III- PRESENTATION ET ANALYSE DES INFORMATIONS
RECUEILLIES
Pour mener ce travail d'évaluation, j'ai donc
tenté de définir une méthodologie alliant à la fois
des méthodes quantitatives et qualitatives (questionnaire aux
personnes), quantitatives (enquête auprès du
tribunal)79, qualitatives (suivis de processus en stage avec des
médiateurs) afin de tenter de cerner le plus précisément
possible la réalité de la durée des accords
réalisés en médiation.
Outre les limites déjà énoncées,
spécifiques pour chaque outil de prospection, il faut ajouter que les
réponses doivent être relativisées proportionnellement
à l'échelle d'un travail certes enthousiaste mais limité
à un seul enquêteur, quelques semaines de recherche, un champ
géographique étroit et un mémoire d'une soixantaine de
pages.
Cependant, les réponses concrètes
apportées peuvent être un point de départ de
réflexion, pour une future pratique et des échanges avec les
acteurs concernés, sur les conséquences des séparations
accompagnées d'une médiation familiale.
Autour de mon hypothèse et à partir des
résultats de la recherche, émergent trois idées-forces
: la réalité de la durée des accords de médiation,
la baisse des retours
79 Les résultats de l'enquête à la chambre de
la famille du TGI de Toulouse sur une centaine de dossiers sont
présentés dans leur intégralité en annexe n°3
(p.66).
contentieux devant les juges, et, au delà, un
bénéfice pour les personnes qui passent en médiation, qui
dépasse largement l'accord écrit.
A- La durabilité des accords
expérimentée par les médiés
L'observation participante en stage permet de confirmer
qu'effectivement, le médiateur familial met en place un accompagnement
soutenant, qui crée les conditions de durabilité de l'accord. Les
personnes arrivent avec une demande, en général précise,
qui est arrivée à un point d'impasse dans un conflit. Le travail
en médiation part de cette demande mais la solution ne pouvant
émerger des positions bloquées de chacune des parties, un long
processus est nécessaire pour aborder tous les champs liés au
conflit des personnes et permettre un changement.
Dans le questionnaire, à la question du nombre
d'entretiens nécessaires pour parvenir à un accord (question
6):
1à 3 entretiens : 0
4 à 7 entretiens : 6
Plus de 7 entretiens : 6.
Il est notable qu'au moins quatre entretiens sont
nécessaires pour parvenir à un accord. Les cas ou la
médiation s'étend au-delà de sept entretiens
représentent également la moitié des réponses. Cela
vient confirmer la nécessité pour un accord de s'inscrire dans le
temps, au long d'un processus complet. J'ai observé en stage que non
seulement, grâce à l'expression des parents en médiation,
leurs positions changeaient, mais qu'également, dans le temps hors
séances, des évolutions significatives avaient lieu.
Les personnes valident l'adéquation entre leurs choix
et le contenu des accords : A la question 7: Avez-vous eu le sentiment que
cet accord reflétait vos décisions et vos choix que vous avez
exprimés pendant la médiation?
Les personnes interrogées ont répondu :
Oui pour 8 d'entre elles
Plus ou moins : 2
Non : 2,
ce qui vient confirmer pour une nette majorité que ce qui
a été écrit a été pesé.
En stage, cette adhésion nécessaire est
vérifiée sans cesse. En reformulant, en amenant les
médiés à réfléchir sur les
conséquences de leurs engagements, le médiateur familial fait en
sorte que les accords écrits reflètent le plus fidèlement
possible les décisions des personnes.
Un médié indique en commentaire libre à
la fin du questionnaire que la médiation familiale «
nécessite la complète adhésion de la personne en
médiation et le professionnalisme du médiateur »
Les personnes reconnaissent s'appuyer sur leurs écrits,
qui règlementent leur nouvelle organisation familiale. A la question 8 :
Selon vous combien de temps cet accord a-t-il été valable
pour votre nouvelle organisation familiale?
9 personnes ont répondu : « jusqu'à
aujourd'hui » (après plus de 18 mois)
1 personne a indiqué une durée limitée
80:
2 personnes ont indiqué que les accords n'avaient pas
été respectés
Il est intéressant de relever que parmi les personnes
qui ont répondu «accords non respectés», l'une d'elle
indique en justification que « L'accord n'a pas été
signé par Monsieur.»
La question 9, qui est corollaire de cette question 8, apporte
des résultats logiques. Après la médiation, avez-vous
pu régler directement avec l'autre parent les aménagements qui
étaient nécessaires ?
Les personnes pour qui les accords sont encore valables
aujourd'hui ont répondu par l'affirmative, les 3 autres ont
répondu non pour 2 d'entre elles, « pas tout à fait »
pour la troisième. Q11F ajoute : «les accords qui ont
été formulés verbalement n'ont pas été
respectés par la suite. »
Le questionnaire a enfin permis d'adresser directement la
question aux personnes concernées : diriez-vous que la
rédaction d'accords écrits en médiation familiale a
été un gage de durée de ces accords dans le temps ?
(Question 15)
9 personnes ont répondu oui
2 personnes ont répondu non
1 personne n'a pas coché de réponse
80 Q10F : « 1 an » expliquant : mon mari
n'applique plus les accords qui ont été mis en place. Nous avons
divorcé avec les accords de médiation comme base du divorce
à l'amiable. Cela m'a beaucoup aidé. Lui a refusé de le
voir comme une aide. Aujourd'hui, il est dans le ressentiment et refuse le
dialogue, c'est pourquoi il m'a été impossible de l'obliger
à revenir en médiation. Nous passons par avocats
interposés et je le regrette. »
Q3F qui rappelle que les accords n'ont pas été
signés par Monsieur, ajoute : « le protocole est excellent et
sa mise en place a été très attentive, malheureusement, il
est fait avec des êtres humains et ces données n'ont jamais
été changées par un quelconque texte. »
Cette personne, par cette remarque pertinente, nous permet de
relativiser les résultats positifs en rappelant que les conditions
réunies pour favoriser la pérennité des accords ne
constituent certainement pas une garantie totale de leur application sur le
long terme.
On peut tout de même conclure que pour la
majorité de ces personnes qui ont suivi une médiation, l'outil
écrit a été étayant dans la suite de leurs
relations et a permis en général une entente durable sur les
décisions prises en médiation.
Au delà, pour les nouvelles décisions à
prendre, il apparaît que le fait d'avoir établi un accord
écrit permet aux parents de s'entendre puisqu'ils ont moins recours au
juge pour trancher.
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