Troisième partie
III-Les types des rituels funéraires
II- Présentation des rituels funéraires
«endogènes» Dadjo
1°) Récit de vie Dadjo en 2006 de Oumar
yakoub
a°) Annonce du deuil
Fi bakane Dadjo,kane nadumum yudor yu mut da, kan
mara wala radjil,nass al yi khaburum da awal keda rudjal al
chuyab.
Fi lubba bed al mardan, zol al cahyib yi mariga
djama'à al dugag hatta yak chiffa al mardane.
Kan zol matt, al chaib yikalim lé rudjal,
hatta awin wa atfal. Iyal dugag yukalimum fadj à tann, aw yi khabirum be
istibal.khayifin le du'ufum.
Khabar hanna mott da, wakil bass yikalumum. Wakil da
zol ya riff yigalib be djuwad. zol da yamchi, yakhabira jama'à bel mott.
Alwakil ma'azun minnal kabiral khabila yikalima be filel aw be nahar hanna mott
le nass aw nass hannal khabila. Daw kalam al kalama: « kef kum
yass ! minina wahid bigui maffi » yi tardjumu be zol wahid
khalla dunia. Alwakil mahazun, ma yacharab almi wala yakhoud fi
Al akhbar yi kalumu be gangissinn ma be tulumm achann
yi tahrumu lil mayitt.
Al ahal yi lumu fi bed hanna
mayitt aw almayitta aw fi bedd hanna radjil aw fi bedd
hanna abbahattum, fi bakann abum aw fi bakkann khawalettum kann abum matt.
Khalass, almayitt yukhuttu fi usutt hannal bedd. Zubatt
yahassu lel mott.
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Chez les Dadjo, lorsqu'un des siens est sur le point de
mourir, selon que ce soit un homme, une femme ou un enfant, ceux qui sont
prioritairement alertés sont ceux qui ont un statut social plus
important, notamment les hommes les plus âgés.
Dans la pièce où se trouve le malade
agonisant, un vieil homme fait sortir les personnes moins âgées
avant de tenir tout propos sur le malade. En cas de décès, il ne
doit l'annoncer prioritairement qu'aux hommes d'abord, puis aux femmes et les
enfants les plus âgés. Les enfants les moins âgés ne
s'informent que passivement, c'est-à-dire par des bouts de blagues que
la nouvelle leur est véhiculée pour ne pas déstabiliser
leur équilibre moral jugé faible. L'annonce du deuil est une
préoccupation masculine, car l'annonceur du deuil ou
« wakil » en question est lui-même
un homme, de préférence un cavalier, chassant galoper à
cheval et pouvant frapper sur le tambour. Car il a pour mission de faire le
tour des villages environnants pour annoncer le décès. Le
cavalier, mandaté par le chef de village ou le chef de clan ou les chefs
de villages, doit aller, le jour ou la nuit même du décès,
porter la nouvelle aux familles ou aux membres du clan ou du lignage. Voici le
contenu
du message : « une personne
dénommée telle est
décédée.kef kum yass ! minina wahid
bigui maffi » qui se traduit littéralement
par :« quelqu'un d'entre vient de laisser la vie ».
L'annonceur, pour témoigner sa compassion, ne
devait ni boire l'eau qui lui serait donnée ce jour, ni s'asseoir sur
une jolie natte sur laquelle il était censé s'asseoir. Ses habits
devaient être des haillons qu'il ne portait jadis que pour des travaux
des champs ou des activités manuelles dures. Le message est livré
en position accroupie mais jamais en station débout pour des raisons de
la politesse aux morts, au décédé en particulier.
La famille réunit dans la case du défunt ou
de la défunte, au domicile marital et si c'est un€
célibataire, la rencontre se fait chez les parents, notamment chez le
père si est vivant ou chez les oncles si le géniteur est
mort.
Là, le corps est posé au milieu de la cour.
Quelques hommes jeunes hommes aux bras solides surveillent avec attention la
dépouille mortelle.
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Commentaire
L'annonce du deuil est une préoccupation masculine
parce que ce sont les hommes qui annoncent le deuil et non les femmes
jugées faibles et émotionnelles.
L'on note la position assise de l'annonceur et jamais
débout, ses habits en haillons qui sont les marques du respect aux
morts.
2°) Récit de vie Dadjo en 2006 de Mahadjir
Abdoulaye
b°) Enterrement
Kann al mayitt dah sininna chi ya, arba'à nass
yi daffinu : khawaleya wa wakilla al khabilla. Khabura yagutt fi bedd, fi
dungur hanna bedd. Maffi hizinn. Yi ghasumu ech hanna masar misil
sadakha.
Lakinn kan hu zol kabir, motta y iwaddu yi dafinu ba
itt minnal bedd.Al nass al yarfa'u dah, khawaleya, akhuwanna al
kubbar.
Al rudjal yankutu nugurra tawila wa yi da finu fogha.
Yi da khulu wa yi sudu be tine lel khabuur.
Ya goddu fi khubbur da, ahala lel mayitt. Yu khuttu be
tulla, idda wa ridjlenna yi rabitun fi hattab gawi. Fi idda, talata ghazaz
hanna
marise (condrong, cochatt, bilbil). Idda al zenna inda
harba achann yi daffi fogha.
Bechech bass, i suddu khabbur.
Yaghoddu fi khabbur, Yi sallu« Kan salok fi
Jama'a , gul fadal inti wahedak », yi tardjumu be « kan
rabbak sa'allak kalima ghul lo hu inti waheddak bass
fadal ».
Dah yi wasif wala Dadjo da irin yi ichu fi dar
ahallum.
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Si c'est le défunt est un enfant de bas âge,
il serait enterré à peine avec quatre personnes, notamment ses
oncles et un sage du clan. Sa tombe serait située dans la maison,
à l'angle de la cour. Trois de deuil sont annoncés. Il sera
distribué des boules appelées
« Ambolo » ou maïs aux enfants en
guise de sacrifice.
Mais s'il est adulte, il sera porté loin de son
domicile marital où il sera enterré. Les personnes qui porteront
le corps sont toujours ses oncles, ses frères notamment les plus
âgés.
Les hommes creusent une tombe longue en hauteur,
puis en largeur. Ils introduisent le corps posant dans une station
débout, bras et mains liés à une échelle en bois
pendante et drue. Sous ses bras, 3 bouteilles d'alcool indigène
(condrong, cochatt, bilbil). La main droite tient une
épée en signe de vaillance, de bravoure et de défense.
Ensuite, en silence, des petites boues d'agile serviront de couvercle à
la tombe.
Assis sur ou autour de la tombe, les membres du clan prient
en ses termes: « Kan salok fi Jama'a , gul fadal inti
wahedak », qui se reprend par «si une
divinité demande avec qui tu vis sur terre, tu lui dis que tu
était le dernier survivant ».
Ce message témoigne de la volonté des Dadjo de
rester plus longtemps en vie ou de la volonté de ne pas quitter la terre
de leurs ancêtres.
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Commentaire :
Le nombre des personnes qui enterrent varie en fonction de
l'âge, du statut ou de la biographie du mort. Il est restreint ou grand
selon que le défunt un bébé ou un héro. Ceci est le
même pour le lieu où se feront leurs tombes.
3°) Récit de vie Dadjo en 2006 de
Souleymane Bochi
C°) Déroulement du
deuil
Kann khallass dafanno, be achie, alwakil yaba
alkhabilla. Rudjal ya zurrughu hurrab fokh fi sahabb, ial wa awinn yu zuurughu
ghadda fokh, yistazonoh didd rabuhum achann challa naduumum.
mara Khabila, adjussai ti zayina wa ti wadiha fi bahr
ya khasulu djisimha. Kann kaballo fill bedd, almarra tin khazinn fi bedd hanna
radjilla
lakinn ma ti mas'si walla ti barrid wa takul akil
dughakk. Khabila tib tadih bil naharr lakinn ba'add aldifa'ne hannal mott. Kann
khalass daffano, alwakil, yaftah alkhabilla gidam al djaamma'à. Huy u
ghull : « khabila badatt » yi tardjim be yomal hizzin
tama'à.
Yi da i wa da'à deine djama'à kuluhum yi
da'u'. rujal yi zurghu hurab fi fokh, atfal wa awinn yi zurghu ghada fi fokh yi
wasifu za'àlum achann rabum challah nadumum. Al mara khabila, khalitta
ti zayinuha
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Une fois le corps enterré, le soir, le
wakil ou déclare deuil: Khabila. Les
hommes lancent des épées en direction du ciel, les enfants et les
femmes des calebasses en l'air, exprimant leur mécontement contre la
divinité qui aurait tué leur sien. La femme endeuillée,
mara Khabila, est rasée par une sage, sa tante, et
conduite à une rivière où elle sera lavée tout le
corps. De retour à la pièce où elle vit, elle sera
enfermée dans la pièce de son mari où elle ne devait pas
se oindre ni se laver mais elle ne mangerait que des petites
nourritures.
La manifestation du deuil se déroule le matin mais
au lendemain de l'enterrement de la dépouille macabre. Une fois, le
corps enterré, le wakil, déclare le deuil devant
une assistance composée des hommes dans la cour de la maison. Il
dit : « khabila badatt » qui se
traduit par le jour du deuil est arrivé ».
Il récite une sentence, puis l'assistance reprend
en choeur. Les hommes lancent des épées en l'air, les enfants et
les femmes des calebasses dans le ciel, exprimant ainsi leur avoir tuer leur
sien. La femme endeuillée, « mara khabila »,
est rasée par une sage femme, sa tante en
général, dans le dortoir de son mari en son vivant. Ensuite, elle
restera enfermée dans la pièce où elle ne devait ni
s'oindre, ni se laver, même pour manger, elle doit suivre un
régime alimentaire bien spécifique: bouillie de maïs ou de
mil, sur une assiette à moitié pleine. Car, les Dadjo pensent que
si elle mange à satiété, elle oubliera son mari. Raison
pour laquelle elle doit suivre cette pénitence durant douze lunes.
Dans la pièce, elle dort sur une vieille natte,
à même le sol, sur une position gauche mais jamais sur la droite,
car les esprits gêneraient son sommeil par des cauchemars
récurrents. Il lui est interdit d'avoir des rapports sexuels durant ces
douze lunes.
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Commentaire : Les
épées et les calebasses symbolisent la tristesse. C'est une
manifestation matinale, collective et répondant aux règles de la
société: un régime alimentaire bien spécifique, une
pénitence sexuelle de douze lunes et quelques règles
drastiques : ne pas s'oindre, se laver ou manger à
satiété.
4°) Récit de vie Dadjo en 2006 de Bochi
seid
d°) Les habits de deuil
khul gane hana mott zurug Khassatane hana awine. Kafom
KhalaKh da yamane le ridjleine num. Inda surwal yadji fi ruKbatum. Kulu Ke
nafara azaK. Azarag da yi wassif Ke nass da haznanine. Rudjal Khulganume hana
zare.
Iyal da ma lamam fi labissine hana Khulgane.LaKine ga
adine wasKhanine fi ymal mott.
Khulgane djudad, suKsuK wa dahab Kulu mamnu.
`
Nadoum Khulgana djadid nass yuchufu be eynal
Khadab.
Lubass nafar da nass yuchufu misil farha, wa da ma
adil wata hana zine.
Nass al yadju yiKalwudu lehum humma Kulu Khulganum
adil.
Awine, indum Khalla, laham, mile, dihine, jar hana
almi, dagid. Muchattum yi fartugu. Ma yu subu dihine fi djilidum. Yi barudu
bas.
choKolum talata yom bas, awine yadju be Khulgane hana
badiline.
Awine yalbaso Khulgane gudam aw wasKhanine.
Awine hana mayitt yabaso Khulgane djuddad.
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Les habits de deuil sont noirs notamment pour les femmes.
Ils sont composés essentiellement d'une longue robe taillée
jusqu'aux talons et une culotte sautant en dessous de genoux, tous deux de
couleur noire. Ces couleurs témoignent la tristesse, la compassion et la
douleur. Les hommes sont en haillon ou habits de travaux champêtres. Les
enfants quant à eux sont littéralement laissés de
côté c'est à dire qu'ils ne sont pas concernés par
le port des habits de deuil quoiqu'ils soient tout sales durant le deuil.
En outre, Les habits neufs tout comme le port de perles,
de l'or ou les porcelains sont défendus. Un homme portant des habits
très proper serait mal vu par la communauté. Un tel port d'habit
neuf est une expression de fierté vivement reprimée durant de
deuil qui est cencé être le moment de compassion et de tristesse.
Les visiteurs sont décemment habillés, les femmes, avec des mils,
des viandes, du sel, d'huile, des jarres d'eau ou de la farine de sorgho. Les
tresses doivent être défaite pour témoigner leur
condoléances. Elles ne doivent pas s'oindre. Se laver est la chose seule
chose qu'elles peuvent se permettre. Etant donné leur séjour de
trois jours, les femmes des villages avoisinants ne doivent pas emporter avec
elles des habits d'échange.
Les femmes qui viennent se consterner doivent s'habiller
en haillons, des habits en général sales ou usés; seules
ses coépouses du défunt portent des habits neufs, nouvellement
cousus à la main et brodée à d'une aiguille artisanale ou
rarement portés parce que propres. Elles déposent des cauris ou
pièce d'argent en s'agenouillant devant la veuve c'est-à-dire
accroupi en génuflexion. Ensuite, elles pleurent en déversant des
grosses outre provoquées pour témoigner leur compassion ou leur
solidarité.
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Commentaire : Le deuil
est caractérisé par le port des habits noirs,
témoignant la douleur et la tristesse. Entouré des interdits
comme le port des objets autour ou avec de cet habit particulier, ces objets
quelque soit leur symbole, sont vivement réprimés car ils
exprimeraient la joie qui est contraire aux moeurs du deuil chez les Dadjo.
Cette interdiction est tout à la fois valable aux visiteurs qu'aux
familles nucléaires du défunt.
5°) Récit de vie Dadjo en 2006 de Moumine
Absakine
e°) Fin des rituels
funéraires
Hizine yamurgu be fadjur ale saba. Marra al mahzuna da tamchi
ti ganguiz fi habur. Tukhutta duwane wahid fi habur ti gabila ale munchakh.
Bakane yi wasif bakane hana rabuhum ga it foga wa alga sadakha
dolda. Sadakha yi wasif ke marra kabalatta le gurus hana fatiha. Mihini le
gidam da, marra takdar takhuda nadum alhi tudora kan akhu sakheyir le mayit
maffi.Aw nadum alhi tu dora bas.
Kan wasalo bet, mara alradjila matt ti gasima laham du gak
hana kanam wa ech hana khalla le ial dugak aw le nas kubar alma induhum gurus
mara wahid.
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Le retrait de deuil se fait le matin de bonne heure comme
c'était le cas pour le début de deuil. La femme endeuillée
ira à nouveau s'agenouiller sur la tombe. Elle dépose un canari
sur la tombe dans une orientation jugée « nord ».
Cette orientation signifie le lieu où est localisé la
divinité sensée recevoir ce cadeau: symbolisant la restitution
des biens matrimoniaux au mari. En d'autres termes, il annonce la fin du
mariage. Elle est désormais libre de se marier à qui elle veut si
le mari décédé n'a pas de frère pouvant le
succédé ou selon que le destin le décide.
De retour à la maison, la veuve distribue des
morceaux de viande de mouton et de la boule de mil ou de sorgho aux enfants ou
des adultes plus démunis.
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Commentaire : Ce retrait du deuil
est matinal. Une offrande, généralement un canari et rarement des
morceaux de viande aux jeunes enfants, est adressée aux morts et
marquant la fin du mariage au cas le ou la décédé(e)
était en situation matrimoniale mariée.
6°) Récit de vie Dadjo en 2006 de Arabi
Absakine
f°) interdits funéraires
Marra al radjila matt ma tardud ma'a radjil naman arba in
yôm hana hizin yi kamil gabul. Kan hibas ragadad ma'a
nadum da, hakuma hana islam yuduguha arba in sot lakin ma fi widjiha. Imam aw
nadum yakhadim fi djami ye bas yu dugaha.
Kan khalass da, tibarit be almi achan tumurga waskh hana
djilidaha.
Kan khalass, battan tabada arba in yôm hizine min
bidaî ta.
Mam nu' le marra tabki le radjila kan matt fi din hana islam
achan dumu da wibadil yabga nar le mayit fi khiyama wa ta iba le mayit.
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Il est interdit à la veuve d'avoir des rapports
sexuels avec un homme durant les quarante jours de deuil. Si elle enfreint
cette loi, elle sera frappée cent coups au dos mais pas au visage ni au
sein par l'Imam de la mosquée ou un haut fonctionnaire de la
mosquée. Ensuite, elle se lavera à nouveau pour purifier son
corps de souillure et des impuretés. Une fois ce rituel accompli, elle
se resocialise avec le deuil en recommençant les quarante jours
dès leur début.
Il est interdit à la femme de pleurer la mort de son
mari car les larmes versées lors des pleurs dans la vie serviront de
« feu » qui attiserait le corps du mari dans
l'au-delà.
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Commentaire : Outre l'interdit
sexuel châtié par des coups de fouet, on note aussi les
interdictions des pleurs considérées comme des marées des
larves susceptibles d'atteindre le mort dans la tombe,c'est-à-dire l'au
delà.
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