Section III : Analyse et interprétation des
résultats
Les résultats d'estimation de notre modèle de
croissance (équation 1) figurent dans le tableau 1 (voir annexe),
sont satisfaisants aussi bien sur le plan économétrique que celui
de l'interprétation économique. L'ensemble des variables semblent
avoir un effet important sur la croissance économique.
En effet sur le plan économétrique, Il est
important de souligner que dans le modèle multiniveau à effet
mixte, l'hétéroscédasticité n'est pas forcement un
problème qui risque de biaiser les estimations. En outre de sa
capacité à analyser les données
hiérarchisées, les modèles à effet mixte
possèdent des caractéristiques qui leur rendent apte à
modéliser les données ou la variance résiduelle n'est pas
constante. Ils permettent donc de modéliser
l'hétéroscedasticité (Snijders et Boskers, 1999). Le terme
(équation 6) représente l'héteroscedacité
des résidus. Il s'interprète comme un effet aléatoire
d'interaction entre le groupe ou niveau et la variable explicative. Dans notre étude les paramètres (variances)
associés au niveau 2 (pays) et au niveau 1 (année) ont un effet
aléatoire dans toutes nos régressions. Cela met en
évidence l'effet contextuel des pays et de la période
d'estimation (année) sur l'explication de la croissance
économique par nos variables explicatives.
Le concept « de proportion de la variance
expliquée » est cependant bien connu dans les analyses de
régression multiples, sa mesure usuelle est le, pour les modèles à effet mixte hiérarchiques et
linéaires, ce concept étant beaucoup plus complexe (Snijders et
Boskers, 1999), nous ne les calculerons pas dans notre étude compte tenu
de la multitude de régression effectuée (18).
Sur le plan économique, pour la régression
(Tableau 1, spécification 1) qui comportent uniquement les variables de
contrôle, nos résultats semblent être conformes aux
considérations théoriques et empiriques. Le coefficient du PIB
initial (pibi) par habitant est positif et statiquement significatif (0,945)
suggérant dès lors une absence de convergence entre pays de
l'UEMOA.
Le capital humain mesuré par le niveau
d'éducation à l'enseignement secondaire, est positif et
statiquement significatif (0,224). Ce qui montre qu'une augmentation de 1% de
la variable HUM apprécie de 0,22 % la croissance économique.
Le taux d'investissement public est affecté d'un
coefficient positif et statiquement significatif, par contre le taux
d'investissement privé est négatif et statiquement non
significatif. Cela suggère que l'investissement public a relativement
des effets plus prépondérants sur la croissance que celui du
secteur privé dans les pays de l'UEMOA.
L'augmentation de la population affecte positivement la
croissance, ceci infirme l'effet appauvrissement de la population dans les
modèles de croissance exogène de SOLOW. En effet le coefficient
(0,945) de la variable POP est positif et non significatif.
Le coefficient de la variable `'ouverture commerciale'' est
positif et non significatif (0,032). Plusieurs auteurs rappellent que le lien
entre ouverture et croissance n'est pas systématique. Grossman et
Helpman (1991) souligne que l'effet du commerce peut être parfois ambigu
et même néfaste. En outre, Fontagné et Guérin (1991)
voient que l'ouverture serait un catalyseur et non le moteur de la croissance.
D'autres études récentes apportent des précisions en la
matière, en particulier, les travaux de Busson et Villa (1997)
relèvent que la nature des échanges est sans doute plus
importante que leur intensité dans l'explication de la croissance.
Notre régression de base montre que la croissance
économique est fonction croissante du niveau d'investissement public en
pourcentage du PIB, du niveau de développement initial et du capital
humain. Pour des pays en voie de développement comme ceux de l'UEMOA,
les autorités publiques devraient dès lors encourager
l'investissement public et améliorer davantage le capital humain par des
investissements élevé dans le secteur de la santé et de
l'éducation.
Les résultats des régressions (tableau
1,regresion 3,4,5) dans lesquelles nous avons augmenté successivement la
régression de base avec les différentes mesures de la
libéralisation financière montrent que les indicateurs de la
Libéralisation Financière, crédit au secteur privé
(CSP) et Masse monétaire (MM) sont positifs et significatifs
suggérant ainsi leurs effets substantiels sur la croissance
économique. Par contre les IDE paraissent négatifs et non
significatifs.
La régression 3 (tableau 1), présente les
résultats d'estimation de la croissance en incluant la variable
``crédit privé rapporté au PIB''. Le coefficient de cet
indicateur qui parait positif, est significatif. Dès lors une
augmentation (diminution) de 1% de la variable CSP entraîne une
augmentation (diminution) de la croissance de 0,096%. Ceci est conforme avec
les résultats de Klein et Olivei (1999).
La régression.4 (tableau 1), prouve ainsi que la
croissance économique est fortement dépendante d'une bonne
intermédiation financière par le biais d'une bonne maîtrise
du ratio ``M2 en pourcentage de PIB''.
Les résultats qu'on peut tirer des régressions
(3,4,5) c'est que la libération financière
présentée par ces trois variables (M2, CSP, IDE) de façon
individuelle, exerce un effet, plus ou moins, faible sur la croissance
économique, à l'exception de la variable IDE qui d'ailleurs n'est
pas significatif. Lorsque nous prenons dans une même spécification
(régression 2) ces trois indicateurs de libéralisation
financière, seul le crédit au secteur privé est
significatif. Ces résultats relèvent de deux constats :
Le premier implique que les détenteurs du pouvoir de la
politique économique des pays de l'UEMOA doivent agir sur les variables
Crédit au secteur privé en pourcentage de PIB et la Masse
monétaire en pourcentage du PIB, car elles constituent en
elles-mêmes une source de la croissance. En effet, il est important de
rappeler qu'il existe une surliquidité des banques dans l'UEMOA (Konan
Sylvère ,2001) due à la forte méfiance de ces
dernières envers les entreprises (en majorité des PME et PMI) de
la zone. Dès lors, la mise en oeuvre par les autorités d'une
véritable politique de soutien (fiscalités adaptées, fond
de garantie, formation) à ces entreprises, favoriserait l'acquisition de
crédit et permettrait d'influer positivement et fortement sur la
croissance. En outre, malgré l'avènement de la
libéralisation financière, il apparaît un oligopole dans le
secteur bancaire et financier, qui freine la concurrence et permet le maintien
à un niveau encore élevé les taux d'intérêt
débiteur, ce qui évidement accroit le cout d'acquisition du
crédit.
Alors que le deuxième aborde la question de
réformes et des conditions économiques et financière et
même institutionnelles qui favoriserait l'impact de la
libéralisation financière sur la croissance économique. Se
référant à quelques travaux théoriques et
empiriques antérieurs, la libéralisation financière exerce
un effet positif élevé et significatif sur la croissance
économique que sous un niveau de développement économique
initial assez élevé (Hamdi Kalfaoui, 2006). La variable
interactive (ILF*GDPI) qui paraît négative et significative dans
la majorité des estimations confirme bien ce constat. Dès lors,
la faiblesse de l'impact de la politique de libéralisation
financière dans l'UEMOA pourrait s'expliquer par le niveau de
développement faible des économies. De même pour la
variable (ILF*HUM) qui paraît négative et non significatif
(tableau 2-panel B régression 1,2 et 3) confirment certains travaux et
prouve que le niveau du capital humain est nécessaire comme une
condition inéluctable pour promouvoir la croissance économique.
Le tableau 3-panel C et D, prouve que l'impact de la
libéralisation financière, mesurée à partir des
indicateurs ``MM et CSP'' sur la croissance économique ne tient pas
compte de l'effet de l'inflation. En effet la variable interactive (ILF*INF)
qui se trouve positivement corrélée mais non significatif avec la
croissance économique dans l'ensemble des cas, stipule que l'inflation
au moment de la libéralisation financière n'handicape pas
l'efficacité de cette dernière sur le taux de croissance. L'effet
de la libéralisation financière sur la croissance
économique est d'autant plus grand que les pays maîtrisent bien
leurs taux d'inflation (en moyenne 3 à 4% dans l'UEMOA). En outre, si la
Libéralisation financière est mesurée par l'indicateur
``Investissement direct étranger en pourcentage du PIB'', d'après
le tableau 3 panel C, la libéralisation financière stimule la
croissance économique. Ce constat est confirmé par McKinnon
(1991) qui à trouvé que l'effet de l'ouverture financière
varie avec la stabilité macroéconomique.
Dans le tableau 2 (panel D), le signe positif de la variable
interactive (ILF*DB), qui domine presque toutes les régressions et qui
parait non significative, explique que l'effet de la libéralisation
financière sur la croissance économique n'agit que dans les pays
qui sont dotés d'un Déficit Budgétaire soutenable. En
effet, dans le cadre de l'intégration économique et
monétaire, les pays de l'UEMOA s'évertuent à respecter les
critères de convergence. L'un des critères exige le maintien des
déficits budgétaires à moins de 3%.
Quant aux résultats dans le tableau 2 (panel E), le
signe de la variable interactive (ILF*DET), parait positif et non significatif
lorsque l'indicateur de libéralisation financière est la masse
monétaire, positif et significatif lorsque l'indicateur est le
crédit au secteur privé mais négatif et significatif
lorsque l'indicateur est l'investissement direct étranger. En effet, un
endettement extérieur (DET) élevé semble rendre
négatif l'impact des IDE sur la croissance économique.
|