Essai d'analyse prospective sur l'union africaine( Télécharger le fichier original )par Bienfait KUJIRAKWINJA KALINDA Université Officielle de Bukavu - Licence en Droit Public 2002 |
SECTION II. L'UNION AFRICAINELe 37e et dernier sommet de l'Organisation de l'Unité Africaine, à Lusaka, en juillet 2001, avait créé, dans l'indifférence générale, une Union Africaine pourtant réclamée à cor et à cris depuis le début de l'Organisation de l'Unité Africaine, en 1963. Il tourna la page d'un siècle de panafricanisme. (34(*)) Tout a commencé par une idée de Mouammar Kadhafi, qui rêvait d'une Afrique organisée selon le modèle de l'Union Européenne. Il s'en est suivi la déclaration de Syrthe du 09.09.1999 révisée profondément pour donner lieu à l'Acte Constitutif de l'Union Africaine le 12 juillet 2000 qui n'atteindra le quorum de ratification (36 ratifications) qu'en juillet 2001. Il a fallu une période d'une année pour la mise en place des organes de l'Union Africaine et pour aboutir à la succession définitive de l'Union Africaine en juillet 2002 à Durban (Afrique du Sud). A partir de cette date, une période transitoire a été laissée au dernier secrétaire général de l'Organisation de l'Unité Africaine, Amara Essy, pour la mise en place effective des organes de l'Union Africaine ; il sera remplacé en juillet 2003 à Maputo (Mozambique) par le premier président de la Commission de l'Union Africaine, Alpha Omare Konaré. Chronologiquement établie, nous allons étudier sous cette seconde section le mécanisme de fonctionnement de l'Union Africaine à travers sa charte constitutive et les critiques qui en découleraient en vue d'évaluer son efficacité par rapport à la Charte de l'Organisation de l'Unité Africaine et les ambiguïtés dont elle est teintée. §1. Mécanisme de fonctionnement de l'Union Africaine Doté d'un complexe d'organes au mode de fonctionnement non conforme à celui de l'Organisation de l'Unité Africaine, en ce qu'ils ont de pouvoirs accrus et une augmentation du nombre des commissions, l'Acte Constitutif de l'Union Africaine a remanié les anciennes institutions de l'Organisation de l'Unité Africaine pour se pourvoir plus des organes qui ressemblent plus à celles prévue par le Traité sur l'Union Européenne. L'article. 5 de l'Acte Constitutif de l'Union Africaine énumère ses organes qui sont au nombre de neuf. A. Les organes de direction de l'Union Africaine 1. La conférence de l'Union Africaine (art. 5, a) La conférence de l'Union Africaine est l'organe suprême de l'union, elle est composée des chefs d'Etats et de gouvernement. Selon son règlement d'ordre intérieur (35(*)), la conférence définit la politique commune de l'union, fixe ses priorités et adopte son programme annuel, elle assure le contrôle de la mise en oeuvre des politiques et décisions de l'union et veille à leur application par tous les Etats membres. A travers des mécanismes appropriés, elle donne des directives au conseil exécutif et à la commission sur la gestion de conflit et décide du droit de l'intervention de l'union, détermine les sanctions à imposer à l'encontre de tout Etat membre en cas de non paiement ou de violation des principes de la charte ; examine les demandes d'adhésion et adopte le budget de l'union. (Article 4 Règlement d'Ordre Intérieur de la conférence de l'U.A). La conférence se réunit en session ordinaire au moins une fois par an, elle élit un président pour une période d'une année sur la base du principe de rotation et des critères convenus. Ce dernier est chargé de convoquer les sessions de la conférence, prononce l'ouverture et la clôture des sessions, dirige les travaux et dans l'intersession, il assure la représentation de l'union en consultation avec le président de la commission (art 15 Règlement d'ordre intérieur de la conférence de l'U. A). 2. Le conseil exécutif de l'Union Africaine Equivalent du conseil des ministres de l'Organisation de l'Unité Africaine, le conseil exécutif de l'Union Africaine connaît une même composition, quorum et organisation que le conseil des ministres de l'Organisation de l'Unité Africaine. Le conseil exécutif de l'Union Africaine assure la coordination et décide des politiques dans les domaines d'intérêt commun pour les Etats membres notamment dans le domaine commercial, économique, éducatif et culturel. Il a vocation d'étudier l'instauration d'une nationalité africaine, de la protection de la condition féminine et des handicapés (art 13 du Règlement d'Ordre Intérieur du Conseil exécutif de l'UA). B. L'organe de mise en oeuvre et de représentation de l'Union Africaine 1. La commission de l'Union Africaine La refonte de l'Organisation de l'Unité Africaine en Union Africaine se remarque plus à travers la commission. Ancien secrétariat général, la commission est le principal organe d'exécution de l'Union Africaine (art 20 Acte Constitutif de l'UA). Elle est composée de 10 membres : un président, un vice-président et huit commissaires. Elle obéit à une parfaite parité entre les hommes et femmes et repose sur un strict respect de l'équilibre régional à raison de deux membres par sous-région. (36(*)) Placée sous l'autorité de la conférence et du conseil exécutif, elle représente et défend les intérêts de l'Union. Elle est le dépositaire de tous les textes juridiques de l'Union et met en oeuvre toutes les décisions de l'Union. Elle propose le budget et reçoit les dons et legs de l'Union. Les membres de la commission sont tenus de ne solliciter et de ne recevoir aucune instruction d'aucun gouvernement. Ils ne sont responsables que devant l'Union. La commission joue un rôle central dans la gestion des conflits. (37(*)) Le président et son vice-président sont élus par la conférence au scrutin secret à la majorité de 2/3 des Etats votant (ici intervient la diplomatie parallèle ou de couloir). Les commissaires sont désignés par le conseil exécutif. Ces derniers sont gestionnaires de porte feuille de la paix et de la sécurité, des affaires politiques, de l'économie rurale et de l'agriculture, etc. Les membres de la commission de l'Union Africaine sont élus pour un mandat de 4 ans renouvelable une seule fois. 2. Le comité des représentants de l'Union Africaine (art 21 Acte Constitutif de l'U.A) Composé des représentants permanents et autres plénipotentiaires des Etats, le comité des représentants est responsable de la préparation des travaux du conseil exécutif selon les instructions dont il agit. Le conseil exécutif peut instituer tout sous-comité ou groupe de travail qu'il juge nécessaire. (38(*)) Le comité facilite la communication entre la commission et les capitales des Etats membres (art 4 Règlement d'Ordre Intérieur du Comité des Représentants de l'UA). Chaque Etat membre veille à ce qu'il soit représenté par un plénipotentiaire mais un Etat non représenté auprès du siège de l'Union Africaine peut désigner un autre pays de sa région pour le représenter (art 3 Règlement d'Ordre Intérieur du Comité des Représentants de l'UA). Le Comité des Représentants de l'UA est pourvu d'un président, qui est celui dont le pays assure la présidence de la conférence, assisté de 3 vices - présidents et un rapporteur élu sur la base de la représentation géographique convenue (art 11 et 12 du Règlement d'Ordre Intérieur du Comité des Représentants de l'UA).
C. Autres Organes de l'Union Africaine 1. Le parlement panafricain En vue d'assurer la pleine participation des peuples africains au développement et à l'intégration économique du continent, il est créé un parlement panafricain (art 17.1 Acte Constitutif de l'UA). Il est donc appelé à représenter la société civile, les partenaires sociaux et les catégories socioprofessionnelles en vue du rapprochement de l'Union avec la population africaine. (39(*)) Le mode de désignation de ses membres n'étant pas prévu par l'Acte Constitutif de l'UA, la représentation des Etats à égalité ou à proportionnalité est sujet à discussion. La solution semble s'orienter vers la création de 2 chambres : un Sénat à représentation égale et une Assemblée à représentation proportionnelle. (40(*)) 2. La cour de justice de l'Union Africaine La cour de justice de l'Union Africaine sera saisie des contentieux nés dans l'Union et des conflits d'interprétation de l'acte constitutif de l'UA, les juges seront nommés par la conférence (article. 18 Acte Constitutif de l'UA). 3. Le conseil économique et culturel de l'Union Africaine Le conseil économique et culturel de l'Union Africaine est un organe consultatif composé de représentants des différentes couches socioprofessionnelles des Etats membres de l'Union. Il travaille sous l'égide de la conférence de l'UA qui détermine son règlement d'ordre intérieur. (Article. 22 Acte Constitutif de l'UA). 4. Comités techniques spécialisés de l'Union Africaine Ces comités sont composés des ministres ou des hauts fonctionnaires chargés des secteurs relevant de leurs domaines respectifs de compétence. Il s'agit : - Du comité chargé des questions d'économie rurale et agricole; - Du comité chargé des questions commerciales, douanières et d'immigration ; - Du comité chargé de l'industrie, de la science et de la technologie, de l'énergie, des ressources naturelles et de l'environnement ; - Du comité chargé de transports, de communications et du tourisme ; - Du comité chargé de la santé, du travail et des affaires sociales ; - Du comité chargé de l'éducation ; de la culture et des ressources humaines. Ces comités assurent le suivi et l'évaluation de la mise en oeuvre des décisions prises par les organes de l'Union et sont responsables devant le conseil des ministres. (41(*)) 5. Les institutions financières de l'Union Africaine Pour mieux promouvoir l'intégration économique, l'organisation va se doter de trois institutions financières : la Banque Centrale Africaine, le Fonds Monétaire Africain et la Banque Africaine d'Investissement. Les gouverneurs des banques centrales africaines qui ont étudié la question le 8 juillet 2002 à Durban ont relevé que pour lancer les initiatives aussi importantes, il faut des préalables économiques et une politique de convergence monétaire. Autant dire que les trois institutions financières ne verront probablement pas le jour avant une bonne vingtaine d'années. (42(*)) 6. Le conseil de paix et sécurité de l'Union Africaine (art. 5, 2° de l'Acte Constitutif de l'UA) Adopté par la 29e session ordinaire de la conférence des chefs d'Etats et de gouvernement au Caire du 28 au 30 juin 2003, le mécanisme de prévention, gestion et règlement des conflits de l'Organisation de l'Unité Africaine n'a jamais su jouer son rôle. En juillet 2001, il est refondu sous cette appellation en vue de promouvoir la paix (art. 3, a protocole relatif à la création de Conseil de paix et sécurité de l'UA), anticiper et prévenir les conflits et si ceux-ci éclatent, faciliter le règlement des conflits, encourager les pratiques démocratiques et la bonne gouvernance (art. 3 protocole précité). (43(*)) Il est composé de 15 membres ayant des droits égaux dont 10 membres élus pour un mandat de deux ans, et 5 autres pour un mandat de trois ans en vue d'assurer la continuité. Ils sont élus par la conférence de l'UA sur le principe de la représentation régionale équitable et de la rotation en tenant compte des critères prévus à l'article 5, a-i du protocole précité. §2. Critiques sur l'oeuvre de l'Union Africaine Selon Claude A. COLLIARD, les principes politiques régissant la société internationale sont le principe d'égalité des Etats, le principe de non-intervention et le principe d'indépendance. (44(*)) Ces principes étant rangés parmi ceux de l'Acte Constitutif de l'UA, nous essayerons d'y faire un commentaire dans les innovations et faiblesses de l'UA.
1. Dans le principe de non-ingérence Il signifie le droit de chaque Etat souverain de jouir de l'exclusivité de sa compétence dans les domaines relevant de sa compétence nationale. (45(*)) Il a été d'une application stricte dans l'Organisation de l'Unité Africaine, principe qui a mis à mal les actions que pourraient entreprendre l'Organisation de l'Unité Africaine même là où son intervention s'avérait nécessaire. Dans l'art. 4. g, l'Union Africaine confirme d'un côté son adhésion à ce principe mais de l'autre elle exprime dans l'art 4.h une réserve à ce principe qui reconnaît "le droit de l'Union d'intervenir dans un Etat membre sur décision de la conférence, dans des circonstance graves, à savoir les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l'humanité". C'est le droit d'ingérence humanitaire en ce qu'il vise à permettre une action internationale quand un peuple serait gravement menacé dans sa survie même.(46(*)) C'est ce que MARIO BETTATI appelle principe de libre accès aux victimes. (47(*)) 2. Sur la participation du peuple à l'Union Africaine Jadis méconnue par l'Organisation de l'Unité Africaine qui n'était l'affaire que des seuls chefs d'Etats, l'Union Africaine a vocation de faire participer le peuple à l'Union (article 17 Acte Constitutif de l'UA). En effet, comme il en est le cas dans le cadre de l'Union Européenne, le temps où on décidait à la place du peuple est révolu. C'est seulement par la voie de consultation du peuple africain à chaque étape de l'intégration africaine, qu'il se sentira concerné par l'Union Africaine. (48(*)) 3. Sur les sanctions et décisions de l'union africaine Les décisions de la conférence sont prises sous forme des règlements, des directives et des recommandations. Les deux premières sont obligatoires à l'égard des Etats membres, à l'égard des organes de l'Union et des Communautés Economiques Régionales. Leur non-respect est passible des sanctions appropriées conformément à l'article. 23 Acte Constitutif de l'UA (article 32-34 du Règlement d'Ordre Intérieur de la conférence de l'UA). Lorsqu'un Etat membre n'a pas respecté ses engagements, il est suspendu. Il lui est interdit de prendre la parole dans les assemblées, de voter, d'abriter les sessions de la conférence, de présenter un candidat à une fonction au poste de l'union. Sans préjudice des sanctions prévues à l'article 23 de l'Acte Constitutif de l'UA qui pourraient s'appliquer, le non-respect des décisions et des politique de l'Union sont sanctionnées par une sorte de blocus de liaison de transport et de communication avec les autres Etats membres (article 36 Règlement d'Ordre intérieur de la conférence de l'UA). En application de l'article 30 de l'Acte Constitutif de l'UA, le changement anticonstitutionnel d'un gouvernement entraîne sa suspension et inadmission de ses représentants aux activités de l'Union. Mais ces interdictions n'affectent en rien leurs obligations envers l'Union ou leur qualité d'Etat membre. Ainsi, il peut leur être refusé le visa, appliqué des restrictions commerciales. Ces sanctions sont prévues par l'article 23 de l'Acte Constitutif de l'UA (art. 37 Règlement d'Ordre Intérieur de la conférence de l'UA). Point n'est besoin de rappeler que ces mécanismes n'étaient pas prévus dans la Charte de l'Organisation de l'Unité Africaine. B. Les faiblesses de l'Union Africaine Malgré les innovations introduites dans l'acte constitutif de l'Union Africaine, celle -ci présente néanmoins quelques failles. 1. Sur la supranationalité Lorsque l'Union Européenne agit selon le principe de base qui est la subsidiarité, c'est pour une efficacité de solutions. Certains domaines sont exclusivement confiés à l'Union Européenne (49(*)) notamment la politique extérieure, la sécurité et le marché commun. (50(*)) On a pu constater par ailleurs que l'exclusivité de la souveraineté nationale a été un frein à l'efficacité de l'Organisation de l'Unité Africaine. (51(*)). Alors, il est surprenant de voir aujourd'hui que l'Acte Constitutif de l'Union Africaine reprend le même principe, sans nuances, malgré le temps révolu, et malgré sa référence au modèle de l'Union Européenne. Le fait pour les Etats de ne pas céder une partie de leur pouvoir au profit de l'UA (décompression autoritaire), validerait une Afrique des parties que celle de l'intégration. Ainsi, un Etat qui contesterait la compétence d'un organe de l'organisation à intervenir dans une affaire de sa compétence, pourrait refuser d'assister aux débats de cet organe saisi en substituant à la volonté de celui-ci sa propre appréciation en rapport avec sa situation juridique et politique. (52(*)) 2. Sur les moyens financiers L'Union Africaine s'est assignée de grands objectifs et un complexe d'institutions sans que les moyens de les réaliser et que les fonds qui vont alimenter ses institutions financières aient été clairement définis... L'Union Africaine ne compte que sur les cotisations des Etats membres pourtant les Etats africains préfèrent visiblement s'acquitter de leurs contributions auprès des institutions non africaines (Organisation des Nations Unies et organisations dérivées) plutôt qu'auprès de l'organisation panafricaine. (53(*)) Ce qui ne lui facilite pas l'efficacité des actions à entreprendre. Le manque de moyen chronique ferait que l'Union Africaine compte sur la bonne volonté du soutien extérieur. Ce qui sacrifierait le but ultime de l'union des africains à la seule faveur de ces étrangers, qui auront conditionné leur intervention par des priorités qui leur sont bénéfiques. C'est à ce titre que nous proposons en premier lieu le recours à l'autre moyen de financement ordinaire notamment par des actions productrices dans des complexes économiques africains, ce qui requiert d'avance un marché africain solide. En deuxième lieu, faute pour l'Union Africaine de réussir un autofinancement, elle procéderait à la réduction de ses objectifs au strict minimum nécessaire, en donnant le temps au temps, ou dans le cas contraire, que les Etats africains riches prennent la relève en utilisant une partie de leur subsides pour financer les actions de l'Union Africaine ou se soutenir mutuellement. 3. Sur le rôle des organes L'Acte Constitutif de l'UA reconnaît la commission comme l'organe d'exécution de toutes les décisions des organes de l'UA. Mais l'article 21 de l'acte constitutif de l'UA institue en même temps le Comité des Représentants comme un organe exécutif des décisions du conseil exécutif de l'union africaine spécifiquement. Ce chevauchement exécutif risque d'être une source de confusion si pas de conflit entre ces deux organes. Une autre confusion pourrait bien se créer entre l'organe Comité Economique, Social et Culturel composé des couches socioprofessionnelles et le parlement panafricain qui est pourvu, en plus d'autres membres, de la même composition, au point qu'on pourrait conclure que le Comité Economique, Social et Culturel est une section du parlement. Si cela s'avérait vrai, il vaudrait mieux supprimer le Comité Economique, Social et Culturel pour rattacher ses compétences à une chambre du parlement. Faisons valoir ici les mêmes critiques faites au rôle dévolu à l'ancien secrétaire général de l'Organisation de l'Unité Africaine. En l'espèce, le fait du maintien, parmi les rôles du président de la commission de l'Union Africaine de la perception des dons et legs, a des conséquences sur la neutralité de ce haut fonctionnaire de l'organisation et sur l'indépendance internationale de ses fonctions. 4. Sur des considérations sociologiques La naissance de l'Union Africaine est consécutive à l'initiative de la violation, au nom de la solidarité africaine, de l'embargo aérien imposé par l'Organisation des Nations Unies à la Libye. Pour louer la bravoure des chefs d'Etats qui ont ainsi osé, le Colonel KADHAFI, président de la Libye, offrit ses visions des Etats Unies d'Afrique en remplacement de l'Organisation de l'Unité Africaine. Or, le changement d'une Organisation Internationale requiert l'assentiment d'au moins ¾ des membres dont la plupart avait des retards de paiement et alors exclus du vote. Pour réunir ce quorum, ou du moins pour marquer sa bonne volonté, le guide Libyen intervint pour régler la dette des Archipels de l'océan Indien 736.634 $ en septembre 1999 et 49.057$ en mai 2002, du Comores 591.993 $ en septembre 1999 et 49.591 $ en mai 2002, de Seychelles 386.605 $ en septembre 1999 et 49.591 $ en mai 2002, du Libéria 41.657 en mai 2002. (54(*)) Par conséquent, on peut en déduire qu'il y a des Etats qui ont voté pour le changement par opportunité de ce soulagement à la dette sans en comprendre la pertinence. Ne peuvent-ils pas se sentir non liés par l'Union Africaine ou dénoncer ses actions dont ils ne se sentent pas liés sociologiquement ? A ces quelques faiblesses, relevées, l'Union Africaine pourrait repenser ses stratégies pour voir son efficacité consolidée surtout en ce qui concerne la supranationalité. En plus de ceci, s'il est donc incontestable que l'Acte Constitutif de l'UA est plus moderne que la Charte de l'OUA, nous pouvons admettre que beaucoup reste encore à faire ou à refaire notamment, dans le cadre des conflits qui déchirent le continent africain. CHAPITRE II. LES CONFLITS EN AFRIQUE Le phénomène de guerre s'est accentué en Afrique à l'issue des indépendances, cela a été dû au climat favorable laissé par l'impérialisme pour le déclenchement de ces guerres. La charte de l'ONU, à laquelle adhèrent toutes les chartes africaines, en son art. 2 § 4 prohibe le recours à la menace et à l'emploi de la force comme mode de règlement des différends internationaux. L'article 1er de la convention de la Haye sur le règlement pacifique des conflits internationaux du 18 octobre 1907 prône le règlement des différends internationaux par des moyens pacifiques.(55(*)) Dans le règlement des différends internationaux, deux types de procédure sont proposés : dans le 1er type, il est proposé une solution aux parties qui ne sont pas tenues de l'accepter ; ce sont les solutions de médiation, de bons offices ( dans les deux cas, il s'agit de l'intervention d'un ou plusieurs Etats tiers tentant de proposer un terrain d'entente ou d'obtenir un arrangement entre les Etats en litige. Les deux procédures se distinguent par une différence de degré car le rôle de l'Etat tiers est plus important en matière de médiation, son intervention étant plus précise et plus continue.) et de conciliation ( il s'agit d'un mode pacifique de règlement comportant l'examen du litige par des personnalités compétentes constituant une commission instituée préalablement au différend et chargée de rédiger un rapport contenant toute proposition utile. Il se distingue de la médiation par l'intervention de personnes dont le caractère principal n'est pas d'ordre politique.) ; et un 2ème type est caractérisé par le caractère obligatoire de la solution élaborée : c'est l'arbitrage (qui fait intervenir des juges du choix des parties, l'aspect juridique de la solution et la sentence arbitrale) et le règlement judiciaire (assorti d'un jugement rendu par une juridiction internationale saisie). (56(*)) Une remarque s'impose à ce sujet du fait que les bons offices sont joués le plus souvent dans les Organisations Internationales par le secrétaire général de l'organisation ; dans l'Organisation de l'Unité Africaine, le rôle de ce dernier était plus protocolaire et administratif que politique. Il n'y avait pas de tribunal institué pour régler les conflits africains. Nous allons voir dans ce second chapitre de manière tout à fait circonscrite, la façon dont l'OUA s'est attelée à résoudre les conflits et guerres sur le continent et entrevoir les voies que se propose l'UA pour juguler ces conflits en vue d'en déduire des nouvelles stratégies d'intervention dans les conflits africains. SECTION I. L'OUA ET LES CONFLITS AFRICAINSLe troisième principe de la Charte de l'OUA sacralisant la souveraineté et l'intégrité territoriale de chaque Etat membre, consacrait le droit inaliénable à une existence indépendante et pensait ainsi mettre fin à toutes les revendications territoriales. Malheureusement, quelques mois après la signature de la Charte de l'OUA divers conflits de ce genre éclatèrent puisque, comme on peut le constater, la charte ne mentionnait pas expressément le principe d'intangibilité des frontières. C'est alors que sera adopté au Caire le 21 juillet 1964, une résolution sur le respect de l'intégrité et le maintien des frontières établies par la colonisation. (57(*)) Nous verrons les conflits frontaliers et les conflits internes. § 1. Les conflits frontaliers Examinons les premiers qui ont marqué l'Afrique juste après l'indépendance. A. La guerre algéro-marocaine En octobre 1963 à cause des prétentions du Maroc sur une partie du Sahara algérien (58(*)), éclate le conflit algéro-marocain dénommé « guerre des sables ». Il a pour origine la délimitation des frontières imposées arbitrairement par la France entre ces deux pays ; à la suite de laquelle le Maroc voulait avoir une main-mise sur une zone riche en gisement de fer de Gara Djebilet dans la zone frontière de Tindouf accordée à l'Algérie par cette délimitation. (59(*)) Lorsque le Maroc accéda à l'indépendance en 1956, il ne considéra pas cette délimitation comme définitive et avança des revendications sur les zones précitées. D'une négociation entre les deux gouvernements, découla un protocole d'accord de résolution de conflit en 1961 mais qui sera mis à mal par des affrontements militaires qui éclatèrent à partir de 1962. (60(*)) Sous la médiation de l'Ethiopie, le cessez-le-feu intervient en octobre 1963. Mais l'intervention de l'Organisation de l'Unité Africaine s'est limitée à prendre, par le biais de son conseil des ministres, une résolution tendant à faciliter le règlement de ce conflit. Le conflit par la suite s'autorégulera, le Maroc étant confronté à un problème du Sahara Espagnol qui le conduisit à rompre avec sa politique. Il cherchera le soutien de l'Algérie, jadis antagoniste, en envisageant une politique de bon voisinage. Les deux pays (Maroc et Algérie) décidèrent d'exploiter en commun le gisement de fer dans la zone conflictuelle. (61(*)) B. Le conflit Somalo - Kenyan. Déjà lors du sommet constitutif de l'Organisation de l'Unité Africaine d'Addis-Abeba, la Somalie ne cacha pas qu'elle ne pouvait souscrire au principe de l'intangibilité des frontières, par ce qu'elle avait des revendications territoriales sérieuses à faire valoir auprès du Kenya. (62(*)) En s'appuyant sur les migrations des tribus somaliennes, le Gouvernement de Mogadiscio émettait des prétentions sur la région frontalière nord rattachée au Kenya et déjà en 1960, un parti somalien y était créé et demanda le rattachement de cette partie à la somalie. (63(*)) Devant le refus du Kenya, ce différend éclata en conflit armé en 1963, le Kenya déposa une plainte auprès de l'Organisation de l'Unité Africaine contre la Somalie. Le conseil des ministres adopta une résolution selon la quelle, les 2 Etats devaient s'engager à résoudre leur différend sur la base des moyens pacifiques. La question de ce conflit a été inscrite à l'ordre du jour des séances jusqu'à ce qu'un règlement définitif fut acquis. (64(*)) Ce conflit a trouvé, dans le cadre de l'Organisation de l'Unité Africaine, un lieu où des discussions ont pu se produire, mais il n'a pas été trouvé solution au fond. Le droit à l'autodétermination des populations d'ethnie somalienne vivant sur le territoire Kenyan n'a pas été trouvé. Le problème a subsisté à l'état latent et a semblé s'orienter vers des solutions par voie diplomatique. (65(*)) C. Conflit Ouganda - Tanzanie En Octobre 1978, quelques 2500 hommes de troupe ougandais se sont rendus maîtres d'une zone de 1600 Km2 au nord du fleuve Kagera en Tanzanie. Selon Idi Amin Dada, ce cours d'eau devait servir de frontière naturelle entre les deux pays. Dès lors, serait rectifiée une limite coloniale qu'un accord entre Londres et Berlin avait fixée au milieu du Lac Victoria. (66(*)) Julius NYERERE ne l'ayant pas entendu ainsi, les hostilités ont été ouvertes. Le président de l'OUA - le Général Gaafar Nimeri - et le Chef d'Etat nigérian - le Général Obasanjo - se sont efforcés de convaincre le Général Idi Amin Dada de retirer ses troupes du territoire Tanzanien. En fait, le conflit prit une autre dimension et se terminera par la chute du Président Ougandais, Idi Amin. (67(*)) Si l'Organisation de l'Unité Africaine s'est penchée à la résolution des conflits frontaliers « avec le plus d'efficacité », ce n'est pas étonnant puisque l'intangibilité des frontières et l'intégrité territoriale ont été pour ainsi dire, la raison d'être de cette organisation. (68(*)) Pourtant, on a remarqué sur les conflits que nous venons d'exposer, non seulement qu'il n'y a pas eu une solution définitive obtenue, l'Organisation de l'Unité Africaine s'étant bornée à prendre des résolutions - recommandations par le conseil des ministres sans aucune intervention du secrétaire général mais aussi on peut relever que ce sont seuls les Etats qui pratiquement trouvaient solution à leur différend (ou l'intervention des personnalités non mandatées par l'Organisation de l'Unité Africaine) ou que des circonstances extérieures aux parties venaient juguler le problème. Là où l'action de l'organisation de l'unité africaine s'avérerait la plus efficace possible, il n'y eut que des failles. Dans les autres cas des conflits internes, l'intervention de l'Organisation de l'Unité Africaine s'est avérée moins opérante. § 2. Les conflits internes Les conflits internes sont dus soit à des luttes armées internes à la course au pouvoir, par des sécessions internes ou par des guerres civiles. Nous allons examiner quelques conflits internes (insistance non faite sur le relais extérieur) et les solutions y apportées par l'Organisation de l'Unité Africaine. A. La crise congolaise Les premières heures de l'indépendance congolaise - actuelle RDC - ont été marquées par des crises d'institutions, de la sécession Katangaise et de multiples rebellions. Cette crise a divisé les chefs d'Etats africains bien avant même la création de l'Organisation de l'Unité Africaine. La confusion qui a régné au Congo (le chef d'Etat Kasavubu destitua son premier ministre Lumumba qui a son tour, se considérant plus légitime destitua le Président) a été à l'origine de la formation du groupe de Casablanca. (69(*)) Le Togo invité à participer au sommet déclina l'offre car, il considérait que la crise ne pouvait trouver solution que par l'Organisation des Nations Unies ; la raison invoquée par le Liberia met en lumière à quel point la crise congolaise est venue involontairement creuser le faussé qui existait déjà entre Etats africains. Ces positions ont fait qu'il se forma au sein de l'Organisation de l'Unité Africaine deux blocs : les pro-lumumbistes et les anti-lumumbistes. Trois ans plus tard, en 1964, avec l'accession de Tchombé au pouvoir à Léopoldville (actuel Kinshasa), il était vu comme l'incarnation du néo-colonialisme avec son rôle joué dans la mort de Lumumba. On lui obstruait l'entrée de la salle des réunions tenues au Caire en 1964 pendant qu'à l'intérieur, se multipliaient les divergences pour ou contre son admission. Finalement il rentra au Congo, sans avoir participé à la conférence des chefs d'Etats et de gouvernements de l'Organisation de l'Unité Africaine tenue au Caire en 1964 et surtout laissant l'Organisation de l'Unité Africaine déchirée. ((*)69) L'Organisation de l'Unité Africaine s'est ainsi limitée non à trouver de solution à la crise mais à étaler ses divisions au grand jour. Il a fallu l'intervention de la mission de l'Organisation des Nations Unies au Congo (ONUC) et le coup d'Etat de Mobutu pour mettre fin à la crise. B. Le problème de la Rhodésie L'indépendance unilatérale de le Rhodésie est une autre situation qui a mis à l'épreuve l'unité de l'OUA. Si cette indépendance de la Rhodésie a fait problème, ce n'est pas parce qu'elle fut proclamée unilatéralement c'est-à-dire sans le consentement de la Grande-Bretagne ; c'est bien plutôt parce que personne ne put soutenir qu'elle fut l'indépendance de tous les Rhodésiens. (70(*)) Cette indépendance consacrait la domination de la minorité blanche sur la majorité noire. Devant la détérioration de la situation, l'Organisation de l'Unité Africaine multiplia les appels à la Grande-Bretagne pour qu'elle empêchât l'indépendance de la minorité blanche, mais l'indépendance fut proclamée en 1965. La réaction de l'Organisation de l'Unité Africaine ne se fit pas attendre. (71(*)) La Grande-Bretagne invitée encore une fois à écraser la « rébellion » Rhodésienne n'a pas réagi. Les Etats membres de l'Organisation de l'Unité Africaine se décidèrent, alors, de rompre les relations diplomatiques avec la Grande Bretagne. Malheureusement, cette menace qui devait montrer la détermination de l'Organisation de l'Unité Africaine à trouver une solution favorable ne fut pas suivie d'effet et étala au grand jour l'indétermination de l'organisation.(72(*)) En effet alors que la Grande-Bretagne n'avait pas donné le moindre signe de vouloir se plier à leurs injonctions, les Etats africaines, eux, ne tinrent pas parole et maintinrent leurs relations diplomatiques avec Londres. On a pu se demander pourquoi les chefs d'Etats africains ont désavoué ainsi publiquement et sans façon leurs ministres des affaires étrangères. Une chose est certaine : devant l'entêtement des colonialistes de Rhodésie, l'Organisation de l'Unité Africaine a plutôt fait montre de sa faiblesse et de son peu de sérieux. (73(*)) C. Les crises dans les grands Lacs Les crises africaines débouchent dans nombre des cas sur des situations de guerre civile et de violence généralisée. Dans cette région, la paix est toujours menacée, en raison de la problématique rwandaise et burundaise. (74(*)) En 1994 éclata un génocide au Rwanda. Le chao perdura trois mois, soit depuis avril jusqu'en juillet 1994, et on n'a pas vu une influence de l'Organisation de l'Unité Africaine là où elle aurait dû intervenir ne fût-ce que qu'en force d'interposition. Pourtant sa commission de prévention et gestion des conflits venait d'être créée en 1993. Il a fallu l'intervention des Français, à travers l'opération dénommée turquoise pour tempérer le désastre et l'intervention du front patriotique rwandais (F. P. R) qui a pris le pouvoir au Rwanda en juillet 1994. Deux ans plus tard, une rébellion naquit au Zaïre, actuelle République Démocratique du Congo, soutenue par les armées des pays de la région des grands lacs et porta l'Alliance des Forces Démocratique pour la Libération du Congo (AFDL) au pouvoir en 1997. D'autres rebellions naquirent deux ans plus tard, dans le même contexte, mais vont trouver solutions par les bons offices des personnalités et chefs d'Etats africains, après multiples interventions des ex-puissances coloniales ainsi que celle de l'Organisation des Nations Unies à travers sa mission de maintien de la paix au Congo (MONUC). Dans la succession légale, la compréhension du jeu politique africain, de même que son évolution proviennent du fait que, sur notre continent, les méthodes démocratiques et/ou les procédures institutionnelles interviennent de manière peu fréquente dans le remplacement des leaders politiques. (75(*)) Dans la plupart des conflits internes africains, l'intervention des médiateurs (les uns nommés dans le cadre de l'Organisation des Nations Unies) et les autres personnalités - par initiative propre - ne l'ont jamais été dans le cadre de l'Organisation de l'Unité Africaine qui vivait d'ailleurs ses derniers jours pour faire place à l'Union Africaine. SECTION II. MECANISME DE GESTION DES CONFLITS PAR L'UNION AFRICAINE Il s'avère que l'Union Africaine aura beaucoup des difficultés à réaliser l'intégration politique du continent à cause des Etats africains qui déstabilisent les autres. (76(*)) La sécurité est l'une des priorités que s'est fixée l'Union Africaine et devrait être d'ailleurs une de ses préoccupations majeures car on ne conçoit pas un développement sans sécurité. Au vu de tous les conflits que vit l'Afrique, il a été décidé, par décision AHG / Déc. 160 (XXXVIII), au sommet de Lusaka de juillet 2001, de créer au sein de l'Union Africaine, le conseil de paix et de sécurité. C'est ainsi que nous allons essayer de voir la complexité du fonctionnement de cet organe qui a préexisté au sein de l'Organisation de l'Unité Africaine sans s'être jamais fait sentir.
§1. Fonctionnement du Conseil de paix et de sécurité de l'Union Africaine Le rôle de cet organe se rapporte à la prévention, à la gestion et au règlement des conflits. Comme le chapitre 8 de la charte des Nations Unies prévoit l'existence des accords et organismes régionaux dans la gestion des conflits, la subordination de ces organismes au conseil de sécurité de Nations Unies se laisserait présumer. Mais cette subordination est mitigée par l'imprécision des termes "accords ou organismes régionaux'' et par la légitime défense collective reconnue par la Charte des Nations Unies à ces organismes. (77(*)) Le conseil de paix et de sécurité est appuyé par la commission, par un groupe de sages ainsi que par un système continental d'alerte rapide, une force pré-positionnée et un fonds spécial. Il est composé des 15 membres ayant des droits égaux dont dix membres désignés pour un mandat de deux ans et cinq autres membres pour un mandat de trois ans selon le critère de représentation régionale et de la rotation. Le conseil de paix et de sécurité de l'Union Africaine est chapeauté par la conférence de l'Union Africaine. A. Prévention des conflits Un système d'alerte rapide est crée. C'est le système continental d'alerte rapide qui facilite la prévision et la prévention des conflits. Il a en son sein un centre d'observation - salle de veille - à charge de collecter et de traiter les données recueillies et des situations qui peuvent déboucher en conflit, en suivant leur évolution et préparant la meilleure action à prendre pour éviter l'éclatement du conflit. Le système d'alerte rapide ou salle de veille fait rapport sur ces situations au président de la commission qui en informe à son tour le Conseil de Paix et de Sécurité. Ce dernier fait des recommandations à la conférence de l'Union Africaine pour qu'elle se décide sur des mesures à prendre face à des conflits potentiels et menaces à la paix. B. Gestion des conflits Lorsqu'un conflit prévenu ne peut être évitée, l'Union Africaine met en place une force africaine pré-positionnée composée des contingents multidisciplinaires en entente, avec les composantes civiles et militaires stationnées dans leurs pays d'origine et prêts à être déployées rapidement aussitôt que requises. Les Etats membres mettent des contingents à la disposition de l'Union. La force africaine pré-positionnée a mandat d'observation et de contrôle, d'appui à la paix, d'intervention humanitaire conformément à l'article 4 (h) et (j) de l'Acte Constitutif de l'Union Africaine, d'apaisement pour éviter des effets des conflits violents ou en voie de s'étendre. Elle intervient en plus, par un déploiement préventif, dans la consolidation de la paix, le désarmement et la démobilisation après les conflits. On a vu pour la première fois le déploiement d'une force africaine de maintien de la paix au Burundi en 2003, composée des contingents africains pour faire asseoir les institutions politiques de la transition burundaise. Ainsi se projettent de telles initiatives en Somalie, au Liberia et en République Démocratique du Congo pour appuyer la transition. Il sied de constater qu'à l'instar du rôle dévolu aux accords et organismes régionaux par le Conseil de Sécurité de Nations Unies, l'Union Africaine prévoit presque la décentralisation des mêmes rôles pour les organisations régionales africaines. Il est prévu des relations entre l'UA et ces organisations puisqu'elles font partie intégrante de l'architecture de la sécurité et assument la responsabilité principale de la promotion de la paix et de la stabilité en Afrique. C'est ce que nous appelons le sous-chapitre 8 de l'Acte Constitutif de l'Union Africaine. C'est dans ce cadre qu'il a été reconnu par l'organe central [central organ/MEC/AMB/COMM. (XCIX)] le rôle et les efforts joués par la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest pour son soutien et ses contributions importantes dans la recherche d'une solution négociée au conflit libérien. (78(*)) Mais à ce sujet, Amara Essy a relevé, tout en soulignant l'importance des Organisations Régionales Africaines dans la résolution des conflits, une difficulté dans la coordination des actions de ces organisations. (79(*)) Faute de cette coordination, nous risquons de déboucher sur des solutions incompatibles. Voilà une tâche dévolue au président de la Commission de l'Union Africaine afin de conformer actions des Organisations aux objectifs et principes de l'Union. C. Le règlement de conflit Le déploiement des contingents a pour but de calmer une situation de tension et tenter que les parties trouvent une solution négociée à leur conflit. Dans les situations post-conflit, le conseil de paix et de sécurité facilite la restauration de l'Etat de droit, la création et le développement d'institutions démocratiques. Les contingents interviennent pour consolider des accords de paix qui ont été conclus. C'est alors que le président de la commission de l'Union Africaine coopérera étroitement avec les organismes régionaux africains auxquels il est reconnu ce grand rôle dans la consolidation de la paix après le conflit. Il est, à ce titre, créé au sein de ces organismes un bureau de liaison avec la commission de l'Union Africaine. Nous pouvons schématiser le fonctionnement du Conseil de Paix et de Sécurité de l'Union Africaine comme suit. 2 Président de la Commission de l'UA Conseil de Sécurité des Nations Unies. des N.U. 3 3 7 8 4 4 5 6 6 1 Contingents panafricains Parlement panafricain Conférence de l'UA Organismes régionaux africains Conseil de paix et sécurité de l'UA Salle de veille Légende
§2. Pour une meilleure prévention des conflits en Afrique Selon l'institut de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI), en 1998, onze des 27 conflits majeurs qui ont eu cours dans le monde se sont déroulés en Afrique faisant pour cette seule année une vingtaine des milliers des morts.(80(*)) Ces chiffres alarmants qui n'ont pas cessé d'accroître exigent une reformulation des stratégies pour régler les conflits africains. L'Organisation de l'Unité Africaine elle même a bien tenté d'intervenir dans les conflits africains : contre Tchombé au Congo en 1964-1965 mais en vain, elle a tenté d'intervenir dans la guerre du Biafra, mais également en vain ; elle a tenté d'écarter le coup d'Etat en Uganda en 1971 toujours en vain. Elle s'est tue devant les problèmes dramatiques du Rwanda et du Burundi, devant la guerre civile du Sud Soudan, devant le problème Érythrée.(81(*)) Pourtant l'OUA avait en son sein, un organisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits. Coopté par l'Union Africaine, l'organisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits risque de se buter aux mêmes difficultés que son prédécesseur par un manque d'intérêt, des stratégies et même d'opportunité. L'Afrique est truffée de sonnettes d'alarme et de feux clignotants, ce qui ne garantit absolument pas une prévention efficace des conflits. (82(*)) C'est pourquoi, pour une meilleure prévention des conflits en Afrique, nous proposons avec les auteurs, une intervention à temps avec un contact réel et la prise en compte des voeux de la base, en l'associant au processus de résolution des conflits. Ainsi, il serait mis en place une sorte de diplomatie civile. Lorsqu'une certaine unité et stabilité sera atteinte en Afrique, il sera alors question, de renforcer la concertation commune non seulement au niveau du sommet mais aussi dans les organisations et conférences internationales. A. Le rôle de la base dans les conflits AfricainsPuisque c'est dans la base que prend naissance le conflit qui se déclenche le plus souvent en hostilité, il serait illogique qu'elle ne soit pas prise en compte pour la recherche de la solution du conflit. S'il est bien facile de saisir les tenants et les aboutissants d'un conflit externe et l'intervention d'une solution soit par la diplomatie traditionnelle soit par les bons offices, les conflits internes et les guerres civiles sont les plus difficiles à gérer. Or, même le système continental d'alerte rapide, bien que pourvu d'une salle de veille, se situe à la direction de gestion de conflit de l'Union Africaine (art 12 protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de Sécurité de l'UA). L'éloignement avec la base reste ostensible puisque le système est attaché aux organes de l'organisation continentale. 1. La dynamique de conflit L'organisation actuelle de la prévention de conflit est insatisfaisante. Les causes principales sont les suivantes : les problèmes en rapport avec le pronostic de la dynamique de conflit, une dynamique ou une volonté insuffisante pour intervenir, une compétence déficiente en matière de prévention de conflit. Nous plaidons ainsi pour une diplomatie de terrain. (83(*)) C'est alors que deux approches doivent être faites. D'avis avec Eric SUY, Professeur à la faculté de droit de l'Université Catholique de Louvain : « l'échec des règlements des conflits par la communauté internationale est dû au fait qu'elle a trop longtemps ignoré les acteurs locaux, et elle s'est enfermée dans un dialogue avec les élites des pays qui ont été souvent les promoteurs des conflits en question ». (84(*)) L'intervention est plus souvent dictée par des intérêts particuliers que suscite le conflit, le manque d'une organisation à prévention efficace. Il faut donc donner un rôle prépondérant dans ce domaine à la base où se trouvent les dirigeants locaux, les Organisations non Gouvernementales autochtones, les travailleurs sociaux, les organisations locales de santé, les enseignants et les dirigeants des camps et au niveau intermédiaire où on retrouve les dirigeants ethniques, religieux, les académiciens et les intellectuels ; les dirigeants humanitaires et d'autres personnes ou institutions reconnues. (85(*)) C'est dans cette optique que se placerait l'intérêt capital qu'on confierait aux Communautés Economiques Régionales Africaines pour le règlement des conflits d'intérêts locaux. Le développement africain dans tous les secteurs devrait tenir compte de la base surtout pour la prévention. D'où la nécessité de la cohésion et de la compréhension dans un cadre sous régional Africain. Pour la deuxième approche, on ne peut pas aussi, pour la recherche de solution aux conflits africains ignorer leur caractère extraverti. Il faut noter, selon Amara ESSY, dernier secrétaire général de l'Organisation de l'Unité Africaine, que : « les conflits africains revêtent une dimension extra africaine. Dès lors, la recherche d'une solution durable doit tenir compte de ce paramètre fondamental ». (86(*)) 2. La diplomatie de terrain Un des développements les plus récents dans le domaine de la diplomatie non gouvernementale est la diplomatie de terrain. Elle se présente comme une valeur ajoutée à la diplomatie traditionnelle. Alors que dans la diplomatie traditionnelle, l'Etat et les intérêts nationaux occupent une place centrale, la diplomatie de terrain recherche une synergie des différentes approches diplomatiques et le développement d'une diplomatie qui démontre son efficacité à plusieurs niveaux. (87(*)) La diplomatie de terrain se distingue des autres formes de diplomatie par ses caractéristiques suivantes :
S'il est évident que les frontières héritées du partage colonial de l'Afrique ont reparti les populations ethniquement identiques entre plusieurs Etats, ce qui à tout moment donna naissance à des conflits interafricains, il est évident aussi que l'unification de l'Afrique ferait disparaître toute possibilité de division (89(*)), en mettant en place un meilleur mécanisme de règlement de conflit tel que nous venons de le voir. B. La concertation commune Pour jeter une base solide dans l'unité africaine tant recherchée, il vaudrait mieux, tant qu'on n'y est pas encore, renforcer la concertation des Etats africains avant la prise de position dans tous les domaines en général, et dans celui extérieur et sécuritaire en particulier. Les Etats Africains, pris individuellement, sont trop faibles face aux grandes puissances. Cette faiblesse les amène à chercher leur sécurité dans les accords avec les ex-puissances coloniales. (90(*)) D'où la nécessité et la place qui doit être réservée à cette concertation surtout dans un cadre régional.
Les Etats membres de l'Union Européenne, eux, représentés dans les organisations internationales ou des conférences internationales dans lesquelles tous les Etats membres ne le sont pas, tiennent ces derniers informés sur toute question présentant un intérêt commun. Les Etats qui sont membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies se concertent et tiennent les autres pleinement informés. Ils veillent à défendrent les positions et l'intérêt de l'Union... (91(*)) Mais pour les Etats Africains, nous constaterons qu'ils ont souvent des positions et vues tout à fait différentes dans les conférences internationales, ils se combattent ainsi entre eux-mêmes là où leur cohésion serait la plus nécessaire. Ils brillent ainsi dans l'incompréhension et sont par conséquent affaiblis. Alors, ils n'attendent toutes les solutions que de l'extérieur même dans un conflit local sans relais extérieur. Evidemment, pour paraphraser Koffi Annan, Secrétaire Général des Nations Unies qui, rappelant la récente rencontre de certains chefs d'Etats avec les dirigeants du G8 au Canada, qui ont prouvé leur respect pour l'Afrique, il souligne qu'ils nous respecteront encore plus lorsqu'ils nous verront régler concrètement les conflits qui défigurent notre continent. (92(*)) CHAPITRE III. L'AFRIQUE ET SON ECONOMIE : POUR UNE INTEGRATION ECONOMIQUE AFRICAINE Il est évident qu'une politique qui se veut bonne doit avoir une assise économique. Toute politique qui ne favorise pas le rassemblement économique des africains à long terme est vouée à l'échec. C'est à ce niveau que l'Afrique doit disposer d'une organisation politique dynamique. (93(*)) Il est tout à fait inadmissible et incompréhensible qu'à l'intérieur de l'Afrique, même si nous n'avons pas encore atteint le stade de la monnaie unique et du démantèlement des barrières douanières, qu'il n' y ait pas de facilité de change des monnaies. ((*)) Pourtant il y a cette facilité de change avec une monnaie lointaine aux pays africains, le dollar américain. C'est alors qu'on plaide pour l'intégration des économies africaines, une des missions que se fixe l'Union Africaine. Cette intégration qui est encore à son stade révolutionnaire, avait déjà commencé par le processus des plans de développement sous l'Organisation de l'Unité Africaine mais avait échoué. Ce processus a été repris par l'Union Africaine dans un ordre individuel (le Nepad), l'Afrique n'ayant pas rompu avec sa politique d'aide extérieure, obstacle à son développement. Et par l'évolution du temps, la mondialisation est venue bouleverser toutes les prévisions économiques africaines. C'est l'un et l'autre de ces points que nous allons analyser dans ce chapitre. SECTION I. LES PLANS DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE AFRICAIN Il y en avait plusieurs sous l'OUA mais nous n'allons retenir que les deux qui nous paraissent importants. Ces plans ont échoué et ont laissé place à celui de la nouvelle initiative africaine, devenue le Nepad. §1. Les plans de développement sous l'OUA A. Le plan de Lagos Préparé par le secrétariat de l'Organisation de l'Unité Africaine et adopté par les chefs d'Etat réunis en Avril 1980 à Lagos, le plan de Lagos est devenu une référence économique pour les dirigeants africains.
Le plan de Lagos avait comme programme le renforcement des structures économiques régionales déjà existantes en vue de l'établissement ultérieur d'un marché commun africain, prélude à une communauté économique africaine (art I de l'acte final de Lagos). (94(*)) Il découle de ce plan, que pour ses stratégies, il entend, pour sa mise en application, épouser la thèse de Samir AMIN du dépandantisme qui a été vivement critiqué car irréaliste. (95(*)) C'est pourquoi on lui a adjoint un assouplissement d'une déliaison partielle avec le système du commerce mondial. (96(*)) Sans rejeter ni les échanges avec le monde industrialisé, ni l'aide extérieure, les auteurs du plan de Lagos considèrent que l'Afrique doit davantage compter sur ses propres forces et réduire sa dépendance vis-à-vis des exportations et l'assistance technique étrangère. (97(*)) Enfin, le plan met l'accent sur les échanges interafricains et la coopération entre les différents pays du continent, l'objectif étant de réaliser un marché commun africain et le renforcement des structures économiques régionales existantes. Pour ses auteurs donc, la coopération régionale est non seulement une fin, mais aussi un moyen de développement du continent et même, pourrait-on dire, le seul moyen envisageable pour que l'Afrique émerge de sa situation actuelle. (98(*))
Ce plan présente des insuffisances et des lacunes. C'est ce qui semble expliquer le fait, qu'il n'ait pas été appliqué. Dès son préambule, les chefs d'Etat s'engagent individuellement et collectivement à promouvoir le développement économique et social, de l'intégration des économies en vue d'accroître l'auto-indépendance et favoriser un développement endogène et auto entretenu. Ces déclarations d'intention n'ont pas suffit pour changer la situation. Certaines de ses propositions sont apparues irréalistes. (99(*)) Une autre des lacunes que l'on peut relever dans le plan de Lagos, est qu'il est étroitement économique et néglige la dimension politique. Il ne suffit pas ainsi de proclamer que les paysans doivent recevoir une incitation financière pour augmenter leur productivité sans tenir compte des réalités locales pour la mise en oeuvre d'une politique économique viable. (100(*)) A ces incertitudes africaines est venu s'ajouter un climat de méfiance. En effet, les 2 initiatives du plan (voir son art 1er précité) ont été superbement ignorées par les institutions de Bretton Woods, qui se sont plutôt employées à perpétuer et à renforcer l'appareil productif hérité du système colonial, lequel avait été mis en place pour l'expansion du commerce transatlantique au détriment des courants d'échanges interafricains. (101(*)) B. La communauté économique Africaine (CEA) ou traité d'Abuja. Le plan de Lagos est tombé en désuétude et s'est vu remplacé par le traité d'Abuja approuvé le 3 juin 1991 au sommet de l'OUA et entré en vigueur le 12 mai 1994, la Communauté Economique Africaine devrait aboutir, en 2019 à une union douanière, et finalement à un marché commun africain en 2028. (102(*)) Ce plan est en fait, une reformulation du plan de Lagos et c'est la principale base sur la quelle se réfère l'Union Africaine pour relancer l'économie africaine. L'acte constitutif de l'Union Africaine se fixe dans ses objectifs, la Communauté Economique Africaine comme un programme ultime à réaliser. Le traité pose essentiellement comme voie de sortie du sous-développement de l'économie africaine, l'intégration régionale en Afrique. Cette démarche du traité d'Abuja a été critiquée : certes que le traité s'inspire largement de l'expérience européenne, mais n'a pas tiré les conséquences de cette expérience. En effet, avant qu'elle ne se s'ouvre au reste de l'Europe, l'actuelle Union Européenne n'a commencé qu'avec 3 Etats (Belgique, Pays-Bas et Luxembourg) qui ont eu un intérêt économique commun et soudé à défendre. Le traité d'Abuja se propose en plus de relancer cette intégration sans tenir compte des risques de désintégration et d'implosion sociale et politique menaçant nombre d'Etats notamment par la montée de l'insécurité et des conflits sur le continent. (103(*)) On se rend ainsi compte que l'intégration est un problème politique dont il convient de débattre comme tel au niveau national et dans les universités, s'interroger sur la légitimité des traités signés par les régimes autoritaires qui déclarent leur adhésion à l'intégration régionale, tout en minant cette même intégration par leurs actions. Mais on peut concevoir l'initiative d'Abuja dans le long terme, en tenant compte du fait que les handicaps de l'Afrique en matière de gestion de ce genre de programme s'amoindriront probablement au fil du temps. (104(*)) §2. Le plan de développement sous l'Union Africaine L'avènement de l'Union Africaine a coïncidé avec le lancement du Nepad, nouvelle initiative dans les plans de développements africains. L'influence de la dette extérieure sur le développement socio-économique et politique africain, nous amènera à faire une critique sur le Nepad et sur la dette africaine. A. Le Nepad (nouveau partenariat pour le développement africain) Baptisé antérieurement "nouvelle initiative africaine", le Nepad est la fusion des deux projets de stratégies de développement de l'Afrique : celui du partenariat pour le renouveau africain élaboré par les Présidents Thabo MBEKI, Abdelaziz BOUTEFLIKA , et Olusegun OBASANJO , visant à la fois à renouveler l'image souvent négative du continent africain dans le monde et à obtenir une place plus équitable pour l'Afrique sur la scène internationale ; et le second du président sénégalais, Abdoulaye WADE, le plan Oméga, dont l'objectif est la création d'un marché commun africain via une sorte de '' plan Marshall '' pour l'Afrique, à travers le financement des grands projets d'infrastructures. (105(*)) Les concepteurs du projet proposent la mobilisation des ressources africaines et leur utilisation concrète. Ceci requiert un leadership courageux et imaginatif de nature à améliorer les conditions de vie et l'éradication de la pauvreté, ainsi qu'un nouveau partenariat mondial fondé sur la responsabilité conjointe et l'intérêt mutuel. (106(*)) En vue de faire participer de l'Afrique à la production mondiale et au commerce international, le plan se propose d'oeuvrer dans 8 secteurs prioritaires : infrastructures, éducation, santé, agriculture, nouvelle technologie de l'information et de la communication, environnement, énergie et accès aux marchés. Le Nepad s'appuie sur l'investissement privé pour ses besoins de financement et privilégie les régions comme lieux d'intervention, c'est-à-dire, les 5 grands ensembles politiques et économiques déjà existants : Nord- Est -Ouest- Centrale-Australe. Ainsi par exemple, le projet d'électricité à partir du barrage d'Inga en RDC ou d'extension du réseau ferré en Afrique de l'Ouest. (107(*)) Les mérites qu'on peut d'emblée reconnaître à ce plan, notamment le vaste projet de relance d'infrastructures et industries africaines, sont suivis des critiques tant économiques que juridiques qui réduiraient considérablement son prestige. 1. Critiques sur le plan économique Au plan économique, une incertitude plane sur la provenance de financement, sa source principale étant les capitaux privés. Or, ceux-ci n'apportent pas la croissance économique mais son suivi. Si une fois ce financement privé est obtenu, il ira naturellement là où il y a de bonnes possibilités de faire des affaires ; ce qui ne fera qu'accroître les inégalités en Afrique. En plus, sa bonne réception par les pays occidentaux n'est pas bénéfique pour l'Afrique, car ils y voient une manière de transformer l'Afrique en un vaste marché ouvert. Or le continent africain ne remplit pas les conditions pour entrer dans ce type de libéralisme mondialisé. (108(*)) L'Union Africaine qui voit la mondialisation comme un défi à lever (voir préambule de l'Acte Constitutif de l'Union Africaine) se voit emboîté les pas par le Nepad qui accueille bien la mondialisation d'emblée. 2. Critiques sur le plan juridique Bien qu'il soit affirmé que le Nepad n'est pas une institution entièrement autonome par rapport à l'Union Africaine car adopté au sommet de LUSAKA de Juillet 2001 comme programme de l'Union Africaine (109(*)), il risque néanmoins de se poser une crise de relation entre l'UA et le Nepad. On se souviendra que l'Union Africaine a pour rôle de réaliser la Communauté Economique Africaine, structure dans la quelle vient s'intercaler le Nepad. En plus, l'avènement simultané du Nepad et de l'Union Africaine reflètent des conflits réels de leadership qu'il va falloir régler.(110(*)) En effet, alors que les autres plans de développement africain naissaient dans un cadre de conférence de l'organisation panafricaine, le Nepad est une émergence des individualités dont l'Union Africaine est appelée à exécuter les programmes. Si ultérieurement, les actions du Nepad se font sentir au point de bouger l'Afrique, ses concepteurs ne tarderont pas à s'en réclamer la paternité. Et si la population africaine, ne se sent pas concernée par les plans adoptés par leurs représentants, qu'en sera-t-il de celui du Nepad où elle n'a été ni consultée ni associée à son élaboration ? B. La dette extérieure La résolution 1803 (XVII) du 14 décembre 1962 relative à la souveraineté permanente sur les ressources naturelles, adoptée par l'Assemblé Générale des Nations Unies, reconnaît la souveraineté permanente des peuples et des nations sur leurs richesses et ressources naturelles pour le développement et le bien être de leur population. (111(*)) Il est ainsi paradoxal que les économies africaines ne comptent que sur le soutien étranger. L'Afrique dépend beaucoup plus que toute autre région du globe de l'apport des capitaux étrangers pour les biens et les services dont elle a le plus souvent besoin pour son développement.(112(*)) Cette politique a été entretenue par les puissances coloniales pour continuer à maintenir l'Afrique sous leur dépendance. Cette dépendance est entretenue par la banque mondiale et le Fonds Monétaire Internationale, deux organisations qui déterminent aujourd'hui le mode et le rythme de développement des nombreux pays africains. (113(*)) La dette extérieure permet aux bailleurs de fonds d'exercer un contrôle sur les politiques et le développement des pays en définissant eux-mêmes l'usage et le domaine d'affectation des fonds qu'ils mettent à la disposition des Etats. (114(*)). Généralement, les institutions financières internationales ne réduisent ni n'annulent la dette. Elles exercent des pressions sur les emprunteurs pour qu'ils règlent leurs arriérés, ce qu'ils ne peuvent faire qu'en empruntant encore d'avantage. (115(*)) La question de l'annulation de la dette extérieure des pays africains est devenue un problème crucial dans les négociations avec les institutions internationales. A notre avis, les Etats africains auraient pu renoncer à une annulation précaire de la dette et recourir à la justice pour un refus de remboursement car ils ont été dupés dans la transaction. Les principes généraux de droit reconnaissent à une partie d'invoquer la mauvaise foi du contractant pour répudier les obligations nées du contrat. Il suffira à un seul Etat africain de saisir une juridiction internationale pour créer un précédent. En dehors de cette voie judiciaire, les Etats africains devront se mobiliser pour une auto soutenance, par l'appui des Etats économiquement forts pour aider les pays économiquement faibles à se relever. Ce qui accroîtrait la confiance africaine. * 34 Http://www.monde-diplomatique.fr/2002/07/TSHIYEMBE/16697 consulté le 02.10.2003. * 35 Pour l'intégralité du règlement d'ordre intérieur de la Conférence de l'U.A, voir http://www.africa- union.org/official_documents/treaties_conventions.fr/regl (consulté le 20.10.2003). * 36 Chérif OUAZANI, « Qu'est - ce que la commission ? », in JA/I, n° 2217 du 6 au 12 / 7 / 2003, p. 24, mais nous devons faire remarquer ici que les sous - régions du continent ont été étendu à la « diaspora », soit 6ème sous - région : chérif OUAZANI, « Union Africaine », in JA/I, n° 2196 du 9 au 15 / 02 / 2003, p.50. * 37 Http://www.reliefweb.int/w/rwb.nsf. consulté le 7 . 10 . 2003. * 38 http://www.africa-union / organs/ permanent consulté le 20 . 10 . 2003. * 39 Samir GHARBI, « L'UA en dix questions qu'est - ce que le parlement panafricain », in JA/I, n° 2115 du 24 au 30 / 7 / 2001, p. 25 - 27 * 40 Chérif OUAZANI, « Union Africaine : les douze travaux d'Amara Essy », in JA /I, n°2060 du 4 au 10/7/2002, p.24. * 41 Http://www-union.org/organs/specialized_technical_committee.fr.htm consulté le 20.10.2003. * 42 Francis KPANTINDE, « UA : Une si longue et si difficile transition », in JA/I, n°2215 du 22 au 28/06/2003, p.78. * 43 Pour l'intégralité de ce protocole, visiter Http://www.africa- union.org/offical_documents/treaties_convention_fr/PROTOCOLE visité le 20/10/2003. * 44 Claude - Albert COLLIARD, Institutions internationales, 2e éd., Paris, Dalloz, 1963, pp. 230 et ss. * 45 Raymond RANJEVA et Charles CADOUX, Droit International Public, Paris, éd. Hachette, 1992, p. 86. * 46 Blaise BAYUBASIRE Kaboyi, De la compétence et de l'intervention des Organisations Internationales face à la souveraineté des Etats, Mémoire, L2 Droit, UNIKIS/CUB, 2001-2002, p.27. * 47 Nguyen QUOC DINH, Patrick Daillier, Alain Pellet, Droit international public, 2e éd., Paris, LGDJ, 1980, p. 394 et ss. * 48 Http://www.uneca.org/fdaii/coverage/fr news letter/fr.020308.gouly.htm consulté le 07/10/2003. * 49 Michel LABORI et Didier BOURDELIN, L'Europe de douze, une puissance mondiale en devenir ?, Paris, éd. Marketing, 1986, p. 418. * 50 Dusan SIDJANSKI, L'avenir fédéraliste de l'Europe, la Communauté européenne, des origines au traité de Maastricht, 1e éd., Paris, PUF, 1992, p. 336. * 51 Francis WODIE, Les institutions internationales régionales en Afrique occidentale et centrale, Paris, L.G.D.J, 1970, pp. 10-12. * 52 René Jean DUPUY, La communauté internationale entre le mythe et l'histoire, coll. Droit international, Paris, éd. Economica, 1986, p. 66. * 53 Edem KODJO, in Edmond JOUVE, Op.cit, p.14. * 54 Francis KPANTINDE, « UA : ce qui attend KONARE » ,in JA/I, n° 2220 du 27 au 2/8/2003, p. 47. * 55 Convention sur le règlement pacifique des conflits internationaux signée à la Haye le 18 octobre 1907, in Paul REUTER. Op.cit, pp.9-22. * 56 Ibidem. * 57 Résolution AGH / Rés. 16 sur l'intangibilité des frontières africaines adoptée par la conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA, au Caire, le 21 juillet 1964, in Jean MFOULOU, Op. cit., pp. 85-86. * 58 H. MARCHAT, « Le conflit algéro-marocain », in revue juridique et politique, 1964 p. 65 et Ss cité par Edmond JOUVE, Op.cit, p. 118 * 59 Edmond JOUVE, Op.cit, pp. 118-123. * 60 Ibidem * 61 Edmond JOUVE, Op.cit, pp 118-123. * 62 Jean MFOULOU, Op. cit., p. 52 * 63 Edmond JOUVE, Op.cit, pp 118 - 123. * 64 Résolution ECM / Rés. 4 (II) adoptée par la 2ème session extraordinaire du conseil des ministres de l'OUA, à Dar-es-Salaam, du 12 au 15 février 1964. * 65 Edmond JOUVE, Op.cit, pp. 118. * 66 Edmond JOUVE, Op.cit, p. 125 * 67 Ibidem * 68 Jean MFOULOU, Op.cit, p. 53. * 69 Jean MFOULOU, Op. cit., p. 53. * 70 Jean MFOULOU, Op.cit, p. 57. * 71 Idem, pp. 58-59. * 72 Ibidem * 73 Ibidem * 74 Valentin KAYILA, Congo : La démocratie du plus fort, Rapport historique sur un peuple qui contribua au salut de l'humanité aujourd'hui humilié au mépris total, Bruxelles, Centre de recherche et d'études Kongo, mai 2000, p. 83. * 75 Momar Coumba DIOP et Mamadou DIOUF, Les successions légales : les mécanismes de transfert de pouvoir en Afrique, Dakar, CODESRIA, 1990, p.12. * 76 BWANA CHUY Bin Kosita, La succession de l'Union Africaine à l'OUA : rétrospectives et prospectives, TFC, CUEG, 2001-2002, p. 29. * 77 Eleuthère MANGA Zambo, Cours de fonctionnement des organisations internationales, L2 Droit, UNIKIS - CUB, 2002-2003, inédit. * 78 Http : // www. africa - union. org. / news - events / communiqué 08-03.pdf consulté le 16/10/03. * 79 Http: // www.african-geopolitics. org / show. cespx ? Article Id = 3324 consulté le 8/10/2003 * 80 Http : //www. google. Com consulté le 4.12.2001 * 81 Yves BENOT, Indépendances Africaines : Idéologies et réalités, Paris, Maspero, 1975, p. 88. * 82 Fondation Roi Baudoin-Médecins sans frontières, Conflits en Afrique : Analyse des crises et pistes pour une prévention, Bruxelles, éd Complexes, 1997, p.30. * 83 Idem, p. 15. * 84 Fondation Roi Baudoin-Médecins sans frontières, Conflits en Afrique : Analyse des crises et pistes pour une prévention, Bruxelles, éd Complexes, 1997, p. 10. * 85 Idem, p. 27. * 86 Http: //www. african - geopolitics. org / show. aspx ? Article Id = 3324 consulté le 8.10.2003 * 87 Fondation Roi Baudouin - Médecins sans frontière, Op.cit, pp 31 - 32. * 88 Fondation Roi Baudouin - Médecins sans frontière, Op.cit, pp. 33 - 35 * 89 Yves BENOT, Op. Cit, p 90. * 90 Yves BENOT, Op cit, p. 90 * 91 Http : // www. Eu. int/abc/obj/treaties/fr consulté le 04.12.2001. * 92 Http: // french. peopledaily. com. cn /200207/09/fra 2002079 55728. html. Consulté le 18.10.2003 * 93 Boubou HAMA, Les grands problèmes de l'Afrique des Indépendances, Paris, éd. Pierre Jean Oswald, 1974, p. 56. * On doit néanmoins soulever que les pays de la CEDEAO et de la CEMAC ont une monnaie unique qui est le Franc de la communauté financière africaine ; mais quitter le Cameroun pour la RDC, il n'y a pas convertibilité de cette monnaie, pas même à la banque centrale. * 94 Pour l'intégralité de cet acte, voir Edmond JOUVE, Op. cit. P. 274. * 95 Victor TOPANOU, Op cit,. Inédit. * 96 Jacques GIRI, L'Afrique en panne, vingt - cinq ans de '' développement '', Paris, éd Karthala, 1986, p 180. * 97 Ibidem. * 98 Ibidem. * 99 Edmond JOUVE, Op cit, pp. 195 - 196. * 100 Idem, p. 182. * 101 Http : // www.monde - diplomatique. fr / 2002/07/MBAYE / 16703 consulté le 2.10.2003 * 102 Http : // www. google.com / CEA consulté le 13.12.2001. * 103 Http : // www.google. com / dimension politique. htm consulté le 12.12.2001 * 104 Idem. * 105 Http : // www. père - blancs. cef. fr / foijus. htm consulté le 10.07.2003. * 106 Http : // www.goouv.sn/politiques/docs/nepad 2001.pdf consulté le 07.10.2003 * 107 Http : // www. père-blancs. cef.fr/foijus..htm consulté le 10.07.2003 * 108 Idem. * 109 Http : // unpan 1. un. org/introdoc/groups/public/documents/idep/un pan 009796.pdf consulte le 7.10.2003 * 110 Http : // www.uneca. org / adfiii/docs/Afrique Ouest. Consulté le 8.10.2003. * 111 Nations Unies., Droits de l'Homme-Recueil d'instruments internationaux, New-York, Nations Unies., 1988, pp 48 - 50 * 112 Robert J. BERG et Jennifer Seymour WHITAKER, Stratégies pour un nouveau développement en Afrique, Paris, éd. économica, 1990, p. 482. * 113 Africa Leadership Forum, Le développement de l'Afrique : Ses problèmes pour le dirigeants du continent, Rapport sur le premier programme du forum des dirigeants africains, Ota, 1988, p. 8. * 114 Http : // sanou.mbaye.free.fr consulté le 07.10.2003 * 115 Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social '' UNRISD '', Etat de désarroi : les répercussions sociales de la mondialisation, rapport de l'UNRISID pour le sommet mondial pour le développement social, Genève, publications UNRISD, mars 1995, pp. 21-22. |
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