3.2.3. Travail des enfants et
scolarité
On examine dans un premier temps l'appréhension du
travail des enfants en relation avec la fréquentation d'un
établissement scolaire et par la suite celle avec le rendement
scolaire.
3.2.3.1
Fréquentation scolaire
Selon que les enfants fréquentent ou travaillent, on
peut regrouper en quatre catégories mutuellement exclusives :
· enfants travaillant uniquement ;
· enfants étudiant uniquement ;
· enfants travaillant et étudiant ;
· enfants ne travaillant point, ni étudiant.
Le tableau 6 met en évidence la relation entre le
travail des enfants et la scolarisation au Cameroun.
Force est de constater qu'au Cameroun, la
simultanéité de la fréquentation scolaire et du travail
des enfants âgés de 5 à 14 ans est assez forte, environ
34,2 %. Sur l'ensemble des enfants combinant école et travail, on note
une prépondérance des garçons : 35,2 % contre 33,3 %
de filles, ainsi que du secteur rural (35,7 % contre 32,2 % dans le secteur
urbain). On qualifie ces enfants combinant l'école et le travail
d'enfants bi-actifs. Cependant, la proportion d'enfants qui apparaissent
inactifs, c'est-à-dire ne travaillent ni ne fréquentent est non
négligeable (14,3 %). Ces enfants sans activité sont parfois plus
désavantagés que ceux qui travaillent, car ne
bénéficiant ni de la scolarisation ni de l'apprentissage acquis
dans la pratique qu'offrent certaines formes de travail. Une fille sur six est
dans cette situation au Cameroun. Dans ce groupe, ce sont les enfants vivant en
milieu rural qui s'y trouvent le plus (19,1 % contre 7,6 % en milieu urbain).
La majorité d'enfants qui ont pour seule activité le travail sont
des filles et vivent en milieu rural. Toutefois, la plupart des enfants qui ont
l'école comme unique occupation sont des garçons, qui vivent par
ailleurs en milieu urbain. Le phénomène d'« enfant
inactif » est particulièrement marqué dans le
septentrion. Ainsi, 36,3 % d'enfants sont des inactifs dans l'Extrême
Nord, contre respectivement 34 % et 26,7 % pour le Nord et l'Adamaoua.
De l'examen des données collectées, il ressort
du tableau 7 que, globalement 4 enfants sur 5 sont scolarisés. Au
Cameroun comme dans d'autres pays, le système scolaire est marqué
par des disparités sensibles selon le sexe et le milieu de
résidence. Ainsi, le taux de scolarisation est nettement plus
élevé chez les garçons que chez les filles, soit de 81,6 %
pour les garçons contre 76,6 % chez les filles. Il est également
bien connu que les enfants qui résident en milieu urbain ont plus de
chances que ceux du milieu rural de fréquenter une école. Au
Cameroun, le taux de scolarisation des enfants de 5-14 ans en milieu urbain est
de 89,1 %, contre 71,8 % pour le milieu rural ; c'est dire que les enfants
qui habitent en milieu rural ont 17,3 % de chances en moins que leurs
congénères du milieu urbain d'aller à l'école. On
note également de fortes disparités entre les dix provinces que
comptent les pays. Les régions septentrionales totalisent les taux de
scolarisation les plus bas. Ils sont de 50,8 % pour l'Extrême Nord, 50,4
% pour le Nord, et 61 % pour l'Adamaoua.
3.2.3.2. Rendement
scolaire
Fort logiquement, la durée moyenne de travail des
enfants est tributaire de leur statut d'activité. En effet, le tableau 8
montre que le temps de travail moyen des enfants ayant pour seule
activité le travail est nettement supérieur à celui des
enfants bi-actifs. Une observation identique est faite indépendamment du
sexe. On note aussi que les enfants issus de ménages très pauvres
travaillent en moyenne un peu plus que ceux issus des ménages non
pauvres. Nous avons mentionné précédemment que les filles
qui ont pour seule activité le travail sont majoritaires. Ceci
étant, elles travaillent en moyenne plus que les garçons de cette
catégorie. Les enfants résidant en milieu rural travaillent en
moyenne plus que ceux des villes quelque soit le sexe. Les enfants ayant pour
seule activité l'école et ceux combinant l'école et le
travail vont à l'école en moyenne près de 4 jours sur 5.
Ce constat est le même quelque soit le genre, le milieu et le niveau de
vie du ménage. Ainsi, on peut penser qu'en fait les enfants bi-actifs
travaillent après l'école.
L'année scolaire 2004-2005 a été
marquée par un succès pour 74,7 % des enfants âgés
de 5 à 14 ans. Comme le montre le tableau 9, ce succès est plus
marquant chez les filles que chez les garçons, soit de 76 % pour les
filles contre 73,4 % chez les garçons et . En revanche, qu'il s'agisse
du milieu urbain ou du milieu rural, le taux de réussite est
équivalent avec une légère différence en zone
rurale. Dans certaines régions (Douala, Adamaoua) les taux de
réussite des garçons sont plus importants que ceux des filles.
Les enfants issus des ménages très riches semblent avoir plus de
chances de réussir que leurs semblables des autres couches. Les
données présentées dans le tableau 9 illustre deux autres
constats. Primo, les enfants de la tranche d'âge 10-14 ans
réussissent plus les enfants âgés de 5 à 9 ans.
Secundo, les provinces du septentrion (Adamaoua, Nord) enregistrent les taux de
réussite les plus élevés.Ce constat doit être
relativisé, puisqu'ils enregistrent aussi les taux de scolarisation les
plus faibles. En fait, le peu d'enfants qui y fréquentent fournissent
des résultats académiques assez satisfaisants.
En ce qui concerne le statut d'occupation des enfants, la
figure 9 nous montre que les enfants bi-actifs négocient facilement leur
passage en classe supérieure comparativement aux enfants n'ayant d'autre
activité que l'école. Ainsi, malgré le fait qu'ils
combinent école et travail, les enfants bi-actifs sont presque
réguliers à l'école et comptabilisent un taux de
réussite supérieur à celui des enfants se consacrant
exclusivement à l'école.
Figure 9 : Pourcentage de réussite
des enfants de 5-14 ans
selon le statut d'occupation - Cameroun 2005
Source : MICS 2006.
La figure 10 laisse apparaître que les enfants
conjuguant école et travail réussissent plus dans le secteur
rural que dans le secteur urbain. Tandis que ceux ne faisant que l'école
réussissent plus dans les villes que dans les villages et campagnes.
Ainsi, les enfants travailleurs des zones rurales ont une bonne capacité
à pouvoir concilier le travail et l'école comparativement
à ceux des zones urbaines.
Figure 10 : Pourcentage de
réussite des enfants de 5-14 ans selon le milieu et par statut
d'occupation - Cameroun 2005
Source : MICS 2006.
Quelque soit le statut d'occupation de l'enfant, la figure 11
montre que les filles ont un taux de réussite supérieur à
celui des garçons. Les figures 12 et 13 récapitulent les taux de
scolarisation, d'activité et de réussite dans les
différentes provinces du Cameroun. On peut constater que les provinces
du Nord Ouest, Ouest et Littoral et du Sud ont des taux de scolarisation et
d'activités des enfants très proches. Par ailleurs, les provinces
du Nord Ouest, sud Ouest et Littoral ont des taux de réussite et
d'activités des enfants très proches.
Figure 11 : Pourcentage de réussite
des enfants de 5-14 ans selon le sexe et par statut d'occupation - Cameroun
2005
Source : MICS 2006.
Figure 12 : Schéma comparatif du
travail des enfants et de la scolarisation dans les dix provinces du Cameroun
EXTREME NORD
NORD
NORD OUEST
ADAMAOUA
SUD OUEST
OUEST
CENTRE
LITTORAL
EST
SUD
Source : MICS 2006.
Figure 13 : Schéma comparatif du
travail des enfants et du rendement scolaire dans les dix provinces du Cameroun
en 2006
EXTREME NORD
NORD
NORD OUEST
ADAMAOUA
OUEST
SUD OUEST
CENTRE
LITTORAL
EST
SUD
Source : MICS 2006.
Le phénomène d'« enfant
travailleur » est une réalité au Cameroun. Son ampleur,
telle que révélée par les données, fait de celui-ci
un problème sérieux. Les résultats préliminaires
obtenus dans ce chapitre nous ont permis d'explorer le travail des enfants et
nous incitent à mieux appréhender l'impact du travail des enfants
sur le rendement scolaire. C'est l'objectif que nous poursuivons dans le
chapitre suivant.
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