Le traitement de la loi etrangere en matiere de statut personnel( Télécharger le fichier original )par Chimene Chrystelle AKEUBANG YEFFOU Universite de Yaounde II SOA - Diplome d'Etudes Approfondies en Droit Prive 2005 |
A. L'APPLICATION D'UN DROIT PROCHE DU DROIT ÉTRANGER DÉFAILLANT120. La recherche d'un substitut à l'application du droit étranger a tout d'abord conduit à se tourner vers un droit proche du droit resté inconnu. Il s'agirait ici d'appliquer la législation d'un ordre juridique que l'on peut estimer voisin -du point de vu juridique- de ce droit. Certes, la solution ne sera pas en tout point conforme en celle qui résulterait de l'application du droit étranger théoriquement compétent ; mais on peut tout de même espérer que le recours à un droit proche peut permettre de s'en approcher le plus possible.319(*) Plusieurs objections ont pu être adressées à cette thèse. Mais la plus décisive a trait à la difficulté qu'il peut y avoir à déterminer à propos d'un ordre juridique donné, les ordres qui lui sont proches. La notion de proximité, a-t-on pu suggérer, serait particulièrement fuyante. Il est fort probable que « des ordres juridiques, pour proches qu'ils soient, diffèrent ne serait-ce que sur des points de détail ».320(*) Cela est d'autant plus évident que « l'on a même constaté que des interprétations divergentes ont pu être données à un même texte par des tribunaux de deux Etats, comme ce fût le cas pour les juridictions belges en ce qui concerne certains articles du Code civil français ».321(*) A la solution du recours à un droit proche, s'apparente une autre solution qui consiste à rechercher une loi à laquelle le litige pourrait être rattaché subsidiairement. B. LE RECOURS À DES RATTACHEMENTS SUBSIDIAIRES121. L'objectif ici est de rechercher si des rattachements subsidiaires peuvent être utilisés par le juge, ce qui pourrait être le cas si la situation entretient des liens avec un ou plusieurs Etats autres que celui dont la loi est restée inconnue. Cette solution est consacrée dans plusieurs législations. La loi de réforme du droit international privé italien du 31 mai 1995 s'est engagée dans cette voie. En effet, l'article 14 (2) de cette loi précise que : « Lorsque le juge ne parvient pas à établir la loi étrangère indiquée, même avec l'aide des parties, il applique la loi désignée par les autres critères de rattachement éventuellement prévus pour la même hypothèse normative. A défaut, la loi italienne s'applique ». Ce n'est donc qu'en l'absence de rattachements subsidiaires que le juge peut appliquer la loi italienne. L'article 23 (2) du Code civil portugais retient une orientation analogue en posant qu' « en cas d'impossibilité de connaître le contenu de la loi étrangère applicable, on aura recours à la loi qui est subsidiairement compétente (...) ».322(*) 122. En fait, la véritable difficulté à ce niveau semble être celle de savoir s'il convient de donner au juge, même en l'absence de directives législatives en ce sens, le pouvoir de rechercher un rattachement subsidiaire afin de remédier à la défaillance de la loi étrangère désignée par la règle de conflit. Selon M. MELIN, il serait excessif d'imposer au juge la recherche d'un rattachement subsidiaire dans tous les cas où la loi étrangère compétente resterait inconnue. Ce serait lui imposer une obligation relativement lourde.323(*) Cet auteur recommande par exemple de recourir à cette méthode particulièrement lorsque la règle de conflit prévoit des rattachements alternatifs.324(*) Dès lors, il serait normal pour le juge d'avoir égard au deuxième ou au troisième rattachement prévu lorsque la loi désignée par le premier rattachement retenu demeure inconnue. Il en serait également de même dans la matière du statut personnel où il est envisageable d'appliquer la loi du domicile à la place de la loi personnelle inconnue. Cette méthode serait encore transposable dans le domaine contractuel afin de faire jouer, lorsque la teneur de la loi choisie par les parties ne peut pas être établie, la loi présentant les liens les plus étroits avec le contrat.325(*) Le mérite de ces autres solutions à la défaillance du droit étranger compétent, réside dans le fait qu'elles ne négligent pas le caractère international des litiges. Malheureusement, elles ont un champ d'application assez restreint pour pouvoir remédier de manière générale aux difficultés engendrées par le défaut de connaissance des législations étrangères.326(*) * 319 v. en ce sens: SZASZY (S.), Private international law in socialist Countries, RCDIP 1964, I, 163, Spéc. p. 235. Cité par MELIN (F.), La connaissance de la loi étrangère par les juges du fond, Préc., p. 257, note 777. * 320 v. MELIN (F.), Préc., p. 258, n° 242. * 321 Ibid. * 322 Le texte est reproduit par la RCDIP 1968, p. 369. * 323 MELIN (F.), Op. Cit., p. 263, n° 248. * 324 Ibid. Comp. PICONE (P.), La teoria generale del diritto internazionale private nelle legge italiana di riforma delle materia , Rivista di diritto internazionale 1996, p. 289, Spéc. p. 345. Cité par MELIN (F.), La connaissance de la loi étrangère par les juges du fond, Préc., p. 263, note 804. * 325 Ibid. * 326 v. MELIN (F.), La connaissance de la loi étrangère par les juges du fond, Op. Cit., n°249. |
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