II - LES CONTOURS THEORIQUES
DE LA RENTABILITE DES ACTIFS
Le secteur financier est essentiel pour assurer une
économie saine et vigoureuse répondant aux besoins et aspirations
des principaux acteurs économiques. Il remplit un large éventail
de fonctions importantes pour l'économie. Les exigences des acteurs
économiques ont conduit à de nombreuses mutations au niveau des
prestations.
La rentabilité d'une banque représente son
aptitude à dégager de son exploitation des gains suffisants,
après déduction des coûts nécessaires à cette
exploitation, pour poursuivre durablement son activité. Elle est issue
du processus de transformation au sens large (telles que sur les contreparties,
les taux d'intérêt, les devises ou les échéances)
mis en oeuvre par les banques commerciales dans le cadre de leur fonction
d'intermédiation.
1- Mesure de la
rentabilité des actifs
Les autorités bancaires
utilisent plusieurs instruments d'appréciation de la rentabilité.
Il est utilisé dans cette étude l'approche qui comprend
l'ensemble des ratios d'exploitation calculés afin de mettre en
évidence les structures d'exploitation. Il est retenu le coefficient de
rendement (return on assets, ROA) qui exprime de
façon assez globale le rendement des actifs.
L'inconvénient de sa référence au total de bilan est
qu'elle ne fait aucune différence entre les actifs
malgré les risques non convergents. Il a l'avantage de mieux exprimer la
rentabilité économique des banques pour un apport dans le
financement de l'économie.
En janvier 1993 les banques doivent respecter un ratio
de 8% entre le total de leurs actifs (pondérés par le risque de
non recouvrement des créances) et leur fonds propres. Il s'agit d'un
ratio de solvabilité qui contraint les banques à réduire
leur crédit et/ou à augmenter leur fonds propres. Un nouveau
ratio prudentiel est en cours d'adoption : il s'agit du ratio Mac Donough. Le
rendement des actifs est égal au résultat net sur le total des
actifs.
2- Les déterminants
de la rentabilité des actifs
Les facteurs organisationnels susceptibles d'expliquer la
rentabilité des banques sont constitués des charges
d'exploitation bancaire, des crédits bancaires et des capitaux propres.
Quant aux facteurs macro-financiers, ils incluent la taille du secteur
bancaire, la concentration bancaire. Deux variables exogènes d'ordre
macro-économique ont été sélectionnés comme
déterminants potentiels de la rentabilité des actifs. Il s'agit
de la croissance économique et du taux d'inflation. Finalement, les
variables réglementaires notamment le ratio de solvabilité (ratio
de couverture des risques) et le ratio de liquidité sont retenus.
La théorie économique et les études
empiriques existantes divergent souvent sur l'impact de certains facteurs
organisationnels sur la rentabilité des actifs. Alors que la
théorie économique insiste sur l'effet négatif des frais
d'exploitation bancaire sur la profitabilité, certaines études
empiriques soutiennent plutôt que l'impact peut être positif dans
la mesure où les frais d'exploitation boostent la productivité
des banques et par là leur rentabilité (Ben Naceur, 2003) et,
dans le souci de la maximisation du profit, les banques tendent à
engager des dépenses d'exploitation additionnelles, justifiant ainsi la
variation dans le même sens entre les frais bancaires
généraux et la rentabilité des actifs (Bashir, 2000 ; Ben
Naceur, 2003). D'autres auteurs (voir par exemple, Anghbazo, 1997 ; Guru et al,
2002) estiment que la réalisation de profits ne peut se faire sans
engager des dépenses, mais les banques doivent éviter d'engager
des dépenses oisives. Les divergences entre les constructions
théoriques et les investigations empiriques sont également
constatées au niveau de l'impact des capitaux propres sur la
rentabilité des actifs bancaires. Plusieurs études empiriques ont
révélé que les capitaux propres exercent un effet
stimulant sur la profitabilité des banques (Bashir, 2000 ; Abreu et
Mendes, 2002 ; Ben Naceur, 2003) mais l'excès du ratio de capital est
considéré comme nuisible à la rentabilité des
actifs puisque, en élevant ce ratio, les banques tendent à
réaliser une fructification minime des capitaux disponibles. Concernant
le ratio de couverture des risques et le ratio de liquidité, il n'existe
pas d'unanimité quand t'a leur efficacité à
améliorer la rentabilité des actifs bancaires.
Le renforcement de la politique de crédit
élève les profits bancaires. Autrement dit, plus la banque
octroie des crédits, plus les revenus augmentent et donc les profits
(Bashir, 2000 ; Ben Naceur, 2003). Néanmoins, la politique de
crédit peut parfois entraver la profitabilité bancaire, en
particulier lorsqu'une politique expansionniste de crédit est
incompatible avec la stratégie poursuivie en matière de recherche
de ressources financières (Bashir, 2000). Dès lors, le
renforcement de la politique de crédit devrait être conduit en
symbiose avec une stratégie efficiente de drainage de ressources
additionnelles. En conséquence, la maîtrise de la politique de
dépôts devrait normalement aider le système bancaire
à augmenter ses profits (Moulyneux et Thornton, 1992 ; Bourke, 1989 ;
Ben Naceur, 2003). Abreu et Mendes (2002), par exemple, ont estimé que
la profitabilité et le ratio des emplois mesuré par le rapport
crédits/dépôts entretiennent une relation
positive, confirmant ainsi la complémentarité entre les
politiques de crédits et de dépôts bancaires. En ce qui
concerne la taille du secteur bancaire, en effectuant des régressions
linéaires générales et en exprimant les profits en
fonction d'un ensemble de facteurs internes et externes, certains auteurs
(Bourke, 1989 ; Moulyneux et Thornton, 1992) ont obtenu une relation positive
et statistiquement significative entre la taille et la rentabilité des
actifs. D'autres auteurs (voir par exemple, Rouabah, 2006) estiment cependant
que la taille n'est pas une source d'économie des coûts, soutenant
ainsi que les grandes banques sont sujettes à des inefficacités
d'échelle.
Les divergences entre la théorie et l'empirisme
existent également au niveau de l'impact de certaines variables
macro-financières sur la rentabilité des actifs. Si
l'émergence des marchés de capitaux dans les pays en voie de
développement renforce l'activité bancaire comme l'ont soutenu
des études empiriques récentes (Bashir, 2000), quant à la
concentration bancaire et à la taille du secteur bancaire, leur impact
estimé sur la rentabilité des actifs bancaires est
généralement positif, ce qui valide empiriquement la
théorie économique (Ben Naceur, 2003 ; Rouabah, 2006 ; Beckman,
2007). Le financement de l'économie par le secteur bancaire
reflète la capacité du système à satisfaire les
besoins des acteurs économiques. La taille du secteur est alors
sensée profiter aux différents intervenants (Demerguç-Kunt
et Huizinga, 2001 ; Ben Naceur, 2003). De même, traditionnellement, les
stratégies de concentration et leurs développements sont
justifiés par la réalisation des économies
d'échelle. L'introduction de cette variable a empiriquement
prouvé une relation positive avec le rendement des actifs (Short,
1979 ; Bourke, 1989 ; Moulyneux et Thornton, 1992 ; Demerguç-Kunt
et Huizinga, 2001).
L'estimation de l'impact des variables
macro-économiques, notamment la croissance économique et
l'inflation, a souvent trouvé un terrain d'entente entre les
économistes. Plusieurs auteurs confirment à l'unanimité
l'existence d'une relation positive entre la croissance économique et la
croissance des profits bancaires (Bashir, 2000 ; Rouabah, 2006; Beckmann,
2007). A leur avis, la richesse nationale profite à toute
l'activité économique du pays, affecte positivement
l'évolution du secteur bancaire et incite les banques à innover
et à rénover leurs techniques et technologies de gestion.
Concernant l'impact de la variation du niveau général des prix,
les travaux de Moulyneux et Thornton (1992), Guru et al (2002), Abreu et Mendes
(2002) ont apporté des éclaircissements sur les liens
susceptibles d'exister entre le rendement sur actifs et l'inflation. Leurs
résultats empiriques font apparaître une relation positive qui
laisse penser que la progression de l'inflation sera favorable à
l'accroissement des profits bancaires.
En mars 1993, la COBAC a mis en place des normes
prudentielles lui permettant de mieux apprécier la liquidité et
la solvabilité des établissements de crédit placés
sous son contrôle. Elle s'est également dotée d'un
système de cotation des banques (SYSCO) axé sur le respect des
normes établies. La solvabilité d'une banque est sa
capacité à faire face à ses engagements vis-à-vis
de ses créanciers au moyen de ses ressources propres. Il existe cinq
normes permettant de contrôler la solvabilité des banques. Nous
retiendrons uniquement Le ratio de couverture de risques qui oblige
les établissements de crédit de justifier en permanence que leurs
fonds propres nets couvrent au moins 8% de l'ensemble de leurs concours y
compris ceux aux Etats. Cette variable favorise un encadrement adéquat
aux banques et réduit la prise de risque. Elle protège le profit
bancaire d'un éventuel risque et est destinée à
sécuriser l'ensemble du système bancaire, ainsi que
l'amélioration de la performance des banques. La liquidité d'une
banque mesure sa capacité à faire face à ses engagements a
vue ou à très court terme. Deux normes ont été
établies afin de contrôler la liquidité des banques. Nous
retiendrons uniquement Le ratio de liquidité qui
contraint les établissements de crédit à
justifier en permanence qu'elles disposent de ressources immédiatement
disponibles et susceptibles de couvrir la totalité de leurs dettes
à échoir dans un mois au plus.
Il ressort de cette section que la restructuration a
rendu globalement les banques solvables et rentables. La section II nous
donnera l'apport des ratios prudentiels.
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