I-4 Objectifs de l'étude
Notre étude comporte deux objectifs :
1. décrire la stigmatisation chez les PvVIH à
Bamako et à Ouagadougou et trouver des facteurs associés pour
avoir un profil des personnes stigmatisées ;
2. examiner si la stigmatisation des PvVIH est
associée à l'adhérence aux traitements ARV et si cette
association persiste en contrôlant pour les facteurs confondants.
CHAPITRE II RECENSION DES ÉCRITS
II-1 La stigmatisation
L'objectif de cette sous section est double : donner une
définition opérationnelle de la stigmatisation et sa mesure puis,
examiner la littérature sur les facteurs déterminent la
stigmatisation chez les personnes souffrant d'une affection.
II-1-1 Définitions et mesures
Selon le dictionnaire Larousse (1991), stigmatiser c'est le
fait de flétrir, blâmer avec dureté et publiquement.
Littéralement, c'est une trace, une marque qui révèle une
dégradation.
Pour qu'il y ait stigmatisation, il faut d'après Link et
al. (2006), une série de cinq composantes se suivant dans un
réseau en cascade et inter reliées. Ces composantes sont :
1. une composante liée à une étiquette
sociale de différenciation facilement identifiable par une population ou
un groupe d'individus (orientation sexuelle, race, état de
santé...).
2. un processus de stéréotypé qui permet
l'étiquetage de l'individu ayant les caractéristiques
indésirées.
3. la troisième composante est marquée par la
distinction qui apparaît quand les personnes qui stigmatisent font la
différence entre « eux » et « nous ».
4. dans la quatrième composante, les personnes
stigmatisées se rendent à l'évidence de la discrimination
dont elles sont victimes et par conséquent, commencent à perdre
leur propre estime de soi.
5. lorsque toutes les quatre composantes sont réunies,
les personnes étiquetées se sentent indésirables et mises
au banc de la société.
La stigmatisation n'affecte pas seulement le malade mais aussi
son entourage. La littérature distingue de ce fait trois types de
stigmatisation :
La stigmatisation de courtoisie ou stigmatisation par
association avec les personnes stigmatisées. Elle est vécue par
les membres de la famille, les amis proches et toute autre personne (comme le
professionnel de la santé) qui a maintenu des liens sociaux ou
dispensé des services aux victimes de stigmatisation en dépit de
leur dévalorisation et de leur marginalisation (Baskind et al. 2005 ;
Stuart, 2003),
La stigmatisation vécue qui se manifeste comme la
discrimination à l'endroit des personnes stigmatisées par les
autres et,
La stigmatisation perçue qui est la peur
qu'éprouvent les personnes infectées ou affectées,
d'être stigmatisées (Baskind et al. 2005).
Plusieurs types de logiques sont à l'origine de la
stigmatisation des personnes atteintes par le VIII (Desclaux, 2002 ; Kuzban et
Leary, 2001 ; Gilmore et Margaret, 1994 ; Goldin, 1994 ; McCare et al. 2006 ;
Perrot et al. 2000). Sans prétendre à l'exhaustivité, nous
donnerons quelques-unes de ces logiques ici :
L'interprétation de la maladie comme une sanction
consiste à tenir les personnes pour « responsables et coupables de
leur atteinte ». Prenant ancrage dans d'anciennes théories
explicatives qui considéraient que la maladie est provoquée par
la transgression de «tabous» sanctionnée par des puissances
surnaturelles, cette logique considère le SIDA comme la
conséquence du non-respect des normes sociales, et les malades comme des
coupables « punis » qui doivent supporter les conséquences de
leur inconduite. Du fait de son lien avec des comportements relatifs à
la sexualité et au sang, porteurs d'une forte charge symbolique,
l'infection par le VIII est particulièrement soumise à cette
interprétation qui fonde des discours de rejet et de condamnation.
Une autre logique ayant la maladie pour substrat est celle de
la crainte de la contagion. De nombreuses personnes considèrent encore
le SIDA comme une maladie contagieuse, et se tiennent à l'écart
des personnes atteintes pour éviter la transmission par contact direct
ou indirect. Bien qu'elles ne fassent pas l'objet d'un jugement moral, les
personnes atteintes souffrent alors d'une mise à l'écart
quotidienne là où elles vivent.
Dans le domaine du VIII / SIDA, la stigmatisation est l'un des
principaux thèmes soulevés dans la littérature qui font
obstacles au traitement de cette maladie. L'ONUSIDA déclarait en 2002
que la stigmatisation et la discrimination associées au VIII et au SIDA
constituent les plus importants obstacles à la prévention des
nouvelles infections, à la fourniture d'une prise en charge, d'un
soutien et d'un traitement adéquats et à l'atténuation de
l'impact. Que la stigmatisation et la discrimination sont provoquées par
toutes sortes de facteurs, notamment une mauvaise compréhension de la
maladie, les mythes concernant la transmission du VIII, les
préjugés, l'insuffisance des traitements, la manière
irresponsable dont les médias parlent de l'épidémie,
l'idée répandue selon laquelle le SIDA est une maladie incurable,
les craintes sociales concernant la sexualité et les peurs liées
à la maladie et à la mort.
Mais au-delà de la crainte de la contagion, certaines
attitudes d'évitement, perceptibles notamment chez les professionnels de
la santé qui connaissent les mesures de prévention et manifestent
une certaine compassion envers les malades, semblent trouver leur origine dans
le sentiment d'impuissance que donne la prise en charge d'un malade du SIDA
lorsque les traitements ne sont pas disponibles. Il ne s'agit dans ce cas ni de
crainte de la contagion, ni de condamnation morale, mais d'un évitement
de l'impuissance et de la perspective de la mort. Là, seule la mise en
place de l'accès aux traitements ARV peut permettre de restaurer
l'espoir indispensable à une véritable relation
thérapeutique.
Malgré le regain d'intérêt des chercheurs
sur la question de la stigmatisation, il n'existe malheureusement pas d'outil
standard pour la mesurer. Peut être l'une des raisons serait que les
études sur cette question ont presque toutes utilisé une approche
qualitative. L'étude de McCare et al. (2006) propose un outil de mesure
de la stigmatisation des PvVIH que nous reproduisons ici :
Tableau I : Items de mesure de la stigmatisation
proposées par McCare et al. (2006)
HIV Stigmatization item
1. If a relative of yours became sick with the AIDS virus, would
you be willing to care for him or her in your household?
2. If a teacher has AIDS virus but is not sick, should she or
her be allowed to continue teaching in school?
3. If you knew that a shopkeeper or food seller had the AIDS
virus, would you buy food from there?
4. If a member of your family got infected with the AIDS virus,
would you want it to remain a secret?
5. Should people with AIDS receive less, the same or more health
care than other serious ill people?
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Comme on peut le constater, il s'agit d'un outil innovateur
sur la mesure de la stigmatisation dans le domaine de la santé publique.
Mais, nous ne le préconisons pas pour deux raisons :
1. la stratégie de validation de leur instrument n'est
pas explicitée et il est donc impossible d'apprécier sa
validité et sa fidélité ;
2. leur étude est réalisée dans des
contextes socio-économiques très différents du
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