2- Mesure de la performance dans les PME.
Depuis la rupture avec le modèle Taylorien des
organisations, le concept performance défini plus haut, a changé
de nature. Elle a été pendant longtemps réduit à sa
seule dimension financière (dimension unidimensionnelle).
Aujourd'hui, avec les changements organisationnels
multiples, la performance doit être entendue dans une acceptation large,
appréhendée à sa dimension financière et
opérationnelle (dimension multiple). La performance dans son sens
global, s'entend comme le degré de réalisation des objectifs dans
une entreprise. Dans cette logique, elle permet d'avoir une vision d'ensemble
dans une approche multiple. Or dans une entreprise, les objectifs sont
multiples et parfois contradictoires si bien qu'il serait illusoire de vouloir
évaluer la performance de l'entreprise de manière uniforme en se
basant sur un seul critère. Elle nécessite des mesures
d'appréciations pertinentes et suffisamment élaborées, qui
tiennent compte d'un ou plusieurs critères. De ce point de vue, la
performance elle-même sera perçue comme un objectif à
atteindre. Dans cette logique, E.M.Morin (1994) recense quatre grandes
approches théoriques de performance : une approche
économique, une approche sociale, une approche systémique et une
approche politique. Le regard porté sur la performance guide les
préconisations en matière de mesure de la performance.
2.1- les approches économiques et sociales de
la performance.
· L'approche économique.
Elle repose sur la notion centrale des objectifs à
atteindre. Ces derniers traduisent les attentes des propriétaires
dirigeants, ils sont souvent énoncés en termes économiques
et financiers. L'illustration de cette approche est reflétée dans
la récente étude de J. Caby (1996) qui souligne les prolongements
stratégiques d'une telle conception. Pour eux, la création de
valeur passée ou anticipée se fonde sur une croissance de
l'activité, soit sur une politique de dividendes raisonnées en
fonction des investissements futurs encore, sur une préférence
pour les financements externes. La performance s'apprécie à
travers la rentabilité économique. Celle-ci a pour but de mesurer
l'efficacité de l'ensemble des capitaux utilisés,
l'évolution des ventes c'est -à -dire de juger de la
capacité de l'entreprise à réaliser un
bénéfice.
· L'approche sociale de la performance.
L'approche sociale de la performance découle des
apports de l'école des relations humaines qui mettent l'accent sur les
dimensions humaines de l'organisation. R. E. Quinn et J. Rohrbaugh (1981)
indiquent que cette approche ne néglige pas les autres aspects de la
performance mais intègre les activités nécessaires au
maintien de l'organisation. Pour cette raison, le point central devient la
morale et la cohésion au sein de l'entité
considérée. Cette conception est défendue par B.M. Bass
qui, dès 1952, enjoint de considérer comme ultime critère
de valeur organisationnelle, celle des hommes. Néanmoins l'acceptation
de cette hypothèse dépend du postula suivant : atteindre les
objectifs sociaux permet d'atteindre les objectifs économiques et
financiers.
2.2- Les approches systémique et politique de
la performance.
· L'approche systémique.
L'approche systémique est développée par
opposition aux approches précédentes, comme étant trop
partielles. Elle met en exergue les capacités de l'organisation :
« l'efficacité organisationnelle est le degré auquel
une organisation, en tant que système social dispose de ressources et
moyens, remplit les objectifs sans obérer ses moyens et ressources et
sans mettre une pression indue sur ses membres.» (B.S.Georgopoulous,
A.S.Tannenbaum1957, p.535)
· L'approche politique de la performance.
La dernière approche qualifiée de politique par
E.M.Morin repose sur une critique des précédentes. En effet,
chacune des trois approches précédentes assigne certaines
fonctions et certains buts à l'entreprise ; or tout individu peut
avoir ses propres critères pour juger la performance d'une organisation.
2.3- Les principaux indicateurs de la
performance.
Morin et alii (1994) proposent aussi une instrumentation de
leurs concepts qui vise à donner à la mesure de performance une
certaine crédibilité. Les difficultés
d'opérationnalisation sont nombreuses, le concept est dimensionnel.
Pourtant des indicateurs de performance plus riches peuvent être
développés.
Ils retiennent quatre critères de mesure de la
performance organisationnelle. Il s'agit de la pérennité
représentée par la qualité du produit / service,
rentabilité financière et compétitivité ;
l'efficience économique mesurée par l'économie des
ressources et la productivité ; la valeur des ressources humaines,
avec comme indicateur la mobilisation, le développement personnel, le
rendement et le climat social ; et enfin, la légitimité de
l'organisation auprès des groupes externes qui se matérialise par
la satisfaction des bailleurs de fonds, de la clientèle, des organismes
régulateurs et de la communauté.
De nos jours, il existe de multiples indicateurs pour mesurer
la performance. L'approche dominante de la performance financière est
celle de la valeur actionnariale dont les fondements sont les suivants. Si on
suppose que les marchés sont concurrentiels et efficients
informationnellement, que les dirigeants sont les agents fidèles des
actionnaires, que ces derniers sont les seuls créanciers
résiduels, alors, il y a confusion entre la maximisation de la richesse
des actionnaires et l'efficacité allocative globale. Ces
hypothèses n'étant pas respectées, en particulier, en
raison des externalités, la mesure de la performance à partir de
la seule richesse des actionnaires est contestable. La difficulté
d'évaluer la création de valeur, pour les PME non cotées,
oblige à recourir à des mesures comptables ne représentant
au mieux que des approximations grossières de la performance. Dans cette
logique, le seul indicateur qui soit fondé, en tant qu'approximation
comptable, est le taux de rentabilité des capitaux propres
(Résultat net / capitaux propres).
L'inconvénient de ce dernier est d'être
très sensible aux manipulations comptables, ce qui conduit à
préférer des indicateurs du type : Résultat courant
/capitaux, qui ont l'avantage d'éliminer l'incidence des
éléments exceptionnels. Mieux encore, on peut lui substituer des
indicateurs de rentabilité économique du type :
résultat économique / (capitaux propres + dettes
financières), qui permettent de mesurer la rentabilité obtenue de
l'ensemble des capitaux investis.
D'autres études ont recours à une batterie de
ratios dont la plupart ne constitue pas des ratios de rentabilité
stricto sensu. Ainsi Charreaux (2000) utilise en dehors de ratios de
rentabilité, des ratios d' activité, des ratios de marge (ou de
profitabilité), tel que le résultat net / ventes ou de
productivité comme : ventes / effectif ou résultat net /
effectif voire des ratios représentant l'effort d'investissement,
l'équilibre financier. Ces derniers sont utilisés à titre
complémentaire. Ils seront plutôt utilisés comme variables
explicatives de la formation ou de l'évolution de la performance.
Par ailleurs, Churchill (1979) a proposé dans le cadre
de la mesure de la performance, une démarche méthodologique,
connue sous le nom de paradigme de Churchill, visant à mobiliser les
connaissances concernant la théorie de la mesure ainsi que les
techniques appropriées pour améliorer dans une procédure
systématique. Ce paradigme sous-tend la démarche de Spriggs
(1994). Ainsi les travaux de spriggs et de Kumar proposent des outils de
mesure pour évaluer les différentes facettes de la performance
identifiée. Leur démarche méthodologie consiste à
la construction de questionnaire et à l'analyse de données
déclaratives recueillies par ce moyen. Les outils proposés visent
à mesurer les différentes facettes de la performance difficile
à appréhender et non observable au moyen d'un simple
questionnaire.
Toutefois, lorsque les indicateurs de la performance sont
directement observables, l'instrument de mesure proposé plus haut
entraîne des biais considérables. C'est la raison pour laquelle
la productivité occupe une place centrale dans l'évaluation de la
performance. Parsons (1994) dresse un excellent panorama des différentes
mesures de productivité. Cette réflexion sur les indicateurs de
productivité peut sembler restrictive mais les indicateurs les plus
perfectionnés peuvent offrir une vision globale de la performance
organisationnelle, une vision élargie de la productivité. Ces
outils sont développés en interne et visent à
l'évaluation des hommes.
La mesure de la performance peut faire appel à
plusieurs indicateurs se rattachant aux objectifs stratégiques des
entreprises (Kaplan et Norton, 1992).
Dans le cas des études antérieures portant sur
les impacts des pratiques de GRH sur la performance des entreprises, les
chercheurs ont retenu différents indicateurs reliés tantôt
de près (interne), tantôt de loin (externe), aux activités
de cette fonction. Les études de Liouville et Bayad (1995) ont permis de
regrouper les indicateurs selon qu'ils sont internes (performance sociale),
intermédiaires (performance organisationnelle) ou externes (performance
économique). La satisfaction, l'absentéisme et le taux de
roulement des employés sont des indicateurs internes (performance
sociale) retenus lors des études antérieures mettant en relation
les pratiques de GRH et la performance des entreprises. ( Liouville
et Bayad, 1995). La productivité, la flexibilité, l'innovation et
la satisfaction des clients sont des indicateurs intermédiaires
utilisés pour mesurer la performance organisationnelle ( Way,
2002 ). Enfin, le taux de rendement de l'actif, le taux de rendement des
fonds propres et le prix des actions se rangent parmi les indicateurs externes
servant à mesurer la performance économique.
|