CHAPITRE DEUXIEME : REDEPLOIEMENT DES ELITES
POLITIQUES ET RECOMPOSITION DE L'ESPACE POLITIQUE EN PROVINCE
ORIENTALE
Il est question à travers ce chapitre, de plancher sur
la mobilité des élites politiques et la reconfiguration de
l'espace politique en Province Orientale par le fait de la violence politique
caractéristique vécue de 1997 à 2003.
Nous tentons d'examiner le renouvellement de l'ordre politique
par la violence en Province Orientale. Et voir comment les élites
politiques de la Province Orientale se sont familiarisées avec les
guerres et en ont profité pour leur contrôle
hégémonique.
Nous y inventorions les élites politiques de la
Province Orientale qui ont tiré profit de ces guerres et conflits
armés interethniques en conservant les positions de pouvoir qu'elles
occupaient et ont connu l'ascension vers une position dominante.
Ces différentes guerres ont servi l'émergence des
nouvelles élites et le captage par ces élites de
l'«Etat» ou de son pouvoir155.
La contrainte est au coeur du phénomène de
pouvoir. Le pouvoir est toujours le pouvoir de...Et le pouvoir de... est bien
celui de quelqu'un, d'un groupe, d'une classe. Là où il y a
rapport de pouvoir, il y a rapport inégalitaire156. Un
rapport de domination donc, le pouvoir de l'Etat, c'est-à-dire celui du
monopole de l'exercice de la violence légitime157. Le
déploiement/redéploiement des élites politiques en
Province Orientale se fait sous une forte rivalité territoriale et
identitaire qui nourrit toutes les
155 Pouvoir entendu comme capacité pour un individu ou un
groupe d'individus d'obtenir d'un autre un comportement qu'il n'aurait
peut-être pas adopté spontanément, de lui-même.
156 P., N'da, Op. Cit., p. 10.
157 C'est nous qui ajoutons.
guerres et tous les conflits armés interethniques qu'a
connus la Province.
II.1. Profils et trajectoires sociales des
élites
Les élites politiques sont aussi variées que
multiples, allant de l'analphabète au cadre universitaire en passant par
des hommes d'affaires, des religieux, des militaires, des artistes, etc.
La sociologie des élites que nous nous employons
à mener pour retracer les trajectoires socio-historiques et politiques
qu'ont suivies les élites politiques en Province Orientale nous conduit
à nous poser les questions suivantes : Qui est qui ? D'où
vient-il ? Qui était-il ? Qu'a-t-il fait? Avec qui agit-il/a-t-il agi ?
De quel milieu social est-il issu ? Etc.
Les élites politiques observées en Province
Orientale pendant les guerres sont globalement nées et issues des
groupements sociaux inférieurs. C'est-à-dire qu'elles
appartiennent dans des familles pauvres ou mieux, modestes. Fils et filles
d'enseignants, de cultivateurs ou de fermiers pour les meilleurs des cas,
d'agents ou commis de l'administration publique, elles ont émergé
dans des contextes socioprofessionnels et politiques particuliers
caractérisés par des guerres et divers conflits armés
interethniques.
Il nous faut tout de même souligner que la Province
Orientale a connu une page d'histoire marquée par une gouvernance
autoritaire rigide et sclérosé de ceux et celles qui ont
appartenu, dès la colonisation bien sûr, aux couches sociales
supérieures. C'est effectivement la période du règne de
Mobutu.
La lutte pour le pouvoir devient alors une course inexorable,
acharnée, pour la promotion sociale. La guerre, la violence politique et
les conflits interethniques structurant les habitus et les ambitions. De ceci,
Bongeli Yeikelo Ya Ato note, à la suite de Paule Bouvier et Francesca
Bomboko, au sujet des acteurs (élites) politiques que: « nombre
d'entre eux, ont fait des études universitaires ou supérieures et
certains ont
eu à exercer des fonctions académiques. Qu'ils
soient civils ou belligérants, leurs origines, leur formation, leurs
parcours les rattachent à cette strate privilégiée de la
société congolaise qui, par le biais des affaires, de
l'administration ou de la politique, a gravité dans l'orbite du pouvoir.
»158
C'est dans ce contexte qu'émergent des élites
politiques de la Province Orientale, en particulier, et de la RDC, en
général.
Les familles, les clans, les ethnies et les territoires, voire
les communes et les quartiers jubilent en voyant leurs «fils» et
«filles» (leurs natifs) occuper un poste de pouvoir politique. La
détention du pouvoir politique devient alors une ressource collective
à savourer par toute la communauté ou du moins, auquel
s'identifie toute la communauté d'origine du promu.
Nous comprenons les chants, dictons et quolibets idiomatiques
suivants comme l'expression à la fois de l'émancipation de tout
le groupe social dont sont membres les élites promues ou qui se
«confirment» par leurs actions. Ceci exprimant un sentiment de
revanche et de domination pour le groupe social dont est membre la personne
promue sur les autres groupes sociaux dont les élites viennent
d'être remplacées. Il s'agit en fait des chants de victoire pour
la reconnaissance du groupe social en tant qu'acteur social ayant du poids
politiquement. La jubilation de l'accession à la bourgeoisie (car, la
réussite économique, sociale, politique et culturelle est
toujours perçue comme un capital commun et collectif en Province
Orientale) :
- Oyo tango na biso ! Rendu de Lingala, ceci veut dire : Voici
notre temps ! Il est temps pour nous ! Marquant l'évocation d'une
présence tant convoitée et non réalisée d'un groupe
social particulier à l'arène de prise de décisions ;
- Botiaki tembe, oyo tango na biso ! Ce lingala signifie en
français : Vous avez tant douté, notre temps est enfin
là ! Pour signifier du même coup un défi lancé
aux autres groupes sociaux, surtout ceux qui ont toujours «
régné » ou eu la prépondérance dans
158 P., Bouvier et F., Bomboko cité par Bongeli Yeikelo
Ya Ato, « Le dialogue Intercongolais : anatomie d'une négociation
à la lisière du chaos. Contribution à la théorie de
la négociation » in Analyses sociales, Vol. IX,
Numéro unique, janvier-décembre 2004, p. 196.
l'espace social et politique de la Province Orientale ;
- Kila mutu na wakati yake ! Ce Swahili porte un sens, il veut
dire: A chacun son tour ! Ceci marque le sens que l'on donne au
renouvellement des élites politiques. Il semble que «à
chacun son temps» signifie aussi intrinsèquement que la
communauté a cultivé et cultive des imaginaires collectif d'une
mobilité ethnique des élites politiques. Cette
réalité est de plus, alimentée par ces mêmes
élites qui recourent si régulièrement aux rituels
identitaires pour fêter leur «élévation»
politique. Même si vraisemblablement l'ethnie ou la tribu n'a du tout
rien fait pour cette élite ;
- Owosu ona. De Lokele ça voudrait dire : Voici le
nôtre ! Le nôtre par rapport à l'autre toujours
considéré comme adversaire ou usurpateur ou dominateur.
- Wakale wae nda bilo (Bureau). Ce Lokele voudrait dire en
français: Avoir le sien au bureau. Evoque une certaine forme
d'apologie au népotisme et à l'ethnie comme
référent d'un service bénéfique de la part des
institutions de l'Etat.
- Unatutosha haya, banasemaka siye hatuna batu. Ces
propos rendus du Swahili de Kisangani signifient : Tu nous a
valorisés, car il est toujours dit que nous n'avons personnes. Plus
clair encore, ceci annonce les couleurs de la cohabitation entre
différents groupes sociaux de la Province Orientale. Marquée par
la suspicion, la peur de l'autre, le complexe à la fois de
supériorité et d'infériorité, la stigmatisation,
l'ethnicisation des rapports publics et au public, etc.159
Ces phrases, anodines et manifestement coquettes, sont
révélatrices de prétentions, de tensions et rapports de
forces caractéristiques des relations entre groupes sociaux en Province
Orientale. Une réalité exploitée et
«capitalisée» par les élites politiques en
compétition.
Ce sont les élites politiques qui mobilisent leurs
frères de tributs et patronnent les occasions où l'on voit se
véhiculer de tels imaginaires. Des camions sont mobilisés pour
transportés les «animateurs» paradant à travers la
ville en scandant la gloire de leur fils ou la reconnaissance de leur groupe
ethnique et de leur
terroir d'origine. Et du coup, les élites
récupèrent la situation pour se faire valoir aux yeux de leurs
alliés et présentent leurs ethnies, territoires ou groupes
culturels comme acquis aux mouvements qui les nomment ainsi qu'à leurs
idéologies.
L'ethnicisation des rapports à la politique conduit
à la détérioration des relations interpersonnelles et
engendre des tendances quasi obsessionnelles de déchirement. Il est
fréquent d'entendre une personnalité imputer sa perte d'un poste
politique aux autres rivaux politiques membres d'autres ethnies, territoires,
districts, etc. du fait d'un combat politique déloyal ethnicisé.
Par exemple, quand Lola Kisanga est nommé Gouverneur en remplacement de
Théo Baruti Amisi Ikumaiyete, les originaires de la Tshopo boudent et
dénoncent une machination du bloc Uélé
(c'est-àdire, Bas et Haut Uélé).
Ces reflets de l'imaginaire collectif peuvent receler une
forme active de participation politique qui valorise l'ethnicité ainsi
que ses manifestations dans le champ politique. Mais, il nous semble
plutôt que toutes ces pratiques reflètent une situation
conflictuelle. Ce qui entraîne et génère des
modalités aussi conflictuelles, problématiques et
concurrentielles dans la circulation des élites politiques en Province
Orientale.
Derrière ces adages et chants populaires
énumérés supra, nous reconnaissons les attachements
identitaires de certains groupes sociaux qui se sentent («toujours»)
marginalisés160 par rapport à la distribution du
pouvoir en Province Orientale. Ainsi, chaque nomination ou
élévation d'un de ses membres, représentent une
satisfaction communautaire. Il est aussi vrai que certains adages, chants et
boutades, reflètent plus la provocation et le défi lancé
aux membres des groupes sociaux «rivaux». Bref, ceci marque le
comportement prédateur et accumulateur des
160 Nous pouvons ici citer à titre d'exemple la
nomination de Monsieur Justin Yogbaa Litanondoto Bazono en 2000 comme
Gouverneur de Province par le RCD et la liesse que cela a suivi dans le groupe
Budu de Wamba en particulier et tous les ressortissants du
Haut-Uélé en général à Kisangani. De
même, la nomination de Madame Adèle Lotsove comme Vice-Gouverneur
avait suscité les mêmes effets dans le camp de l'Ituri en
général et Hema/Gegere en particulier. Nous pouvons ainsi
étendre la liste en citant aussi les cas de Messieurs Floribert Asiane
(Vice-Gouverneur), Mathias Dechuvi Dz'x (Vice-Gouverneur), Maurice Abibu
Sakapela (Vice-Gouverneur), Frédéric Esiso Asia Amani (Chef de
Département chargé de l'ESU du RCD), etc.
élites politiques en Province Orientale ; car
l'occupation d'un poste politique ou administratif signifie avoir accès
libre aux ressources de l'Etat : le cadastre, le crédit sous toutes ses
formes, le fisc, les investissements publics, etc.161
Les relations communautaires étant fragmentées
quand il s'agit de rapport au pouvoir, de telle sorte que les autochtones de la
Province Orientale semblent unis quand il n'y a aucun poste à se
disputer. Au contraire, il est plus qu'habituel de voir les élites
s'entredéchirer et leurs communautés d'origine,
instrumentalisées bien sûr, rentrer dans des guéguerres
inextricables. La phase du «doublement institutionnel» au temps de la
scission du RCD-Goma en 1999, avec d'une part un Gouverneur Lokele du RCD-Goma,
Théo Baruti Amisi Ikumaiyete et un autre Topoke du RCD-K, Walle Sombo
Bolene nous renseigne des rapports problématiques observés entre
les Lokele et les topoke.
En Ituri, nous assistons à la même
récurrence des rivalités entre ethnies ou du moins entre
élites des différentes ethnies qui manipulent leurs ethnies
respectives. Les acteurs étrangers ont vite compris ce fait et se sont
appuyés sur les rivalités ethniques existantes pour asseoir leurs
hégémonies. Le Rwanda emploie plus les ressortissants de la
Tshopo et surtout d'Isangi à des postes de commandement. L'Ouganda
accorde diversement son soutien à toutes les milices ethniques et les
oppose les unes aux autres (cela relèvant, à notre connaissance,
non d'une politique de l'Etat ougandais, mais des factions ou réseaux du
pouvoir (les Généraux James Kazini, Salim Saleh qui est aussi
frère de Yoweri Kaguta Museveni, les Colonels Noble Mayombo, Kahinda
Otafire, Peter Karim, etc.)162 et ne nomme par exemple aucun Lendu
à la tête de la «Province» de l'Ituri.
161 J.-F., Bayart, L'Etat en Afrique...Passim (surtout
pp. 100-153).
162 Pour une meilleure connaissance des réseaux
politico-militaires ougandais ayant intervenu en RDC, lire le Rapport du Panel
d'Experts de l'ONU sur l'Exploitation Illégale des Ressources Naturelles
et Autres Formes de Richesse en République Démocratique du Congo,
New York, 13 novembre 2001 et celui du 12 avril 2001 sur la même
problématique. Voir aussi, Judicial Commission of Inquiry into
Allegations into Illegal Exploitation of Natural Resources and Other Forms of
Wealth in the Democratic Republic of the Congo, November 2002.
Dans ce contexte d'appropriation collective d'un pouvoir
personnel des élites, le pouvoir politique devient une ressource
collective ou mieux communautaire, même si cette communauté n'en
profite guère.
Kuda Pombwa l'a aussi remarqué quand il note : «
Bref, les coteries tribales et toutes les associations des districts
concernés ont ouvertement manifesté un appui aux leurs qui ont
été nommés même si beaucoup de leurs membres ne sont
pas de même appartenance politique qu'eux. Et, celles qui sont
oubliées ont vigoureusement réagi par un mémorandum
adressé aux instances nationales »163. Tout cela est un
mécanisme classique de fonctionnement de groupe et d'identité :
chaque acteur est multipositionné et mobilise une pluralité
d'identités soit alternativement soit cumulativement soit
parallèlement. Au sein du groupe, il y a cohésion
renforcée (in group) qui pousse à exclure les autres (out group)
perçus comme ennemis ou menaces.
Ceci marque en fait les modalités d'action des
élites politiques dans leur circulation du fait de la guerre :
marginalité, automarginalité, blanchiment d'élites (comme
pour le blanchiment d'argent sale, les différentes guerres qui ont
marqué la Province Orientale ainsi que les différentes
négociations qui s'en sont suivies ont nourri une forme de recyclage des
élites politiques). Bref, leur transformation en «homme
nouveau» dont le passé, même sombre, doit être
ignoré, voire oublié par la mémoire collective
sombrée dans l'amnésie.
Ces événements sont comme une
blanchisserie164 politique ; une purification / sanctification, il
s'agit ici du fait que la population accorde comme une rédemption
à certaines élites de la guerre en les ennoblissant ou en les
considérant comme des «libérateurs de la
communauté»). Ceci a nettement enrichi la circulation des
élites politiques pendant les guerres et les conflits armés
interethniques en Province Orientale.
163Kuda Pombwa Lendebu Le Bagbe, Op. Cit.,
pp. 117-118
164 C'est-à-dire une sorte de cuve d'épuration
des élites. Même celles qui ont été bannies par la
population lors de certaines échéances
«démocratiques» ou celles qui sont réputées
comme ayant commis des crimes se voient renouvelées en
«libérateurs» ou défenseurs de la cause
«communautaire». Elles bénéficient par ailleurs des
postes importants de commandement au sommet de l'Etat.
Le champ politique de la Province Orientale pendant les
guerres est caractérisé par une lutte âpre des agents
politiques, avec des forces différentes et selon des règles
instituées par l'allié étranger, pour s'approprier les
profits et avantages que génère ce champ, c'est-à-dire,
facilités économiques et financières, prestiges, pouvoir,
honneurs, estimes,...
A ce propos, il ne serait pas hasardeux d'illustrer la
manifestation et la formation de l'habitus pour les élites de la
Province Orientale. Habitus se comprenant comme une disposition de l'esprit
et de la volonté qui fait voir les choses sous un jour
déterminé. Bourdieu le définit de manière complexe,
dialectique et se voulant opératoire comme «systèmes de
dispositions durables et transposables, structures prédisposées
à fonctionner comme structures structurantes, c'est-à-dire en
tant que principes générateurs et organisateurs de pratiques et
de représentations165».
Les différentes guerres ont engendré un
activisme politique débordant. Les acteurs politiques locaux profitent
de la violence contre l'Etat et de celle adressée aux autres groupes
sociaux du fait de la faillite ou de la faiblesse de l'Etat pour
réorganiser et reconfigurer l'espace politique. Cette situation suit une
logique à plusieurs séquences guidées par l'histoire des
guerres et conflits armés qu'a connus la Province Orientale de 1997
à 2003.
Certaines élites ont profité aux niveaux
provincial et local des situations de guerres. D'autres ont saisi leur chance
pour aller occuper des postes politiques supérieurs au niveau national.
Cependant, il y en a également qui ont perdu le pouvoir du fait des
guerres et des conflits armés interethniques166.
165 P., Bourdieu cité par C., Dubar, Op.
Cit., p. 70 pour un meilleur entendement de la
production, de la reproduction, du transfert de l'habitus.
166 Nous pouvons citer, parmi ceux qui ont profité de
la guerre : Jean Yagi Sitolo, Noël Obotela Rachidi, Jean Pierre Bilusa
Baila, Jean Pierre Lola Kisanga, John Tibasima Atenyi, Adèle Lotsove,
Mohamed Bule Ngbangolo, Simon Blupi Galati, Blaise Baise Bolamba,... Et pour
ceux qui n'ont profité des guerres ou ont perdu le pouvoir:
Eugène Lombeya Bosongo, Noël Obotela Rachidi, Alphonse Maindo Monga
Ngonga, Likulia Bolongo, Mokonda Bonza, Walle Lofungola, Walle Sombo Bolene,
etc. Certains ont accédé au pouvoir et en ont été
chassés par la guerre, tels sont les cas de Yagi, Obotela, Maindo Monga
Ngonga, Walle Lofungola, etc.
Nous classons ces différentes élites suivant
l'appartenance aux sphères du pouvoir ou leur capacité
d'influence ; c'est-à-dire selon les critères fondamentaux de
l'action historique et de la fonction sociale immédiate. Nous ne
dressons aucunement une classification des élites, comme l'avait fait
Guy Rocher167, basée sur la nature et les origines des
élites.
La pratique et les actions de ces élites
s'insèrent tout logiquement dans un système de
gouvernementalité qui s'explique par le paradigme de recherche
hégémonique qu'a utilisé J.F. Bayart168
s'articulant à travers une triple dimension d'autonomisation du pouvoir,
d'accumulation des richesses et de sens commun de la domination, pour
déterminer le politique. Le paradigme de la recherche
hégémonique permet donc de préciser les frontières
du politique dans la mesure où la qualification politique d'une pratique
ou d'un mouvement social réside dans sa capacité à
structurer dans sa globalité les enjeux et les questions sous-jacentes
à la recherche hégémonique.
Les élites politiques en Province Orientale en
étude ont, pour la majorité, une trajectoire politique identique.
Elles sont presque toutes pratiquement issues des familles pauvres ou modestes
et ont profité des guerres et violence politique pour capter le pouvoir
de l'Etat et participer à sa gestion.
Nous nous retrouvons ici face à une situation similaire
de celle qu'avait observée Robert Dahl169 au New Haven aux
Etats-Unis. Dahl part d'un postulat selon lequel: l'accession à des
postes politiques de direction nécessite un certain nombre de
ressources: la richesse, la compétence, le prestige.
167 G., Rocher, Op. Cit., p. 4
classifie les élites en : élites d'expert (grands commis,
élites d'affaires...), élites idéologiques
(traditionnelles : clergé, hommes politiques, journalistes ; nouvelles :
universitaires, étudiants, ouvriers), élites symboliques
(artistes de la radio et de la télévision, chanteurs
populaires)
168 Cette notion est richement argumentée dans les
ouvrages importants suivants: J.F., Bayart, A., M'bembe et C., Toulabor, Le
politique par le bas en Afrique noire: contributions à une
problématique de la démocratie, Paris, Karthala, 1992.
J.-F., Bayart, L'Etat en Afrique. La politique du ventre, Paris,
Fayard, 1989, pp. 146-153.
169 Passim, R., Dahl, Op. Cit.
Il observe ainsi que «deux cas de figures s'offrent alors
: soit un groupe ou une élite possède ces trois ressources dans
ce cas nous sommes dans une oligarchie, soit plusieurs groupes ou élites
possèdent chacun une (voire deux) de ces ressources. Nous sommes dans ce
cas-là dans une polyarchie. Le pouvoir politique est alors
partagé entre différents groupes dominants qui ne cumulent jamais
les trois ressources. Les différentes élites doivent donc
s'allier pour trouver des décisions communes finales. On parle donc de
système de pouvoir pluraliste compétitif (puisque les
élites sont en compétition pour faire accepter leurs choix,
idées, etc.) et équilibré (on conçoit que les
groupes ont à peu prêt les mêmes ressources).
Partant de ces explications de Robert Dahl, nous constatons
qu'il y a une pluralité d'élites en Province Orientale. Ce
pluralisme politique provient d'un pluralisme social (à l'image de la
société) dont la différenciation sociale, la
diversité d'intérêts, de profils et d'ambitions, etc. sont
des marques170. En Province Orientale ceci s'observe par les milieux
d'origine des élites. Elles sont issues des milieux culturel et savant
(cadres universitaires et autres), des milieux commerçants et des
affaires, des milieux militaires, politiques et de la société
civile, etc. Pas surprenant qu'elles aussi aient des intérêts et
des ambitions divers et différents.
II.2. Elites politiques : redéploiement et
rapport aux autres acteurs
La guerre de l'AFDL de 1997 a généré une
forme ascendante de la mobilité des élites politiques. De jeunes
cadres universitaires, des membres des mouvements de jeunesse, des enseignants
d'université, ont été propulsés au sommet des
entités et des institutions grâce à la guerre.
Pour marquer l'espace conquis, l'AFDL choisit de remettre tous
les sièges de la gestion politique et administrative en
compétition populaire dans certaines régions du pays. Des membres
des groupes sociaux jusque là marginalisés171 ou
exclus sont happés par l'attraction magnétique de la politique
poussés par les populations en quête
170 Nous empruntons ces éléments de
pluralité des élites de G., Rocher, Multiplication des
élites et changement social...Op. Cit., pp. 8-9.
171 Maindo Monga Ngonga, Thèse déjà
cité, p. 224.
de changement politique.
Les autorités communales, municipales et provinciales
sont élues à travers un mécanisme de vote insolite et
inédit.172 L'AFDL organise les élections à
mains levées et convie la population173. Comme des
météorites, de nouveaux visages prennent le contrôle du
pouvoir politique. Cela peut être interprété comme une
revanche de la population sur les anciennes élites politiques
«complices» du régime tortionnaire de Mobutu.
En effet, dès son occupation de la ville de Kisangani,
et sa prise de contrôle du pouvoir politique, l'AFDL a innové en
créant une rupture d'avec les habitudes déjà
installées dans l'ordre ancien, la transition débutée le
24 avril 1990 : un multipartisme et une bipolarisation des forces politiques
entre, d'une part, le bloc du pouvoir ou la mouvance présidentielle
constituée de ceux qui soutenaient le Président Mobutu et,
d'autre part, l'Union Sacrée de l'Opposition Radicale et Alliés
(USORAS) chère à Etienne Tshisekedi. Cette époque est
caractérisée par les nominations des autorités
politico-administratives (Gouverneurs, Maires, Commissaires de District,
Bourgmestres, Administrateurs de Territoire, etc.). Ceci a favorisé le
partage du pouvoir, dans le champ politique, sur base du népotisme, du
tribalisme, du clientélisme, etc.
Aussi, nous avons observé lors de l'élection des
autorités locales (Gouverneur, Vice-Gouverneurs, Maire et Vice-Maire de
la Ville de Kisangani) une forte mobilisation des états-majors de
certaines ethnies et associations politiquement intéressées,
notamment Bana Etats-Unis174, GRAMA175, Isonga songa,
Lisungameli,
172 Lire à cet effet pour une meilleure
compréhension : Ponea Tekpibele Masudi, La révolution et le
changement politique : analyse du régime post-révolution de
l'AFDL à Kisangani, TFC (inédit) en SPA, FSSAP, UNIKIS &
Maindo Monga Ngonga, Voter en temps de guerre : Kisangani (RD- Congo) 1997,
quête de légitimité et (con)quête de l'espace
politique, Paris, L'Harmattan.
173 Il n'y a ni restriction en terme d'âge ni en terme
des droits civils et politiques. Tout le monde, jeune, moins jeune, vieux,
homme, femme, même le prisonnier qui venait d'être
«libéré» la veille quand les militaires de l'AFDL ont
cassé les portes des prisons, vote. Une démocratie dans la guerre
et atypique se réalise en Province Orientale de la RDC.
174 Bana Etats-Unis est une association de la Commune de Mangobo
à Kisangani très active et constamment instrumentalisée et
trop vexée dans la violence. Mais tolérée et
manipulée par les autorités.
les étudiants176 etc. Quelques candidats ont
mobilisé de gros véhicules pour la «récolte» et
le transport de «leurs bases» respectives vers le stade Lumumba,
contrairement à une certaine opinion qui soutiendrait que les candidats
à ces élections à mains levées organisées
par l'AFDL à Kisangani ne s'étaient préparés dans
le sens de la mobilisation des électeurs.177
Ce fait nous a aussi été relaté pour les
mêmes élections organisées dans certains Territoires comme
Banalia, Buta (pendant l'AFDL et le MLC), Isangi, Yangambi, Basoko,...
où l'on pouvait plutôt observer la compétition politique
prendre des allures d'antagonismes et de positionnement entre tribus.
Ces élites nouvellement promues doivent ployer dans un
régime encadré par le système partisan
«Chembe-chembe», apparenté aux comités locaux du MPR
partiEtat de la deuxième République tant décriée,
consistant à vulgariser et idéologiser les peuples
«libérés».
Une structure de renseignement de l'AFDL emprunté au
«nyumba kumi» de l'allié rwandais à son tour
calqué à la national resistance movement (NRM) de l'Ouganda, un
cadre d'action politique à la base qui est l'oeil, la bouche et
l'oreille de l'Alliance. La cellule de base regroupant soit les membres d'une
entreprise ou d'un service, d'une avenue, d'un quartier ou encore d'une
société.
175 GRAMA aussi est une association de la même commune
de Mangobo un peu rivale à la précédente mais n'utilisant
pas souvent la violence comme langage d'action. Nous verrons l'apport de cette
association dans la suite du déploiement des élites politiques de
la Province Orientale
176 Nous étions nous même de ce groupe
d'étudiants qui, aux premières heures de l'entrée de
l'AFDL, paradaient à travers les grandes artères de la ville de
Kisangani avec le drapeau de la République du Congo (Celui de 1967) en
scandant «Yagi gouverneur». Ceci s'était déroulé
bien avant même que les élections communales ne soient
organisées par l'AFDL. Aussi, Willy Poyo Poye, Alain Kpoku Gbay,
Christophe Baelongandi Twaotulo, Evariste Epupwa Kalenga doivent leur
élection au soutien des étudiants mobilisés à leurs
milieux de vote respectifs.
177 Nous nous souvenons nous être brouillé nous
même avec l'une des personnalités intéressées de
cette compétition le jour du vote de Maire de la ville et qui fût
très versée dans cette pratique.
Le redéploiement des élites politiques de la
Province Orientale se fait en trois phases principales : la première,
celle que nous venons de décrire plus haut, celle favorisée par
la guerre de l'AFDL, la deuxième, celle orchestrée par la guerre
du RCD et les différents conflits interethniques de l'Ituri et la
troisième est celle des négociations politiques.
Ces vagues successives ont chacune occasionné soit
l'entrée en scène des nouvelles élites soit le retour aux
affaires des anciennes élites qui, par opportunisme, se muent en
hérauts des mouvements conquérants qui les gouvernent et portent
leurs labels politiques soit encore l'irruption des seigneurs de guerres qui se
voient comme gratifiés et promus. Car par exemple, de seize
autorités élues lors des élections de l'AFDL, quinze n'ont
jamais eu à gérer. La même chose se remarque en Ituri
où, des onze promus commissaires de district ou gouverneurs entre 1997
et 2003, un seul avait occupé auparavant une fonction
politico-administrative.
Et de toutes ces phases, les élites ont entretenu des
rapports entre elles et avec d'autres acteurs externes (parrains). Ces rapports
ont grandement contribué à l'émiettement de ces
élites et à leurs divers alignements ayant accordé du
même coup, prétexte aux forces étrangères à
se livrer bataille sur le sol congolais.
Dans leurs relations réciproques (c'est-à-dire
des élites en Province Orientale entre elles) et avec d'autres acteurs
(les élites d'autres provinces de la RDC et avec les acteurs /
commanditaires des différentes guerres), les élites de la
Province Orientale sont à la fois alimentaires, satellisées, sous
perfusion et vigoureusement exclusives.
Sans leadership effectif et responsable personnel, les
élites en Province Orientale ne sont que des exécutants des
politiques et procurateurs des entreprises importées. Ceci est
remarquable, car jusqu'aujourd'hui la Province Orientale ne connaît
aucune élite capable de mobiliser et de fédérer les masses
autour d'un idéal ou d'une cause commune.
Globalement, dans leurs rapports avec d'autres acteurs, les
élites politiques en Province Orientale en étude, que nous
qualifions pour besoin de commodité d'explication et de
compréhension élites de la guerre, ont été à
la fois dans une position d'intermédiaires des potentats
étrangers et de maîtres de leurs espaces de contrôle
respectifs. Il s'agit en fait d'une adaptation à la situation pour faire
triompher des intérêts personnels de contrôle d'espaces
économiques ainsi que de conquérir et affermir le pouvoir
politique.
Les rapports entre élites en Province Orientale n'ont
pas échappé à la règle de la nature conflictuelle
de la société comme l'indique Alain Touraine178 :
« l'ordre n'est, finalement, qu'une traduction partielle des conflits de
pouvoir et des transformations des modèles culturels. De là
l'importance des mouvements sociaux, qui font apparaître les rapports
sociaux les plus fondamentaux et révèlent que les institutions et
les formes d'organisation sociale sont produites par les rapports sociaux,
[...].» Seulement ici, du fait de la manipulation extérieure et des
intérêts économicofinanciers que procuraient la violence
politique ainsi que le pouvoir qu'elle générait, ces rapports ont
conduit aux innombrables déchirements et peuvent expliquer la tendance
fissipare des élites en Province Orientale.
178 A., Touraine, Le retour de l'acteur, Paris, Fayard,
1984, p. 113 et ss. Voir aussi, dans une vision purement fonctionnaliste, L.,
Coser, Les fonctions du conflit social, traduction de M., Matignon et
Alii., Paris, PUF, (coll. sociologies), 1982, surtout, les pp. 27, 95.
Tableau 3 : Les élus de la guerre de 1996 à
Kisangani
NOMS & POSTNOMS
|
NIVEAU D'ETUDE
|
FONCTION POLITIQUE OCCUPEE
AVANT
|
FONCTION TENUE
|
JURIDICTION
|
OBSERVATION
|
Dr Jean Yagi Sitolo
|
Dr en médecine
|
Sans
|
Gouverneur de
Province
|
Province Orientale
|
Ancien Président de l'UDPS en Province Orientale, Chef
de Travaux à l'UNIKIS
|
Noël Obotela Rachidi
|
Dr
|
Sans
|
Vice-Gouverneur de Province
|
Province Orientale
|
Professeur à
l'UNIKIS, acteur de la société civile
|
François Lobela Alauwa
|
L2
|
Sans
|
Maire de la Ville
|
Ville de
Kisangani
|
Avocat au Barreau de Kisangani, membre de la DLD
|
Selenge wa Selenge
|
L2
|
Sans
|
Vice-Maire de la
Ville
|
Ville de
Kisangani
|
Employé de la
Sotexki et très actif dans le monde du football.
|
Evariste Yangoy Epupwa
|
L2
|
Sans
|
Bourgmestre
|
Commune de
la Makiso
|
Chef de Travaux à F.P.S.E/UNIKIS
|
Joseph Lokinda Komoy
|
G3
|
Commissaire de
Zone assistant de la commune Makiso
|
Bourgmestre adjoint
|
Commune de
la Makiso
|
Etudiant en L2 SPA
|
Willy Mpoyo Poye
|
L2
|
Sans
|
Bourgmestre
|
Commune de
la Tshopo
|
Il fait les petits
commerces entre
Kisangani et les sites d'extraction de diamant
|
Alain Kpoku Gbay
|
G3
|
Sans
|
Bourgmestre adjoint
|
Commune de
la Tshopo
|
Ami du précédent, il est comme lui dans le
business entre
Kisangani et les sites d'extraction de diamant
|
Alphonse Maindo Monga
Ngonga
|
L2
|
Sans
|
Bourgmestre
|
Commune de
Kabondo
|
Assistant de
recherche à
l'UNIKIS au
département des
SPA et très actif dans les milieux de la jeunesse
catholique et de la société civile
|
Jules Okete Longe
|
G3
|
Sans
|
Bourgmestre
|
Commune de
|
Enseignant
|
|
|
|
adjoint
|
Kabondo
|
(Professeur d'école) au Complexe Scolaire de
l'UNIKIS
|
Saleh Muzelea
|
D6
|
Sans
|
Bourgmestre
|
Commune de
Kisangani
|
Employé à Athul
GHELANI, un
magasin de gros
implanté à Kisangani
|
Ndjasi Liandja
|
G3
|
Sans
|
Bourgmestre adjoint
|
Commune de
Kisangani
|
|
Loela Bonone Bisonya
|
L2
|
Sans
|
Bourgmestre
|
Commune de
Mangobo
|
|
Christophe Baelongandi
Twaotulo
|
L2
|
Sans
|
Bourgmestre
|
Commune de
Mangobo
|
Il faisait le business entre la ville et les sites
d'extraction de diamant de Bafwasende
|
Augustin Yessaya Losembe
|
G3
|
Sans
|
Bourgmestre
|
Commune de
Lubunga
|
Inspecteur à l'EPSP
|
Clément Apatchakuwa
Mikendi
|
G3
|
Sans
|
Bourgmestre adjoint
|
Commune de
Lubunga
|
|
Source : Ponea Tekpibele Masudi,
Op. Cit. (1997), p.26
Les personnalités ci-haut ont été
poussées par une pression de jeunes de leurs quartiers respectifs
à briguer les postes en compétition. Parmi elles, des jeunes
cadres universitaires ou encore étudiants préférés
aux vieux «dinosaures» de l'ancien régime. Les
élections sui generis organisées par l'AFDL ont permis un
renouvellement des élites politiques en Province Orientale. Tous les
postes de gestion politique ont vu leurs responsables rejetés et
accusés par la population d'avoir été complices du MPR.
Une autre révélation issue de ces
élections est l'élection dans plusieurs communes de certains
allogènes alors que la Province était qualifiée de bastion
de la « géopolitique »179. Car, pendant les
derniers mois du régime Mobutu, les élites autochtones de la
Province Orientale avaient machinalement adopté la «politique»
de « Kila mamba na Kivuku yake » (entendez, A chaque Caïman son
marigot ou sa rive)
179 La géopolitique était cette stratégie de
xénophobie et d'exclusion des non originaires au profit des originaires
quidevraient dorénavant occuper seuls les postes de gestion
dans leur province d'origine. La Province Orientale, bien
qu'ayant à sa tête l'un des chantres les plus
invétérés, n'est pas la seule en RDC d'avoir
actionné cette politique du pire ; le Katanga, le Kasaï ont connu
entre 1992 et 1993 des pires épisodes de crises sociales.
et entretenaient une xénophobie à l'égard
des allogènes. Prétendant que cela était le reflet de la
société, donc des «originaires», qui ne voulait
être dirigée par les «étrangers». Mais, les
élections dans la guerre, riche de la spontanéité dans
leur organisation, ont démenti ces manipulations politiciennes des
élites aux abois.
Les professions libérales et la proximité avec
la population semblent être des éléments qui ont servi ces
élites dans leur ascension180. Les jeunes élites
novices en politique pour la grande partie font irruption et profitent de la
guerre pour prendre le pouvoir. Seuls deux élus (le Vice-Maire Selenge
wa Selenge et le Bourgmestre Adjoint de la ville de la Makiso) sont des anciens
politiciens reconnus du temps du MPR. Le Gouverneur Jean Yagi Sitolo a
été Président fédéral de l'UDPS, mais il n'a
jamais été en contact avec le pouvoir.
Malgré la spontanéité et la moindre
préparation des élections, nous observons que la population a
opté pour la qualité intellectuelle, ou mieux le niveau
d'instruction, comme critère de choix de ses gouvernants. Car, de tous
les élus, un seul, Saleh Muzelea n'a un niveau universitaire. Ceci n'est
pas surprenant si l'on considère le fait que la commune de Kisangani
dont il est l'élu n'a pas beaucoup d'écoles et ne comporte, sans
que cela ne soit compris comme une insulte, assez
d'universitaires.181
Les élections à temps de guerre ont rompu avec
le clientélisme instauré et entretenu par la pratique des
nominations. C'est l'ère de la démystification et la dispersion
du régime de Mobutu et de ses auxiliaires locaux. Les nouvelles figures
occupent par exemple des villas jadis objet de mythes et de crainte
fréquemment entretenues quoique toujours inhabitées. Leurs biens
sont réquisitionnés par les
180 Passim, Maindo Monga Ngonga, Voter en en temps
de guerre... pp. 105-135
181 A Kisangani, il est de notoriété commune que
les Enya et les arabisés, majoritaires dans la commune Kisangani,
n'envoient pas leurs enfants à l'école ou ne les poussent vers
des études universitaires. Les ressortissants de ces deux
communautés sont à peine identifiables dans les sphères du
pouvoir en Province Orientale. Les Enya et les arabisés s'adonnent
dès le plus jeune âge aux petits métiers et commerces
(cireurs, vendeurs de noix de cola, vendeurs de la pacotille, crieurs au
marché central, etc.) et pratiquent encore le rapt comme système
de mariage. Ce qui explique la précocité de mariage chez les
jeunes de ces groupes ethniques à Kisangani et de la négligence
des études par ces derniers. Kisangani étant leur village, ils
vivent en ville comme au village perpétuant les pratiques rurales dans
une entité qui s'urbanise de plus en plus. Ceux qui atteignent le niveau
supérieur préfèrent quitter leur milieu de vie pour
d'autres communes de la ville.
nouveaux maîtres de jeu pour eux-mêmes ou pour le
compte des alliés étrangers, etc.
A Kisangani par exemple, de toutes les autorités
élues, une seule survit de l'ancien régime mobutiste : Lokinda
Komoy élu Bourgmestre adjoint à la commune de la Makiso.
Tableau 4 : Les différentes élites de la
guerre du RCD en Province Orientale
NOMS & POSTNOMS
|
NIVEAU D'ETUDE
|
PERIODES
|
Fonctions exercées
|
JURIDICTION
|
OBSERVAT ION
|
Bene Kabala
|
Dr
|
26 9 1998 - 06 12 1998
|
Gouverneur de
Province
|
Province Orientale
|
Tshopo
|
Baruti Amisi Ikumaiyete
|
DES
|
23 12 1998 - 20 6 2000 et 16 5 2004 - 15 11 2005
|
Deux fois
Gouverneur de
Province
|
Province Orientale
|
Tshopo
|
Yogbaa Litanondoto
|
-
|
20 7 2000 - 20 4 2001
|
Gouverneur de
Province
|
Province Orientale
|
Haut - Uélé
|
Bilusa Baila Boingaoli
|
Dr
|
21 4 2001 - 16 6 2004
|
Gouverneur de
Province
|
Province Orientale
|
Tshopo
|
Lola Kisanga
|
Dr en
Médecine
|
2000 - 11 2005 à 2006
|
Vice-Gouverneur et
Gouverneur de
Province
|
Province Orientale
|
Haut- Uélé
|
Asiane Bamukwiemi
|
L2
|
|
Vice - Gouverneur
|
Province Orientale
|
Haut- Uélé
|
Abibi Azapane Mango
|
Dr
|
2001
|
Président
|
Assemblée Provinciale
|
Haut-Uélé
|
Abibu Sakapela
|
L2
|
2001
|
1er Vice-Président
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Amisi Mabango Kasa
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Amundala Bin Ramazani
|
L2
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Baboko Jacogne
|
L2
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Badi Amolo
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Baolimo Lotemba
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Basinga Batokambele
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Batumbu Ewikio
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Bongeli Osombetamba
|
Ir
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Bosasele Losinge
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Bosenge Akoko
|
|
|
|
|
|
Daudi Auber
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Djassi Liandja Bofando
|
L2
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Ekita Longomba
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Elombo Bonyangela
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Ekili Sefu
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Feruzi Kimina
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Mme Furaha Bernadette
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Iyango Faki
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Itha Loola
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Kanena Louis
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Keto Likema
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Kilolo Kitunga
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Kokonyange Georges
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Laguine Dikumbo
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Bas-Uélé
|
Libaki Idulumade
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Lifindiki Lokengo
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Lingofo Jacques
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Lisuli Boni
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Liyeye Balonga
|
L2
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Lokawe Balabala
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Lokwa N'koy
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Malindo Abakisi
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Mangubu Lotika
|
L2
|
2001
|
1er Secrétaire
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
|
|
|
Rapporteur
|
|
|
Mbalaka Michel
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Momoty Lemand'azuato
|
L2
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Muhayirwa Baudouin
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
N'goy Musafiri Lihemba
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Okangola Ekili
|
L2
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Tibamwenda Basara E.
|
Dr
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Ituri
|
Tumilali Lonyongo
|
-
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Tshopo
|
Mme Uzele Béatrice
|
L2
|
2001
|
Membre
|
Assemblée Provinciale
|
Ituri
|
Mme Wawa Marie-Hélène
|
-
|
2001
|
membre
|
Assemblée Provinciale
|
-
|
Boondo Lotika B.
|
L2
|
1998-1999
|
Maire de la Ville
|
Ville de Kisangani
|
Tshopo
|
Tchoko Lisungi B.
|
L2
|
1999 - 2001 & 2001 - 2003
|
Maire de la Ville de Kisangani & Vice- Gouveneur
|
Ville de Kisangani &
Province Orientale
|
Tshopo
|
Bongeli Osombetamba
|
Ir
|
2001-2002
|
Maire de la Ville
|
Ville de Kisangani
|
Tshopo
|
Fumba Kambemba
|
-
|
1999-2000
|
Bourgmestre
|
Kisangani
|
Maniema
|
Bompenda Bona
|
G3
|
1999-2001
|
Vice Maire de la ville en charge de
l'Economie et Finances
|
Ville de Kisangani
|
Equateur
|
Deuda Mamoko
|
L2
|
1999-2000
|
Bourg. Adjoint
|
Makiso
|
Haut-Uélé
|
Mabuse Ekila
|
-
|
1999-2000
|
Bourg. Adjoint
|
Kabondo
|
Tshopo
|
Bakoy Bakunguwo
|
D6
|
1999-2000-2005
|
Vice Maire (Adm.) et Maire de la Ville
|
Ville de Kisangani
|
Haut Uélé
|
Kambili Lofemba
|
G3
|
2005-2007
|
Maire de la Ville
|
Ville de Kisangani
|
Tshopo
|
Etula Libange
|
-
|
2005-2006
|
Maire de la Ville
|
Ville de Kisangani
|
Tshopo
|
Bosenge Akoko
|
L2
|
|
Maire Adjoint
|
Ville de Kisangani
|
Tshopo
|
Kanena Sawamunzila
|
L2
|
2002
|
Maire Adjoint
|
Ville de Kisangani
|
Sud Kivu
|
Tabey Ngbengo
|
L2
|
2003-2005
|
Bourgmestre
|
Commune de Kabondo
|
Bas Uélé
|
Bulaya Basong
|
G3
|
2001
|
B/Adjoint
|
Commune de Kabondo
|
Tshopo
|
Djasi Liandja B.
|
L2
|
1998-2005
|
Bourgmestre
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Selenge Sakina
|
D4
|
-
|
B/Adjoint
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Sikoti Katenga
|
G3
|
-
|
Bourgmestre
|
Commune de Lubunga
|
Tshopo
|
Etukumalo Inola
|
L2
|
2002
|
B/Adjoint
|
Commune de Lubunga
|
Tshopo
|
Okete Longe Watuku
|
L2
|
1998
|
Bourgmestre
|
Commune de la Makiso
|
Maniema
|
Mandjeku
|
L2
|
2002
|
B/Adjoint
|
Commune de la Makiso
|
Tshopo
|
Lomoyo Iteku
|
L2
|
1998
|
Bourgmestre
|
Commune de Mangobo
|
Tshopo
|
Lolesia Botalema
|
L2
|
1998
|
B/Adjoint
|
Commune de Mangobo
|
Tshopo
|
Benda Malio
|
D6
|
1998
|
Bourgmestre
|
Commune de la Tshopo
|
Equateur
|
Batululu Kalokola
|
PP4
|
1998
|
Chef de Collectivité
|
Lubuya-Bera
|
Tshopo
|
Bulu Bobina
|
L2
|
1998
|
CDD
|
District de la Tshopo
|
Tshopo
|
Bometo Bosukwa
|
L2
|
1998
|
CDD/Adjoint
|
District de la Tshopo
|
Tshopo
|
Uvon Opara
|
L2
|
1998-2001
|
Directeur de Province
|
Province Orientale
|
Ituri
|
Lokanzola Mbeyo
|
-
|
2003
|
Directeur de Province
|
Province Orientale
|
Tshopo
|
Mme Binti Darabu
|
-
|
1998-1999
|
Bourgmestre
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Saleh Museleya
|
L2
|
1999
|
Bourgmestre
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Kombozi Masua
|
-
|
1999-2000
|
Bourgmestre
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Mme Uzele
|
-
|
2000
|
Bourgmestre
|
Commune de Kisangani
|
Ituri
|
Amundala Bulozi
|
-
|
1999-2000
|
B/Adjoint
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Ngongo Wazambila
|
-
|
1998-1999
|
B/Adjoint
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Djassi Liandja B.
|
L2
|
2002-2005
|
Bourgmestre
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Kamulete di Bolamba
|
-
|
2005
|
Bourgmestre
|
Commune de Kisangani
|
Tshopo
|
Ayaka
|
-
|
1998-1999
|
Bourgmestre
|
Commune de Lubunga
|
Tshopo
|
Apatchakuwa Mikendi
|
-
|
1998-1999
|
B/Adjoint
|
Commune de Lubunga
|
Tshopo
|
Limengo Liloa
|
-
|
1998-1999
|
B/Adjoint
|
Commune de Lubunga
|
Tshopo
|
Sikoti Katenga
|
-
|
2000-2004
|
Bourgmestre
|
Commune de Lubunga
|
Tshopo
|
Sikoti Katenga
|
-
|
2000-2005
|
Bourgmestre
|
Commune de Lubunga
|
Tshopo
|
Mme Saile Selenge
|
L2
|
2005-2008
|
Bourgmestre
|
Commune de Lubunga
|
Tshopo
|
Poyo Poye
|
L2
|
2000-2002
|
Bourgmestre
|
Commune de la Makiso
|
Kasaï Occidentale
|
Mme Benda Malio
|
G3
|
2002-2005
|
Bourgmestre
|
Commune de la Tshopo
|
Equateur
|
Batumbu Mungamba
|
A1
|
1998
|
CDD/Adjoint
|
District de la Tshopo
|
Tshopo
|
Bofonda
|
G3
|
2003
|
CPEA
|
Bengamisa
|
Tshopo
|
Lihaha Mona
|
L2
|
2001
|
AT
|
Basoko
|
Equateur
|
Andefelo Yenga
|
L2
|
2001
|
AT/Adjoint
|
Basoko
|
Tshopo
|
Saile Selenge
|
L2
|
1999
|
AT/Adjoint
|
Basoko
|
Tshopo
|
Akanis S.
|
L2
|
1999
|
AT
|
Opala
|
Tshopo
|
Olela Bolangi
|
PP5
|
1999
|
AT/Adjoint
|
Opala
|
Tshopo
|
Elembo Bonyangela
|
D6
|
2002
|
AT/Adjoint
|
Opala
|
Tshopo
|
Lombo Lilima
|
PP2
|
1999
|
CPEA
|
Lokito
|
Tshopo
|
Obendela Itondo
|
PP3
|
1999
|
CPEA
|
Mayoko
|
Tshopo
|
Okangola Ema
|
PP2
|
2002
|
CPEA
|
Mongo Likenge
|
Tshopo
|
Tabu Yeni
|
G3
|
2001
|
CPEA
|
Yatolema
|
Tshopo
|
Apachakua Makana
|
G3
|
1999
|
AT
|
Ubundu
|
Tshopo
|
Shokoto Mikaeli
|
G3
|
1999
|
AT/Adjoint
|
Ubundu
|
Tshopo
|
Asika
|
D4
|
1999
|
AT/Adjoint
|
Ubundu
|
Tshopo
|
Fundi Malanda
|
D4
|
1998
|
Chef de cité
|
Ubundu
|
Tshopo
|
Malungu Walipesi
|
D4
|
1999
|
CPEA
|
Kirundu
|
Tshopo
|
Tchoma Tchoma
|
PP3
|
1998
|
CPEA
|
Basusoko
|
Tshopo
|
Salumu Beki
|
PP5
|
1999
|
CPEA
|
Lowa
|
Maniema
|
Masanza
|
L2
|
2002
|
CPEA
|
Wanierukula
|
Haut Uélé
|
Bokalanga Wya
|
G3
|
1998
|
AT
|
Yahuma
|
Tshopo
|
Liendo Monga
|
L2
|
1998
|
AT/Adjoint
|
Yahuma
|
Tshopo
|
Bitie Amundala
|
L2
|
2003
|
AT/Adjoint
|
Yahuma
|
Tshopo
|
Etsike Badjoko
|
L2
|
2003
|
Chef de Cité
|
Mosite
|
Tshopo
|
Topo Bombongo
|
L2
|
2003
|
CPEA
|
Buma
|
Tshopo
|
Yangelonge Losom
|
D4
|
2003
|
CPEA
|
Koret
|
Tshopo
|
Source Source : Nos enquêtes.
Il est remarquable de voir que le RCD-Goma a abondamment
utilisé les élites intellectuelles dans sa gestion des espaces
contrôlés. Nous remarquons aussi que la mobilité a
été très forte sous la gestion RCD-Goma. Dans un
intervalle de sept ans, six gouverneurs de province ont défilé
à la commande de la Province Orientale (du moins de la partie sous
contrôle du RCD-Goma) par exemple. Des tentatives de
démocratisation de l'espace politique par l'institution de
l'Assemblée provinciale. Le district de la Tshopo est majoritairement
servi par la rébellion du RCD-Goma, peut-être parce que ce
mouvement ne contrôle en fait que cette partie de la Province Orientale.
Ainsi se concrétise la permanence déjà observée qui
consiste à utiliser chacun chez soit. Les quelques cas de
présence des élites d'autres districts répondraient
certainement à une logique de camouflage de la part du mouvement
cherchant à se donner un semblant de cohésion provinciale, voire
nationale. La tendance régionaliste dans le choix des cadres par le
RCD-Goma n'a pas été si absolue. Plusieurs personnalités
des provinces autres que la Province Orientale ont été aussi
mobilisées dans la gestion de l'espace RCD-Goma.
Noms & Postnoms
|
Niveau d'étude
|
Période
|
Fonctions exercées
|
Juridiction
|
Observation
|
Mondenge Loota
|
PP5
|
2001
|
Administrateur de Territoire (AT)
|
Bafwasende
|
Tshopo
|
Ngomiandji Lengo
|
L2
|
2001
|
AT
|
Opienge
|
Tshopo
|
Alotadi Makindo
|
D6
|
2001
|
AT/Adjoint
|
Bafwasende
|
Tshopo
|
Aloma Hopla
|
G3
|
2001
|
AT/Adjoint
|
Bafwasende
|
Tshopo
|
Asango Komoy
|
L2
|
2001
|
AT/adjoint
|
Opienge
|
Tshopo
|
Mbolipasiko Dalungba
|
D4
|
1999
|
AT
|
Faradje
|
Haut Uélé
|
Makusudi
|
G3
|
2002
|
AT
|
Rungu
|
Tshopo
|
Fataki Androma
|
D6
|
2002
|
AT
|
Wamba
|
Haut Uélé
|
Kpoku Gbay
|
G3
|
2003
|
AT/Adjoint
|
Wamba
|
Haut Uélé
|
Abaina Mukumwana
|
D4
|
2001
|
AT/Adjoint
|
Wamba
|
Haut Uélé
|
Azibi Mungu Kita
|
D6
|
2000
|
CPEA
|
Bobond
|
Haut Uélé
|
Mangole Mowale
|
PP4
|
2001
|
CPEA
|
Betongwe
|
Haut Uélé
|
Nganda Nzemen
|
D6
|
2001
|
CPEA
|
Ibambi
|
Haut Uélé
|
Ngamane Atinga
|
D6
|
1999
|
CPEA
|
Obongone
|
Haut Uélé
|
Kahia Madaku
|
D6
|
2001
|
AT
|
Watsa
|
Haut Uélé
|
Kwinza Dudu
|
PP2
|
2003
|
AT/Adjoint
|
Watsa
|
Haut Uélé
|
Agombe Lombondi
|
L2
|
2001
|
AT/Adjoint
|
Watsa
|
Tshopo
|
Azima Ndima
|
D6
|
2001
|
Chef de Cité
|
Watsa
|
Haut Uélé
|
Akenani A.
|
D4
|
2002
|
CPEA
|
Duruma
|
Haut Uélé
|
Bochechele Baelo
|
A2
|
2003
|
CPEA
|
Gombari
|
Tshopo
|
Adamu Mungu
|
-
|
2001
|
CPEA
|
Mungbere
|
Haut Uélé
|
Awele Azapana
|
-
|
-
|
CPEA
|
Ngovera
|
Haut Uélé
|
Source Source : Nos enquêtes.
Il ressort de ce tableau que le RCD-N s'est aussi
préoccupé, dans sa gestion de l'espace, du recrutement d'une
«main d'oeuvre» politique locale. Car, Roger Lumbala devait faire
face à l'exigence des populations locales à gérer leurs
propres espaces, sa gestion étant déjà
récusée par les jeunes de Bafwasende qui se sont
constitués contre lui en milice d'autodéfense maï maï.
Nous retrouvons aussi parmi les élites mobilisées pour ce
mouvement, un ancien de l'AFDL à Kisangani qui revient dans la
scène politique après une éclipse dans son monde habituel
des affaires d'or et de diamant. Aussi, Monsieur Makusudi, un ancien
Administrateur de Territoire est gardé. Ceci témoigne d'une
certaine assimilation réciproque des élites que nous allons voir
dans les lignes qui suivent.
Noms et Post-
noms
|
Niveau d'études
|
Période
|
Fonctions exercées
|
Juridiction
|
District d'origine
|
Kwanza Bambe
|
L2
|
2002
|
CDD
|
Bas Uélé
|
Bas Uélé
|
Sende Nange
|
L2
|
2002
|
CDDA
|
Bas Uélé
|
Bas Uélé
|
Mokoto
|
G3
|
1999
|
AT
|
Aketi
|
Bas Uélé
|
Lovo
|
G3
|
1999
|
ATA
|
Aketi
|
Bas Uélé
|
Kalonda
|
D6
|
1999
|
Chef de cité
|
Aketi
|
Bas uélé
|
Litefanye Mosomali
|
D6
|
2002
|
CPEA
|
Bunduki
|
Bas Uélé
|
Kompanye Mosowali
|
PP4
|
2002
|
CPEA
|
Dulia
|
Bas Uélé
|
Mbeu
|
PP5
|
1999
|
CPEA
|
Likati
|
Bas Uélé
|
Motyobe
|
D6
|
2002
|
CPEA
|
Muma
|
Bas Uélé
|
Mamuzi Lani
|
L2
|
1999
|
AT
|
Ango
|
Bas Uélé
|
Lemalema Kisisa
|
L2
|
1999
|
ATA
|
Ango
|
Bas Uélé
|
Zanga Baye
|
D6
|
2001
|
CPEA
|
Api
|
Bas Uélé
|
Kele Belo Kana
|
PP5
|
1999
|
CPEA
|
Bweli
|
Bas Uélé
|
Segwele
|
D6
|
2001
|
CPEA
|
Dakwa
|
Bas Uélé
|
Dula Kaba
|
PP5
|
1999
|
CPEA
|
Dingba
|
Bas Uélé
|
Badele Bapage
|
G3
|
1999
|
AT
|
Bambesa
|
Bas Uélé
|
Kabemole Ngoto
|
PP5
|
1999
|
ATAt
|
Bambesa
|
Bas Uélé
|
Kanako Alula
|
D6
|
2001
|
CPEA
|
Bambili
|
Bas Uélé
|
Motangba
|
D6
|
1999
|
CPEA
|
Ganga
|
Bas Uélé
|
Tongo Bandamali
|
G3
|
2002
|
AT
|
Banalia
|
Tshopo
|
Ramazani Bin Hasan
|
PP5
|
2002
|
ATA
|
Banalia
|
Maniema
|
Bambe wa Mambo
|
D4
|
2002
|
ATA
|
Banalia
|
Tshopo
|
Lokando Ankole
|
PP4
|
2003
|
CPEA
|
Kole
|
Tshopo
|
Lomaliza wa Lomaliza
|
PP3
|
2003
|
CPEA
|
Panga
|
Tshopo
|
Ogibo Sasa
|
D6
|
2001
|
CPEA
|
Makongo
|
Bas Uélé
|
Bamwingamela Mbali
|
L2
|
1999
|
CPEA
|
Maleke
|
Bas Uélé
|
Epebato
|
L2
|
2001
|
CPEA
|
Zobia
|
Bas Uélé
|
Gasao Yangume
|
L2
|
2001
|
AT
|
Bondo
|
Bas Uélé
|
Ngbondo Nbgonda
|
G3
|
2001
|
ATA
|
Bondo
|
Bas Uélé
|
Bosila
|
G3
|
2000
|
CPEA
|
Bili
|
Bas Uélé
|
Soto Ganga
|
G3
|
1999
|
CPEA
|
mangoli
|
Bas Uélé
|
Londo Kito
|
G3
|
2003
|
CPEA
|
Monga
|
Bas Uélé
|
Isungila Selenge
|
D6
|
2001
|
CPEA
|
Ndu
|
Bas uélé
|
Ngbelo Baobia
|
L2
|
1997
|
CPEA
|
Bambili
|
Bas Uélé
|
Lomaliza Aligane
|
L2
|
1997
|
AT
|
Buta
|
Bas Uélé
|
Lokundo Komba
|
G3
|
1996
|
ATA
|
Buta
|
Tshopo
|
Gwaso Poka Lingi
|
A1
|
1999
|
Chef de Cité
|
Buta
|
Bas Uélé
|
Nenga Lisasi
|
-
|
2001
|
CPEA
|
Kumu
|
Bas Uélé
|
Mogoya Molangi
|
A1
|
2000
|
CPEA
|
Buta Sud
|
Bas Uélé
|
Abadiponi
|
G3
|
2001
|
CPEA
|
Titule
|
Bas Uélé
|
Tutu Kendeza
|
A2
|
1999
|
AT
|
Poko
|
Bas Uélé
|
Bwana Tule
|
D6
|
1999
|
ATA
|
Poko
|
Bas Uélé
|
Kopeya
|
PP5
|
1999
|
CPEA
|
Hamadi I
|
Bas Uélé
|
Betima Etitule
|
D6
|
1999
|
CPEA
|
Hamadi II
|
Bas Uélé
|
Muhamed Kileta
|
-
|
1999
|
CPEA
|
Mawa/Gare
|
Bas Uélé
|
Molinga N.
|
PP5
|
1999
|
CPEA
|
Teli
|
Bas Uélé
|
Tepatondele Nzai
|
PP5
|
1999
|
CPEA
|
Viadana
|
Bas Uélé
|
Movari M'avoba
|
PP2
|
1999
|
CDD (Front de
Libération du Congo)
|
Haut Uélé
|
Haut Uélé
|
Sangba Lanzi
|
G3
|
1999
|
CDDA (Front de
Libération du Congo)
|
Haut Uélé
|
Haut Uélé
|
Kpakwo Tungalani
|
A1
|
1999
|
CDD (Front de
Libération du Congo)
|
Dungu
|
Haut Uélé
|
Source : Nos enquêtes.
La lecture de ce tableau nous renseigne que le mouvement
rebelle MLC a procédé de la même manière que les
autres dans la gestion des entités conquises. Ils ont massivement
nommé des auxiliaires de leurs administrations respectives. C'est
effectivement ces nominations qui ont généré la
circulation des élites politiques locales. Il est remarquable de
signaler que des 52 personnalités retenues, 12 ont fini les
études universitaires (dont 9 licenciés et 3 Ingénieur
A1), 10 personnalités ont un niveau de gradué dont 1 personne le
grade de A2, 12 autres personnalités sont d'un niveau de D6. Les autres
personnalités ont un niveau scolaire qui varie entre le D4 et le PP2 en
passant par le PP3, le PP4 et le PP5. Aussi, l'appartenance régionale
est capitale dans la distribution des postes aux acteurs. Chacun est
nommé chez lui, sauf quelques rares cas observés notamment
à Banalia et à Buta.
Nous remarquons ici le rôle déterminant de
l'instruction ou niveau d'étude dans la distribution des postes pendant
les guerres. Ceci témoigne bien de ce que Pierre Bourdieu a écrit
: «le rôle de l'école est déterminant dans la
perpétuation des
inégalités sociales.»182 On
remarque en outre que les élites retenues dans ce tableau ont
été mobilisées dans leurs terroirs d'origine
respectifs.
Tableau 7 : Quelques élites dominantes de l'Ituri
en temps de guerre
Noms et Postnoms
|
Niveau d'étude
|
Période
|
Fonctions exercées
|
Juridiction
|
Pouvoir de
nomination
|
Observation
|
Kamara Rwakaikara
|
Dr
|
1997
|
CDD
|
Ituri
|
AFDL
|
Hema/Irumu
|
Dheju Mugenyi
|
-
|
1997
|
CDD/Kamara
|
Ituri
|
AFDL
|
Hema/Djugu
|
Uringi Padolo
|
-
|
1998 et
2000-2001
|
CDD
|
Ituri
|
RCD-Goma & RCD-K
|
Alur/Mahagi
|
Lotsove Mugisa
|
-
|
1998
|
Gouverneur de la
Province du Kibali- Ituri183
|
Kibali-Ituri
|
Le général
ougandais Kazini
|
Hema/Djugu
|
Bule Ngbangolo Mohamed
|
-
|
2001- 20002
|
Gouverneur de la
Province du Kibali-Ituri
|
Kibali-Ituri
|
Bemba/FLC
|
Boa/Bas-Uélé
|
Ruhigwa Baguma
|
-
|
2002-2003
|
Gouverneur de la
Province du Ituri
|
Ituri
|
Bemba/FLC
|
Hema/Irumu
|
Molondo Lobondo
|
-
|
2003
|
Gouverneur de la
Province du Ituri
|
Ituri
|
Bemba/FLC
|
Luba/Kasaï Orientale
|
Eneko Ngwanza
|
-
|
2003
|
Gouverneur de la
Province du Ituri
|
Ituri
|
Lubanga/UPC
|
Lugbara/Aru
|
Mileyo Lotiyo
|
-
|
2003
|
Gouverneur de la
Province du Ituri
|
Ituri
|
Lubanga/UPC
|
Kakwa/Aru
|
Leku Apuobo
|
-
|
2003-2004
|
CSA II
|
Ituri
|
AS II
|
Lese/Mambasa
|
Vwaweka Petronille
|
-
|
2004
|
CDD
|
Ituri
|
Gouvernement central
|
Alur/mahagi
|
Mbitso Joas
|
-
|
2004
|
CDDA
|
Ituri
|
AS II
|
Lendu/
|
Germain Katanga
|
-
|
1999-2004
|
Seigneur de la guerre, nommé général des
FARDC en 2004184
|
Ituri
|
FRPI
|
Ngiti (Lendu) il
est le leader de FRPI
|
Jérôme Kakwavu Bukande
|
-
|
1999-2004
|
Chef des FAPC nommé général des FARDC en
2004
|
Aru
|
FAPC
|
Tutsi du Masisis au Nord Kivu
Ancien sergent des FAZ
|
Floribert Ndjabu Ngabu
|
D6
|
1999-2004
|
Commandant des FNI
|
Djugu-Irumu
|
FNI
|
Lendu
|
182 P., Bourdieu cité par M. De Coster, B.,
Bawin-Legros et M., Poncelet, Introduction à la sociologie,
Bruxelles, De Boeck & Larcier, 6ième édition,
2006. p. 229. Lire aussi dans le même registre A., Prost,
L'enseignement s'est-il démocratisé ?, Paris, PUF,
1986.
183 Le Kibali-Ituri est l'ensemble du District de l'Ituri plus
le Territoire de Faradje qui lui est une entité du District du
Haut-Uélé. Le fait d'incorporer ce Territoire dans la juridiction
de l'Ituri a toujours provoqué de vives réactions de la part de
nombreux natifs du Haut-Uélé qui n'apprécient pas voir
leur terre, donc eux aussi être placés sous tutelle des ituriens.
Par contre, certaines élites du Haut-Uélé ont tiré
profit de cette situation en participant activement dans les différents
gouvernements de fait de cette configuration.
184 Le 11 décembre 2004, le Président Joseph
Kabila a signé un décret nommant six chefs de groupes
armés de l'Ituri au rang de généraux dans les FARDC. Ce
décret assurait également la nomination de trente-deux autres
personnes à des postes de responsabilité.
Kahwa Panga Mandro
|
D4
|
1999-2004
|
Leader du PUSIC
|
Djugu-Irumu
|
PUSIC
|
Hema. Chef de la chefferie Bahema
Banywagi
|
Bosco Taganda
|
-
|
1999-2004
|
Chef d'opérations
militaires de UPC/L.
Nommé au rang de Général des FARDC en
2004.
|
Ituri
|
Lubanga/UPC
|
Tutsi (Munyamulenge)
|
Thomas Lubanga Dylo*185
|
L2 en
Psychologie
|
1998-2004
|
Seigneur de la guerre et Leader de l'UPC, UPC/L
|
Ituri
|
UPC
|
Hema-Gegere de Djugu
|
Source : Nos enquêtes.
Ce tableau reflète l'Ituri de la guerre et exprime les
tendances des étapes successives de la violence politique
manifestée dans ce district/province entre 1997 et 2003. Nous remarquons
premièrement l'ascendance Hema sur les autres groupes ethniques de
l'Ituri. Deuxièmement, nous assistons à l'irruption des nouvelles
élites politiques dans la gestion politique des entités. Car,
sauf Uringi Padolo et Mbitso Joas ont des passés de territoriaux. Les
autres sont des produits des guerres en politique. Nous retrouvons des
militaires (Molondo Lobondo et Bule Ngbangolo Mohamed) exercer les fonctions
politiques. Ceci exprime le radicalisme ethnique qui s'y était
développé à travers un clivage identitaire Bantou/Non
Bantou importé à celui Tutsi/Hutu du Rwanda et qui raviva les
anciens ressentiments communautaires préexistants. Un clivage
alimenté du reste par un complot mythologique de l' « empire
Hima-Tutsi» aux allures du prétendu « Protocole de sages de
Sion » juif.
Quant à la diversité d'appartenance
régionale ou territoriale, ceci se justifie par le fait que la
«province d'Ituri» a connu plusieurs procurateurs
«suprêmes» qui ont à leur tour procédé aux
nominations. Ainsi, quand c'est Jean Pierre Bemba Gombo qui contrôle
l'Ituri sous le girond du FLC, il nomme, outre un Hema, un Kasaïen et un
Boa. Le seul Lendu ayant gravi le sommet de la gouvernance locale de l'Ituri
est Mbitso Joas. Sans crainte d'être contredit, nous observons que les
leaders majeurs (seigneurs de guerre ou leaders communautaires) de la violence
en Ituri ont peu ou prou fait des
185 Thomas Lubanga Dylo est détenu par la Cour
Pénale Internationale pour crimes de guerres et crimes contre
l'humanité.
longues études. Sur ce tableau, seules deux
personnalités ont un niveau universitaire. Tableau 8 : Quelques
autres élites des guerres de l'Ituri
Noms et Postnoms
|
Niveau d'étude
|
Période
|
Fonctions exercées
|
Juridiction
|
Pouvoir de
nomination
|
Observation
|
Adheribo Pete
|
L2
|
2001
|
AT
|
Aru
|
FAPC
|
Ituri
|
Batamoko
|
G3
|
2001
|
AT/Adjoint
|
Aru
|
FAPC
|
Ituri
|
Amadri
|
G3
|
2001
|
AT/Adjoint
|
Aru
|
FAPC
|
Ituri
|
Mateso Bamarake
|
D6
|
2001
|
AT
|
Djugu
|
UPC
|
Ituri
|
Ndjonji Lossa
|
PP5
|
2000
|
CPEA
|
Blukwa
|
UPC
|
Ituri
|
Lolo
|
L2
|
1999
|
CPEA
|
Libi
|
UPC
|
Ituri
|
Walo Kpodda
|
D6
|
2000
|
CPEA
|
Nizi
|
UPC
|
Ituri
|
Bahimuka
|
PP5
|
2001
|
AT
|
Irumu
|
FNI
|
Ituri
|
Silbilio Duaka
|
L2
|
2000
|
Chef de Cité
|
Bunia
|
CPI
|
Ituri
|
Alezu Bakati
|
D6
|
2001
|
CPEA
|
Boga
|
FNI
|
Ituri
|
Sambo Avetsu
|
L2
|
1997
|
CPEA
|
Geti
|
FNI
|
Ituri
|
Musafiri Gbongo
|
PP3
|
2001
|
CPEA
|
Kasenyi
|
FNI
|
Ituri
|
Lobisobo Makanagwa
|
PP4
|
2001
|
CPEA
|
Komanda
|
FNI
|
Ituri
|
Kerali
|
L2
|
2004
|
AT
|
Mahagi
|
FAPC
|
Ituri
|
Udaga Njoozo
|
G3
|
2001
|
AT/Adjoint
|
Mahagi
|
FAPC
|
Ituri
|
Matata Makalamba
|
D4
|
1983
|
AT/Adjoint
|
Mahagi
|
FAPC
|
Ituri
|
Tumba Djaloi
|
D4
|
2003
|
Chef de Cité
|
Mahagi
|
FAPC
|
Ituri
|
Ukumu Lungee
|
D6
|
2002
|
CPEA
|
Djalasiga
|
FAPC
|
Ituri
|
Ucoum Nican
|
G3
|
2001
|
CPEA
|
Nioka
|
FAPC
|
Ituri
|
Urombi
|
G3
|
2001
|
CPEA
|
Niarambe
|
FAPC
|
Ituri
|
Lusenge
|
L2
|
1998
|
AT
|
Mambasa
|
RCD-K/ML à
Biakata
|
Nord Kivu
|
Sinani Bin Masudi
|
D6
|
2000
|
AT
|
Mambasa
|
UPC à Mambasa
|
Ituri
|
Golu Sinde
|
L2
|
2003
|
AT/Adjoint
|
Mambasa
|
RCD-K/ML à
Biakata
|
Ituri
|
Ndua Magaa
|
PP4
|
2003
|
AT/Adjoint
|
Mambasa
|
UPC à MAmbasa
|
Ituri
|
Molemba Kapinga
|
PP5
|
2002
|
CPEA
|
Bela
|
RCD-K/ML
|
Tshopo
|
Tolingani Baelo
|
PP5
|
2001
|
CPEA
|
Lulivu
|
RCD-K/ML
|
Tshopo
|
Kazoka Abatia
|
PP5
|
2000
|
CPEA
|
Nioka
|
RCD-K/ML
|
Ituri
|
Duduniabo Seliabo
|
D6
|
2002
|
CPEA
|
Ndue
|
RCD-K/ML
|
Ituri
|
Source : Nos enquêtes.
Pour ce tableau, la même régularité, en
terme de niveau d'études, d'appartenance régional et de
militantisme, a primé dans le choix des élites de soutien que
sont les administrateurs de territoires, les chefs de postes d'encadrement
administratif et autres retenus ici.
Nous notons que toutes les personnalités
présentées dans le tableau ci-haut ne sont pas des
«parvenus». Nombreux sont d'anciens administratifs
récupérés par les mouvements rebelles ou les milices.
Nous observons la même récurrence que dans
d'autres contextes analysés ci-haut. Le niveau d'étude semble
avoir une importance dans le choix des élites politiques aux postes de
responsabilités. Ainsi par exemple, douze personnalités sur
vingt-huit retenues ont un diplôme d'université ou d'enseignement
supérieur, six sont diplômées d'Etat, deux n'avaient pas
obtenu leur diplôme d'Etat et les restes sont des
«primairiens.»186
Aussi, il est remarquable de constater que l'appartenance au
district de l'Ituri a servi les élites pour bénéficier des
postes de commande au niveau local. Seules trois personnalités sur les
vingt-huit ne sont autochtones de l'Ituri. Ceci est l'image de l'ethnicisation
des rapports aux politiques et de la compétition politique
caractéristiques de l'Ituri de la période en étude. C'est
justement l'application de la triste vieille recette de «kila mamba na
kifuku yake» des années 1992-1996 appliquée par les
élites mobutistes en déclin (Cf. infra).
Les élites politiques en Province Orientale n'ont pas
profité que de la guerre. Certaines ont aussi profité de la
Transition dite 1+4 issue des négociations politiques qui ont mis fin
à la situation générale de guerre. A titre indicatif,
Médard Autsai Asenga député national de la Transition se
voit nommé Vice-gouverneur en charge des questions économiques et
financières, John Tibasima Atenyi est nommé Ministre de
l'Urbanisme et Habitat, etc.
De celles-ci, il faut compter les personnalités issues
des milieux de la Société Civile. De ce nombre nous pouvons par
exemple citer Blaise Baise Bolamba qui devient député national,
Mgr Marini Bodho préside le sénat de la transition 1+4, Faustin
Toengaho Lokundo est sénateur, Béatrice Lomeya Atelite est
cooptée député nationale,
Pierre-Hubert Moliso Nendolo de la magistrature est nommé
Vice-gouverneur en charge de l'administration et politique, etc.
Par ailleurs, au même moment que certaines élites
locales restées sur place profitaient de la guerre sous occupation du
RCD/Goma, du MLC, du RCD-N, etc., certaines autres élites politiques de
la Province Orientale bénéficiaient du pouvoir national à
Kinshasa en représentation de la province occupée. Nombreuses ont
été nommées « députés »,
ministres, conseillers du Président de la République,... Nous
citons par exemple à titre purement illustratif: François Alauwa
Lobela, ancien Maire de la ville de Kisangani (en fuite à Kinshasa
à l'entrée du RCD-Goma) est nommé
«député»187 par Laurent-Désiré
Kabila, Marie Moke Mambangu de même est nommée
«député», Jean Yagi Sitolo devient Ministre des Travaux
Publics, ...
Ce chapitre nous a permis de comprendre comment les acteurs
politiques en Province Orientale ont profité de la violence politique
locale profondément enraciné autour de l'accès à la
terre188, aux ressources économiques. Le désordre,
l'insécurité et l'état général de
l'impunité ont encouragé ainsi la formation de réseaux
nouveaux et militarisés pour l'extraction (et l'accumulation) des
bénéfices économiques, en référence à
la propriété ethnique comme étant partie intégrante
et centrale des tactiques de contrôle et de la «redistribution»
des ressources politiques et économiques.
Il nous reste, pour bien mener à bout cette
étude sur les guerres et la circulation des élites politiques en
Province Orientale, de découvrir quelles ont été les
modalités et tactiques de ces acteurs dans leurs actions de recherche
hégémonique et comment l'espace socio-économique et
politique a été réorganisé par la violence
politique au point de générer une nouvelle
génération des élites politiques.
187 Ils sont nommés députés de
l'Assemblée Constituante-Parlement de Transition (ACPT) qui
siégeait à Lubumbashi.
188 K. Vlassenroot et T. Raeymaekers, Op. Cit. pp.
209-210
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