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L'enseignement/apprentissage de la lecture au college

( Télécharger le fichier original )
par Martin GUIMFAC
Chaire UNESCO, Université MARIEN NGOUABI, Brazzaville - Doctorat thèse unique 2007
  

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Objectif général 2 : Comprendre des supports écrits

Objectifs spécifiques

Contenus notionnels

2.1 Identifier les indices de sens, d'articulation logique et d'articulation rhétorique.

2.2 Lire différents types de textes.

2.3 Interpréter un texte lu, une iconographie ou un film visionné

2.4 Illustrer un texte lu, une iconographie observée ou un film visionné

2.5 Distinguer la présentation matérielle des genres littéraires

Identification des indices :

- Support textuel

Indices de sens : thèmes, contexte, types de texte, Idées, personnages, événements, enchaînement des événements et des idées.

Indices d'articulation logique : mots de liaison.

Indices d'articulation rhétorique : figures de style.

Outils :

Types de discours,  temps et modes de conjugaison.

- Support iconographique : Bande dessinée, Portrait, Tableau, Pyramide, Représentation graphique.

Lecture de différents types de textes

Différents types de textes : descriptif, historique, injonctif, argumentatif, informatif, scientifique, fonctionnel.

Manuel : La 3è en français, EDICEF.

Interprétation d'un support lu ou visionné

Texte : Reformulation des messages retenus

Iconographie  ou film visionné: Explication du plan, du champ visuel, de l'angle de prise de vue, des symboles, des formes et des couleurs.

Illustration par transposition  d'un type de support à l'autre

- du texte au plan ou à l'itinéraire.

- du texte au schéma ou à la bande dessinée.

- de l'image au texte.

- de la bande dessinée au texte.

Présentation matérielle des genres littéraires 

- Genre romanesque (conte, nouvelle, roman)

- Genre dramatique (tragédie, comédie, tragi-comédie)

- Genre poétique (vers libres, poème à forme fixe)

Objectif général 3 : S'exprimer à l'oral

Objectifs spécifiques

Contenus notionnels

3.8 Présenter le compte-rendu d'une lecture ou d'un événement

3.10 Reformuler un texte lu

Présentation d'un compte-rendu de lecture

Thème, idées, plan ou structure, personnages, événements.

Reformulation d'un texte 

- Type de texte,

- Ton du texte,

- Contenu du texte,

- Reconstitution du message en d'autres termes.

Objectif général 5 : Acquérir les compétences techniques

Objectifs spécifiques

Contenus notionnels

5.1 Utiliser les techniques et sources d'information

5.2 Participer à la création d'une oeuvre collective.

5.7 Etudier une oeuvre.

5.8 Résoudre les problèmes de la vie quotidienne.

5.9 Clarifier une valeur

Techniques d'information :

- Enquête,

- Observation,

- Interview,

- Créativité

- Elaboration des fiches

Sources d'information :

- Bibliothèque, centre de documentation et d'information

- Personne-ressource, presse écrite et audiovisuelle

Réalisation d'une oeuvre collective :

- Projet

- Plan,

- Méthodes d'organisation du travail en groupes,

- Evaluation.

Etude d'une oeuvre :

Présentation, auteur, titre, structure, personnages

Analyse, morceaux choisis, étude de quelques thèmes, synthèse.

OEuvres : La carte d'identité, Jean-Marie Adiafi

La dernière aimée, Rabiatou Njoya

Résolution d'un problème

Définition du problème,

Formulation des hypothèses de solution

Testing des hypothèses selon les critères définis

Elaboration de la conclusion

Application de la conclusion.

Clarification d'une valeur

Définition de la valeur

Formulation des hypothèses

Choix justifié d'une ou de plusieurs hypothèses

Appréciation publique du choix opéré

Application ou non de l'hypothèse (ou des hypothèses) choisie(s).

Nous rappelons que les deux types de lecture en cours en classe de troisième dans les collèges d'enseignement général à Brazzaville sont la lecture expliquée et la lecture suivie et dirigée. Les instructions officielles insistent sur la pratique de ces deux types de lecture qui font l'objet d'apprentissage en classe de troisième. La lecture expliquée assure la maîtrise du texte par l'apprenant. La lecture suivie et dirigée le prépare à l'entrée dans la littérature.

D'un crédit horaire d'une heure par semaine, la lecture expliquée est pratiquée de la classe de sixième (6è) à celle de troisième (3è). Elle se rapporte à l'étude d'extraits et vise à :

- renforcer les capacités de communication écrite ;

- développer les techniques de lecture ;

- faciliter l'accès à la culture.

D'un crédit horaire d'une heure par semaine, la lecture suivie et dirigée est inscrite au programme de la classe de sixième (6è) à celle de troisième (3è). Elle concerne l'étude d'oeuvres et poursuit des objectifs d'ordre technique et culturel pour :

- former les apprentis lecteurs ;

- enseigner aux apprenants à lire une oeuvre complète ;

- améliorer la lecture des apprenants par la consolidation de l'approche textuelle. En effet, elle permet à la fois d'accéder au contenu des messages qu'un texte est censé véhiculer ainsi qu'au mode de fonctionnement de ses éléments constitutifs ; le texte étant à la fois tissu de sens et matériau de communication ;

- assurer le développement de la culture littéraire des apprenants.

Il faut rappeler que les instructions officielles ne sont pas des textes publiés dans le Bulletin Officiel comme en France par exemple. Dans notre cas, elles sont soit des indications d'accompagnement des programmes, soit des circulaires ministérielles. Les instructions sont constituées des orientations générales contenues dans le guide pédagogique du programme dont l'extrait est ci-dessus présenté.

B - L'EXTRAIT DU GUIDE PEDAGOGIQUE

Le guide  pédagogique comprend pour l'essentiel les orientations générales, la présentation du programme, le commentaire des objectifs généraux et spécifiques, les stratégies d'enseignement, les activités d'apprentissage et d'évaluation ainsi que divers conseils pratiques relatifs à la mise en oeuvre du programme d'étude.

ORIENTATIONS GENERALES ET PRESENTATION DU PROGRAMME

A ce stade, nous présentons les orientations générales, d'une part, le programme d'autre part.

Orientations générales

L'enseignement du français au collège repose sur deux préoccupations essentielles : 

- consolider (ou renforcer) les acquis du primaire ;

- préparer le passage au second degré du cycle secondaire avec un nouveau type d'exercices et l'entrée dans la vie professionnelle.

Le niveau de maîtrise de la langue visé, doit permettre à l'élève de faire face aux exigences du cycle et des exercices auxquels il va devoir dorénavant faire face.

L'enseignement est organisé en fonction des besoins réels, des objectifs généraux et des objectifs spécifiques dans les différents domaines de l'apprentissage d'une langue : compréhension, expression, et développement des compétences techniques acquises (réinvestissement), tout en étant envisagé comme un tout.

La compréhension fait appel à des nouvelles exigences, à l'oral comme à l'écrit et s'évalue à partir de supports divers : textes, iconographies, documents sonores etc.

L'expression orale qui est un pré-requis indispensable à l'apprentissage de l'expression écrite est, à ce titre, liée à l'expression écrite, même si les codes en sont différents.

Une langue étant un tout, un instrument, son utilisateur a le loisir de l'enrichir, d'en faire une exploitation personnelle à l'école ou ailleurs, d'appréhender tous les autres enseignements.

Présentation du programme

Le programme de français au collège se présente sous forme d'objectifs généraux et d'objectifs spécifiques accompagnés de contenus notionnels. La progression étant un critère indispensable à la qualité d'une formation ou d'un apprentissage, les objectifs spécifiques et les contenus notionnels varient d'un niveau à un autre, en fonction des besoins, des nécessités et des activités à réaliser, tandis que les objectifs généraux restent les mêmes de la 6ème à la 3ème.

Objectifs généraux

6ème

5ème

4ème

3ème

1. Comprendre un message oral

2. Comprendre un support écrit

3. S'exprimer à l'oral

4. S'exprimer par écrit

5. Acquérir les compétences techniques

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COMMENTAIRE DES OBJECTIFS D'APPRENTISSAGE ET DES STRATEGIES D'ENSEIGNEMENT

Objectif général 2 : Comprendre des messages écrits

Commentaire :

Comprendre des messages écrits c'est saisir le sens global et les significations de tout support écrit. Il s'agit de pouvoir lire, c'est-à-dire donner du sens aux signes du code écrit.

Pour ce faire, l'apprenant doit s'entraîner à découvrir les nuances du ton ainsi que les caractéristiques formelles (genre, type, courant littéraire, présentation typographique, situation d'énonciation, éléments de para texte), tout comme le lexique, pour pouvoir découvrir par approches successives le ou les sens du support qu'il lit.

Ainsi, l'enseignant doit familiariser l'apprenant à la découverte des indices de sens, de forme et de structure du support considéré. Puis il doit l'amener à pouvoir manifester sa compréhension par l'exécution des activités liées audit support. Celles-ci pourraient consister en la réponse aux questions, la dramatisation, la reconstitution, l'illustration ou la reformulation d'un point de vue motivé sur un problème soulevé par le support en étude à l'écrit ou à l'oral.

Objectif spécifique : 2.1 Lire un texte écrit ou un extrait

Commentaire :

Lire un extrait, consiste à aller à la découverte du genre, du type et du ton du texte pour pouvoir construire du sens. Pour ce faire, on va de l'exploitation des alentours du texte (titre, illustration, notes...) à l'appropriation de la substance du message par le lecteur. Il s'agit de réaliser par approches successives les étapes suivantes :

- Identification du genre, du type et du ton du texte ;

- Repérage par analyse détaillée du système d'énonciation, de l'organisation du texte, des mots, des expressions et des figures de style, porteurs de sens et susceptibles de commentaire.

- Exercice de sa sensibilité personnelle par l'exploitation de certains sentiments éprouvés par les personnages ou suggérés par leur situation, et par la verbalisation de ce qu'on a éprouvé.

- Rapprochement du message du texte au vécu quotidien.

Stratégies d'enseignement : Elles comprennent les étapes suivantes :

a)- Préparation

- Choix de l'extrait

- Repérage d'éventuelles difficultés lexicales, syntaxiques ou culturelles.

b)- Déroulement

- Consigne fixant les objectifs.

- Lecture silencieuse.

- Questionnement oral portant sur le repérage et l'extraction des informations qui guideront l'exploitation du texte.

- Exploitation détaillée passage par passage ;

- Lecture des élèves ;

- Questionnement portant sur la prise d'indices ;

- Questionnement portant sur la construction du sens ;

- Questionnement portant sur les détails de la synthèse.

- Discussion socioculturelle

Les élèves élaborent une discussion orale ou/et écrite portant sur le rapprochement du message du texte à leur vécu quotidien.

Objectif spécifique 2.1 Lire une iconographie

Commentaire

La lecture d'un support iconographique doit permettre d'éduquer le regard, d'enrichir la sensibilité artistique, de stimuler l'imagination, d'éveiller l'esprit critique et de développer l'expression de l'apprenant.

L'analyse scriptoiconique suppose quatre étapes :

- L'approche intuitive : l'impression qu'a produit le document ;

- L'approche iconique : simple inventaire de ce qu'on voit ;

- L'approche iconographique : inventaire de ce qu'évoque le document ;

- La synthèse : bref résumé du document étudié.

Stratégies d'enseignement : Elles comprennent les étapes ci-après:

a)- Préparation

Le professeur choisit le document, se donne une interprétation et prend des dispositions pour le multiplier ou le mettre au tableau.

b)- Déroulement

- Le professeur présente le document et indique la consigne.

- Le professeur demande l'impression que le document produit chez les élèves.

- Le professeur indique la ou les pistes de déchiffrage du document.

- Le professeur guide les élèves pour réaliser la synthèse du document.

- Le professeur invite les élèves à traduire la synthèse en résumé.

Objectif spécifique 5.8 : Etudier une oeuvre

Commentaire

Etudier une oeuvre ne signifie pas qu'il faut la lire entièrement en classe avec les élèves. Ceux-ci doivent prendre le temps de la lire individuellement avant les séances d'étude qu'ils auront en classe avec le professeur. Un travail sur la connaissance de l'auteur, de l'oeuvre, des thèmes, des personnages, des évènements, des actions importantes, du genre d'oeuvre, du contexte, et de la langue sera réalisé avec l'aide du professeur. Des explications d'extraits de texte et des exposés constituent l'essentiel de l'étude, ceci, sur une période de quinze jours.

Stratégies d'enseignement : Elles comportent les étapes suivantes :

a)- Préparation

Le professeur propose aux élèves une oeuvre inscrite au programme et leur demande de la lire individuellement ou en groupes. Un délai leur est accordé.

b)- Déroulement :

Le professeur propose un questionnaire sur :

- L'auteur : son nom et son prénom ;

- L'oeuvre : le genre littéraire, la maison, le lieu et la date d'édition ainsi que les principaux personnages, les thèmes abordés, et la langue utilisée. Le professeur sélectionne les extraits les plus caractéristiques à étudier en classe, les communique aux élèves, et veille à l'exploitation de ces passages-là.

Le professeur fait préparer et présenter en classe des exposés sur les thèmes sélectionnés d'avance.

A la suite de ces extraits du programme et du guide pédagogique, nous analysons les faiblesses relatives à la pratique de la classe qui sont constituées de la préparation écrite et du mauvais déroulement des séances.

2. LA PREPARATION ECRITE

Elle comprend le choix des textes, la fiche de préparation écrite, les stratégies d'enseignement et d'apprentissage, le processus d'évaluation et quelques défauts de la fiche.

A. Le choix des textes

Le choix des textes tel qu'il se fait aujourd'hui est opéré sans réflexion préalable aussi bien pour la lecture expliquée que pour la lecture suivie et dirigée.

Le mauvais choix des textes en lecture expliquée

Ne disposant pas de manuel de lecture, le professeur est obligé de sélectionner les textes à partir de tout ouvrage en sa possession. Dans ce cas, il ne tient compte ni du développement de la personnalité des apprenants ni de leurs centres d'intérêt et encore moins de leurs aptitudes réelles. En classe de troisième, dans certains collèges d'enseignement général de Brazzaville, les élèves lisent le manuel intitulé Horizons d'Afrique, Perspectives francophones, CM2, 6ème année30(*), conçu pour les apprenants du cours moyen deuxième année. Pour cela, les professeurs les regroupent autour de quelques livres disponibles, ou recopient le texte au tableau noir au début de la leçon.

Ainsi, ces solutions relèvent à notre avis beaucoup plus de la science de « la misère » que d'une démarche pédagogique efficace et véritablement rentable.

Le mauvais choix des textes en lecture suivie et dirigée

Pour choisir des fragments d'oeuvres à étudier en classe, les professeurs utilisent l'approche thématique qui a le mérite de rassembler et de mettre en relation les textes de manière diachronique et synchronique et d'éviter ainsi l'étude des fragments isolés. L'approche thématique ne vise donc aucun objectif technique d'apprentissage tel que reconnaître le type de texte (narratif, argumentatif, scientifique, historique, informatif ou fonctionnel) ou le genre littéraire (romanesque, dramatique, poétique) auquel il appartient.

Ainsi, le choix des textes paraît relever du hasard en lecture expliquée. En lecture suivie et dirigée, il semble détourner l'activité de ses objectifs initiaux, à savoir former des lecteurs polyvalents et favoriser leur développement culturel. La situation ne semble guère plus heureuse en ce qui concerne la préparation écrite.

B. L'élaboration de la fiche de préparation écrite

L'étude des fiches de préparation écrite des professeurs que nous avons observés, révèle certes quelques aspects positifs mais aussi des insuffisances dans la formulation des objectifs, la définition des stratégies d'enseignement ainsi que dans le processus d'évaluation.

a)- L'incohérence des objectifs pédagogiques

Deux constats s'imposent :

- en lecture expliquée, les objectifs poursuivis ne sont pas spécifiés ;

- en lecture suivie et dirigée, les objectifs visés sont indiqués mais ils sont mal formulés et inadaptés.

Le manque d'objectifs pédagogiques en lecture expliquée

Notre observation des fiches de préparation écrite des professeurs montre que

bien souvent, elles n'ont pas d'objectifs pédagogiques précis en dehors de la volonté de faire lire le texte à l'avance à la maison31(*) .

Le cours de lecture apparaît comme un rituel au cours duquel ni les réponses des apprenants ne sont exploitées, ni le contrôle de leur travail ne se fait. Lorsque l'objectif pédagogique n'est pas spécifié, les termes du contrat didactique ne peuvent être définis. Il n'est pas possible de contrôler le comportement attendu des apprenants au terme de la séance pédagogique. Puisque celui-ci n'est pas défini au départ, il n'est pas possible de s'assurer à la fin de la séance qu'il est atteint.

La mauvaise formulation des objectifs pédagogiques en lecture suivie et dirigée

Nous avons indiqué précédemment qu'en lecture suivie et dirigée les objectifs pédagogiques sont mal formulés et inadaptés. En effet, les objectifs ne sont pas définis dans des termes qui permettent au professeur de s'assurer à la fin de la séance qu'ils sont atteints. Leur formulation ne contient pas de critère d'acceptabilité de la performance; elle n'exprime pas le produit d'une activité d'apprentissage et ne précise pas les conditions de réalisation du comportement souhaité.

Par ailleurs, les objectifs paraissent trop ambitieux. Nous en avons relevé deux fort frappants : « développer le goût de la lecture » et  «transformer l'apprenant en lecteur d'oeuvres »

« Développer le goût de la lecture » signifie faire accroître l'inclination de l'apprenant à cette activité. C'est un objectif à long terme. «Transformer l'apprenant en lecteur d'oeuvres » pose le même problème que le précédent. Il tend à rendre l'apprenant amoureux de la lecture. Un tel objectif ne saurait être réalisé en une heure de cours par semaine.

Les concepts utilisés dans ces deux objectifs font plutôt partie des termes requis pour la formulation d'objectifs généraux et non spécifiques ou opérationnels.

En outre, les objectifs pédagogiques sont inadaptés puisqu'ils ne tiennent pas compte du milieu de résidence des apprenants.

Le milieu, c'est tout ce qui nous entoure, matériellement, intellectuellement, c'est tout ce qui se passe, se croit, s'affirme, s'exprime autour de nous32(*).

Nous constatons que les professeurs veulent transformer leurs élèves en lecteurs sans s'être assurés que ceux-ci savent lire. Ils croient que

lire un livre ou aimer lire vont de soi33(*),

Or la lecture n'étant pas un acquis culturel en République du Congo, lire des livres ne saurait aller de soi. Les apprenants qui constituent notre échantillon expérimental sont au départ défavorisés par leur milieu de résidence. Il est peu propice à la lecture et plus généralement caractérisé par le manque de la culture de l'écrit. C'est pourquoi, dans son article intitulé « Comment parvenir à une société de la lecture au Congo ? », Sylvain Bemba (1985) écrit que la lecture n'est pas encore entrée dans les moeurs au Congo34(*).

Dans la Semaine Africaine (1986), il est écrit que :

les jeunes ne lisent pas, ne savent pas lire. Dans leur langage quotidien, lire signifie étudier ses leçons, repasser un cahier de cours et, trop souvent hélas l'apprendre par coeur35(*).

Dans son article « Qui lit quoi au Congo ? », Marc Talansi (1986) indique que :

le congolais ne lit pas, ou pas assez36(*).

Le fait que la société africaine est de tradition orale par essence ou la faible implantation de l'industrie du livre en République du Congo pourrait expliquer partiellement le manque d'intérêt que certains adultes congolais manifestent pour l'écrit.

Ce manque d'intérêt de l'adulte pour l'écrit influe négativement sur l'apprentissage de la lecture de ses enfants. Leur motivation pour la lecture serait grande s'ils voyaient leurs parents en situation de lecteurs.

Par ailleurs, certains enfants n'ont pas la possibilité de lire par manque de lumière le soir à la maison. A cela s'ajoutent leur disposition personnelle et l'insuffisance de moyens financiers pour leur permettre de s'acheter des livres ou des journaux. D'autres habitent loin des lieux de lecture : les bibliothèques, les kiosques à journaux, les cybercafés et les centres de documentation et d'information.

L'objectif pédagogique étant l'énoncé d'intention exprimant ou décrivant le changement attendu dans le comportement de l'apprenant à la suite d'une intervention pédagogique ou d'une activité d'apprentissage, sa formulation correcte a une triple utilité. L'objectif pédagogique oriente et guide l'acte d'enseignement ; il facilite l'apprentissage en garantissant la distinction entre l'essentiel et l'accessoire ; il facilite enfin l'évaluation.

Seule la maîtrise des critères et techniques de formulation des objectifs pédagogiques peut inciter un enseignant à leur utilisation. Celle-ci conditionne et rend aisée l'élaboration des stratégies d'enseignement et d'apprentissage dont le manque constitue un handicap que nous avons constaté dans les fiches de préparation écrite que nous avons observées.

En somme, l'incohérence des objectifs pédagogiques a une incidence sur les stratégies d'enseignement et d'apprentissage. En fait, c'est en fonction de l'objectif poursuivi qu'un professeur est censé opérer ses choix didactiques et préconiser ses stratégies car elles doivent s'accorder avec l'objectif visé. Le défaut d'objectif ou sa mauvaise formulation implique le manque de stratégies d'enseignement et d'apprentissage cohérentes.

b)- Le manque de stratégies d'enseignement et d'apprentissage

Apprendre à lire consiste à s'approprier un dispositif méthodologique permettant de parcourir tout texte, d'en découvrir le contenu et de le comprendre. Dès lors toute stratégie d'enseignement de la lecture doit prendre appui sur les stratégies d'apprentissage de la lecture qui sont de trois ordres  selon Anne Torunczyk (2000):

- la reconnaissance de mots que le lecteur a mémorisés ;

- le décodage, syllabe après syllabe ;

- le devinement37(*).

L'analyse des fiches de préparation écrite des deux types de lecture susmentionnés indique que les stratégies d'enseignement se réduisent pour l'essentiel à une succession de questions. Ce moyen ne saurait être efficace pour conduire ces activités dans la mesure où un apprenant peut répondre aux questions relatives à un texte et ne pas être capable d'accéder à la pensée de l'auteur du texte.

Au lieu d'indiquer les tâches d'apprentissage, les professeurs prévoient quelques explications des structures langagières et syntaxiques, oubliant que ces explications devancent l'observation, la comparaison, l'analyse et constituent leur fonction majeure. La séance tourne au verbiage au détriment du raisonnement et de l'action. Célestin Freinet (1964) affirme que cette explication à outrance38(*) consacre la voix du professeur comme l'outil majeur de la vie enseignante. Elle fait de lui uniquement le dispensateur des connaissances alors qu'il serait aussi tantôt organisateur, tantôt observateur pour laisser éclore les multiples potentialités des apprenants.

Dans ces conditions, les professeurs semblent ignorer qu'apprendre ce n'est pas seulement « recevoir » des connaissances données par d'autres, c'est aussi les recréer, les réinventer, les intégrer dans une structure que l'apprenant élabore. En principe, il doit être parfois acteur ou auteur de sa propre formation et non seulement agent.

L'explication à outrance fait du professeur le principal artisan de la séance pédagogique, alors qu'il devrait en être simplement le régulateur. Placé au coeur de l'acte pédagogique, seul l'apprenant devrait s'investir pour acquérir le savoir et le savoir-faire attendus de lui. Le savoir ne se transmet ni ne se communique, à proprement parler. Il se construit ou se reconstruit.

Le défaut d'objectifs pédagogiques n'entraîne pas seulement le manque de stratégies d'enseignement et d'apprentissage efficaces. Il implique aussi la non application du processus d'évaluation car évaluer, c'est vérifier si le professeur a atteint l'objectif qu'il visait. L'objectif étant le point de départ de toute évaluation, nous nous demandons comment s'assurer qu'un objectif est atteint s'il n'était pas connu au départ.

c)- La non application du processus d'évaluation

Dans les fiches de préparation écrite, nous notons le défaut de culture d'évaluation aussi bien en lecture expliquée qu'en lecture suivie et dirigée. Dans aucune fiche que nous avons examinée, nous n'avons trouvé les trois types d'évaluation requis pour vérifier l'acquisition effective des savoirs au cours d'une séquence pédagogique - pronostique (ou diagnostique), formative et sommative -.

L'évaluation pronostique (ou diagnostique), différente de la traditionnelle révision sans lien avec la leçon du jour, désigne le contrôle des pré-requis culturels et linguistiques indispensables pour installer chez l'apprenant de nouveaux acquis. Elle est importante parce que ses résultats déterminent la suite du cours. En fait, si les résultats de ce contrôle sont concluants, le professeur entreprend l'objet d'acquisitions nouvelles. Dans le cas contraire, il est différé pour que les bases qui favorisent son appropriation par les apprenants soient dispensées, même si cela s'avère parfois inopportun.

Malheureusement, les professeurs négligent en effet, trop souvent, le souci du diagnostic et

ils ressemblent parfois à des médecins qui, au lieu de chercher les causes et les remèdes du mal, se contenteraient d'indiquer le pourcentage de chance de guérison ou de pointer la température du malade sur une courbe39(*)

En médecine comme en pédagogie, il importe de dépasser la notion purement quantitative de « niveau » pour accéder à celle du traitement ; et seul le diagnostic permet ce passage.

L'évaluation formative vise à repérer les difficultés d'apprentissage et à proposer des palliatifs. Elle est sous-tendue par une série d'activités qui, au fil des acquisitions permettent au professeur de vérifier les progrès des apprenants. Philippe Meirieu (1987) affirme que :

pour être formative, une évaluation doit permettre à la fois un renforcement, une correction et une régulation40(*).

Malheureusement cette évaluation, qui permet d'orienter et d'affiner les apprentissages, n'est pas prise en compte dans la préparation écrite des professeurs.

L'évaluation sommative qui intervient, en principe, au terme d'un apprentissage pour en apprécier la validité, permet de mesurer l'atteinte de la performance visée afin de réguler les apprentissages car jouant sur les attentes et les représentations des partenaires de l'acte pédagogique, elle participe de l'action sur le système de formation. Nous convenons avec Charles DELORME (1987) que :

l'évaluation sommative est, elle aussi formative41(*).

Nous précisons par ailleurs que dans le cadre d'une séance, l'évaluation sommative ne fait pas la somme des évaluations partielles réalisées au cours d'une période (mois, trimestre, semestre, année scolaire) comme quand elle est certificative.

A caractère certificatif, l'évaluation sommative conduit aux notations, appréciations et communications aux parents et aux membres du conseil de classe car il s'agit de ne rien éviter de ce qui fait l'attente des uns et des autres.

Malheureusement, les professeurs n'exploitent pas systématiquement l'évaluation sommative. Ils ont l'habitude de prévoir un simple exercice d'application au lieu de concevoir un item d'évaluation fidèle et représentatif du cours dispensé. Lorsque l'évaluation est prévue, l'item n'est pas en congruence avec l'objectif visé, et la précision et l'objectivité qui fondent l'évaluation font défaut.

En somme, le processus d'évaluation fait défaut tout au long de la préparation écrite. En plus de ce manque, la fiche pédagogique comporte d'autres handicaps.

d)- Les autres défauts de la fiche de préparation écrite

Ils sont de quatre ordres :

- le manque de minutage du cours ;

- l'absence de projet d'exploitation ultérieure du texte ;

- le manque de dispositif d'observation pendant le cours ;

- l'allure générale de la fiche de préparation écrite.

Le manque de minutage des séquences du cours

L'une des imperfections des fiches de préparation écrite est le manque de minutage des séquences. Celle-ci conduit à une gestion hasardeuse du temps imparti à la leçon. Ce qui empêche le professeur de terminer son cours à la fin du temps réglementaire. Il en résulte une nette insuffisance du nombre de textes lus par les apprenants au cours d'une année scolaire.

Toutefois, le minutage du cours répond simplement à un souci de gestion rationnelle du temps imparti à la séance. Il importe d'éviter le dérapage qui consiste à arrêter les apprenants en pleine activité sous prétexte que le crédit horaire affecté à celle-ci est arrivé à son terme parce qu'un tel comportement ébranlerait les apprenants et perturberait toutes les ressources mobilisées en vue de la réalisation de la tâche en cours d'exécution.

Le manque d'activités d'exploitation ultérieure du texte de lecture

L'examen des fiches de préparation écrite nous révèle que très peu de professeurs pensent à une exploitation ultérieure du texte étudié en classe. Ils s'en tiennent, dans le meilleur des cas, à la rédaction et à la récitation.

Cette pratique suppose à tort que chaque apprenant est suffisamment armé, grâce à ses qualités propres et à son environnement socioculturel, pour trouver tout seul un prolongement à l'activité de lecture qu'il fait en classe. Cela laisse penser que les professeurs tiennent très peu compte du milieu socioculturel peu propice à la lecture des apprenants.

Le manque de dispositif d'observation

Dans une bonne fiche pédagogique, il devrait être prévu un espace réservé aux observations du professeur pendant le déroulement du cours. Celles-ci porteraient sur les difficultés d'apprentissage et les besoins des élèves, pris chacun individuellement ou en petits groupes. Elles porteraient également sur les ressources mobilisées, les choix didactiques du professeur ainsi que sur celui du support d'enseignement/apprentissage.

Ce manque de dispositif d'observation est un handicap réel dans la conduite de la classe ainsi que sur les perspectives de remédiation, d'accompagnement et de soutien aux apprenants en difficulté.

L'allure générale de la fiche de préparation écrite

Nous avons l'impression qu'au lieu d'être un simple support de mémorisation et de documentation, la fiche de préparation écrite apparaît comme la transcription d'un cours préparé que le professeur dictera totalement ou partiellement aux apprenants.

La fiche de préparation devrait permettre de traduire la réflexion sur les actions pédagogiques à mettre en oeuvre pour atteindre les objectifs fixés en tenant compte des capacités et besoins réels des apprenants.

Ainsi, nous avons le sentiment que la fiche de préparation écrite, telle qu'elle fonctionne actuellement, comporte tellement de défauts qu'elle risque de ne pas favoriser la conduite efficace des séances pédagogiques.

3. LE MAUVAIS DÉROULEMENT DES SÉANCES

Conduire une séance de lecture consiste à amener les apprenants à atteindre les objectifs préalablement définis. Notre observation de la pratique de la classe montre que la conduite des séances est limitée par le manque de support d'apprentissage, l'utilisation irrationnelle du tableau noir et le manque de professionnalisme des enseignants.

A. Le manque de support d'apprentissage

Le manque de support d'apprentissage est constant d ans les deux types de lecture à savoir la lecture expliquée et la lecture suivie et dirigée.

a)- Le manque de support d'apprentissage en lecture expliquée

Les manuels scolaires font cruellement défaut dans les classes. Ce défaut prive le professeur de la source de documentation indispensable et l'apprenant d'un appui d'apprentissage et de mémorisation de connaissances.

Pour pallier ce manque, le professeur a recours soit à la reproduction des textes au tableau noir, soit à leur dictée. La première possibilité prive l'apprenant du plaisir et de la motivation que suscite l'écrit. La silhouette du texte (forme prise par le texte sur le tableau noir) et la qualité des signes typographiques (titres, paragraphes, majuscules) ne sont pas authentiques. En fait, le non-respect des caractères d'imprimerie lors de la copie du texte au tableau noir dénature sa présentation matérielle et rend mal aisée la perception du texte par les apprenants.

La reproduction d'un texte dans le cahier rend confuse sa lisibilité à cause de l'inaptitude des apprenants à reproduire fidèlement le texte écrit au tableau ou dicté par le professeur.

De telles pratiques réduisent le temps de lecture et constituent en fin de compte un handicap à l'apprentissage en lecture expliquée. La situation en lecture suivie et dirigée paraît plus déplorable qu'en lecture expliquée.

b)- Le manque de support d'apprentissage en lecture suivie et dirigée

La lecture suivie et dirigée présente l'avantage de placer l'apprenant dans une situation authentique de lecture, en présence d'une oeuvre complète et au contact de l'objet livre. Mais l'absence d'oeuvres prive l'apprenant non seulement de cet avantage supposé, mais aussi de leur maniement et de la pratique effective.

En plus du manque de manuels, l'utilisation irrationnelle du tableau noir, quand il y en a, est un autre facteur réducteur de la pertinence de l'acte pédagogique en lecture.

B. L'utilisation irrationnelle du tableau noir

Notre observation de la classe révèle que le tableau noir n'est pas toujours utilisé à bon escient. Nous avons relevé les défauts d'usage suivants.

- L'utilisation incohérente du tableau : le tableau est rempli de façon fantaisiste. Tantôt le professeur écrit le plan du texte à gauche, tantôt il l'écrit à droite. Il en est de même des mots-clés et des synthèses partielles. Le tableau apparaît désordonné et confus. Ainsi, les apprenants ne distinguent pas l'essentiel de l'accessoire et ne comprennent pas en fin de compte ce qui est écrit.

- L'incohérence de la calligraphie : la déformation et l'étroitesse des lettres ainsi que le mélange des caractères manuscrits et ceux d'imprimerie rendent l'écriture peu lisible.

- La présentation des mots dégagés de tout contexte signifiant : nous avons remarqué que des mots isolés, c'est-à-dire en dehors de tout contexte de communication, sont écrits dans un coin du tableau. Un mot n'a de sens que dans un contexte et ne devrait être écrit que dans un énoncé linguistique pertinent qui rendrait son sens manifeste pour les apprenants.

Une si malheureuse utilisation du tableau semble trahir le manque de professionnalisme des professeurs.

C .Le manque de professionnalisme

La démarche méthodologique officielle suggère en classe de troisième des collèges d'enseignement général l'articulation ci-après :

1) La lecture silencieuse : les apprenants parcourent le texte des yeux ;

2) La situation du texte : le professeur fait situer le texte et son auteur tout en se gardant de donner des indications qui n'ont aucune incidence sur la compréhension du texte ;

3) La lecture magistrale : le professeur procède à la lecture expressive du texte ;

4) L'explication des difficultés : le professeur fait expliquer les principales difficultés lexicales et grammaticales contenues dans le texte ;

5) La lecture individuelle : le professeur invite deux ou trois bons apprenants à lire à haute voix le texte ou une partie ;

6) Le mouvement du texte : le professeur fait mettre en évidence la structure du texte ;

7) L'étude détaillée du fond et de la forme : le professeur fait examiner par les apprenants les indices de sens, d'articulation logique et d'articulation rhétorique ;

8) La formulation de l'idée générale : le professeur fait énoncer l'idée générale  du texte ou de l'extrait;

9) La synthèse des remarques : le professeur fait formuler par les apprenants la synthèse des remarques qu'ils ont faites au cours de l'examen détaillé du texte.

Les professeurs se réfèrent ordinairement au manuel recommandé par le programme officiel. Le manuel n'étant qu'un support de mise en oeuvre d'un programme ayant tendance à se substituer au programme lui-même, il arrive que les professeurs s'en tiennent uniquement au manuel inscrit au programme au point de ne plus se préoccuper de la méthodologie officielle.

L'exploitation du livre du professeur du manuel en vigueur dans les classes de troisième laisse percevoir une démarche en lecture expliquée qui comprend pour l'essentiel l'articulation suivante :

1) La lecture du professeur ;

2) L'idée générale ;

3) Les questions de contrôle de la compréhension du texte ;

4) L'exploitation détaillée du fond et de la forme (difficultés liées au vocabulaire et à la grammaire) ;

5) La conclusion qui consiste à énoncer la synthèse des remarques.

L'examen de cette approche montre qu'elle présente des similitudes avec celle indiquée dans la méthodologie officielle, et constitue le prolongement de l'approche méthodologique de la lecture courante en usage du cours élémentaire au cours moyen en République congolaise.

C'est probablement la raison pour laquelle au cours du déroulement des séances que nous avons observées, nous avons constaté quelques imperfections liées au manque de savoir-faire des professeurs : le défaut de maîtrise de la démarche méthodologique tant en lecture expliquée qu'en lecture suivie et dirigée et le découpage traditionnel établi.

a)- Le défaut de maîtrise de la méthodologie en lecture expliquée

Le professeur fait lire le texte à haute voix en début de séance par un ou plusieurs apprenant(s) alors qu'aucun texte ne saurait être lu correctement à haute voix sans que le lecteur l'ait parcouru silencieusement. Cette lecture expressive ne devrait être que la modalité de communication d'un texte dont la compréhension en aura été faite auparavant. C'est, semble-t-il, l'une des causes pour lesquelles les apprenants trébuchent, ânonnent, hésitent et se reprennent fréquemment lors de la lecture à haute voix.

Les professeurs font rechercher aussitôt le plan du texte, qui en principe, ne se découvre que par approches successives et non à la première lecture. Ils semblent ignorer que l'étude d'un texte permet aussi de faire apparaître progressivement sa structure.

En outre, les professeurs font de la recherche des champs lexicaux une fin en soi alors qu'elle serait simplement un moyen au service de l'étude du texte. Dans ce cas, la lecture devient une simple leçon de vocabulaire et réduit le texte à une collection de mots.

Enfin, certains professeurs considèrent le texte comme une succession de phrases que les apprenants s'efforcent de traduire et de commenter superficiellement, c'est-à-dire de paraphraser, de répéter sous une autre forme ce qui est bien dit par l'écrivain.Et nous sommes d'avis avec les auteurs d'IPAM (1996) qui constatent que

le texte n'est pas étudié comme un ensemble doté d'un sens défini par son genre, sa structure, ses réseaux de signification42(*).

b)- Le défaut de maîtrise de la méthodologie en lecture suivie et dirigée

La séance se limite souvent à la lecture d'extraits choisis. C'est souvent une lecture mal exécutée par des apprenants que le professeur interrompt par des commentaires et des remarques pointilleuses, de temps à autre.

Parfois, les apprenants se contentent de répondre à un questionnaire dicté à l'avance par le professeur qui, par manque de livres, introduit l'oeuvre et en élabore lui-même le résumé sans solliciter la contribution des apprenants.

Par la suite, le professeur reproduit au tableau quelques paragraphes de l'oeuvre qu'il fait lire. L'étude d'une oeuvre se réduit alors soit à l'étude d'extraits courts soit à la reconstitution orale de texte.

Souvent, lorsqu'il existe quelques livres, l'étude d'oeuvres se fait chapitre par chapitre, sans projet d'ensemble privant ainsi les apprenants du plaisir que suscite l'appropriation du contenu global d'une oeuvre intégrale et de la possibilité de s'identifier aux héros.

Une telle approche est contraire aux objectifs généraux de la lecture suivie et dirigée qui visent entre autres, comme nous l'avons indiqué plus haut, à enseigner aux apprenants à lire une oeuvre complète.

Certains professeurs utilisent les schémas de la critique littéraire sans que la nature de l'oeuvre s'y prête. Par exemple, le schéma actanciel est devenu une panacée pour l'analyse de toute oeuvre alors qu'il se prête mieux à celle des pièces de théâtre.

Les pratiques qui ont cours dans les classes de troisième sont en rupture avec les orientations méthodologiques officielles. Les orientations officielles elles-mêmes ne sont pas exemptes de reproches. La lecture silencieuse qui est la vraie lecture ne représente qu'une étape sur neuf.

L'explication des difficultés lexicales se transforme souvent en leçon de vocabulaire. L'exploitation des difficultés grammaticales devient un cours de grammaire. L'étude du fond du texte se mue en questionnement évasif et à la paraphrase du texte. L'étude de la forme n'est pas souvent abordée.

Ainsi, à la place de la lecture et de l'exploitation du texte prennent place les activités qui n'ont que de lointains liens avec la lecture elle-même. Ces pratiques suscitent la désaffection que les apprenants éprouvent pour la lecture et, partant, pour l'écrit en général.

c)- Le partage traditionnel établi

Le partage lecture expliquée et lecture suivie et dirigée a montré toutes ses limites au plan de l'efficacité de l'enseignement/apprentissage. De nombreuses tentatives de découpage de la lecture en classe de troisième traduisent à la fois l'enjeu et la complexité de la question.

En effet, les derniers programmes français des classes de troisième des collèges du 15 septembre 1998 consacrent la lecture analytique, la lecture cursive, la lecture documentaire et la lecture de l'image.

La lecture analytique

Elle se fonde sur l'analyse construite avec méthode d'un extrait ou d'une oeuvre courte. Elle amène l'élève à formuler des hypothèses que l'étude du texte, permet d'infirmer ou de confirmer, dans un processus de construction de sens. On peut employer également dans un sens équivalent, lecture détaillée ou méthodique.

La lecture cursive

On appelle lecture cursive la forme usuelle de la lecture. Elle se fait selon les besoins, la fantaisie, le gré de chacun, sans ordre ni rythme imposés, sans interruption autre que l'humeur, la disponibilité ou l'intérêt du lecteur.

La lecture documentaire

La lecture documentaire fait référence à toute lecture visant la recherche d'informations et de renseignements. Pour être efficace, elle doit savoir sélectionner les documents en fonction d'un but, et y chercher des informations précises.

La lecture de l'image

Elle vise à explorer les relations entre le langage verbal et le langage visuel dans la perspective du discours.

En République du Congo, Le français en 3è 43(*) préconise les séances de lecture expliquée et celles de lecture suivie. Ces dernières sont axées sur des larges extraits dont chaque épisode fait l'objet d'une séance.

La 3è en français44(*) envisage tout un autre découpage : l'étude des textes, des documents, de l'image et des textes favorisant l'installation chez les apprenants des techniques de lecture.

L'exploitation de chaque type de support suggère une approche particulière. L'étude du texte vise la saisie de la quintessence du message que le texte est censé véhiculer.

L'étude des documents a pour vocation de familiariser l'apprenant à plusieurs textes appartenant à un même champ thématique et aux dossiers portant sur les thèmes les plus divers. Le but visé par l'étude des documents reste avant tout la recherche d'informations et de renseignements.

L'étude de l'image prépare l'apprenant à la lecture du code pictural car on ne lit pas que le texte. On lit d'autres types de support comme le plan, le portrait, les pyramides, les représentations graphiques et tout ce qui est support iconographique.

L'étude des techniques de lecture a pour objectif d'installer efficacement l'apprenant dans les mécanismes de lecture et dans l'univers de l'écrit.

Le souci qui anime les auteurs de ce manuel semble être la volonté de familiariser l'apprenant à des caractéristiques de chaque type de texte et de chaque genre littéraire dans la mesure où personne ne saurait lire de la même manière un poème et un dialogue, chaque type de texte ayant sa structure et son mode de fonctionnement interne.

La nouvelle méthode de français45(*), manuel de l'élève, classe de 3è, envisage un autre partage qui ne manque pas d'intérêt. Les auteurs de ce manuel se proposent de faire des apprenants de la classe de troisième des lecteurs autonomes, capables de :

- construire, grâce à une lecture silencieuse puis expressive, le sens du texte, dans la perspective à la fois globale et nuancée ;

- repérer les caractéristiques formelles dominantes du texte (genre, courant littéraire, présentation typographique, situation d'énonciation, éléments du para texte) ;

- fournir des réponses élaborées et pertinentes à des questions relatives à tel ou tel aspect du texte et de la langue ;

- formuler, à l'écrit et à l'oral, un point de vue motivé sur un problème soulevé par un texte lu.

Dans cette perspective, apprendre à lire en classe de troisième consiste à s'entraîner à découvrir toutes les nuances de la tonalité, du rythme, des caractéristiques du genre et du lexique, et à découvrir par approches successives le sens global du texte.

Parmi les professeurs que nous avons observés, certains choisissent des textes dans l'un ou l'autre de ces manuels. Ils adoptent tantôt la démarche préconisée par l'un tantôt celle suggérée par l'autre, en fonction du texte choisi.

Nous remarquons aussi que le fait que la lecture soit un objet d'étude constitue une difficulté supplémentaire pour les apprenants. En consacrant la lecture comme une discipline scolaire, l'école devient une source de blocage pour les apprenants.

Ainsi, le résultat de toutes ces pratiques est l'ennui et le désintérêt des apprenants pour la lecture. Il s'en suit une grande désaffection pour l'écrit. Les parents et les professeurs s'étonnent que les apprenants ne sachent pas lire.

Conscient de ce constat d'échec de l'enseignement/apprentissage de la lecture, nous nous proposons de revisiter le champ de ses pratiques pédagogiques pour contribuer à l'amélioration de sa qualité pour que les principaux bénéficiaires sachent lire.

CHAPITRE II

* 30. A.C.C.T (1994), Horizons d'Afrique, Perspectives francophones, CM2, 6ème année, Paris, EDICEF.

* 31. IPAM (1996), Enseigner le français au collège et au lycée, Paris, EDICEF, p.34.

* 32. A., CLAUSE (1978), « Le milieu, moyen et fin de la culture », cité dans IPAM, Pédagogie pour l'Afrique Nouvelle, Paris, EDICEF, p. 106.

* 33. IPAM (1996), op.cit.

* 34. Sylvain, BEMBA, ETUMBA (1985), Brazzaville, n° 807 et 808, septembre.

* 35. La Semaine Africaine (1986), Brazzaville, n° 1688 du 18 au 24 décembre.

* 36. Marc, TALANSI (1989), « Qui lit quoi au Congo ?», Notre librairie, Paris, n°92/93, p.192.

* 37.Anne, TORUNCZYK (2000), L'apprentissage de l'écrit chez les adultes, Cheminements du savoir lire écrire, Paris, L'Harmattan/Montréal (Qc), L'Harmattan Inc, p. 14.

* 38. Célestin, FREINET (1964), Les techniques Freinet de l'école moderne, Paris, Armand Colin, p. 25.

* 39.Philippe, MEIRIEU (1987), « Pédagogie et évaluation différenciées », L'évaluation en questions, Paris, Editions ESF, p. 155.

* 40. Philippe, MEIRIEU (1987), op.cit.

* 41. Charles, DELORME (1987), L'évaluation en questions, Paris, Editions ESF, p. 85.

* 42. IPAM (1996), op.cit. p.35.

* 43. IPAM (1990), Le français en 3è, Paris, EDICEF.

* 44. IPAM (2001), La troisième en français, Paris, EDICEF.

* 45. La Nouvelle Méthode de Français 4è/3è, (1997), manuel de l'élève, Paris, Editions Nathan.

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