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Réfugiés Hmong à  Montreuil-Bellay (Maine-et-Loire) - rapports aux lieux et diaspora

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par Pilippe MICHEL-COURTY
Université de POITIERS - Migrinter - Master 2 2007
  

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v L'évolution progressive des configurations matrimoniales :

Il faut d'abord rappeler le principe de base sur lequel repose la structure sociale de ces populations. Elle est fondée sur le clan à filiation patrilinéaire. L'exogamie clanique est rigoureuse : les gens portant le même nom se considèrent comme parents proches et ne peuvent pas se marier entre eux. Or, à Montreuil-Bellay, la plupart des familles appartiennent au même clan CHIENG/TCHA/CHA, ce qui va compliquer le choix des époux ou des épouses.

Graphique n°3 : 3 exemples de configurations matrimoniales

L'observation des 3 graphiques permet de constater qu'en 2007, près de la moitié des enfants des 3 familles sont mariés (46%). Nous savons que ces familles sont arrivées parmi les premières à Montreuil-Bellay avec des enfants très jeunes, nés soit au Laos soit dans les camps de réfugiés thaïlandais. 25 ans plus tard, devenus adultes, ils vivent en couple et ont eux-mêmes des enfants. Si l'on observe maintenant la répartition des mariages par catégorie sur l'ensemble des 3 familles, on voit que les « mariages hmong » (14 sur 26) dominent légèrement (53%).

Cependant, l'étude par famille conduit à une autre conclusion : en effet, dans la famille CHIENG, sur les 9 mariages, 6 sont hmong (66%), dans la famille Tsiong-Yia TCHA, 7 sur 11 (64%), par contre chez Ka-Gé TCHA 1 sur 6 (17%). En l'absence de véritable explication de la part des intéressés - parents ou enfants -, nous proposons de justifier cette différence par 2 arguments. Le premier est lié à l'âge des pères. Ka-Gé TCHA est plus jeune de 10 ans. Aurait-il souhaité inconsciemment faciliter l'intégration de ses enfants dans la société française en acceptant ces unions mixtes ? Ses aînés, au contraire, en perpétuant un système matrimonial traditionnel, ont-ils voulu maintenir une cohérence familiale ? Le second argument s'appuie sur le lien de parenté qui existe entre CHIENG Teng et TCHA Tsiong-Yia : en dépit de leur patronyme différent, ils sont frères et ont été accompagnés par leurs deux parents dans leur migration. Ces derniers ont-ils alors joué un rôle, direct ou indirect, dans le choix des conjoints de leurs petit-enfants ? J. Pierre HASSOUN constatait en 1997 qu' « une quinzaine d'années après l'arrivée des premiers Hmong en France, les mariages à l'extérieur des clans hmong restent exceptionnels bien qu'il n'existe aucun interdit formalisé dans le fait de se marier ` à l'extérieur' ». Il justifie cette affirmation par « les réflexes `communautaires' que la faiblesse démographique de la population [hmong] en France peut provoquer ». Les jeunes, devant la difficulté d'insertion dans la société globale, opèrent alors « un retour à la tradition sous la forme d'une endogamie accentuée » (HASSOUN, 1997 : 79). On retrouve une fois de plus le renforcement des besoins de solidarité interne. Pour P. BOURDIEU, analysant ce qu'il appelle « le marché matrimonial », les femmes ont pour « fonction de contribuer à la perpétuation ou à l'augmentation du capital symbolique détenu par les hommes » (BOURDIEU, 2002 : 65). En choisissant une épouse hmong, les jeunes hommes, à l'instar de leur père polygame, affirmeraient ainsi, face à la communauté, leur « capital symbolique ».

Quoi qu'il en soit, sur les 14 mariages « hmong », 10 sont contractés par des jeunes filles, contre 4 pour les garçons. Sont-elles plus respectueuses de la tradition ou ont-elles subi davantage de pression que leurs frères de la part de leurs parents ? Sans entrer dans le secret des transactions qui ont peut-être existé, ces mariages ont parfois des « histoires » liés à la mobilité des intéressés aux-mêmes. En effet, les 3 filles aînées de la première épouse de Teng CHIENG allaient, chez des « cousins » maraîchers à Nîmes, pour la cueillette des courgettes. Elles y ont fait la connaissance de jeunes Hmong qui sont devenus leurs époux. Une fille de Tsiong-Yia TCHA a épousé un Hmong venu des Etats-Unis passer des vacances à Montreuil-Bellay. Le fils aîné de Teng CHIENG, encore plus respectueux de la tradition, a fait spécialement le voyage en Thaïlande pour épouser une jeune fille hmong.

Les mariages « mixtes » sont essentiellement le fait des garçons. Toutefois, la tradition est maintenue par tout le cérémonial qui entoure le mariage et en particulier le port par les époux et leurs témoins des costumes traditionnels (photo n°14)

Photo n°14 : Mariage « mixte » à Montreuil-Bellay

Enfin, il faut encore une fois tenir compte de la très petite taille de la communauté hmong de Montreuil-Bellay pour expliquer le nombre de mariages mixtes. A l'inverse, des communautés numériquement fortes, comme celles de Rennes ou Nîmes, peuvent maintenir effectivement l'intermariage (STREIFF-FENART, 2000).

Qu'ils soient endogamiques ou mixtes, quelle va être l'influence des mariages sur la configuration des bassins de vie familiaux ? Pour cela, nous nous appuierons à nouveau sur les 3 familles précédemment étudiées en observant la localisation des lieux de résidence des enfants qui ont décohabité, soit pour des raisons professionnelles soit parce qu'ils sont mariés et ont quitté le domicile parental.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams