en ayant pas. Mais
dans cette étude, l'explication pourrait provenir du fait que les
volumes des lésions sont différent pour ces deux populations. En
effet, les volumes sont de 107,31 #177; 34,22 cm3 pour le groupe
ayant une hémorragie et de 79,79 #177; 53,47 cm3 pour le
groupe sans hémorragie. L'auteur indique que « cette
différence est sensible même si elle n'est pas
significative (p=0,074). Le fait que le volume soit plus important noie
les pixels d'ADC bas dans les pixels de valeur plus élevée
». Ainsi, le risque hémorragique pourrait simplement être
corrélé à la taille de la lésion. En fait cette
notion existe déjà puisque les hypodensités
étendues visible au scanner à J0 sont une contre indication
à la thrombolyse et au traitement anticoagulant. Le risque
hémorragique peut donc être approché par l'ADC, mais un
seuil valable pour tous les patients et dans tous les hôpitaux ne peut
être déterminé avec un si petit échantillon de
valeurs. Cependant la mesure de l'ADC reste un outil intéressant pour
évaluer le volume de nécrose à la phase hyper aiguë
de l'AIC. Par ailleurs, il a déjà été prouvé
qu'il y a une répartition « en bulbe d'oignon » des
valeurs d'ADC (très basses au centre des lésions et de plus en
plus élevées en allant vers la périphérie). Ainsi
certaines études (comme l'étude faite par les UCL) montrent qu'il
est possible d'établir une valeur seuil d'ADCr compris entre 70 et 80%.
L'ensemble de ces études montre donc que l'ADC semble
généralement diminuer en cas d'AVC. En effet l'ADC diminue pour
toute diminution de perfusion d'au moins 50%. Cependant l'ADC peut rapidement
varier au cours du temps pour un même individu et de nombreux cas de
baisse d'ADC non significatif ont été rapportés. Cela en
fait un paramètre inexact pour l'évaluation de l'évolution
de l'AVC. Cependant, l'ADCr (ratio entre la région
ischémiée et la région controlatérale) est un
indicateur plus sur du devenir de la nécrose et du risque
hémorragique. Aucune étude de grande envergure n'a établi
de valeur seuil pouvant être appliquée dans tous les centres
d'urgence, mais une valeur seuil entre 70 et 80% semble ressortir.
Il est classiquement admis que le coefficient apparent de
diffusion est réduit les premiers jours de l'infarctus, puis augmente
par la suite (pseudo normalisation), pour devenir hyper intense pendant la
phase de chronicité. L'analyse transversale de multiples étude
démontre [9] une réduction maximale du coefficient de diffusion
apparaît en moyenne 33 heures après la survenue des signes
cliniques, reflétant degré d'ischémie. Ceci permet de
distinguer trois phases d'infarctus, hyperaiguë (moins de 6h),
subaiguë (4 à 10 jours), et chronique. Cette progression naturelle
(patients non traités) est variable en fonction des études. Cette
variabilité peut provenir des différentes techniques
utilisés et/ou d'une possible reperfusion précoce :
- dans les premières heures : la zone
ischémiée (oedème cytotoxique) est en hyposignal alors que
le T2 est normal
- au bout d'une semaine : pseudo-normalisation, disparition de
l'hyposignal ;
- cicatrice, séquelle : hypersignal (augmentation de
l'eau extracellulaire au sein de la cicatrice qui correspond donc à une
augmentation du coefficient de diffusion).
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