Conclusion
Le vote de la l'article 52 de la loi de simplification du
droit du 9 décembre 2004 démontre que le législateur porte
à la sécurité juridique du cotisant une attention
particulière.
Cependant, l'ordonnance du 6 juin 2005 venue organiser les
mécanismes d'opposabilité de la doctrine et le rescrit reste
très complexe et ne semble pas offrir une complète garantie au
cotisant, notamment en raison du fait que l'ordonnance ne permet toujours pas
au cotisant de se prévaloir utilement des dispositions d'une circulaire
ou instruction de l'administration devant le juge. La procédure de
rescrit, par contre, offre, juridiquement, une garantie importante au cotisant.
Cependant, son formalisme, s'il permet à l'organisme de recouvrement
d'étudier la demande en toute connaissance de cause, présente le
risque de se transformer en une véritable auto-dénonciation du
cotisant dans la mesure où la demande de celui-ci permet à
l'URSSAF de disposer d'une grande partie des documents nécessaires au
contrôle.
Ainsi, les articles L. 243-6-2 et L. 243-6-3 du Code de la
sécurité sociale ne sauraient être analysés comme un
aboutissement dans la prise en considération de la
sécurité juridique du cotisant mais plutôt comme un pas
supplémentaire et nécessaire.
Au delà des dispositions de l'ordonnance du 6 juin
2005 et des textes s'y rapportant, la sécurité juridique du
cotisant dans ses relations avec l'URSSAF semble difficilement accessible dans
le contexte du droit français où le principe de
légalité est aussi présent. En effet, si le principe de
légalité peut être considéré à plus
d'un titre comme un principe permettant la sécurité juridique,
c'est celui-ci qui amène le juge à refuser de prendre en
considération l'interprétation administrative lorsqu'elle va
à l'encontre des lois et règlements en vigueur. Dès lors,
il semble difficile d'aboutir à une réelle sécurité
juridique pour le cotisant sans que le contexte dans lequel il évolue ne
soit modifié.
L'une des solutions possibles, pour que la
sécurité du cotisant soit effective, serait de faire perdre leur
indépendance et leur personnalité juridique aux URSSAF et
d'organiser un système hiérarchique au sommet duquel se
trouverait l'ACOSS. Un tel système présenterait l'avantage pour
le cotisant de n'avoir à faire qu'à une seule administration, qui
n'aurait qu'une seule doctrine qui s'appliquerai sur l'ensemble du territoire.
Ainsi, le cotisant ayant plusieurs établissements dans le ressort de
compétence de plusieurs URSSAF pourrait obtenir une décision de
l'autorité hiérarchique s'imposant , à l'échelon
inférieur, aux organismes de recouvrements y compris en justice dans la
mesure où tout contentieux n'opposerait pas une URSSAF à un
cotisant, mais opposerait le cotisant à l'ACOSS et que cette
dernière serait celle qui répondrait directement des
décisions prises par les inspecteurs du recouvrement sur le terrain. De
plus, pour ce qui est de l'opposabilité des circulaires et instructions,
dans la mesure où l'ACOSS aurait une autorité hiérarchique
sur les inspecteurs du recouvrement, la possibilité que ceux-ci passent
outre la circulaire de l'ACOSS serait considérablement amoindrie.
Cependant un contentieux serait tout de même possible si le cotisant
considère que ses agissements se sont fait dans le cadre de la
circulaire et que l'ACOSS et ses agents sont d'un avis contraire. Dans un tel
cas de figure, la probabilité que la Cour de cassation reconnaisse la
possibilité pour le cotisant de se prévaloir de la circulaire y
compris contra legem serait importante dans la mesure où il
s'agirait ici, pour le cotisant, de se prévaloir de la doctrine de
l'ACOSS contre l'ACOSS. Autrement dit, un tel mécanisme se rapprocherait
de l'opposabilité à l'URSSAF de sa propre doctrine reconnue par
la Cour de cassation.
Si un tel mécanisme paraît intéressant
sur le papier, la probabilité de le voir se réaliser à
moyen terme paraît assez faible dans la mesure où les URSSAF
tiennent à leur indépendance juridique et surtout dans la mesure
où un tel mécanisme conférerait un pouvoir
considérable à l'ACOSS en matière de recouvrement, ce qui
pourrait avoir pour conséquences de diminuer l'importance de
l'activité du parlement en matière de cotisations sociales
puisque le cotisant pourrait se prévaloir des circulaires de l'Agence
centrale y compris lorsqu'elles vont à l'encontre de la loi.
Dès lors, il est fort probable que les prochaines
règles destinées à assurer la sécurité
juridique du cotisant se feront dans un contexte identique (
indépendance de chaque URSSAF, absence de lien hiérarchique entre
l'URSSAF...), promettant ainsi, et encore, des mécanismes
particulièrement difficiles à appréhender pour le juriste
et surtout pour le cotisant.
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