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La concertation comme outil de construction d'un développement durable en Nouvelle-Calédonie

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par Yannick MONLOUIS
Arsenal - M1 Infocom 2008
  

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PARTIE 3 : Les principaux acteurs

concernés dans le processus de décision

Dès le commencement du projet, les différents partis on eu le souci de construire l'usine en suivant les principes du développement durable. Toutefois, nous observerons dans cette partie le déséquilibre entre les priorités des différents acteurs participant au projet. Dans un premier temps nous nous attacherons à développer les objectifs de chacun vis-à-vis du développement durable, c'est-à-dire économique, social et environnemental. Cette analyse nous permettra de comparer les priorités des acteurs. Puis, nous verrons comment la préservation de l'environnement est passée au premier plan du débat, en nous appuyant sur les manques concernant le volet environnemental.

I. Les priorités des acteurs du projet

Chaque acteur du projet n'ayant pas les mêmes intérêts, il m'a semblé nécessaire d'analyser leurs intérêts particuliers. Cette analyse permettra une meilleure compréhension des enjeux de la mise en place d'une politique de concertation.

A. Système économique : Vale Inco

Depuis le début du projet, la société Vale Inco a incorporé les piliers du développement durable. Nous allons observer ses objectifs en fonction des trois piliers.

1. Objectif économique

Vale Inco Nouvelle-Calédonie S.A.S., est une entreprise d'extraction du minerai et de production de nickel et cobalt. Par nature une entreprise est un agent économique qui a pour finalité la production de biens et de services destinée à la vente pour réaliser du profit. Aucune entreprise ne peut survivre sans en faire sa priorité, à moins d'être protégée et en dehors du champ de la concurrence (ex : cas des services publics).

Le marché du nickel est un oligopole. Cela implique une veille concurrentielle accrue de la part de Vale Inco et des stratégies permanentes pour améliorer sa compétitivité. Les marchés oligopolistiques sont marqués par une concentration importante. Si la société Vale Inco veut garder sa souveraineté, elle doit être autonome au niveau financier. De ce fait, l'objectif de maximisation du profit est crucial, car il est le seul garant de la survie de l'entreprise.

Maximiser ses profits consiste à extraire des bénéfices financiers en récoltant plus d'argent à l'arrivée que d'argent investi au départ ; notamment pour attirer les investisseurs institutionnels et les actionnaires. En effet, l'augmentation du profit conditionne les fonds que l'entreprise pourra lever pour permettre sa survie sur le marché.

Pour résumer, la société Vale Inco a comme objectif économique, la maximisation de son profit grâce à la production de minerai servant à répondre à la demande mondiale.

2. Objectifs sociaux

L'entreprise est un système ouvert, c'est-à-dire que d'une part elle est influencée par son environnement et d'autre part, elle influence son environnement. Son activité est à l'origine d'externalité positive ou négative. Elle est donc responsable des conséquences de son activité sur la société, ses hommes, son patrimoine culturel, historique...

En ce sens, Vale Inco accorde un effort particulier à la création d'emplois locaux et à l'octroi de contrats à des firmes locales. En plus des centaines d'emplois temporaires liés à la construction, 800 postes permanents seront créés pour le fonctionnement de l'usine en production constante, dont 90% seront détenus par des calédoniens. On estime qu'environ 3000 autres emplois, indirects et induits, seront créés localement grâce à ce projet, et ce sur une trentaine d'années ou davantage si d'autres gisements sont exploités après celui de Goro. Pour remplir ses emplois, il faut des individus formés. L'industriel doit être en mesure de trouver les compétences nécessaires parmi les jeunes Calédoniens. C'est pourquoi la société a mis en place un programme de formation adapté à ses besoins. Ce qui offre aux jeunes Calédoniens intéressés par ce grand projet industriel la possibilité de se préparer à occuper les postes qui seront ouverts dans divers métiers de haute technologie.

De plus, Vale Inco Nouvelle-Calédonie travaille à l'élaboration d'initiatives communautaires en collaboration avec ses voisins. La société a donc pour objectif d'intégrer la population calédonienne au projet en participant activement au développement économique local. Cet objectif se raccorde au volet social et non au volet économique, car les retombées financières ne profitent pas à la société, mais au pays d'accueil. Cet objectif est volontaire de la part de l'industriel.

3. Objectif environnemental

En matière environnementale, la société se conformera aux règlements locaux en vigueur et aux normes reconnues internationalement. Ces choix ne sont pas uniquement dictés par un

37

sens de la responsabilité et une conscience environnementale plus aiguë que par le passé de la part des dirigeants. Ils représentent également une sage décision d'affaires. Comme l'ensemble de la communauté internationale, les investisseurs connaissent les risques d'un projet qui ne respecterait pas les normes mondiales du développement durable et sont plus réticents à y investir.31

La société souligne les retombées économiques que son activité engendrera pour le territoire, s'engage à travailler avec les communautés voisines, se conforme à respecter les règles internationales en matière environnementale... D'après ces informations nous pouvons dire que Vale Inco s'inscrit dans un développement durable. Cependant, on notera que le volet économique prend l'ascendant sur les deux autres, car il conditionne l'existence méme de l'entreprise. Les autres volets sont satisfaits en fonction de ce dernier.

La formation des locaux (volet social) permet l'embauche de personnels qualifiés qui favorisera une meilleure productivité pour Vale Inco. Puis, l'industriel communique sur le fait qu'il se conformera aux règlements en vigueurs et aux normes internationales (volet environnemental) pour « montrer patte blanche » devant les investisseurs. La société sera attractive et pourra bénéficier de fonds financiers pour assurer son développement. Il est donc indéniable que pour cet acteur, le volet économique prime sur les deux autres.

B. Système politique

Le projet du sud concerne particulièrement la Province sud et les communes de Yaté, du Mont-Dore et de Nouméa. La Province sud étant compétente en matière de développement économique et social, de protection de l'environnement et d'aménagement du territoire, nous focaliserons notre analyse sur ses objectifs. Les décisions prisent par la Province ont une forte incidence sur le projet, donc nous pouvons dire que cette entité politique est la plus impliquée dans le projet et de ce fait, il semble intéressant de focaliser notre analyse sur ses objectifs.

1. Objectifs économiques

D'une part, le projet Vale Inco va permettre une entrée importante de fonds pour la collectivité via la fiscalité applicable. En dépit, des nombreux avantages fiscaux attribués par le Gouvernement calédonien et l'État français à l'industriel tel que la défiscalisation dans le carde de la loi Girardin ou encore l'exonération de taxes et de droit d'importations pour les

31 Extrait du paragraphe sur la protection de l'environnement [en ligne] [ www.valeinco.nc]

38

équipements nécessaires à la construction des biens d'équipements de nouvelles installations ; On estime que pour les 15 premières années d'exploitation, la société canadienne reversera au territoire 20 à 30 milliards CFP de taxes diverses.

D'autre part, la société a cédé 10% du capital de Vale Inco Nouvelle-Calédonie au territoire dont 5% iront directement dans les caisses de la Province sud. Cette participation permet à la collectivité de disposer d'un siège au conseil d'administration de Vale Inco et donc d'un droit de regard sur la gestion de l'entreprise. Mais elle représente surtout une ressource financière permettant à la Province d'augmenter son budget et de subvenir aux dépenses publiques induites par le projet industriel tel que l'entretien des réseaux routiers, des équipements publics, l'emploi et la formation...

Au final, l'objectif économique de la Province sud est d'augmenter et de diversifier ses ressources financières. Jacques Lafleur le dit clairement à l'assemblée tenue le vendredi 5 juillet 2002, « Je rappelle simplement que, pour le moment, la Nouvelle-Calédonie vit de la production de la SLN qui est de 58.000 tonnes. C'est tout ! Il n'y a rien d'autre ! ».

2. Objectif social

Le sud de la Nouvelle-Calédonie étant historiquement plus peuplé, le plus divers ethniquement, le plus riche économiquement, mais aussi en charge des problèmes sociaux les plus aigus, la Province sud est une collectivité territoriale majeure. Elle regroupe en 2004, 71,16% de la population du pays, soit presque 3/4 des calédoniens vivent dans le sud. Lors du dernier recensement (2004), la Province a vu sa population augmentée de 19,08% par rapport au recensement de 1996 soit 2,38% d'augmentation par an.32 Cette situation est dû à la fois à un accroissement naturel plutôt fort mais aussi à un solde migratoire élevé. La Province est ainsi non seulement bénéficiaire de l'essentiel du solde migratoire positif de la NouvelleCalédonie mais également, elle est un pôle d'attraction pour les actifs (surtout au sein des jeunes générations) des deux autres provinces qui elles, ont un solde migratoire négatif33. Pour éviter l'apparition de problèmes sociaux, la Province sud doit gérer au mieux cette forte augmentation démographique.

L'équilibre social dépend de la santé économique du pays. Le projet Vale Inco est une aubaine pour la Nouvelle-Calédonie est particulièrement pour la Province sud. Ce projet lui permettra de répondre aux divers problèmes concernant l'augmentation de la population, notamment en termes d'emploi. L'objectif est d'atteindre une prospérité économique telle que

32 Statistiques issues de l'Institut de la Statistique et des Études Économiques, [en ligne], [ www.isee.nc]

33 ISEE, « Situation démographique 2008 », [en ligne], [ www.isee.nc]

39

le pays l'a connue durant la période du « Boom du Nickel ». Pour atteindre cet objectif, la collectivité devra travailler sur différents axes.

Tout d'abord, l'emploi. L'activité engendrée par le projet va générer des effets directs, indirects et induits sur le marché de l'emploi calédonien. Ci-dessous, vous pouvez voir le tableau approximatif des effets du projet Vale Inco, sur le marché de l'emploi34.

Phase de
construction

Phase d'exploitation

 

Effets directs

Effets Indirects

Effets Induits

Effectif inscrit chez
l'opérateur

Effectif chez les sous-
traitants

Emplois crées dans

l'ensemble de l'économie
liés a l'effet du revenu
distribué par l'opérateur

et les sous-traitants à
leurs salariés

3000

800

1500

2000

Ces nouveaux emplois permettront d'absorber l'augmentation démographique de la Province en assurant des emplois aux jeunes. La Province devra s'assurer de l'adéquation entre l'offre et la demande sur le marché du travail. Elle prendra des mesures favorisant cette adéquation. Ensuite, la formation. Les emplois devront être assurés par des jeunes calédoniens formés. C'est dans ce but que l'ensemble des institutions politiques calédoniennes et françaises ont collaborées avec l'industriel pour la mise en place de programmes de formation adaptés aux métiers de la mine.

Enfin, la collectivité doit assurer le développement équilibré de son territoire. Elle devra accompagner le projet d'une réelle politique d'aménagement du territoire permettant le développement économique et la réduction des inégalités spatiales et terme économique et sociales. Elle aura pour rôle d'assurer l'habitat à travers les logements sociaux, d'entretenir les réseaux routiers, de préserver et de permettre la mise en valeur de l'environnement comme on la conçoit par exemple dans la Gestion intégrée des zones côtières.

Au final, pour atteindre un équilibre social, la Province devra gérer au mieux son développement économique en assurant le partage des richesses. Précisément, son rôle sera de capter la richesse issue du projet Vale Inco et de la répartir équitablement sur son territoire.

34 Vale Inco, source BTH, base de référence projet 2002

En 2002, le Président de la Province sud, de part ses décisions, avait facilités au maximum l'installation de l'industriel, assurant ainsi une nouvelle ère économique et sociale prospère pour la Province.

« Je crois que notre raison de faire de la politique, c'est de créer une Calédonie prospère pour tous, assurer des emplois aux jeunes et préparer le futur. »35

3. Objectif environnemental

En matière environnementale, la Province sud n'avait pas pris de mesure particulière concernant le projet minier. « Goro Nickel est un établissement classé et, à ce titre, doit répondre à des normes de sécurité et de propreté draconiennes. Si ce n'est pas le cas, la Province sud pourra faire stopper l'exploitation »36. La Province s'est élevée avec force contre l'État concernant le dépôt du dossier de classement du lagon calédonien au patrimoine mondial de l'Unesco. Le Président de la Province sud invoquait une ingérence de l'État en matière environnementale. Pour Pierre Bretegnier, premier vice président de l'assemblée de la Province, le classement « n'apportera rien à la protection du site classé »37. Le Président de la Province s'inquiétait des impacts du classement sur la gestion du lagon qui est de compétence provinciale et sur les impacts culturels. Il écrivait dans une lettre adressée aux Verts : « Que se passerait-il si des clans de la mer étaient interdits de pêcher dans des zones qu'ils exploitent de tout temps ? »38. En janvier 2002, Mme Bachelot, Ministre de L'Écologie et du Développement Durable décide suite à sa rencontre avec Mr Jacques Lafleur d'annuler la demande d'inscription du lagon calédonien au patrimoine mondiale de l'Unesco. Elle déclara qu'il valait mieux assurer la protection environnementale en travaillant avec les sociétés minières internationales.

On constate que la Province tient à gérer elle-même son environnement, sans être contraint par des instances extérieures.

La Province sud a un objectif social fort qui est d'assurer un avenir prospère à ses habitants. Cette prospérité sociale passera d'abord par une prospérité économique. Si la Province réussie à s'intégrer au maximum au projet de l'usine du sud, les retombées économiques seront

35 Extrait du discours de Jacques Lafleur, Les Nouvelles Calédoniennes, du 11/11/02, [en ligne], [ www.lnc.nc]

36 Déclaration de Pierre Bretegnier, premier vice président de l'assemblée de la Province sud de mai 1999 à mai 2004, Les Nouvelles Calédoniennes, du 31/08/02, [en ligne], [ www.lnc.nc]

37 Déclaration de Pierre Bretegnier, Les Nouvelles Calédoniennes, du 31/08/02, [en ligne], [ www.lnc.nc]

38 Extrait de la lettre de Jacques Lafleur au vert, Les Nouvelles Calédoniennes, du 20/02/03, [en ligne], [ www.lnc.nc]

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importantes pour la collectivité. Ces retombées lui permettront de répondre au fort accroissement démographique et aux différents maux de société qui l'accompagnent. Le pilier social sera satisfait en fonction d'une bonne santé économique. On peut noter que le pilier environnemental ne fait pas l'objet de décision particulière. D'ailleurs, ce volet est très peu évoqué. Pour exemple, sur les 26 pages du procès verbal concernant l'attribution du site de Prony à la Société Vale Inco, seulement 5 lignes mentionnent les risques environnementaux du projet.

C. Société civile

Par rapport au système économique et au système politique, la société civile n'a pas d'objectif concret à atteindre concernant le projet. Elle se contente de mettre en exergue des points qui posent problèmes ou qui ne sont pas réellement traités. Comme précédemment nous allons analyser ses points en fonctions des différents piliers du développement durable.

1. Signalement économiques

La société civile calédonienne a souligné trois incohérences économiques dans le projet de l'Usine du sud.

Premièrement, l'attribution du site de Prony à Vale Inco. Pour la société civile, cette décision fut prisent prématurément et les perspectives de surproduction et de déstabilisation du marché qu'elle ouvrait, risquées de nuire au financement de l'Usine du Nord et donc, de nuire au rééquilibrage économique du territoire. L'attribution de Prony n'avait pas lieu d'être avant que le territoire est digéré, les deux projets métallurgiques en termes d'emplois et de formations.

Puis, la gratuité de l'attribution. Comment qualifier l'attribution, sans contrepartie apparente, d'un gisement qui permettrait à l'usine produisant 55.000 tonnes de passer à 120.000, voire à 180.000 tonnes de production annuelle ? Par comparaison, au Canada, Inco a acheté le gisement de Voisey's Bay pour l'équivalent de 270 milliards CFP, alors qu'il est deux fois moins important. Selon Gérard Jodar, Président du syndicat USTKE, « la Province sud n'a pas à donner à une société étrangère un massif minier de cette importance »39.

Enfin, la participation du territoire au capital de Vale Inco Nouvelle-Calédonie fut jugée dérisoire. La Nouvelle-Calédonie est entrée dans le capital de la société canadienne à hauteur de 10%. Rappelons que dans le projet Koniambo, la SMSP détient 51 % des parts et

39 Déclaration de Gérard Jodar, Les Nouvelles Calédoniennes, du 05/07/02, [en ligne], [ www.lnc.nc]

42

Falconbridge 49%. La société civile avait pour revendication le rachat par l'État de 15% des titres miniers du projet Vale Inco pour les céder à la Nouvelle-Calédonie, permettant une plus grande participation du territoire dans le projet minier.

« Il a fallu nous battre pour que la Nouvelle-Calédonie entre dans le capital de la SLN et d'Eramet. Nous allons maintenons nous battre comme les Inuits du Canada se sont battus, et ont obtenu ce qu'ils voulaient ».40

En terme économique, la société civile réclame à la Province sud une plus grande participation au projet de l'Usine du sud et une gestion tenant d'avantage compte de l'intérêt du territoire et non seulement de la province. Ce principe correspond à la solidarité entre les territoires, un des 27 principes de la déclaration de Rio. La solidarité entre les territoires correspond à la prise en compte de l'incidence des choix faits par un territoire sur d'autres territoires. Il s'agit de penser aux conséquences que son propre développement peut avoir sur les autres et de ne pas entraver leurs développements. Dans ce cadre l'articulation des échelles territoriales et temporelles est essentielle.

Toutes les manifestations qui ont été menées avaient pour but d'interpeller les politiques de la Province sud uniquement. En effet, en tant que représentant démocratiquement élus, ils étaient les seuls habilités à négocier avec l'industriel. Leurs décisions furent le plus souvent contestées par une très large opposition qui s'est sentie dépouillée de son patrimoine.

2. Signalement social

Les projets miniers auront un impact socioculturel gigantesque pour la Nouvelle-Calédonie. L'ensemble de la population calédonienne sera touché de près ou de loin par ces projets. Ainsi, les décisions prises par les politiques, que se soit au sud ou au nord, sont lourdes de conséquences pour l'ensemble du territoire.

La société civile a soulignée le risque qu'engendrerai l'attribution du site de Prony, pour le rééquilibrage économique et sociale du pays. Le projet Koniambo est considéré comme seul garant du rééquilibrage sud/nord. L'essor économique qu'il engendrerait permettra de freiner l'exode rural vers la Province sud et sa capitale. Ainsi, les richesses et la population seront mieux répartit sur le territoire. Le rééquilibrage est important et c'est pour cela qu'il constitue un des fondements des accords de Matignon de 1988. Cette attribution porterait atteinte à la

40 Déclaration de Victor Tutugoro, porte parole du FLNKS, Les Nouvelles Calédoniennes, du 31/08/02, [en ligne], [ www.lnc.nc]

viabilité de l'Usine du nord et irait à l'encontre du rééquilibrage économique et social de la Nouvelle-Calédonie.

La société civile souligne également le manque d'information autour des enjeux concernant cette attribution. Mr Rock Wamytan, membre du FLNKS, insiste sur le fait que le projet à souffert d'un manque sérieux de communication : « J'ai entendu ce matin les uns et les autres s'exprimer et on a tous reconnu qu'effectivement c'était un dialogue de sourds. Les uns et les autres ont des arguments techniques, ont des arguments financiers à faire avancer et il me semble que d'après ce que nous avons entendu, d'après les arguments des uns et des autres, ce projet n'est pas mür [...] Je crois que les uns et les autres ont dit que ce n'était pas urgent à la minute ou urgent à la semaine ou au mois. Il faut que nous puissions continuer à discuter. »41

Enfin, les populations voisines du site de Goro, essentiellement les habitants des communes de Yaté et du Mont-Dore ont réclamés leurs participations obligatoires au suivi du projet. C'est d'ailleurs le fait que l'industriel soit dispensé par la loi du consentement des populations autochtones et d'une compensation des impacts sociaux et culturels, qui a conduit, en l'absence de négociations, à un conflit ouvert.

La société civile a dénoncé les décisions de la Province sud qui sont lourdes de conséquences. Elles ont été prises rapidement sans laisser le temps à l'information de se diffuser et sans concertation, ni même consultation des calédoniens, premiers concernés par ces décisions. Ce manque de concertation a fait naître des associations qui ont pour but d'inciter les politiques et l'industriel à élargir la gouvernance du projet.

3. Signalements environnementaux

La protection de l'environnement représente le fer de lance de la société civile concernant le projet Vale Inco. L'action des associations à fait apparaître de nombreux besoins en matière de protection environnementale. Des associations environnementales existaient avant le projet de l'usine du sud, mais la majorité de ces associations ont été créées à partir des conflits liés au projet minier. À travers leurs revendications, elles ont su hisser le volet environnemental au même niveau que le volet social et économique.

41 Extrait de la déclaration de Rock Wamytan, Rapport n°14-2002/APS : projet de délibóation relatif à l'attribution d'un permis de recherche A à « Prony OUEST » au profit de la société Goro Nickel et rejet d'autres demandes, 05/07/02.

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Premièrement, concernant l'attribution du site de Prony, la société civile a dénoncé la dilapidation du patrimoine minier. Les grands chefs Moyatea et Tein42 ont déclaré « Il ne faut pas que nos enfants nous accusent d'avoir dilapidé leur patrimoine. Dans le passé, nous avons laissé les exploitants miniers faire n'importe quoi et polluer notre terre qui en porte encore les traces. Il est temps que cela cesse »43. Le développement durable est un développement qui vise à « répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Si trois usines métallurgiques produisent en même temps en Nouvelle-Calédonie, que va-t-il rester au final pour les générations futures ? La Calédonie étant une île, si elle exploite d'un seul coup sa principale richesse en détruisant par la même occasion son environnement naturel, elle se condamne à un triste avenir.

Puis, la société civile locale et internationale a appelé le gouvernement Français à poursuivre la demande de classement du lagon au patrimoine de l'humanité. Ce classement constituerait un label de qualité impliquant une réglementation obligatoire en matière environnementale. Ainsi, l'activité de l'industriel et ses impacts sur l'environnement ne seront pas soumis au seul jugement des locaux, mais également à l'opinion internationale. Les instances internationales n'auront pas le droit de prendre des restrictions en cas d'impacts négatifs. Cependant, le seul fait de retirer le label, mettrait en évidence aux yeux de l'humanité une mauvaise gestion de l'environnement. Pour ne pas que son image soit ternie, l'industriel sera plus incité à prendre des mesures fortes en matière de protection environnementale si le lagon est classée au patrimoine de l'Unesco.

Enfin, les associations ont réclamées des garanties sur la protection de l'environnement. Ces garanties couvrent un champ très large allant de la nécessité d'une gouvernance élargie au dédommagement de l'entreprise vis-à-vis des populations voisines en cas de catastrophes industriels, écologiques et/ou humaines. L'étendu de ces revendications témoignent du vide que connaît le territoire en matière de protection environnementale.

A travers les manifestations qu'elles ont organisées, les nombreux blogs qui ont été créés, les réunions publiques, etc... Les associations ont joué un rôle crucial pour faire prendre conscience au public des risques environnementaux que comporte le projet. Elles ont poussées la société canadienne et les politiques à prendre en charge le volet environnemental pour inscrire le projet dans une réelle logique de développement durable.

42 Robert Moyatea est le Grand chef coutumier du Mont Dore, commune voisine de Yaté (lieu du site industriel) et Mr Emmanuel Tein celui de l'île Ouen (rattachée à la commune du Mont Dore) située en face de Yaté.

43 Déclaration des Grands chefs Moyatea et Tein, Les Nouvelles Calédoniennes, du 31/08/02, [en ligne], [ www.lnc.nc]

Au final, la société civile se positionne comme contre-pouvoir face à Vale Inco, mais surtout face aux politiques. Via ses actions, elle a fortement incitée les organes décisionnaires à traiter des points litigieux tels que la participation du territoire dans le capital de la société ou les garanties concernant la protection de l'environnement. Par rapport au système politique et au système économique, le pilier environnemental est vraiment important, on peut même dire qu'il est l'axe majeur de l'existence de la société civile. Ce sont les manques concernant l'environnement qui constituent sa force.

D. Analyse des priorités des acteurs du projet

Le projet Vale Inco est sujet à controverse. Pourtant les parties s'accordent sur la nécessité de construire l'usine, qui au final sera bénéfique en terme de développement économique et social pour le territoire. Dans ce cas, la question n'est pas de savoir si oui ou non les calédoniens veulent du projet ? Mais de savoir comment gérer au mieux ce projet dans une perspective de développement durable ? Comment retirer de ce projet un maximum de bénéfices, tout en limitant au maximum ses impacts sur l'environnement ?

« Il faut bien comprendre. Nous ne sommes pas contre le projet. Nous voulons simplement qu'il se fasse dans de bonnes conditions.44 »

Les déclarations émises par chacun montrent que l'ensemble des acteurs veulent inscrire le projet dans un développement respectueux de l'environnement naturel et humain. Seulement, la réponse apportée par chaque acteur est différente. Lorsque que le Président de la Province sud se réjouit d'entrer dans le capital de Vale Inco Nouvelle-Calédonie à hauteur de 10%, la société civile l'accuse de brader le patrimoine minier. Lorsque Vale Inco annonce qu'il se conformera aux normes locales et internationales en matière de protection de l'environnement, la société civile souligne le vide juridique que connaît la NouvelleCalédonie en la matière. Ces différences de points de vues laissent transparaître les intérêts particuliers de chacun, qui d'après notre analyse, ne sont pas les mêmes. Pour autant, il existe un objectif commun qui est de construire une usine viable, vivable et équitable pour tous.

Le rejet énergique et quasi systématique de la plupart des décisions prises concernant ce projet devait être considéré par les politiques comme un indicateur pour modifier la méthode

44 Déclaration de Raphael Mapou, Président de l'association Rhéébù Nùù, Les Nouvelles Calédoniennes, du 18/11/02, [en ligne], [ www.lnc.nc]

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de gouvernance. Face à une opposition forte, le projet aurait dü s'accompagner d'un développement progressif de la concertation. On peut dire que dès sa conception, ce projet a fondamentalement manqué de confrontation entre les parties ou a simplement, évincé la société civile de la discussion. Ce manque de concertation a fait naître une confrontation qui a mué de revendications plutôt économiques à des revendications plus portées sur l'environnement. Là ou un vide était présent, des associations se sont formées et ont militées pour faire entendre leurs voix et signaler de sérieux manque en matière de protection de l'environnement.

Afin de mieux comprendre, l'émergence des nombreuses associations de protection de l'environnement. La partie suivante analysera les cadres juridiques en matière de protection environnementale en Nouvelle-Calédonie. À partir de cette analyse nous verrons les problèmes qui ont été soulevés par les associations.

II. La protection de l'environnement en Nouvelle Calédonie

Face à l'installation des deux grands projets industriels et aux enjeux mondiaux concernant la mise en oeuvre des politiques de développement durable ; la Nouvelle-Calédonie et plus particulièrement la Province sud en charge de la protection de l'environnement, se devait de faire évoluer son cadre réglementaire. Dans un premier temps, nous allons étudier le cadre réglementaire existant pour ensuite comprendre les critiques et revendications des associations de protection de l'environnement.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille