Bibliographie
Annexes
SIGLES ET ABBREVIATIONS
3
ACED-SUD : Association pour la coopération et le
développement économique du Sud ACP : Afrique Caraïbes
Pacifique
ADOS : Association Ardèche Drôme Ourossogui
Sénégal AFD : Agence française de développement
AFVP : Association française des volontaires du
progrès ARD : Agence régionale de développement
ASER : Agence sénégalaise de
l'électrification rurale CCL : Code des collectivités locales
CDFP : Centre départemental de formation
professionnelle
CEPRAO : Cellule d'échange et de partenariat
Rhône-Alpes/ Afrique de l'Ouest
CIEDEL : Centre international des études pour le
développement Local
CNCD : Commission nationale de coopération
décentralisée CRREJ : Centre régional de ressources pour
l'emploi des jeunes CSS : Compagnie sucrière
sénégalaise
CUF : Cités Unies France
DAECL : Direction de l'action extérieure des
collectivités locales DCL : Direction des collectivités
locales
DSRP : Document stratégique de réduction de la
pauvreté EPT : Education pour tous
ESPS : Enquête de suivi de la pauvreté au
Sénégal FAIL : Fonds d'aide aux initiatives locales
FCFA : Franc des communautés françaises d'Afrique
FDD : Fonds de dotation
FECL : Fonds d'équipement aux collectivités locales
FED : Fonds européen de développement
GECT : Groupe Européens de coopération territoriale
GIE : Groupement d'intérêt économique
MAEE : Ministère des Affaires Etrangères et
Européennes PACCA : Provence Alpes Cotes d'Azur
PADDEL : Programme d'appui à la décentralisation et
au développement local
PDDE : Plan départemental de développement
économique PDM : Programme de développement municipal
PEPAM : Programme eau potable et assainissement du
millénaire PIC : Plans d'investissements communaux
PLD : Plans locaux de développement
PLDE : Plans locaux de développement économique PLE
: Plans locaux d'électrification
PLHA : Plans locaux de l'hydraulique et de l'assainissement PNDL
: Programme national de développement local
PNUD : programme des nations unies pour le
développement RGPH : Recensement général de la population
et de l'habitat RESACOOP : Réseau d'appui à la coopération
Rhône-Alpes
5
INTRODUCTION
La pratique déjà ancienne des jumelages de
l'après-guerre a planté le décor de la coopération
dite « décentralisée ». En effet, naît au
lendemain de la Seconde guerre, en 1951, avec la création de
l'association du Monde Bilingue de Jean-Marie Bressand (figure de la
Résistance), le concept de jumelage promeut l'éducation bilingue
comme élément de compréhension entre les peuples et
vecteur de paix.
Dans un premier temps, les jumelages lient les communes
françaises, animées par la volonté de développer
des liens d'amitié avec les populations des communes allemandes. Puis,
pendant la guerre froide, les jumelages principaux cadres d'échanges
culturels, se sont développés avec les communes des pays d'Europe
de l'Est. Il s'agissait par delà les différences nationales et de
régimes politiques, de reconstruire l'amitié internationale, pas
seulement par le haut, à travers les appareils d'Etats, mais aussi par
le bas, à travers des réseaux d'échanges amicaux
réguliers, (A. Marie, 2005). Et enfin, dans les années 1960-1970,
les indépendances des pays sahéliens changent la nature des
jumelages lorsque des communes d'Europe occidentale s'engagent dans des actions
concrètes de solidarité en Afrique subsaharienne,
formalisées en tant que « jumelages-coopération ».
L'idée d'une solidarité Nord-Sud y trouve son fondement car les
jumelages-coopération unissent des collectivités locales de pays
"industrialisés" avec celles de pays "en voie de développement ".
Dans cet ordre d'idées, dès 1968 les communes de Dakar et
Marseille signent un accord de jumelage. Cette forme de jumelage est
caractérisée par des donations et des échanges
interculturels.
Cependant, deux événements vont remettre
radicalement en cause, ce qu'on a communément désigné
comme coopérations « cadeaux » ou « conteneurs ».
D'une part, avec la crise des années 1970, des
mutations d'ordre économique, social, politique, culturel,
environnemental sont intervenues à tous les échelons de
l'administration des sociétés humaines. Cette conjoncture finit
par avoir raison des Etats providence en Europe. Autrement dit, c'est la fin du
référentiel modernisateur de l'après guerre, qui a
propulsé les Etats au devant de la scène, et l'avènement
du référentiel néolibéral symbolisé par
Margaret Thatcher et Ronald Reagan. Ainsi dans cette atmosphère de
libéralisation et de plans d'ajustement structurel émergent des
objets politiques marquants tels que: la décentralisation, la
mondialisation, la bonne gouvernance, la subsidiarité, la protection
de
l'environnement et l'immigration, entre autres, ouvrant une
nouvelle ère de la coopération internationale. Devant cet
échec affiché par les Etats, les institutions financières
internationales les ont encouragé à reculer. Ainsi, à
l'occasion du sommet franco-africain en 1990, Mitterrand invite ses pairs
à la démocratisation des Etats africains. Il donne, un principe
d'avenir à la « coopération décentralisée
». Dans cette optique, les collectivités locales françaises,
renforcées par les lois de décentralisation, deviennent les
nouveaux ambassadeurs de la coopération pour le développement en
Afrique subsaharienne.
D'autre part, au début des années 1990 vient
enfin l'heure des premiers bilans des formes classiques d'assistance technique
et financière au coup par coup. Les chiffres étant
mitigés, les collectivités françaises prennent alors
résolument, la décision de réorienter leurs
coopérations vers des objectifs à plus longue portée, dont
le transfert de compétences (en matière de gestion et de services
publics) et l'appui au processus de décentralisation. Dans cette
dynamique, la loi d'orientation du 06 Février 1992, leur confère
une relative autonomie d'action, par la reconnaissance juridique de la
coopération décentralisée.
Néanmoins, si en France, la montée en puissance
de la coopération s'explique par la volonté des élus
locaux d'intervenir dans un champ jusqu'alors réservé aux acteurs
étatiques et aux institutions internationales. Dans les pays
sous-développés comme le Sénégal, la
coopération décentralisée est une politique de captation
des ressources pour le financement du développement des
collectivités locales. Elle représente, ainsi, un enjeu majeur
pour l'appui à la mise en oeuvre du processus de décentralisation
et la lutte contre la pauvreté. Ce qui lui offre, des champs
d'application assez larges appliqués, prioritairement, à la mise
en place de services de proximité, à l'accompagnement des actions
de développement local, à la mobilisation et l'implication des
acteurs sociaux dans la mise en oeuvre des actions et à l'appui
institutionnel aux collectivités locales.
Les projets mis en oeuvre mobilisent une multitude d'acteurs
(collectivités territoriales, hôpitaux, écoles,
universités, associations ad hoc de coopération, comités
de jumelage, bureaux d'études, ONG, ARD, Ministères et leurs
Directions, AFD, UE, CUF, etc.). Ces acteurs sont au centre du processus de
coopération. Par cette place centrale qui leurs est accordée, la
coopération décentralisée a bénéficié
d'un crédit fondé sur l'idée qu'elle associe sans
intermédiaires les « acteurs de terrains » et les «
forces vives » émanant de la « société civile
» (Petiteville, 1996). Ainsi elle a fait l'objet d'un discours de
valorisation teinté sur le
7
thème d'une coopération « souple »,
« partenariale », « à échelle humaine » qui
s'opposerait aux arcanes bureaucratiques traditionnels de la coopération
multilatérale ou aux réseaux clientélistes des
coopérations bilatérales. Cependant, on est progressivement dans
un système de coopération institutionnalisé par les Etats
et les bailleurs internationaux. Il résulte de ce changement que les
procédures sont de plus en plus complexes et l'autonomie des acteurs
préconisée, à la base, n'est plus en phase avec les
nouvelles orientations de la coopération décentralisée.
L'exigence de professionnalisme a induit un phénomène de
bureaucratisation.
Finalement, c'est une coopération entre initiés et
élus ou notables, rares sont les exemples oüles
représentants des populations en difficultés sont mis à
contribution. Vraisemblablement la
stratégie d'impulser un développement
piloté par des « électrons libres » (les acteurs),
même dotés de ressources et réseaux, n'a pas
démontré son efficacité. Leurs choix et orientations sont
guidés par des intérêts matériels ou symboliques. En
outre, l'idée négative d'une politique de coopération
folklorique ne correspond plus à la réalité, même si
l'éparpillement des interventions et la multiplicité des acteurs
provoquent beaucoup d'effets pervers (contradictions et lourdeurs
procédurières). Dans les pays du Sud, les élites au
pouvoir s'adonnent, dans bien des cas, à des luttes intestines pour
l'appropriation des retombés.
Les moyens mobilisés sont importants, pourtant, ils
n'ont pas eu de réels impacts sur les populations d'Afrique
Subsaharienne. Mieux les cibles ne se sentent pas très concernés
et accusent, dans biens des cas, leurs acteurs locaux de détournement
des objectifs du sans doute au manque de circulation des informations. Ainsi
une meilleure rationalisation des actions est souhaitée. A ce titre, les
collectivités locales sont invitées à harmoniser leurs
actions avec les stratégies et politiques sectorielles de
réduction de la pauvreté, engagées à
l'échelon national et/ou international (comme le PNDL, les OMD, le DSRP,
etc.).
Ce changement d'orientation motivé par des offres de
cofinancement, de la part des bailleurs internationaux ou du MAEE en ce qui
concerne la France, pousse à s'interroger sur ses vrais objectifs.
Autrement dit, cette politique d'harmonisation, viserait-elle un alignement des
collectivités du Sud sur les systèmes locaux de gouvernement du
Nord? Si tel était le cas, que deviennent les vrais problèmes
à résoudre dans les pays du Sud qui ont des contextes politiques,
socio-économiques et culturels différents.
Quelques considérations sur la notion de
coopération amènent à mieux comprendre le sujet. Au
préalable, il convient, de définir la coopération
interrégionale, afin d'éviter les risques de confusion.
La coopération interrégionale est de nature
différente de la coopération décentralisée car elle
n'est valable que dans une relation de région à région et
non de région à commune par exemple. Ses relations n'impliquent
pas forcément un voisinage géographique, par conséquent le
partenariat Rhône-Alpes et Saint-Louis du Sénégal en est un
exemple.
Selon l'angle dans lequel il est employé, le concept de
coopération décentralisée est fluctuant.
En France, la coopération décentralisée
est définie, par le « Guide de la coopération
décentralisée : Echanges et partenariats internationaux des
collectivités territoriales », comme l'ensemble des relations
de coopération, d'aide au développement, de promotion à
l'étranger, d'amitié, d'assistance technique, d'aide humanitaire,
de gestion commune de biens et de services... qui lient des
collectivités territoriales françaises et leurs groupements
à leurs homologues étrangers. Ces relations naissent, entre
autres, de la volonté des élus territoriaux des deux
collectivités et sont formalisées par des conventions qui sont
validées, du côté français, avant leur signature par
l'assemblée délibérante.
Cependant, l'action extérieure des collectivités
françaises est encadrée juridiquement par la Loi d'Orientation du
6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la
République (A.T.R.)1. Elle complète la loi sur les
droits et libertés des communes, des départements et des
régions du 2 mars 1982, qui autorisait la coopération en son
article 65. La coopération décentralisée est, ainsi,
homologuée, dans la limite des compétences des
collectivités locales et dans le respect des engagements internationaux
de la France. Par cette loi, l'Etat crée également la Commission
nationale de la coopération décentralisée (C.N.C.D.) dont
la mission est de contrôler l'action extérieure des
collectivités territoriales. En outre, cet ancrage juridique de la
coopération décentralisée a connu trois évolutions
plus récentes :
- La loi du 27 janvier 2005 (dite « Oudin - Santini
») stipule que les collectivités françaises responsables de
la production, de la distribution et de l'assainissement de l'eau peuvent faire
financer l'accès à l'eau de l'usager du Sud par l'usager du
Nord.
- La principale modification résulte de la loi du 2
février 2007 (dite « thiollière ». Elle libère
l'action extérieure des collectivités territoriales de
l'obligation de justifier un intérêt local. Cette loi
légalise simultanément les dons humanitaires d'urgence comme
unique exception à l'obligation de signature conventionnelle.
1 Sources : CNCD, MAE, Guide de la coopération
décentralisée : Echanges et partenariats internationaux des
collectivités locales, la documentation française, Paris, 2000
9
- Enfin, la loi du 16 avril 2008, calquée sur le
modèle des Groupement Locaux de Coopération
Transfrontalière (GECT), met le droit interne en conformité avec
le règlement communautaire du 5 juillet 2006. Avec ce nouvel outil
juridique, les collectivités françaises peuvent désormais
signer une convention directement avec un Etat de l'Union Européenne,
là où jusqu'ici un traité international était
nécessaire.
L'Etat français dispose, ainsi, d'un cadre juridique
avancé en matière de coopération
décentralisée et d'action extérieure des
collectivités territoriales. Ce qui est un gage supplémentaire
pour la région Rhône-Alpes dans sa coopération avec la
région de Saint-Louis du Sénégal.
Par " Coopération décentralisée " l'Union
européenne2 entend tout programme conçu et mis en
oeuvre dans un pays du Sud ou de l'Est par un acteur de la
société civile : ONG, pouvoirs publics locaux, coopérative
agricole, groupement féminin, syndicat, " de façon plus
générale toute forme organisée de la Société
civile ".
Une première remarque permet de constater, que
contrairement à l'UE, l'Etat français écarte de la
coopération décentralisée les relations pouvant exister
entre collectivités locales et des organismes tels les ONG,
Associations, etc. Par cette approche, l'Union Européenne opte pour une
uniformisation de l'idée de coopération
décentralisée dans tous ses Etats membres. Mais elle se heurte
à l'obstination des Etats membres soucieux de garder une certaine
autonomie à l'internationale.
Dans les années 1990, Les Etats africains, notamment le
Sénégal, sous l'égide des institutions de Bretton Woods
ont été, également, affectés par la fièvre
de généralisation de la décentralisation,
Ainsi, pour parachever l'édifice de la
décentralisation entamée depuis 1872 à Saint-Louis, l'Etat
sénégalais adopte, la régionalisation par les lois de
décentralisation (96-06 du 22 Mars 1996). Ces lois se
caractérisent par trois avancées fondamentales :
- La refonte du cadre institutionnel des collectivités
locales avec l'élaboration d'un nouveau code des collectivités
locales (CCL).
2 Sources : « Approche de l'Union
européenne en matière de coopération
décentralisée », CE, Direction Générale du
développement, Unité VIII-B2
10
- L'érection de la région jusque-là
simple circonscription administrative, en collectivité
décentralisée dotée d'une personnalité morale,
d'une autonomie financière relative et d'une assemblée
élue au suffrage universel.
- La consécration juridique de la coopération
décentralisée conformément à l'article 17 du CCL.
Il dispose que « Les collectivités locales peuvent, dans le
cadre de leurs compétences propres, entreprendre des actions de
coopération qui donnent lieu à des conventions avec les
collectivités locales de pays étrangers ou des organismes
internationaux publics ou privés de développement ».
Donc, cette réforme reconnait trois principes
fondamentaux: la libre administration des collectivités locales; le
principe de transfert des compétences et de leur compensation
financière; le principe de solidarité entre collectivités
et entre celles-ci et l'Etat. Néanmoins, la régionalisation
rencontre des difficultés inhérentes à l'insuffisance de
formation du personnel, à l'absence du système de
fiscalité locale et au manque de moyens techniques et humains.
Pour prendre la mesure de cette situation des
collectivités sénégalaises, l'ARD de Saint-Louis avait
organisé des ateliers les 14-15 Septembre 2004 afin de faire la
synthèse (ci-dessous) des forces, faiblesses et perspectives de la
décentralisation dans cette localité:
Forces
|
Faiblesses
|
Perspectives
|
- Réduction de la très forte
|
-Non maîtrise des compétences
|
- I. E. C
|
marginalisation des
|
transférées
|
- Réforme financière
|
populations rurales par la
|
- Absence de moyens
|
- Reforme du personnel
|
démocratie à la base ;
|
Financiers
|
|
- Le transfert de certaines
|
|
|
compétences aux élus locaux
|
|
|
- L'allégement de la tutelle et
|
|
|
du contrôle de l'Etat
|
|
|
Confrontées à des difficultés relatives
à l'absence de moyens financiers et de qualification du personnel, les
collectivités sénégalaises ont choisi la stratégie
de nouer des relations de jumelage avec les collectivités du Nord,
notamment leurs homologues français. Par conséquent, l'Etat
sénégalais à travers l'article 17 (ci-dessus) du CCL
reconnait juridiquement la coopération
décentralisée3. Conformément à cet
article, les collectivités peuvent signer des
3 Sources : Base de données de la DIRCOD
(Dakar)
conventions avec leurs homologues étrangers et avec des
organismes internationaux publics et privés.
L'Etat sénégalais va, ainsi, plus loin que son
homologue français en s'alignant sur les approches universalistes de
l'Union Européenne, des Nations-Unies, de l'USAID (son plus grand
bailleur) et de la Banque mondiale. Ce choix trouverait sa
légitimité dans la nécessité de laisser, les
entités locales, profiter des avantages financiers qu'offre la
coopération décentralisée. Cet universalisme introduit,
cependant, une logique de bureaucratisation et de dépendance croissante
vis-à-vis des bailleurs. Certes les moyens augmentent mais il y'a lieu
de se demander si cette donnée correspond à la souplesse
souhaitée dans le fonctionnement de la politique de coopération
décentralisée ?
Eu égard, cette différente de perception de la
coopération décentralisée entre la France et le
Sénégal, les collectivités françaises sont les
premiers interlocuteurs des collectivités sénégalaises.
Ces relations privilégiées sont dues à la bonne marche des
rapports bilatéraux diplomatiques franco-sénégalais. C'est
dans ce cadre, qu'il faudrait inscrire le partenariat entre la région
Rhône-Alpes (France) et la région de Saint-Louis du
Sénégal.
Saint-Louis du Sénégal a un passé
exceptionnel qui lui confère une renommée internationale.
Située au nord du Sénégal, son histoire se lie de
près à celle de la colonisation. Elle fut fondée en 1659
par Louis Caullier et baptisée en hommage au Roi de France, Louis IX,
sous la régence de Louis XIV. Vitrine française en Afrique
pendant deux siècles, Saint-Louis cumulait les fonctions de capitale des
colonies du Sénégal et de celle de l'AOF (Sénégal,
Mauritanie, Soudan, Guinée et Côte d'Ivoire), de 1895 à
1902. Elle était l'une des plus importantes villes d'Afrique, la plus
active politiquement et économiquement et la mieux urbanisée.
Capitale du Sénégal de 1872 à 1957, elle fut,
également, capitale de la Mauritanie de 1919 à 1958. A partir de
1916 les Saint-louisiens étaient citoyens français à part
entière (de même que les habitants de Gorée, Dakar et
Rufisque). C'est pendant les indépendances que Saint-Louis perd son
influence au profit de Dakar. Mais grâce à son patrimoine
historique et architectural, elle reste la première ville historique du
pays. Par conséquent elle a été classée, en 2000,
patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco.
Cependant, la loi 2002-02 du 15 février 2002, modifiant
la loi 72-02 relative à l'administration territoriale, donne à
la région son organisation actuelle. D'abord elle perd le
département de Matam érigé en région. Ensuite
Saint-Louis et l'arrondissement de Rao sont réunis pour
12
former le nouveau département de Saint-Louis. Depuis cette
date, le conseil régional administre 3 départements
(Dagana-Podor-Saint-Louis).
Malgré le déclin de ses fonctions
politico-administratives et économiques, la population de la
Région de Saint-Louis est estimée à 802.858
habitants4, en 2007.
La majorité de la population est d'origine rurale. La
commune de Saint-Louis concentre à elle seule 60,4% de la population
urbaine de la région. Hormis le département de Saint-Louis
constitué de sa commune et de l'arrondissement de Rao, les autres
départements de la région sont à majorité rurale et
ce malgré l'érection de certaines localités en commune.
La région de Saint-Louis abrite des ressortissants de
tous les groupes ethniques du Sénégal et de la sous-région
en plus de quelques étrangers d'origine africaine et européenne.
Ils sont composées de : Pulaar (48,1%), Wolofs (43.4%), Maures (4.8%),
Soninkés (1.4%), Sérères (0.9%), autres (1.4%). Une
majorité de musulmans (98.6%), chrétiens (0.4%), autres (1%)
Cette population est caractérisée par sa jeunesse.
72,5% des habitants ont moins de 30 ans.
La région de Saint-Louis dispose de tous les ordres
d'enseignement, de la maternelle au supérieur avec notamment
l'implantation de l'université Gaston Berger.
Les indicateurs de santé montrent qu'un un nombre
important d'infrastructures de santé pour la prise en charge des soins
de santé primaires (case de santé et poste de santé) sont
présents à Saint-Louis.
L'ESPS réalisée en 2005 démontre que
l'emploi des jeunes constitue une préoccupation majeure des
ménages de la région de Saint-Louis.
Il résulte de cette enquête que les secteurs
primaire et tertiaire emploient le plus d'actifs dans la région de
Saint-Louis.
Le secteur secondaire reste par contre peu
développé dans la région. L'agriculture, l'élevage
et la forêt enregistrent 44,0% des actifs occupés de la
région. Ce taux cache, cependant, des disparités importantes
entre les départements, car 59,1% travaillent dans le département
de Podor.
Le secteur du commerce vient après le secteur agricole en
employant ainsi 20,7% du total des actifs de la région mais 42,1%
évoluent dans le département de Saint-Louis.
4 Sources : ANDS, Situation économique et
sociale de la région de Saint-Louis en 2007, Septembre 2008
En outre, les secteurs qui emploient le plus de main d'oeuvre
sont pour plus de la majorité dans l'informel. Les activités
économiques de la région concernent principalement quatre
secteurs :
- Avec la présence de grosses unités
agro-industrielles (CSS, SOCAS, Agroline) et de société
d'exportation de produits agricoles (GDS), le secteur agricole emploie 44% de
la population active, selon l'enquête pauvreté
réalisée en 2005-2006. D'où la nécessité de
renforcer la place de l'agriculture dans la stratégie de
réduction de la pauvreté.
-L'élevage est un secteur aussi important que
l'agriculture pour la région de Saint-Louis où il occupe une part
conséquente de la population active. Les potentialités sont
énormes et peu exploitées. Mais le secteur est en train de se
moderniser timidement à travers certaines initiatives notamment la
création de fermes modernes.
-La pêche figure parmi les plus importants secteurs
économiques de la région de Saint-Louis. A cause de l'ouverture
à la mer et au fleuve Sénégal. Ainsi la population
évoluant dans ce secteur est estimée à 5,5% du total dont
les 87% sont dans le département de Saint-Louis.
-La région de Saint-Louis, riche en patrimoine culturel
et historique, est dotée en parcs, réserves naturelles (parc
national de Djoudj, parc national de la langue de Barbarie et la réserve
spéciale de la faune de Gueumbeul) et rendez vous internationaux tel que
le festival de Jazz. Le dynamisme de ce secteur entraîne la
création d'emplois supplémentaires et le développement du
secteur de l'artisanat et devrait être inclus dans la stratégie de
réduction de la pauvreté.
Les résultats de l'enquête de suivi de la
pauvreté (ESPS)5 au Sénégal de 2005/2006 ont
montré l'existence d'une forte corrélation entre le niveau
d'instruction et le niveau de pauvreté. Par ailleurs même si les
infrastructures de santé consacrées aux soins d'assistance de
base respectent les normes de l'OMS, il est à noter que les deux
hôpitaux sont insuffisants pour les 800 milles habitants de la
région de Saint-Louis. La jeunesse de la population associée aux
fortes pressions qu'exercent les services sociaux de base sur les ressources
des collectivités locales constituent des facteurs explicatifs de la
complexité du problème de l'emploi. En effet avec une proportion
importante de jeunes, la problématique de l'emploi s'y pose avec
acuité.
5 Sources : ANDS, Situation économique et
sociale de la région de Saint-Louis en 2007, Septembre 2008
14
Ainsi Saint-Louis, métropole d'équilibre doit
fournir à son hinterland les services et fonctions économiques,
administratifs, socio-éducatifs, sanitaires et culturels pérennes
qu'il est en droit d'attendre d'elle. Toutefois, elle ne dispose pas de fons
propres et les moyens financiers alloués par l'Etat, à travers le
FDD et le FECL, sont insuffisants. Ce qui ruine de fait les espoirs d'impulser
un développement régional performant. Afin de s'acquitter de
cette lourde mission de service public et réaliser un
développement équilibré de sa région, le Conseil
Régional de Saint-Louis s'est doté d'un vaste réseau de
coopération décentralisée. A ce titre, les liens
historiques avec la France lui ont permis de nouer des relations de
partenariats avec la région Rhône-Alpes, depuis 1997.
Située au Sud-est de la France, la région
Rhône-Alpes est très ouverte sur le monde. La région
bénéficie d'une population plus jeune que la moyenne nationale et
de migrations importantes de populations. D'une superficie de 43.698
Km2 et une population de 6.005.000 personnes, elle est la seconde
région française économique et démographique
après l'Île-de-France. Cette région intègre 25
arrondissements et 335 cantons. On y compte, également, 8
départements et 2.879 communes. Par conséquent, le Conseil
régional administre les départements de l'Ain, l'Ardèche,
la Drôme, la Haute Savoie, l'Isère, la Loire, le Rhône et la
Savoie. Même en Europe, Rhône-Alpes recèle les
données de certains États : même superficie que la Suisse
et population égale à celle de la Finlande. C'est une grande
région européenne qui recèle d'immenses
potentialités. Ainsi le Conseil régional interpellé par la
fracture économique qui oppose le monde des riches et le monde des
pauvres -source de conflits, d'instabilité, de migrations d'importantes
populations dans sa région- promeut le partage des richesses et du
développement à l'échelle de la planète. Avec 10
millions d'euros affectés sur cette ligne budgétaire en 2006, la
région Rhône-Alpes possède le premier budget d'aide au
développement des collectivités françaises, sur fonds
propres.
Pour avoir pratiqué la décentralisation pendant,
au moins, une décennie avant les Etats africains, Rhône-Alpes
dispose d'un savoir faire confirmé dans le domaine de la gouvernance
locale et de l'ingénierie urbaine. Elle inscrit, donc, son action
extérieure dans une logique de renforcement de l'action publique locale
de ses collectivités partenaires. L'objectif étant d'aider les
pays du Sud à réussir leur décentralisation, rapprocher la
prise de décision du citoyen et l'inscrire dans un processus
démocratique progressif. Afin de matérialiser ses engagements, la
région Rhône-Alpes a noué des relations de
coopération décentralisée avec dix sept (17)
régions étrangères, dont Saint-Louis du
Sénégal.
Cet engouement de la région Rhône-Alpes pour la
coopération décentralisée pousse, cependant, à
s'interroger sur ses véritables buts. Sachant que les acteurs locaux du
Nord ne sont pas facilement mobilisables, malgré leur promptitude
à financer les aides ponctuelles au coup par coup. Y aurait-il de la
réciprocité pour ses acteurs ou est-ce une volonté
déguisée de conquérir de nouveaux territoires ?
Par ailleurs, bien que l'ossature de la coopération
décentralisée a été revue et corrigée par
les recompositions institutionnelles, comment justifier qu'on retrouve, peu ou
prou, les mêmes types de réalisations. Est-ce que les discours
philanthropiques de solidarité Nord-Sud reflètent les
véritables enjeux de la coopération décentralisée
?
Les rumeurs de lourdeurs bureaucratiques, la
multiplicité des acteurs et l'opacité des rôles exacerbent
l'image de la coopération décentralisée. Qui sont ces
acteurs ? Dans quelle mesure leur présence impacte sur la
coopération? Comment est-ce qu'ils interagissent ?
Les collectivités du nord délèguent, dans
bien des cas, l'exécution de leurs projets à des
opérateurs, ONG ou professionnels du développement. Quels sont
les axes prioritaires mis en oeuvre à Saint-Louis ? Et comment les
pouvoirs locaux et les Etats essayent de s'adapter face à cette
pluralité d'acteurs et ces dispositifs multi niveaux ?
Si la finalité optimale de la coopération est de
rendre opérationnelle la décentralisation au Sud. Dans quel
cadre, Rhône-Alpes peut aider la région de Saint-Louis à
agir en tant qu'institution publique fiable et performante?
Dans un premier temps, on présentera les enjeux et les
acteurs du partenariat Rhône-Alpes et Saint-Louis. L'occasion de retracer
la dynamique constructive dudit partenariat. Deuxièmement, on analysera
les thématiques privilégiées dans la mise en oeuvre des
projets et leurs finalités réelles. Tout en explorant la variable
du renforcement des capacités de Saint-Louis. Sachant que c'est l'un des
axes qui pourraient permettre aux élus locaux du Sud de renouer avec la
confiance de leurs administrés.
L'originalité de ce travail réside dans sa
vocation à utiliser les différentes matières et
méthodes d'analyses des sciences sociales. Ceci en accordant une
attention particulière aux travaux de science politique et, dans une
moindre mesure, à la littérature administrative. Par
conséquent les données théoriques ont été
croisées avec les informations tirées des investigations
empiriques, composées généralement d'entretiens et
d'interactions avec les acteurs du partenariat Rhône-Alpes/ Saint-Louis
du Sénégal.
16
Les informations théoriques relatives à cette
étude ont nécessité le concours de différentes
sources. Dans un premier temps, il s'est agit de dépouiller les
archives, les documents administratifs, les rapports d'activités et les
comptes rendus de rencontres sur la coopération
décentralisée, disponibles dans les bases de données des
structures en charge dont (RESACOOP, les Conseils régionaux de
Saint-Louis et de Rhône-Alpes, le SCAC et la DIRCOD).
Deuxièmement, les lectures d'ouvrages spécialisés ont
permis d'examiner les différentes approches de la coopération
décentralisée (notamment ceux de Petiteville intitulé
« Les collectivités locales dans la coopération Nord-Sud,
publié en 1996 », et d'Alain Marie « La coopération
décentralisée et ses paradoxes. Dérives bureaucratiques et
notabilières du développement en Afrique », sorti en 2005).
Enfin pour compléter cette revue de la littérature, les articles
de Bernard Husson dont : « la coopération
décentralisée et le renforcement institutionnel une dynamique
à construire » (2007), entre autres, nous ont proposé une
approche alternative au manque d'efficacité des projets
réalités. En outre, certains articles de presse, ont
été utilisés dans une démarche d'évaluation
et de transversalité des opinions.
Le travail de terrain consistait, au préalable,
à effectuer un stage au Conseil régional de Saint-Louis,
après accord du Secrétaire général M. Amath Dia.
L'objectif initial étant de faire une observation sur place, à
chaud, avec le souci de conserver une certaine objectivité. Mais durant
cet exercice au Conseil régional de Saint-Louis (à partir du 06
Avril 2009), il a fallu surmonter le déficit de supports documentaires
et d'échanges avec les acteurs locaux. Non seulement, il n'y a pas de
service technique chargé de la coopération
décentralisée, mais les acteurs n'étaient pas disponibles
car l'organe délibératif du Conseil régional devait se
réunir pour choisir le nouveau Président ou confirmer l'ancien,
suite aux résultats des élections locales de Mars 2009.
Par ailleurs, les documents étaient
éparpillés entre plusieurs services, dont le Secrétariat
général et la gestion des affaires administratives. Ainsi entre
problèmes d'archivages, par-ci, et absence de mise à jour des
documents, par-là, des changements d'ordre méthodologique ont
été opérés. En effet pour sortir de cette impasse,
M. Amath Dia Secrétaire général du Conseil régional
de Saint-Louis et M. Babacar Faye, chargé des affaires administratives
du Conseil régional de Saint-Louis, ont suggéré d'entrer
en contact avec M. Bouna Warr (Directeur de l'Ard de Saint-Louis), M. Adama Sow
(Coordonnateur permanent de Rhône-Alpes à Saint-Louis) et les
responsables de l'association le Partenariat (ONG opérateur permanent du
partenariat Saint-Louis/ Nord Pas de Calais). Ces acteurs locaux
présents à Saint-Louis, ainsi
que les acteurs nationaux rencontrés durant les
enquêtes à Dakar, nous ont accordé des entretiens, fourni
des documents et prodigué des conseils (cf. annexe : liste des
entretiens).
Après le dépouillement de tous ces documents
confondus, ce travail a été marqué par trois principaux
spécialistes. Les raisons et les résultats de cette
sélection sont suivants :
- Petiteville (Maître de Conférences en Science
politique à l'Université de Paris V et à l'IEP de Paris)
propose dans son livre6, réalisé à partir de
ses travaux de doctorat, en 1995, une analyse pionnière de cette forme
nouvelle de coopération. Cet ouvrage révèle la
diversité des pratiques et des motivations qui se nouent sur le terrain,
contrairement à l'homogénéité des idées.
Sans oublier la dimension encore largement expérimentale de cette forme
de coopération, Petiteville dépasse la représentation
folklorique et désuète qui reste encore attachée à
cette coopération décentralisée de la première
heure. Par conséquent, il donne à voir comment par touches
successives a pu se constituer un véritable réseau
franco-africain de coopération municipale. Mais notre travail ne devrait
s'y attarder qu'accessoirement, car les recompositions institutionnelles,
notamment en 1996 au Sénégal, ont catégoriquement
modifié la coopération décentralisée
franco-africaine, à cause de la présence de nouveaux acteurs.
- Alain Marie (Sociologue Maître de conférences
à l'Université Paris 1), à partir d'une série
d'études cas (douze au total) dans 4 pays d'Afrique dont le
Sénégal, se situe dans une approche socio-anthropologique. Dans
un chapitre de son ouvrage7 intitulé, « De l'aide
hétéroclite au développement local, l'épreuve des
réalités », il analyse les paradoxes de la
coopération Nord-Sud : projets éparpillés, intervenants
multiples et bureaucratisation des dispositifs. Néanmoins, pour ce
dernier le développement local a une finalité positive bien
qu'elle doit surmonter deux écueils : la notabilisation, entre
élites modernes et traditionnelles pour s'approprier les ressources, et
la bureaucratisation qui alourdie les procédures et diminue les
financements. Donc, Alain Marie pointe du doigt les vrais obstacles à
surmonter, sans s'inscrire dans une démarche de restructuration
catégorique, partagée par plusieurs observateurs dont Bernard
Husson, économiste et professeur au CIEDEL de Lyon.
- Cette étude entre, donc, dans la filiation de Bernard
Husson qui promeut l'idée d'un renforcement institutionnel des
collectivités locales du Sud. Dans plusieurs articles et
6 F. Petiteville, La coopération
décentralisée : les collectivités locales dans la
coopération Nord-Sud, Paris Harmattan, 1996.
7 A. Marie, La coopération
décentralisée et ses paradoxes. Dérives bureaucratiques et
notabilières du développement local en Afrique, Paris, Karthala,
2005.
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publications parmi lesquels : « La coopération
décentralisée et le renforcement institutionnel : une
démarche à construire » (, Mai 2007), il s'inscrit sur une
démarche de changement. Pour Husson, le contenu de la coopération
décentralisée ne peut être séparé de ses
modalités de mises en oeuvre. Il appelle les collectivités
françaises, notamment la région Rhône-Alpes, à
intervenir en priorité sur la responsabilisation de leurs partenaires du
Sud par la formation du personnel, la mise en place de fonds locaux propres, le
renforcement de l'information entre les élus et la population et par le
renforcement des capacités de maîtrise d'ouvrage des acteurs. Par
conséquent, les axes d'interventions préconisés par ce
dernier constituent l'avenir de la coopération
décentralisée s'ils s'inscrivent sur la même dynamique que
les collectivités françaises en partenariat avec leurs homologues
du Sud.
Tout en empruntant aux spécialistes de la question les
conclusions de leurs travaux, l'objectif de cette étude est d'analyser
la coopération décentralisée à partir d'une
étude de cas, à savoir le partenariat Rhône-Alpes et
Saint-Louis du Sénégal. Il s'agit, également, de mettre en
évidence le cheminement conceptuel et organisationnel des projets de
coopération décentralisée, les axes d'interventions
privilégiés des acteurs et leurs dynamiques au regard des
objectifs visés et des finalités réelles des projets
notamment en termes d'appui institutionnel au gouvernement local de la
région de Saint-Louis.
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