L'enseignement/apprentissage de la lecture au college( Télécharger le fichier original )par Martin GUIMFAC Chaire UNESCO, Université MARIEN NGOUABI, Brazzaville - Doctorat thèse unique 2007 |
MISE AU POINT DES INSTRUMENTS D'ENQUETE ET PRE- ENQUETECe chapitre comprend deux volets : la mise au point des instruments d'enquête d'une part et la pré-enquête d'autre part. 1. MISE AU POINT DES INSTRUMENTS D'ENQUETE Après avoir décrit les pratiques pédagogiques actuelles, nous procédons à l'élaboration des instruments de collecte des données qui nous permettront de tester la validité du protocole expérimental. La collecte des données est une étape importante dans une étude qui se veut scientifique parce qu'elle fournit les informations de base pour la vérification des hypothèses de recherche.L'hypothèse de recherche est une préoccupation à vérifier, c'est-à-dire un point de vue anticipé formulé à la forme affirmative ou interrogative que le chercheur se propose de confirmer ou d'infirmer par une observation ou une démonstration. En ce qui nous concerne, notre hypothèse consiste à affirmer comme nous l'avons noté en introduction que certains éléments du milieu, un minimum de support d'enseignement/apprentissage et l'innovation des pratiques pédagogiques contribuent à l'amélioration de la qualité de l'enseignement et de l'apprentissage de la lecture. Cette hypothèse générale implique, comme nous l'avons indiqué, trois hypothèses secondaires. La première porte sur le milieu de résidence de l'apprenant, la deuxième sur son support d'apprentissage et la troisième sur l'innovation des pratiques pédagogiques. En vue de la collecte des données permettant de vérifier notre hypothèse générale et nos hypothèses secondaires, nous avons mis au point des instruments d'enquête qui sont le questionnaire et les tests. A. Le questionnaire Le questionnaire consiste à soumettre au jugement individuel un groupe de propositions distinctes centrées généralement autour d'un même objet. Le nôtre comprend deux parties : - les renseignements socioculturels relatifs au milieu de résidence; - les renseignements relatifs à la pratique de la lecture. Les renseignements socioculturels sont en congruence avec notre première hypothèse secondaire à savoir certains éléments du milieu socioculturel de résidence favorisent mieux l'amélioration de la qualité de l'enseignement et de l'apprentissage de la lecture en classe de troisième. Les renseignements relatifs à la pratique de la lecture sont en cohérence avec notre seconde hypothèse secondaire. Nous rappelons qu'elle est ainsi formulée : un minimum d'équipement en support pluriel d'apprentissage de la lecture contribue à l'amélioration de la qualité du comportement des apprenants au cours de l'enseignement/apprentissage de la lecture. Les renseignements socioculturels concernent l'identité de l'enquêté, son âge, son sexe, son lieu de résidence, la profession et le statut matrimonial de son père (ou tuteur), la profession de sa mère (ou tutrice), le niveau d'étude de chacun de ses parents (ou tuteurs) et la mise à sa disposition d'une salle d'études ainsi que d'une table de travail. Le lieu de résidence d'un individu est souvent tributaire de la classe sociale à laquelle il appartient. L'appartenance à telle ou telle catégorie sociale justifie le choix du quartier d'habitation du parent. Il peut assurer à l'enfant de bonnes ou mauvaises conditions matérielles et culturelles d'étude. Les résultats de l'apprentissage de la lecture, comme ceux des autres disciplines scolaires, en dépendent pour une grande part. Dans les villes africaines, les citoyens les mieux nantis occupent les quartiers viabilisés alors que les citoyens pauvres vivent dans des banlieues qui sont constituées de bidonvilles, de quartiers marécageux où il n'y a ni installation d'électricité ni système d'adduction d'eau potable. Ces quartiers qui se développent de façon anarchique, ne disposent pas d'infrastructures de base de la lecture : écoles, bibliothèques, centres de documentation et d'information, kiosques à journaux, centres de lecture, librairies et cybercafés. Le niveau d'étude des parents indique souvent leur statut social dans la société africaine contemporaine et influe sur la nature des apprentissages scolaires des enfants. Le statut matrimonial du père détermine les conditions de vie de l'enfant. Ces dernières peuvent gêner ou favoriser l'apprentissage de la lecture comme celui de toutes les autres disciplines scolaires. Le nombre d'épouses d'un citoyen règle le degré d'implication de celui-ci dans l'éducation de ses enfants. Dans le régime polygamique par exemple, chaque épouse veille de façon particulière à la scolarité de ses enfants et les plus âgés participent activement à l'éducation de leurs cadets. Dans le régime monogamique, les deux parents contribuent au soutien et à l'accompagnement des études des enfants qui en ont besoin. Le moyen d'éclairage utilisé est fonction du niveau de vie du ménage. Les ménages à faible revenu s'éclairent à la lampe à pétrole et ceux dont le revenu est moyen ou important vivent dans les maisons électrifiées. La disponibilité d'une salle d'études pour un apprenant et le fait qu'il dispose d'une table de travail sont tributaires du niveau de vie des parents et peuvent favoriser ses succès scolaires.
Bref, les renseignements socioculturels visent à définir le statut économique et culturel du père de l'enquêté car ils peuvent influer sur la qualité de ses apprentissages, c'est-à-dire qu'ils peuvent contribuer, tout au moins en partie, à déterminer le succès ou l'échec de l'apprentissage de la lecture, comme celui des autres disciplines scolaires. En ce qui concerne les renseignements relatifs à la pratique de la lecture, ils portent sur la possession du manuel de lecture et des oeuvres au programme, l'abonnement à une bibliothèque, le type de support de lecture et le moyen d'information utilisés. Le manuel de lecture semble être le gage d'un apprentissage efficace de la lecture. Seule sa possession permet à l'apprenant de repérer les textes, les illustrations, les index et les lexiques. Le manuel de lecture est un appui de l'apprentissage et de la mémorisation des connaissances. Il doit faire l'objet d'une étude particulière pour que l'apprenant sache s'y référer. Le manuel ne vaut que par l'usage que l'apprenant sait en faire. Les oeuvres d'étude paraissent tout aussi indispensables que le manuel de lecture. Faire l'étude d'oeuvres sans oeuvres est tout à fait possible de nos jours. Cela nécessite une formation plus poussée des enseignants et une certaine ingéniosité de leur part. Le type de support de lecture (dictionnaires, revues, catalogues, affiches, bandes dessinées, journaux, livres appartenant aux parents ou tuteurs) détermine le type de lecteur. La bande dessinée favorise l'apprentissage de la lecture. Les lecteurs de ce support sont souvent, au regard de l'échelle qui a été préconisée par Jean Foucambert (1980) dans La Manière d'être lecteur46(*), considérés comme de bons déchiffreurs. La fréquentation des bibliothèques et des autres lieux de lecture (librairies, kiosques à journaux et cybercafés) contribue à renforcer les compétences en lecture de l'apprenant. Elle consolide la pratique de l'étude des oeuvres littéraires. La lecture, de nos jours, ne saurait être enseignée et pratiquée uniquement dans les classes. Elle requiert le concours des autres lieux et des autres supports de lecture. En somme, les renseignements spécifiques à la pratique de la lecture permettent de définir le type d'apprenti lecteur, son niveau d'équipement et ce qu'il convient d'en attendre au plan de l'apprentissage de la lecture. B. Les tests Nous rappelons que le test est l'une de nos techniques de collecte des données. Les résultats des tests que nous allons élaborer nous permettront de comparer les performances lectorales du test de pré apprentissage à celles de celui de post apprentissage des apprenants de la classe de troisième et de vérifier l'efficience de notre protocole expérimental. Nous faisons nôtre la définition que le Docteur Pierre Pichot (1990) en donne. On appelle test une situation expérimentale standardisée servant de stimulus à un comportement. Ce comportement est évalué par une comparaison statistique avec celui d'autres individus placés dans la même situation, permettant ainsi de classer le sujet examiné47(*). Cette définition insiste sur deux éléments qui conditionnent la valeur du test : - les sujets doivent impérativement se trouver dans la même situation : la durée et le matériel du test sont les mêmes ; - l'évaluation du comportement intervient selon les règles rigoureuses déterminées statistiquement. Pour l'élaboration des tests, nous nous sommes inspirés des travaux de Noëlle Pardon (1993)48(*) et de ceux de Brigitte Chevalier (1986)49(*). Les deux ont abordé ces compétences : - les composantes du savoir-faire fondées sur l'habileté de l'oeil ; - le développement de la mémoire ; - la capacité à anticiper, à reconstituer. Brigitte Chevalier (1986) a amélioré cette grille et préconisé trois compétences : - oeil et esprit exercés ; - capacité à anticiper, à reconstituer ; - entraînement total. Elle a mis au point plusieurs types d'exercices requis pour l'installation chez l'apprenant de chacune des compétences suscitées. Nous considérons chacune d'elles comme une variable. Ainsi, nous avons trois variables : oeil et esprit exercés, capacité à anticiper, à reconstituer et entraînement total. a)- Variable « oeil et esprit exercés » Cette variable se compose d'une série de trois items : un oeil panoramique, un oeil habile, un esprit agile. OEil panoramique Pour rendre la lecture plus rapide et plus performante, il est nécessaire d'accroître le nombre de signes graphiques perçus à chaque fixation. Grâce aux travaux du chercheur Emile Javal (1978) et de ceux de François Richaudeau (1997), il est tout à fait possible de décrire le processus de la lecture50(*). C'est vers 1900 que le premier, directeur du laboratoire d'ophtalmologie à la Sorbonne, a montré que l'oeil du lecteur ne progresse pas de façon continue le long de la ligne d'un texte. Au contraire, l'oeil opère par bonds successifs, c'est-à-dire par saccades. Depuis, d'autres chercheurs - comme François Richaudeau (1997) qui a bâti la méthode qui porte son nom - ont pris la relève et, grâce à des techniques d'expérimentation fine, ont poursuivi l'étude des mécanismes en jeu dans l'acte de lire51(*). Ils ont montré que d'un quart à un tiers de seconde, l'oeil du lecteur tout en étant immobile fixe un ensemble de lettres ou de mots puis il pivote en un quarantième de seconde, puis fixe à nouveau un ensemble de lettres ou de mots pendant un quart de seconde et ainsi de suite... L'oeil ne perçoit qu'en état d'immobilité. Il convient de rappeler que le temps de déplacement et celui de fixation sont sensiblement identiques pour tous les lecteurs. L'oeil du lecteur entraîné ne se déplace guère plus vite que celui du lecteur lent. En revanche, l'équipe du « Centre d'étude et de promotion de la lecture » a mis en évidence, avec François Richaudeau (1997), le fait que le lecteur prodige perçoit davantage de signes en une fixation que le lecteur lent : plusieurs dizaines de signes (soit cinq à dix mots) pour le lecteur rapide, alors que le lecteur lent ne perçoit qu'une dizaine de lettres (un à deux mots)52(*). L'item « oeil panoramique » est destiné à exercer le champ de vision de l'apprenant. La progression est assurée par le nombre de signes graphiques à percevoir lors de chaque fixation de l'oeil : trois à dix signes. L' « oeil panoramique » comprend des colonnes de mots ou groupes de mots à parcourir de haut en bas, dans le sens d'une flèche. Après les avoir parcourues, les apprenants doivent répondre à des questions qui les amènent à mobiliser au maximum leur capacité de mémorisation. Cet item vise à exercer l'angle de vision du lecteur que les pédagogues appellent aussi empan perceptif. Une action sur l'empan d'un individu entraîne l'amélioration de sa vitesse de lecture. L'agrandissement du faisceau de vision d'un apprenti lecteur est déterminant pour accroître son efficacité de lecture. Et nous faisons nôtres les propos de Brigitte Chevalier (1986) pour qui, l'ampleur du champ perçu est, par ailleurs, directement en liaison avec la compréhension53(*). OEil habile Un bon lecteur se remarque notamment par son agilité visuelle. Celle-ci permet d'éviter la confusion des signes graphiques ; en effet elle oblige le lecteur à revenir en arrière, à explorer plusieurs fois la même phrase. L'item «oeil habile » se compose de colonnes de mots ou groupes de mots. Devant chaque colonne, un mot ou groupe de mots témoin est indiqué. Il s'agit de le photographier du regard et de vérifier rapidement s'il y apparaît. Cet item vise à amener l'apprenant à distinguer de plus en plus sûrement les différences et les ressemblances entre les mots. Des expériences ayant montré en France54(*) que l'oeil identifie chaque mot globalement et ne voit pas le dessin détaillé de chaque lettre, il s'agit d'accroître la précision et l'exactitude de la discrimination visuelle et, partant, d'améliorer l'agilité non seulement visuelle mais aussi intellectuelle. Esprit agile La lecture ne saurait se faire sans l'intervention de la mémoire car lire c'est aussi une manière de se rappeler. Au cycle d'éveil, les spécialistes de la science du langage distinguent plusieurs types de mémoire : la mémoire visuelle, la mémoire auditive, la mémoire intellectuelle, la mémoire verbale et la mémoire tactile55(*). La mémoire visuelle s'attache plus spécialement aux physionomies, aux paysages, aux couleurs et à toutes les données concrètes qui frappent les yeux. La mémoire auditive retrouve sans peine les sons, les airs, tout ce qui touche l'ouie. La mémoire intellectuelle emmagasine les idées, les raisonnements et les connaissances procédurales. La mémoire verbale retient facilement la plupart des données par coeur. Elle est constamment sollicitée pour les comptines et les récitations, par exemple. La mémoire tactile aide surtout les aveugles chez qui elle atteint un haut niveau de sensibilité. Chaque apprenant possède ces diverses mémoires à des degrés différents. En revanche, au cycle secondaire, les pédagogues distinguent deux niveaux de mémoire : la mémoire immédiate et la mémoire à moyen ou long terme. La mémoire immédiate, dite mémoire de travail (ou mémoire phosphorescente), conserve les souvenirs quelques secondes. Elle permet de clarifier un geste ébauché quelques dizaines de secondes plus tôt. Elle favorise la rétention des groupes de mots ou de la phrase qu'un lecteur prononce après en avoir pris connaissance des yeux. Sans elle, aucun lecteur ne pourrait sortir les yeux du texte et regarder les auditeurs, en lecture à levée d'yeux ou en lecture communication. La lecture à levée d'yeux désigne, faut-il le rappeler, la lecture à haute voix au cours de laquelle le lecteur lève de temps en temps la tête pour fixer son auditoire afin de maintenir l'attention de celui-ci éveillée. La mémoire immédiate est limitée à la fois sur le plan de la durée et de la capacité. C'est pourquoi, pour que de nouvelles informations soient assimilées, il faut que les données antérieurement stockées disparaissent par oubli ou par passage dans la mémoire à moyen ou long terme. En lecture compréhension, c'est la mémoire immédiate qui est sollicitée. Elle favorise par exemple le repérage de la page d'un article dans un ouvrage grâce aux indications fournies peu avant par le sommaire ou l'index. Par ailleurs, découvrant les derniers mots d'une phrase, le lecteur se souvient encore des premiers, sinon la compréhension ne saurait être possible. La mémoire immédiate conserve pendant quelques instants une suite de termes, puis le souvenir du mot à mot s'efface et seule la quintessence de l'information est transférée à la mémoire à moyen ou long terme. Les signes s'effacent devant le sens ; l'information linguistique remplace l'information visuelle. Il convient de rappeler que l'empan du lecteur rapide est supérieur à celui du lecteur lent. Est appelé empan la capacité de la mémoire immédiate c'est-à-dire la quantité de données qu'elle est susceptible d'emmagasiner. Elle en enregistre environ sept lorsqu'il s'agit d'une suite aléatoire de mots. Si les mots font partie des énoncés linguistiques dans lesquels ils sont unis par des liens sémantiques et syntaxiques, l'empan peut être beaucoup plus important. Des expériences récentes ont montré qu'un lecteur peu entraîné retient huit mots environ dans un message signifiant56(*). Il est donc nécessaire d'inviter les apprenants à exercer leur empan. L'item «esprit agile» comprend des listes de mots ou groupes de mots. Il s'agit de relever ceux qui désignent un référent précis ou s'y rapportent. Cet item vise à exercer l'agilité intellectuelle de l'apprenant. b)- Variable « capacité à anticiper, à reconstituer » Cette variable est composée de deux items : le texte à trous et le texte puzzle. Le texte à trous La lecture ne saurait être réduite à une activité visuelle. Elle est avant tout une activité de l'intelligence. Après avoir exercé l'habileté de l'oeil, élargi le champ de fixation, il convient de faire participer l'apprenant à la construction du sens. Cette dernière se fait grâce à l'anticipation : émissions d'hypothèses et leurs vérifications. A ce propos, Gérard Vigner (1979) affirme : lire, ce sera formuler une hypothèse de signification, redéfinie constamment tout au long de la lecture, l'accès au sens totalement réalisé lorsque l'hypothèse de recherche, par réaménagements successifs déterminés par l'apport de données nouvelles prélevées dans le texte, coïncide totalement avec le projet de l'auteur57(*). L'amélioration de la lecture passe par le développement de la capacité à prévoir le contenu de ce qui suit à partir de ce qui précède. Tout lecteur émet des hypothèses que la lecture effective permet de confirmer ou d'infirmer. C'est la raison pour laquelle la lecture est dite activité probabiliste sur l'écrit. En effet, pendant la lecture, les indices perceptifs et les indices de sens conduisent à opérer un choix très rapide, non conscient, que la lecture ne fait, dans la plupart des cas, que confirmer. L'item «texte à trous», inspiré du test de Closure58(*), comprend un texte dans lequel certains mots ont été enlevés et remplacés par des numéros. L'enquêté est invité à compléter les mots manquants à raison d'un seul, par numéro, en tenant compte du sens général du texte. Cet item vise à renforcer ou à créer chez l'apprenant les comportements d'anticipation et à l'habituer à mobiliser l'information déjà recueillie pour prévoir celle à venir. Le texte puzzle Cet exercice consiste à remettre dans l'ordre logique des paragraphes ou des phrases dispersés : il s'agit de travailler à la fois sur l'anticipation et sur la structuration du texte. Il oblige l'apprenant à tenir compte de la cohérence sémantique et à appuyer sa recherche sur tous les éléments fournis par l'écrit : indices grammaticaux, indices visuels (majuscules, signes de ponctuation). Le texte puzzle a pour but de faire passer l'apprenant du stade de « liseur » à celui de lecteur, conformément à l'échelle qui a été, comme nous l'avons précédemment indiqué, préconisée par Jean Foucambert (1980). Cet item se compose d'un texte dont l'ordre logique des paragraphes a été dispersé. Il s'agit de le reconstituer en restituant l'ordre initial des paragraphes. c)- Variable «entraînement total» Si les exercices précédents se proposent d'agir sur des aptitudes partielles entrant dans l'acte de lire, celui-ci place l'apprenant face à un texte entier. Ce n'est pas, en effet, par la combinaison de savoir-faire accumulés que l'apprenti lecteur atteint une compétence de synthèse car la lecture en est une et mobilise toutes les compétences requises : vitesse, compréhension et efficacité. La variable «entraînement total» est composée d'un texte suivi soit de questions à choix multiples, soit d'affirmations à propos desquelles il faut répondre par vrai ou faux. Cet exercice vise à évaluer la capacité globale de lecture d'un apprenant car il ne s'agit pas de développer uniquement telle ou telle faculté pour prétendre être lecteur mais il s'agit de manifester sa compréhension du texte : lire c'est comprendre. Dans la présente étude, nous avons retenu un texte suivi des questions à choix multiples. Une fois nos instruments d'enquête mis au point, nous devons les tester sur un échantillon relativement modeste afin d'éprouver leur validité et élaborer les dimensions de l'enquête proprement dite, c'est la pré-enquête. 2. PRE-ENQUETE Nous avons mentionné en introduction que la pré-enquête vise à vérifier si les sujets auxquels s'adresse l'enquête disposent des pré-requis nécessaires, à recenser les éventuels problèmes et envisager les palliatifs, à estimer la durée des items et à fixer la taille de l'échantillon. Dans la pré-enquête, nous indiquons la population cible, testons nos instruments d'enquête et tirons des leçons. A propos de la pré-enquête, nous convenons avec Roger Mucchielli (1978) que : la pré-enquête est une investigation de type qualitatif (interviews semi-directifs, documentation, réflexion) destinée à élaborer les dimensions de l'enquête, les hypothèses, le libellé des questions et des tests59(*). A - Population cible La population désigne l'ensemble de sujets ayant un statut ou une qualité définis. Dans notre étude, la population est constituée de l'ensemble des apprenants admis en classe de troisième, dont l'âge varie de 12 à 20 ans, dans le département scolaire de Brazzaville, au titre de l'année scolaire 2002 - 2003. L'unité statistique est donc l'apprenant de Brazzaville. Cette ville est, comme nous l'avons indiqué dans l'introduction, considérée comme type de microcosme linguistique national. A partir de cette population, nous avons soumis un groupe de quinze (15) apprenants de la classe de troisième du collège d'enseignement général du 8 février 1964 au questionnaire et aux tests de lecture. Au terme du dépouillement et de l'exploitation des données collectées, nous avons constaté que nos instruments d'enquête confirment la justesse de notre méthodologie et méritent d'être maintenus, mais la taille de notre échantillon expérimental mérite d'être corrigée. B - Instruments d'enquête Au terme de la pré-enquête, nous nous sommes rendu compte que les instruments mis au point sont accessibles aux apprenants auxquels ils sont destinés. Toutefois, nous avons jugé utile d'y apporter les précisions, les améliorations et les amendements suivants. Le questionnaire L'enquête s'adressant aux apprenants de trois établissements différents, à raison de deux classes chacun (une expérimentale et une témoin), il nous a paru nécessaire de faire indiquer le sexe, la classe et l'établissement de chaque apprenant. Les tests A propos de l'item «texte à trous», nous nous sommes aperçu que les espaces vides sur lesquels les apprenants sont invités à écrire paraissent petits ou grands en fonction de la taille des lettres de chaque apprenant. Nous avons amélioré l'exercice en inscrivant un numéro à chaque espace vide dans le texte pour que le sujet enquêté soit invité à porter le mot manquant au numéro correspondant, placé à la suite du texte et à un endroit précis réservé à cet effet. Pour rendre l'item «texte puzzle» plus pratique, il nous a paru nécessaire de faire indiquer au début de chaque paragraphe dans un encadré le numéro correspondant à la place qu'il devait normalement occuper. La durée d'administration des instruments En considérant le temps mis par l'apprenant le plus lent pour réaliser chaque item qui se présente ainsi qu'il suit, la durée d'administration des instruments est fixée à deux heures, ainsi réparties. - questionnaire : 20 minutes - test : 1 heure 40 minutes organisée comme suit : ? variable «un oeil et un esprit exercés» : 40 minutes Item «un oeil panoramique» : 15 minutes Item «un oeil habile» : 15 minutes Item « un esprit agile » : 10 minutes ? variable «capacité à anticiper, à reconstituer» : 40 minutes Item «le texte à trous» : 20 minutes Item «le texte puzzle» : 20 minutes ? variable «entraînement total» : 20 minutes Après avoir fixé la durée d'administration des instruments de collecte des données, nous déterminons les modalités d'attribution des scores. Modalités d'attribution des scores Eu égard à la densité des calculs à effectuer lors du dépouillement et du traitement des données, nous avons modifié le barème d'attribution des scores. Il se présente désormais ainsi qu'il suit : - les items «oeil panoramique», «oeil habile», et «esprit agile» sont mesurés sur cinq points chacun, à raison d'un demi-point par réponse. - L'item «texte à trous» est mesuré sur cinq points, à raison d'un point par mot trouvé. - L'item « texte puzzle » est mesuré sur cinq points, à raison d'un point par paragraphe placé. - Enfin, la variable «entraînement total» est mesurée sur cinq points, à raison d'un point par réponse. Une fois, les modalités d'attribution des scores mises au point, nous déterminons l'échantillon auquel les instruments seront administrés. Nous rappelons que nous aurions aimé étendre cette étude à l'ensemble des apprenants admis en classe de troisième, dont l'âge varie entre 12 et 20 ans, au titre de l'année scolaire 2003 - 2004 dans le Département scolaire de Brazzaville. La modicité de notre budget de recherche ne nous l'a pas permis. A partir de la population cible que nous avons précédemment indiquée, nous avons déterminé un échantillon, c'est-à-dire un certain nombre d'individus sur lesquels devrait porter l'enquête. Il s'est agi d'une enquête par sondage : nous avons tiré au sort les individus, à partir de listes exhaustives de zones sociolinguistiques, d'établissements et de classes pédagogiques. Il faut signaler qu'une liste exhaustive ne contient ni omission ni répétition. Nous avons mentionné dans l'introduction que Brazzaville constitue le type de microcosme linguistique de la République du Congo. Nous l'avons globalement divisée en trois zones sociolinguistiques. Sur la base de cette division sociolinguistique et conformément au procédé de tirage que nous avons retenu, à savoir le tirage au sort, nous avons constitué un échantillon expérimental que nous présentons ci-après sous la forme d'un tableau. Tableau n° 1 : Echantillon expérimental
C - Leçons à tirer de la pré- enquête En considérant les résultats de la pré-enquête, nous avons constaté que l'effectif de quinze apprenants convient pour la pré-enquête, mais il nous paraît insuffisant pour toute l'étude. Par conséquent, nous avons soumis l'effectif global de l'échantillon soit 381 sujets à nos instruments d'enquête. Malheureusement seuls cinquante apprenants récemment admis en classe de troisième par classe au moins ont pris part à toutes les séances d'enquête. Ainsi, nous avons retenu un groupe expérimental et un groupe témoin de cinquante apprenants chacun par établissement, soit cent apprenants par établissement pour un total de trois cents sujets répertoriés dans le tableau suivant: Tableau n° 2 : Taille de l'échantillon
Par ailleurs, les épreuves des tests sollicitant l'implication de plusieurs organes de sens, d'une part et pour des raisons de fraîcheur d'esprit des apprenants, d'autre part, il s'est avéré indispensable de les faire passer en deux séances espacées d'au moins deux jours l'une de l'autre. En effet, le questionnaire et la variable «oeil et esprit exercés» du test de préapprentissage (ou de post apprentissage) font l'objet de la première séance alors que les variables «capacité à anticiper, à reconstituer» et «entraînement total» constituent l'objet de la deuxième séance. Lors de chaque séance, le professeur expérimentateur doit préalablement distribuer les supports (questionnaire ou épreuves du test) à tous les apprenants, leur expliquer l'objectif de la tâche à exécuter et l'utilisation des accessoires. Dans un bref commentaire, il doit insister sur la méthode de travail à mettre en oeuvre, la sincérité et la collaboration attendue de chaque apprenant. Le professeur expérimentateur a l'obligation par la suite d'expliciter la consigne particulière de la première activité afin que les apprenants l'exécutent, chacun travaillant sur son support. Lorsque le temps imparti à une activité est épuisé, l'activité suivante est abordée, et ainsi de suite jusqu'à la fin de la séance. Afin de faciliter l'administration des tests, les accessoires suivants ont été préalablement réunis : des caches et des montres. Nous appelons cache une feuille de papier cartonnée de forme rectangulaire de douze centimètres de long sur sept centimètres de large, sur laquelle il est percé une ouverture de quarante-deux millimètres de long sur cinq millimètres de large. Il sert à masquer les mots au fur et à mesure que l'apprenant les parcourt pour éviter de fréquents retours en arrière. La montre sert à veiller au temps imparti à chaque item. Après avoir validé nos instruments d'enquête par une pré-enquête, nous procédons à l'enquête. La réalisation de l'enquête consiste à administrer le questionnaire d'une part et les épreuves des tests, d'autre part, aux enquêtés selon les conditions et les modalités déterminées au terme de la pré-enquête. L'administration du questionnaire et la passation des tests obéissent à des clés préalablement établies. CHAPITRE III ENQUETE L'enquête est une technique de sondage qui s'appuie sur les informations et les témoignages. Nous avons noté qu'il s'agit de proposer les instruments d'enquête à l'échantillon afin de collecter les informations nécessaires à la vérification de nos hypothèses de recherche. Nos instruments d'enquête étant de deux ordres (questionnaire et tests), nous exposons l'administration du questionnaire d'une part et celle des tests d'autre part. 1. Administration du questionnaire Au cours de l'enquête, trois cents (300) apprenants âgés de 12 à 20 ans, répartis en cent trente neuf (139) filles et cent soixante-un (161) garçons appartenant à trois établissements ont été soumis à un questionnaire. Des réponses collectées, nous avons prélevé les caractéristiques individuelles et contextuelles qui constituent nos variables indépendantes. Elles sont vingt (20). Il s'agit des variables sexe, âge, arrondissement de résidence, disponibilité d'une salle d'études, table d'études, autres lectures (journaux, livres des parents, bandes dessinées), possession du manuel de lecture, possession du roman au programme, possession de la pièce de théâtre au programme, abonnement à une bibliothèque, moyen d'information utilisé (télévision, radio, lecture), moyen d'éclairage utilisé (électricité, lampe à pétrole), profession du père (ou tuteur), son niveau d'étude, son statut matrimonial, profession de la mère (ou tutrice), son niveau d'étude, catégorie d'établissement, type de classe, et classe. La distribution des sujets sur lesquels nous avons enquêté en fonction de ces variables se présente ainsi qu'il suit sous la forme des tableaux : premièrement par sexe, elle montre la disproportion entre les filles (46%) et les garçons (53%). Ce qui signifie que sur 100 apprenants, 46 seulement sont des filles. Nous relevons une sous scolarisation des filles telle que le montre le tableau ci-après60(*). Tableau n° 3 : Taux de scolarisation des filles par cycle
Une récente communication de la section Education de l'Organisation des Nations Unies pour l'Enfance (U.N.I.C.E.F) à Brazzaville vient de confirmer les données statistiques que nous venons de présenter61(*). Dans la société congolaise, la pauvreté, la puberté, les pesanteurs psychologiques, les grossesses non désirées, les accouchements précoces et l'environnement social sont à l'origine des abandons scolaires des filles. Tableau n° 4 : Répartition des apprenants selon le sexe
Deuxièmement par groupes d'âge de 12 à 16 ans d'une part, de 17 à 20 ans d'autre part, elle révèle que ceux du premier groupe sont plus nombreux (61%) que ceux du deuxième (38%). L'âge modal en classe de 3ème est de 16 ans en moyenne en République du Congo. Mais en ville, cet âge est de 14 ans. Cela provient probablement de la scolarité précoce des enfants et de la proximité des apprenants de leur établissement. Tableau n°5 : Répartition des apprenants selon l'âge
Troisièmement par arrondissement de résidence, elle est disproportionnée. Les arrondissements de résidence de la majorité des apprenants sont : l'arrondissement 3 (37%), l'arrondissement 5 (23%). Les arrondissements 2 (4%) et 4 (6%) sont habités par peu d'apprenants de notre échantillon. Une telle disproportion pourrait s'expliquer par des raisons de proximité des apprenants par rapport aux établissements que nous avons retenus pour l'enquête. Tableau n°6 : Répartition des apprenants selon l'arrondissement
Quatrièmement selon la disponibilité d'une salle ou d'un cadre d'études, elle montre que 83% des apprenants en disposent d'une, chacun. Seulement 17% n'en disposent pas. Cela tient probablement de ce que la majorité des apprenants de l'échantillon sont issus des personnes des professions scientifiques, techniques, libérales et assimilées. Les parents ayant un niveau de vie intéressant, disposent des structures qui devraient favoriser une existence confortable et en principe les apprentissages extrascolaires de leurs enfants.
Tableau n°7 : Distribution des apprenants selon la disponibilité d'un cadre d'études
Cinquièmement selon la disponibilité d'une table d'études, elle révèle que 61,7% des apprenants en disposent d'une. Cela participe du confort matériel du ménage. Les parents ayant un niveau de vie satisfaisant possèdent du mobilier nécessaire pour mener une vie décente avec l'ensemble de toute leur famille. Tableau n°8 : Distribution des apprenants selon la disponibilité d'une table d'études
Sixièmement selon le type de lecture, elle met en évidence que plus de la moitié (56%) d'entre eux portent leur choix sur les bandes dessinées et les 44% restant sont partagés entre les journaux (23%) et les livres des parents (21%). Cette volonté des apprenants à lire les bandes dessinées contraste fort malheureusement avec l'insuffisance dudit support dans les lieux de lecture de la ville et particulièrement leur rareté dans les librairies. Tableau n° 9 : Distribution des apprenants selon le type de lecture
Septièmement selon la possession du manuel de lecture, elle révèle qu'aucun apprenant ne le possède. Cela montre que la pratique de la lecture n'est qu'une activité scolaire pour ces apprenants car après l'école, ils ne sauraient pratiquer la lecture sans livres. C'est peut être pourquoi ils ne pratiquent aucune activité d'exploitation ultérieure du texte étudié en classe. Tableau n°10 : Distribution des apprenants selon la possession du manuel de lecture
Huitièmement selon la possession du roman au programme, elle indique qu'aucun apprenant ne l'a. Cela explique en partie la confusion que les apprenants font entre leur propre carte d'identité et La Carte d'identité62(*), roman de Jean Marie Adiafi. Tableau n°11 : Distribution des apprenants selon la possession du roman au programme
Neuvièmement selon la possession de la pièce de théâtre au programme, elle met en évidence qu'aucun apprenant ne la possède. Cela montre que la lecture suivie et dirigée ne peut être préparée à la maison. Dans la plupart des cas, elle n'est pas faite du tout car certains apprenants de la classe de troisième ignorent les titres des oeuvres au programme. Tableau 12 : Distribution des apprenants selon la possession de la pièce de théâtre au programme
En somme, le manque de manuel et d'oeuvres au programme implique deux conséquences : le texte de lecture est recopié au tableau et la lecture d'oeuvre n'est pas du tout faite. La première hypothèse déforme la physionomie du texte, complique la lisibilité et réduit le nombre de texte à étudier par an. La deuxième hypothèse prive les apprenants de la classe de troisième de la pratique de la lecture alors que la lecture est un comportement en devenir. Ce savoir-faire nécessite une pratique régulière. Dixièmement selon l'abonnement à une bibliothèque, elle établit qu'une infime minorité d'entre eux (12%) fréquentent une bibliothèque. Sur 100 apprenants, seulement 13 sont abonnés à une bibliothèque alors que la majorité (87%) n'en fréquentent aucune. Les raisons suivantes peuvent justifier un tel phénomène : - le taux de couverture de Brazzaville en bibliothèques est faible ; - les mouvements sociopolitiques que Brazzaville a connus n'ont pas épargné les bibliothèques et les centres de documentation et d'information du pillage et de la destruction gratuite. - les dispositions mentales et la pauvreté qui ne permettent pas à certains apprenants de disposer des moyens financiers suffisants pour s'abonner à une bibliothèque.
En somme, Brazzaville ne constitue pas un environnement propice à la lecture parce qu'on y trouve peu de lieux et de supports de lecture. Et les bibliothèques familiales, quand elles existent, sont soit insuffisamment équipées, soit trop spécialisées. Chacun dispose souvent des récentes publications de sa spécialité et ne dispose pas souvent des ouvrages traitant des autres domaines de spécialité. Tableau n° 13 : Distribution des apprenants selon l'abonnement à une bibliothèque
Onzièmement selon le moyen d'information utilisé, elle indique leur préférence pour la télévision (79%). Seulement 10% des apprenants enquêtés se servent de la lecture et 10% de la radio, comme moyen d'information. Nous constatons qu'un tel phénomène est probablement tributaire de l'environnement enclin à la facilité. En effet, les apprenants suivent passivement la foule d'informations que déversent les médias au point de négliger la lecture comme moyen d'information. Tableau n° 14 : Distribution des apprenants selon le moyen d'information utilisé
Douzièmement selon le moyen d'éclairage utilisé, elle montre que la majorité d'entre eux (72%) vivent dans les maisons électrifiées. Seulement 27% des apprenants vivent dans les ménages qui utilisent la lampe à pétrole comme moyen d'éclairage. Cela est un indicateur du niveau de vie et du privilège économique des parents des enquêtés. Tableau n° 15 : Répartition des apprenants selon le moyen d'éclairage utilisé
Treizièmement selon la catégorie socioprofessionnelle du père, elle met en évidence que 51% ont des parents issus des professions scientifiques, techniques, libérales et assimilées ; 11%, des personnels administratifs et travailleurs assimilés ou du personnel commercial et vendeur. Seulement 6% d'apprenants sont issus d'ouvriers et manoeuvres. La configuration socioprofessionnelle des parents indique que les apprenants sur lesquels nous avons enquêté sont pour la plupart issus des familles aisées. L'aisance matérielle des parents peut être un facteur important dans la nature de la scolarité d'un apprenant. Tableau n° 16 : Répartition des pères selon leur catégorie professionnelle
Quatorzièmement selon le niveau d'étude du père, elle indique que la majorité d'entre eux ont au moins celui de l'enseignement secondaire, soit 48% au cycle secondaire et 47,5% au cycle supérieur. Une telle configuration constitue un privilège culturel qui peut être un atout considérable pour les enfants à condition qu'ils sachent tirer tout le profit qu'un tel avantage présumé est censé leur réserver. L'avantage est une chose et savoir en jouir est une autre. Tableau n° 17 : Répartition des pères selon le niveau d'étude
Quinzièmement selon la situation matrimoniale du père, elle montre que la monogamie est plus répandue puisqu'elle concerne 81% d'hommes en union. La polygamie n'intéresse que 19% d'hommes en union. Une telle répartition constitue un facteur de stabilité susceptible de garantir un meilleur encadrement scolaire des enfants en âge scolaire, à condition que la délinquance sénile ne s'accapare des parents en situation de monogamie comme c'est parfois le cas dans les grandes métropoles africaines. Tableau n° 18 : Répartition des pères selon la situation matrimoniale
Seizièmement selon la profession de la mère, elle révèle que 41% d'entre elles sont des ménagères; 26% font partie du personnel commercial et vendeur; 14% exercent des professions techniques, scientifiques, libérales et assimilées; et 7% sont des personnes spécialisées dans leur service. Cette répartition est le reflet de la configuration sociale de la société congolaise. Tableau n° 19 : Répartition des mères selon la profession
Dix-septièmement selon le niveau d'étude de la mère, elle met en évidence que la majorité d'entre elles (78 %) sont du cycle secondaire, 14% du cycle supérieur et seulement 8% du cycle primaire. Nous remarquons que les 14% des mères qui appartiennent au cycle supérieur sont des personnes des professions techniques, scientifiques, libérales et assimilées. Cette coïncidence entre le niveau d'étude des mères et leur catégorie socioprofessionnelle pourrait contribuer au succès scolaire de leurs enfants. Tableau n° 20 : Répartition des mères selon le niveau d'étude.
Dix-huitièmement selon l'établissement d'appartenance, elle indique 100 apprenants par établissement. Cette répartition obéit au besoin d'enquête parce qu'il est nécessaire de disposer d'un même effectif par établissement. Tableau n° 21 : Répartition des apprenants selon l'établissement
Dix-neuvièmement selon le type de classe, elle montre une répartition équitable entre les classes expérimentales et les classes témoins. En effet, il existe une classe expérimentale et une classe témoin par établissement d'expérimentation. Nous avons en fin de compte trois classes expérimentales et trois classes témoins ayant chacune le même effectif. Tableau n° 22 : Répartition des apprenants selon le type de classe
Vingtièmement selon la classe, elle indique une répartition équitable des apprenants par classe. Pour les besoins d'étude, chaque classe expérimentale ou témoin compte un effectif de 50 apprenants qui ont effectivement pris part à toutes les séances d'enquête. Il faut rappeler qu'au départ nous avions sélectionné près de quatre cents élèves dans les classes retenues. Mais pour diverses raisons, ils n'ont pas tous pris part à toutes les séances d'enquête. Nous n'avons en fin de compte considéré seulement les individus qui ont pris part à toutes les séances d'enquête. Et comme nous avons deux classes par établissement et six pour l'ensemble de l'univers d'enquête, nous avons finalement un échantillon de 300 apprenants. Tableau n° 23 : Répartition des apprenants selon la classe
Les effets des variables indépendantes ci-dessus exposées seront contrôlés dans le traitement des résultats. En effet, l'impact de chacun d'eux permettra de nuancer les résultats globaux de l'étude. 2. Administration des tests Nous avons proposé les épreuves des tests aux apprenants à deux reprises : les épreuves du test de pré apprentissage d'une part, celles de celui de post apprentissage d'autre part. Comme nous l'avons indiqué à la pré-enquête, les épreuves des tests sollicitant l'implication de plusieurs organes de sens d'une part, et pour des raisons de fraîcheur d'esprit des sujets, d'autre part, nous les avons fait passer en deux séances espacées d'au moins deux jours l'une de l'autre. Cette précaution a été observée aussi bien au test de pré apprentissage qu'à celui de post apprentissage. Lors de chaque séance, l'expérimentateur distribue préalablement à tous les sujets les épreuves de test. Il leur explique par la suite les règles du jeu. Il insiste particulièrement sur la méthode de travail à observer, la sincérité et la collaboration des apprenants ainsi que sur le caractère confidentiel des résultats pour ne pas frustrer les moins brillants. Il explicite la consigne particulière de chaque item afin que les sujets l'exécutent, chacun travaillant sur son support. Lorsque le temps imparti à l'item est épuisé, l'expérimentateur fait passer les sujets à l'activité suivante, et ainsi de suite jusqu'à la fin de la séance. L'évaluation de la production des apprenants a permis de collecter des informations relatives à leurs performances, variable par variable. Pour rendre la lisibilité matérielle du texte aisée, nous avons préféré placer ces données brutes en annexes pour ne présenter que nos résultats d'étude au chapitre suivant. Une fois les informations collectées pendant l'enquête, nous devons les traiter. Cela nécessite qu'il soit mis au point les modalités et les instruments de traitement des données, objet partiel du chapitre suivant. CHAPITRE IV TRAITEMENT DES DONNEES ET PRESENTATION DES RÉSULTATS Le chapitre précédent nous a permis de présenter notre méthodologie de collecte des données. Il s'est agi en effet de proposer un questionnaire et des tests aux sujets expérimentaux. Les réponses au questionnaire nous ont permis de collecter des informations relatives à leur identité, à leur milieu socioculturel de résidence, à leurs pratiques et à leurs supports d'apprentissage de la lecture. Ces informations sont constituées de facteurs qualitatifs. Pour rendre la lecture de l'étude aisée, nous avons préféré placer ces données brutes en annexes, comme nous l'avons précédemment noté. Le présent chapitre vise donc l'exposition des modalités de traitement des données d'une part, et celle des résultats d'autre part et enfin la vérification méthodique des hypothèses de recherche. 1. TRAITEMENT DES DONNEES Le traitement des données est une étape centrale du travail de recherche. C'est sur elle que repose la vérification de l'hypothèse générale. Nous rappelons que notre hypothèse générale génère trois hypothèses secondaires, en fonction desquelles nous avons élaboré nos instruments de collecte des données. Les données que nous avons recueillies sont de deux ordres : les données qualitatives et les données quantitatives. Les premières font référence aux renseignements relatifs au milieu de résidence des apprenants sur lesquels nous avons enquêté et leur pratique de la lecture. Elles concernent nos deux premières hypothèses secondaires. Les secondes désignent les innovations que nous avons introduites dans les pratiques pédagogiques actuelles dans les classes expérimentales. Elles sont en relation avec notre troisième hypothèse secondaire. Ainsi, nous distinguons deux types de traitement des données : le traitement des données qualitatives et celui des données quantitatives. A- Le traitement des données qualitatives Le traitement des données qualitatives implique deux étapes principales : la classification de l'information d'une part, l'analyse proprement dite des données d'autre part. En ce qui nous concerne, la classification consiste à ranger les faits recueillis à l'intérieur des deux catégories que nous avons prédéterminées en fonction de notre cadre opératoire et de l'instrument d'analyse que nous avons mis au point. En effet, nous avons déterminé d'avance deux catégories de renseignements : les renseignements relatifs au milieu de résidence des apprenants de la classe de troisième d'une part, et ceux relatifs à leur pratique de la lecture d'autre part. En vue de l'analyse proprement dite des données qualitatives, nous recourons à l'analyse qualitative. Nous partageons la définition de l'analyse qualitative que propose Gordon Mace (1988) : l'analyse qualitative est un exercice structuré de mise en relation logique de variables et, par voie de conséquence, de catégories de données. C'est le type d'exercice par lequel on tente de reproduire logiquement un schéma mental d'une interrelation entre phénomènes, en essayant de vérifier, par l'observation, le degré de correspondance entre cette construction de l'esprit et la situation réelle63(*). Le traitement des données relatives au milieu de résidence Des informations que nous avons recueillies sur le milieu de résidence des apprenants sur lesquels nous avons enquêté, nous avons sélectionné les éléments qui favorisent l'enseignement/apprentissage de la lecture. Ils sont constitués de douze (12) caractéristiques individuelles et contextuelles : le caractère adolescent des apprenants, la sous scolarisation des filles, le niveau d'étude des mères, leur origine socioprofessionnelle, le niveau d'étude des pères, leur origine socioprofessionnelle, leur statut matrimonial, la disponibilité d'un cadre d'études, la disponibilité d'une table d'études, le moyen d'éclairage utilisé, le moyen d'information choisi, la répartition par arrondissement des apprenants. Ces éléments du milieu socioculturel de résidence jouent un rôle important dans l'enseignement/apprentissage de la lecture tout comme dans celui de toutes les disciplines scolaires. Il s'agit des facteurs suivants : Le caractère adolescent des apprenants Les apprenants sur lesquels nous avons enquêté sont âgés de 12 à 19 ans. Or, les adolescents sont les individus dont l'âge varie entre 10 et 20 ans. Donc, nos sujets expérimentaux sont des adolescents et des adolescentes. Au cours de la période d'adolescence : - l'individu progresse du stade de l'apparition initiale des caractères sexuels secondaires à celui de la maturité sexuelle ; - les processus psychologiques et les modes d'identification de l'individu évoluent de ceux qui sont propres à un enfant à ceux qui caractérisent un adulte ; - l'individu passe de l'état de dépendance sociale et économique totale à celui d'indépendance relative. A la suite de cette description de l'adolescence, nous nous demandons si un individu agité par toutes ces pulsions sexuelles, psychologiques, identitaires et économiques peut véritablement se concentrer sur l'apprentissage de la lecture. La lecture étant un acte éminemment individuel qui exige un minimum d'isolement et une attention soutenue. Les adolescents sont partagés entre le désir d'établir leur propre personnalité et le puissant besoin d'appartenance à leur classe sociale. Il en résulte qu'ils peuvent être influencés par leurs pairs, peut-être d'une façon qui va à l'encontre des aspirations de leur famille qui aimerait les voir savoir lire. Les adolescents sont également écartelés entre le désir d'assouvir pleinement leur besoin sexuel et disposer des moyens financiers pour paraître au milieu de leurs camarades surtout de la classe de troisième. Ainsi, l'apprentissage et la pratique de la lecture deviennent des préoccupations de second plan. Un adolescent préfère s'offrir un produit à la mode plutôt qu'un livre de lecture. Nous constatons que ce sont les dispositions mentales qui commandent les attitudes de certains adolescents. L'une des conséquences immédiates de ce comportement est leur choix de la télévision comme moyen d'information au détriment de la lecture. La sous scolarisation des filles La sous scolarisation des filles que nous avons relevée au cours de l'enquête semble cacher un autre phénomène : leur déperdition scolaire. En effet, dans les classes de sixième des collèges d'enseignement général où nous avons réalisé l'enquête, le nombre de filles est sensiblement équivalent à celui des garçons. Mais, au fur et à mesure que les cohortes progressent d'un niveau à un autre, la régression du nombre de filles s'accroît. L'abandon scolaire des filles semble être dû principalement aux grossesses précoces. Les adolescentes enceintes abandonnent les classes sans avoir aucune chance de pouvoir y retourner par la suite. Le retour d'une adolescente mère dans sa classe d'origine peut s'avérer impossible car elle peut être considérée comme un mauvais exemple pour les autres élèves. Une grossesse précoce est souvent perçue comme une source de déshonneur pour l'adolescente et sa famille toute entière. Les fortes pressions sociales qui s'exercent sur l'adolescente enceinte la contraignent à abandonner les études. Dans certains cas, les conséquences sont plus graves. L'adolescente est contrainte soit à se marier, soit à commettre un avortement illicite. Ainsi, les effets d'une grossesse précoce peuvent être dévastateurs aux points de vue éducatif, social, et économique pour une adolescente de la classe de troisième dont la réussite au Brevet d'Etudes du Premier Cycle (BEPC) aurait pu ouvrir les perspectives nouvelles pour la vie. Le niveau d'étude des mères des apprenants Nous avons constaté lors de l'enquête que 78% des mères des apprenants sont du niveau d'étude secondaire. Les adolescents d'aujourd'hui étant les adultes de demain, le faible niveau d'étude des mères peut être l'une des conséquences de la déperdition scolaire que nous venons d'exposer. Par ailleurs, les conflits entre les parents et les adolescentes à propos de la sexualité par exemple peuvent être aussi à l'origine des abandons scolaires. Une adolescente qui abandonne les études finit par devenir mère. Les adolescentes mères, qu'elles soient mariées ou célibataires, s'exposent à de nombreuses difficultés financières. Les filles mises au monde par les adolescentes ont de forts risques de devenir elles aussi mères adolescentes. Le cycle de pauvreté s'en trouve perpétué. Les apprenants issus de cette catégorie de mères ont besoin d'un soutien scolaire. Leurs mères ne disposent pas souvent de moyens intellectuels requis pour le leur apporter. Elles ont un niveau scolaire proche de celui des enfants car elles peuvent avoir abandonné les études quelques années plus tôt en classe de troisième, niveau auquel fréquentent leurs enfants. Le niveau d'étude des mères a par ailleurs une implication sur leur catégorie socioprofessionnelle. La profession des mères des apprenants Au cours de l'enquête, nous avons observé que 41% des mères des apprenants sont des ménagères. Lorsque les chances d'éducation des adolescentes ont été compromises à la suite des abandons scolaires, leurs perspectives d'emploi sont réduites de sorte qu'il est vraisemblable qu'elles continueront à dépendre des autres pour leurs moyens d'existence. Cela peut contribuer à perpétuer la condition inférieure de nombreuses femmes dans la société congolaise d'une génération à une autre. Le niveau d'étude des pères des apprenants Lors de l'enquête que nous avons menée, nous avons remarqué que 48% des pères des apprenants ont le niveau de l'enseignement secondaire et 47,5%, celui de l'enseignement supérieur. Donc 95,5% des pères des apprenants ont au moins le niveau d'étude secondaire. Une telle configuration aurait pu constituer un privilège culturel important pour l'apprentissage de la lecture par les enfants. Mais ces parents eux-mêmes ne lisent pas ou lisent peu. Si les enfants les voyaient se servir de la lecture pour résoudre leurs problèmes quotidiens, ils prendraient conscience de l'importance de la lecture et seraient probablement motivés pour l'apprentissage et la pratique de la lecture. Nous pouvons penser qu'une société dans laquelle les citoyens ne lisent pas ou lisent peu, reproduit des enfants peu lecteurs car ces derniers voient rarement les livres chez eux. Nous partageons l'analyse selon laquelle le livre se voit presque condamné à la clandestinité, à tel point que de l'avis de nombreux observateurs culturels les Africains ne lisent pas. Ainsi, il est peu probable que les enfants soient des lecteurs lorsque leurs parents ne le sont pas, dans une société où la lecture n'est pas un fait culturel. Cependant, un bon niveau d'étude peut prédisposer un individu à une bonne catégorie socioprofessionnelle et, partant, à une réelle ascension sociale. La catégorie socioprofessionnelle des pères des apprenants Nos résultats d'enquête révèlent que 51% des apprenants sont issus des parents des professions scientifiques, techniques, libérales et assimilées ; 11%, des personnels administratifs et travailleurs assimilés ou du personnel commercial et vendeur et 6%, d'ouvriers et manoeuvres. Une telle configuration socioprofessionnelle des parents devrait garantir aux enfants une aisance matérielle certaine. Elle peut être un facteur important dans l'apprentissage de la lecture, comme dans celui de toutes les autres disciplines scolaires. La qualité de l'alimentation, le temps de sommeil et celui d'étude sont importants pour la nature des apprentissages scolaires. Ordinairement, la catégorie socioprofessionnelle du père apparaît comme un facteur important dans la réussite scolaire des enfants. La profession du père souvent en congruence avec son niveau d'étude, lui permet d'acquérir une relative aisance matérielle et un certain confort culturel qui ont, dans la plupart des cas, une incidence sur le travail scolaire des enfants. Au regard des résultats de notre étude, nous avons le sentiment que les apprenants ne tirent pas toujours autant de profit espéré du privilège économique et culturel que leur confère la profession de leur père ou tuteur. Bien d'autres facteurs comme l'établissement, la classe, la compétence du professeur et l'environnement semblent déterminer la réussite ou l'échec scolaire des adolescents. Il est probable que cela tienne de deux facteurs : premièrement, il y a comme une véritable démission parentale des tâches d'éducation scolaire des enfants. Les pères se déchargent souvent sur les mères. Les occupations professionnelles de celles-ci ainsi que leurs tâches ménagères ne leur laissent guère le temps de jouer leur rôle d'éducatrice et d'accompagnatrice du travail scolaire des enfants qui en ont le plus besoin. Deuxièmement, les adolescents passent le plus clair du temps journalier en compagnie des pairs du même groupe d'âge, et en dehors de la famille. Nous avons indiqué qu'ils peuvent être influencés par leurs camarades de façon qui va à l'encontre des aspirations de leurs parents. Un tel constat conduit à souhaiter que la famille s'engage à prendre en charge le suivi et l'accompagnement du travail scolaire des enfants. Ainsi, la qualité des apprentissages d'un enfant n'est pas uniquement tributaire de la catégorie socioprofessionnelle de son père. D'autres paramètres semblent influencer positivement ou négativement le travail scolaire des adolescents. Son résultat peut dépendre de l'aisance matérielle du ménage. Celle-ci à son tour peut dépendre du statut matrimonial du chef de famille et de la taille de celle-ci. Le statut matrimonial du père Nos résultats d'enquête montrent que 81% des apprenants sont issus des parents monogames. La monogamie désigne un régime juridique dans lequel une personne ne peut avoir légalement qu'un seul conjoint. Dans cette définition, nous insistons sur l'adverbe légalement parce qu'il arrive parfois qu'au moment où un Brazzavillois se prononce pour la monogamie devant un officier d'état civil, une amante l'attend dans un « nganda » (buvette populaire). Dans ces conditions, l'apparente aisance matérielle supposée pour les couples monogames peut se transformer en difficultés de toutes sortes au point où certains apprenants issus de tels ménages ne disposent ni de manuels de lecture, ni d'oeuvres au programme. Il leur arrive de ne même pas avoir des moyens financiers pour s'abonner à une bibliothèque. La disponibilité d'un cadre ou s'une salle d'études à domicile A partir des résultats d'enquête, nous avons remarqué que 83% des apprenants disposent d'un cadre d'études à domicile. Nous avons indiqué que cela tient de ce que la majorité des apprenants de notre échantillon sont issus des personnes des professions scientifiques, techniques, libérales et assimilées. Le bon niveau de vie d'un ménage peut garantir des conditions matérielles d'apprentissage des enfants. Avec Michèle Bedouet et Frédrique Cuisiniez (1997), nous affirmons que : les bonnes conditions dans lesquelles la lecture s'effectue jouent un rôle non négligeable dans l'efficacité et le plaisir dla lecture64(*). Ainsi, les parents ayant un niveau de vie intéressant, disposent des structures favorisant les apprentissages extrascolaires des enfants. La disponibilité d'une table d'études Les résultats d'enquête révèlent que 61,7% d'apprenants disposent d'une table à la maison. Mais, elle n'est pas spécialement destinée à leurs études. Ce mobilier a une autre fonction. Il sert de table à manger et participe du confort matériel du ménage. Le moyen d'éclairage utilisé Le dépouillement de l'enquête que nous avons réalisée, établit que 72% d'apprenants vivent dans des maisons électrifiées. Nous notons que cela est un indicateur du niveau de vie et du privilège économique de leurs parents. Le niveau de vie d'un citoyen peut être tributaire pour l'essentiel de la catégorie socioprofessionnelle à laquelle il appartient. La catégorie socioprofessionnelle du chef de famille détermine habituellement le privilège économique dont jouissent ses enfants. Ainsi, ce privilège est par ailleurs un facteur important dans les apprentissages scolaires étant donné qu'il favorise l'acquisition des moyens matériels requis pour une vie décente et, partant, pour une bonne scolarité supposée des enfants. Le moyen d'information choisi Le dépouillement des données nous révèle qu'une importante majorité d'apprenants choisissent la télévision comme moyen d'information au détriment de la lecture et de la radio. Ce constat pourrait s'expliquer par le faible taux de couverture de Brazzaville en milieux de lecture et un environnement enclin à la facilité. En effet, la télévision exerce sur l'esprit des enfants une grande séduction parce qu'elle diffuse à longueur de journées une successivité d'images aiguisant ainsi leur agilité visuelle et mentale. Nous remarquons qu'en ce début du XXIè siècle, la lecture est concurrencée par la télévision et les médias en général. Certes, ils invitent à la facilité mais ils nourrissent et entretiennent en même temps la culture des apprenants par les spectacles qu'ils présentent et les informations qu'ils véhiculent. La télévision devient pour les apprenants le principal moyen d'information et leur bonne mémoire les prédispose à la rétention de nouveaux éléments contribuant à la consolidation de leur culture. C'est pourquoi, cette catégorie d'apprentis lecteurs paraît plus performante en ce qui concerne la variable « oeil et esprit exercés ». Par ailleurs, la lecture étant un acte éminemment individuel et nécessitant une attention soutenue, nous nous demandons avec le Professeur Mukala Kadima-Nzuji (2004) si elle peut raisonnablement s'exercer pleinement dans une société qui fonctionne assez largement sur la base de l'esprit communautaire plutôt qu'individualiste et sur le mode de l'oralité plutôt que de l'écrit65(*). L'arrondissement de résidence des apprenants La répartition des apprenants par arrondissement se révèle disproportionnée. Cette disproportion est due à des raisons de proximité des apprenants par rapport aux établissements que nous avons retenus pour l'enquête. Tous les arrondissements de Brazzaville présentent le même environnement. Il est caractérisé par l'insuffisance des lieux de lecture (bibliothèques, librairies, kiosques à journaux, cybercafés, centres de lecture, centres de documentation et d'information) et la présence des médias comme la télévision et la radio. Un tel environnement invite plus à la facilité qu'à l'effort d'isolement et d'attention soutenue qu'implique la lecture. Marc Talansi a pu écrire que le Congolais ne lit pas assez et Brazzaville ne constitue pas un environnement propice pour la lecture. Nous convenons par ailleurs que le livre ne bénéficie pas du même réseau de distribution que la chanson de variété à tel point qu'il s'agisse de sa production ou de sa réception, il demeure l'affaire d'une minorité. En Afrique et singulièrement dans les deux Congo, les maisons d'édition et les librairies sont quasi inexistantes, le nombre de centres de lecture insignifiant et la politique du livre inefficace. En somme, le milieu de résidence des apprenants sur lesquels nous avons enquêté, tel qu'il fonctionne actuellement, offre toutes les conditions matérielles pour une vie confortable. En revanche, il n'assure pas toujours des conditions intellectuelles d'étude et il y a constat d'échec de l'enseignement/apprentissage de la lecture. Cela confirme la justesse de notre hypothèse selon laquelle certains éléments du milieu favorisent l'enseignement/apprentissage de la lecture et, quand ils ne la favorisent pas, ils demeurent non défavorables. Après avoir montré le caractère non propice pour la lecture du milieu de résidence des apprenants qui ont constitué nos sujets d'enquête, nous abordons l'analyse des données qualitatives relatives à leur pratique de la lecture. Le traitement des données relatives à la pratique de la lecture Des renseignements que nous avons collectés à propos de la pratique de la lecture des apprenants qui ont constitué nos sujets d'enquête, quatre caractéristiques individuelles permettent de décrire leur pratique de la lecture. Ce sont le manque de manuel de lecture, le choix des bandes dessinées comme support de lecture, l'abonnement à une bibliothèque, la pratique effective de la lecture à travers l'établissement, le type de classe et la classe. La pratique régulière de la lecture est importante pour l'amélioration de la qualité de la lecture individuelle et de l'enseignement/apprentissage de la lecture en général. Cette pratique est caractérisée par les facteurs suivants : Le manque de manuels de lecture Nous avons relevé qu'aucun apprenant de notre échantillon expérimental ne dispose ni du manuel de lecture ni d'oeuvres au programme. Certains vont jusqu'à ignorer totalement les noms des titres des manuels et d'oeuvres au programme. D'autres confondent le titre de l'oeuvre de Jean-Marie Adiafi, La Carte d'identité à leur carte d'identité personnelle. Un tel phénomène peut être dû à plusieurs facteurs : premièrement, nous avons relevé précédemment que le refus des adolescents d'acheter les livres est un choix délibéré tributaire sans doute de leurs dispositions personnelles et non d'une quelconque pauvreté, comme on a souvent tendance à le croire. Deuxièmement, la pauvreté qui ne permet pas aux parents d'élèves de disposer des moyens financiers pour acheter les fournitures scolaires de leurs enfants. Les politiques d'ajustement structurel sont à la base du rabattement des salaires des agents de l'Etat congolais depuis près de deux décennies. L'Etat étant le principal employeur en République du Congo, la pauvreté s'est installée réduisant de nombreuses familles à la mendicité. Les derniers événements sociaux, élégamment appelés bêtise humaine, n'ont fait que ruiner les espoirs de prospérité qui pointaient à l'horizon pour quelques familles. Troisièmement, des décennies du socialisme ont habitué les apprenants des écoles congolaises à ne pas acheter les fournitures scolaires. La culture de l'effort a fait place au militantisme. L'agitation a été pendant longtemps le gage de réussite sociale et la culture de la médiocrité a pris corps dans de nombreux secteurs de la vie nationale. Quatrièmement, l'indisponibilité des manuels et oeuvres au programme est chronique dans le pays. La dislocation de l'Office national des librairies populaires a mis fin à l'embryon de circuit de distribution des livres qui existait dans le pays. La politique du livre étant inefficace, celle du manuel scolaire est défaillante. La Société Congolaise de Distribution et de Recouvrement (S.C.D.R) des manuels scolaires est une excellente initiative qui ne se limite actuellement qu'à l'enseignement primaire. Nous avons l'impression que cette initiative reste insuffisante dans la mesure où elle n'opère que sur les ouvrages financés par l'Agence Intergouvernementale de la Francophonie (AIF). A la suite de la Convention de Diffusion - Distribution des manuels scolaires n°AG/DLE/BK/1999 1241-041 entre l'Agence et la SCDR, société congolaise de droit privé, les manuels de français et ceux de mathématique sont désormais disponibles sur toute l'étendue du territoire national. Ainsi, l'environnement de Brazzaville est pauvre en manuels scolaires du second cycle. Une telle pauvreté en supports écrits est un handicap qui ne saurait favoriser l'apprentissage et la pratique de la lecture, même si par ailleurs le manque de manuel de lecture n'est plus un handicap incontournable pour l'enseignement/apprentissage de cette discipline fondamentale. Le support de lecture utilisé Plus de la moitié des sujets de notre échantillon portent leur choix sur les bandes dessinées. Ce choix semble contraster avec l'insuffisance de ce support dans les lieux de lecture de notre ville capitale comme nous l'avons précédemment noté. La lecture de la bande dessinée paraissant facile, fascine de nombreux apprenants. En réalité, certains apprenants qui ont prétendu qu'ils lisent les bandes dessinées voulaient plutôt dire qu'ils préfèreraient les bandes dessinées à la place des journaux et des livres des parents car ils n'ont pu nous citer le titre d'une seule bande dessinée connue d'eux, au cours de l'enquête complémentaire. Nous l'avons organisée pour mieux élucider le contraste que nous avons constaté au cours du dépouillement des données que nous avons eu à collecter. La répartition des apprenants par établissement, classe et type de classe. Cette répartition des apprenants de notre échantillon selon les facteurs scolaires, est équitable pour des besoins d'expérimentation. C'est au cours de l'enseignement/apprentissage de la lecture que les apprenants la pratiquent effectivement. Cette pratique est limitée par trois facteurs : 1. La fréquence des cours de lecture (deux heures par semaine) nous paraît insuffisante. 2. La méthodologie qui consacre la lecture de deux ou trois bons élèves est un handicap pour la pratique effective de la lecture pour tous les élèves. Pendant que les trois élèves supposés bons lecteurs se produisent les autres sont réduits au rôle de spectateurs passifs. 3. La leçon de lecture ne produit pas les résultats escomptés car il manque de support. Certains professeurs, comme nous l'avons noté précédemment, recopient le texte au tableau. Cette pratique contribue à réduire le nombre de textes que les apprenants peuvent lire au cours d'une année scolaire. Dans certains cas, la formation des professeurs ne leur permettant pas de procéder autrement, ils se résolvent à ne faire ni la lecture expliquée ni la lecture suivie et dirigée dans leur classe par manque de livres, même si ce handicap de nos jours peut être contourné. En somme, nos deux premières hypothèses secondaires se vérifient. Le manque de support d'apprentissage ne favorise pas actuellement la bonne qualité de l'enseignement/apprentissage de la lecture et, partant, de sa pratique dans les classes de troisième. Les résultats des élèves en lecture sont décriés au point où l'échec en lecture est perçu comme celui de toute la scolarité. Au neuvième chapitre intitulé perspectives, des propositions d'amélioration de la contribution du milieu et du minimum de support pluriel d'apprentissage requis en vue de l'enseignement/apprentissage de la lecture seront mises en évidence. B - Le traitement des données quantitatives Des tests d'évaluation initiale d'une part, et d'évaluation terminale d'autre part ont été également proposés aux sujets expérimentaux. L'évaluation de leur production nous a permis de recueillir des informations relatives à leurs performances, variable par variable. Avant de présenter les résultats, il importe d'exposer le mode de traitement des données que nous avons adopté. Les informations recueillies à partir des tests auprès de l'échantillon décrit au chapitre précédent sont traitées conformément à la méthodologie suivante. Fondements théoriques En vue du traitement des données quantitatives, nous recourons à la statistique descriptive. Elle décrit les populations ou les échantillons sans se préoccuper de déterminer les limites de validité des mesures effectuées. Choix du test statistique Le problème posé étant la vérification de la pertinence des pratiques pédagogiques actuelles en lecture, nous devons comparer les moyennes des tests passés par les deux groupes de cinquante (50) apprenants chacun dans les trois (3) établissements : - un groupe expérimental auquel la lecture est enseignée selon les pratiques pédagogiques innovées. - un groupe témoin auquel la lecture est enseignée selon les pratiques pédagogiques actuelles. Pour la comparaison de trois à plusieurs moyennes, il convient de recourir au test F de Fisher Snédecor qui est ordinairement utilisé pour effectuer des tests de comparaison de variances. Une statistique F est calculée dans un échantillon en faisant le rapport de deux estimations différentes ( ) et elle est ensuite comparée à la valeur de la table. Si Fc < Fr = 1,96 ; la différence est non significative (NS); Si Fc = Fr = 1,96 ; la différence est significative(S*) ; Si Fc = Fr = 2,56 ; la différence est très significative (S**). Il existe la relation suivante entre la table de F et celle de t : 66(*). Loi normale (ì ou z) Convergence pour N = 100 (Dl = 8) Loi de Snédecor (F) Loi de Student (t) pour v =1 Pour l'essentiel, il s'agit de calculer les paramètres suivants : * 46. Jean, FOUCAMBERT (1980), La Manière d'être lecteur, Paris, Editions Sermap, OCDL, p. 137. * 47. Jean-Jacques, LARAME (1992), Les tests de sélection dévoilés, Paris, Editions de l'Ecrit, p. 10. * 48. Noëlle, PARDON (1993), « Lecture : les compétences à développer », Diagonales, Paris, EDICEF, n° 25, janvier 1993, p. 34. * 49. Brigitte, CHEVALIER (1986), Bien lire au collège, Textes et exercices d'entraînement progressifs, Niveau 2, Paris, Nathan, p. 15. * 50. Emile, JAVA L (1978), Physiologie de la lecture et de l'écriture, Paris, Editions RETZ. * 51. Michèle, BEDOUET ; Frédérique, CUISINIEZ (1997), Lire : soyez rapide et efficace, 2ème édition, Paris, Editions ESF, p. 19. * 52. Michèle, BEDOUET ; Frédéric, CUISINIEZ (1997), op.cit. p. 35. * 53. Brigitte, CHEVALIER (1986), Bien lire au collège, Guide méthodologique, Niveau 2, Paris, Editions Nathan, pp. 14 - 20. * 54. Emile, JAVAL (1978), op.cit. * 55. Frère, MACAIRE (1993), Notre beau métier, Paris, Les classiques africains, p. 403. * 56. Brigitte, CHEVALIER (1986), Bien lire au collège, Guide méthodologique, Niveau 2, Paris, Nathan, p. 16. * 57. Gérard, VIGNER (1979), Lire : du texte au sens, Paris, Editions Clé International, p. 53. * 58. Le test de CLOSURE est un exercice inventé par William TAYLOR aux Etats-Unis d'Amérique, en 1953, qui a été transposé pour la langue française par Gilbert de LANDSHEERE. Il désigne un texte auquel il manque certains mots qu'il faut trouver. * 59. Roger, MUCCHIELLI (1978), Le sondage d'opinion, Applications pratiques, Paris, les éditions ESF, p. 123. * 60. Source : Annuaire statistique 2001 - 2002 du Service des études et de la planification scolaires d'avril 2003 de la République du Congo. * 61. Antoine, MAKONDA (2004), « Point sur la scolarisation des filles au Congo », Colloque sur la scolarité des filles, Pointe-Noire, le 16 février. * 62. Jean Marie ADIAFI, La Carte d'identité, Paris, Hatier, Collection monde noir de poche 2002, * 63. Gordon, MACE (1988), Guide de l'élaboration d'un projet de recherche, Québec, Les Presses de l'Université de Laval, p.93. * 64. Michèle, BEDOUET ; Frédérique, CUISINIEZ (1974), op.cit. * 65 Mukala, KADIMA-NZUJI (2004), «Paroles et musique: pérennité du lien», Notre librairie, n° 154, avril-juin, p.17. * 66. Michel, LORIAUX en collaboration avec Grégoire, BALARD ; Dominique, REMY (1988-1989), Méthode d'analyse statistique multi variée à l'étude des interrelations en population et développement, Louvain, Centre International de Formation et de recherche en population, p. 59. |
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