La lutte contre la pauvreté en Afrique sub-saharienne à travers l'amélioration du marché du travail et la contribution au développement de l'emploi des jeunes.( Télécharger le fichier original )par Gaelle CAYAU Université Montpellier 3 Paul Valéry - MASTER 1 Institution-Organisation-Développement Gestion Stratégique des Ressources Humaines 2008 |
CHAPITRE 2 : La responsabilité de l'éducation à l'égard de l'offre d'emploi pour les jeunes africainsEn guise d'introduction, rappelons que la main-d'oeuvre jeune en Afrique sub-saharienne est celle qui augmente le plus dans le monde. Il est donc admis de dire que beaucoup de jeunes sont obligés de trouver des emplois précaires dans le secteur informel et dans le secteur agricole pour survivre, ces jeunes ont perdent jour après jour toute confiance en eux. L'éducation est un droit humain fondamental, proclamé par tous les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme. « L'éducation pour tous est importante et ce pour trois raisons. Un, l'éducation est un droit. Deux, l'éducation accroît la liberté individuelle. Trois, l'éducation apporte une contribution formidable au développement54(*). » (John Daniel) L'école est un lieu d'enseignement des valeurs, on y acquiert l'épanouissement individuel et collectif, c'est également le lieu de construction de la démocratie. La démocratie ne pouvant pas ainsi être envisagée dans un monde d'analphabètes. Selon le rapport mondial sur la jeunesse de 2007, il y a de grands progrès qui ont été réalisé en matière d'éducation en Afrique sub-saharienne. En effet, le taux brut de l'école primaire est passé de 57% en 1999 à 70% en 200555(*). Néanmoins, certains affirment qu'il faut utiliser ces chiffres avec prudence car ceux-ci sont souvent manipulés par les chefs d'Etats contre de l'argent. La situation actuelle, montre que le taux de scolarisation n'est pas pleinement atteint. Est-ce parce que les gouvernements africains n'ont pas fait de l'éducation leur priorité et donc n'ont pas mis à disposition les moyens matériels et financiers permettant aux jeunes d'accéder à la connaissance ? Est-ce parce que les systèmes éducatifs en Afrique sub-saharienne ne sont pas au coeur des stratégies de développement ? L'accès à l'éducation est donc toujours un sérieux problème pour de nombreux jeunes qui demeurent dans la pauvreté. Les principaux enjeux mettent l'accent sur le fait que l'Afrique doit pouvoir compter avant tout sur elle (sur ses ressources) pour son propre avenir. En effet, elle seule peut définir correctement ses stratégies. Pour cela, la société africaine doit pouvoir savoir lire et écrire. Développer l'employabilité des jeunes est crucial pour leur donner une chance d'accéder à un emploi et une carrière professionnelle viable et ainsi leur permettre d'assurer une place de premier choix sur le marché du travail. Autrement dit, les défis à mettre en place en vue d'améliorer la situation des jeunes en termes d'emploi sont de mettre en oeuvre simultanément les politiques d'éducation et celles du marché du travail en adéquation. Néanmoins, de nombreuses questions restent en suspend : les jeunes sortis du système scolaire trouvent ils un emploi ? Les enseignements dispensés sont ils cohérents avec les compétences que devront requérir les jeunes pour se procurer un emploi ? Dans une première partie nous nous intéresserons aux politiques éducatives de l'Afrique sub-saharienne. On s'interrogera sur la qualité de l'enseignement, sur les facteurs d'amélioration de la qualité, savoir quels ont été les changements particuliers depuis la décolonisation. Il conviendra également de voir comment se caractérise globalement le système scolaire. En effet, si l'éducation est nécessaire pour tous, on peut constater entre autre que tous les individus n'y ont pas facilement accès, notamment les filles qui dès leur plus jeune âge sont confrontées à des inégalités d'accès à l'éducation. Enfin dans une seconde partie, nous verrons que l'école est certes une chance pour tous de performance et d'amélioration des connaissances mais qu'aujourd'hui concernant les problèmes d'obtention d'un emploi fixe et convenable, les enjeux à surmonter sont beaucoup plus profonds. En effet, les problèmes relevés dans certains pays comme la France en matière d'emploi des jeunes indiquent qu'un étudiant sorti du système universitaire, acquiert un niveau d'instruction satisfaisant, mais parfois il rencontre des difficultés à être rémunéré à hauteur de ses qualifications. Le niveau général de l'instruction n'est il pas une cause du chômage des jeunes ? Dans le cas de l'Afrique sub-saharienne, il ya a trop souvent des problèmes rencontrés lors du passage de l'école à la vie active. En effet, les jeunes n'ont pas le plus souvent les connaissances, les compétences nécessaires pour trouver l'emploi qu'il désire effectuer. Un autre problème qui souligne cette inadéquation entre l'école et la vie professionnelle est le rôle que joue la femme africaine dans la société. Ainsi, aujourd'hui, il y a un profond décalage entre l'éducation de la fille, l'emploi réservé à la femme, la pauvreté et les actions réellement menées pour que tout cela change. Il s'avère donc important de redéfinir la place des femmes africaines. I : Caractéristiques des politiques éducatives et système d'instructionLes enfants qui ne vont pas à l'école, sont ceux dont les parents sont pauvres. Il faut mettre en place les systèmes d'éducation avec cohésion. Les communautés internationales se sont données comme priorité en 1990, lors de la Conférence mondiale de l'éducation pour tous, de promouvoir au niveau universel, l'éducation pour tous (EPT)56(*). Depuis cette conférence, des efforts considérables ont été faits et les systèmes éducatifs ont connu une augmentation des effectifs. « Le taux net total de scolarisation dans le primaire dans les régions en développement a atteint 88% au cours de l'année scolaire 2004/2005, alors qu'il n'était que de 80 % en 1990/199157(*) ». Le programme des Nations Unies pour le développement, réaffirme que les pays pauvres se sont engagés à travers les Objectifs du Millénaire pour le Développement58(*), à investir dans leur population à travers dans de nombreux domaines, notamment celui de l'éducation. L'enseignement à l'époque coloniale était dispensé à une minorité d'africain et devait être adapté aux objectifs et aux besoins des métropoles coloniales. L'éducation relevait des fonctions des missionnaires dont le rôle consistait à créer des écoles dans le milieu rural. La scolarité reposait sur l'enseignement du catéchisme, la lecture et le calcul, mais également des connaissances pratiques telles que la menuiserie ou encore la maçonnerie59(*). Cependant, les mauvais cotés de l'éducation à cette période ont montré que les colonisateurs voulaient imposer leur culture et ont de ce fait, marginalisé les valeurs traditionnelles. Aujourd'hui de nouvelles orientations essaient de gommer ces injustices restées dans l'ombre pendant cette période, en réaffirmant le rôle que joue la culture au sein de l'éducation.
En 2000, l'Afrique sub-saharienne a été la région du monde où le taux de scolarisation est resté le plus faible et là où il y a le plus d'enfants non scolarisés. L'UNESCO a dégagé un certain nombre de principes directeurs pour l'éducation interculturelle sur lesquels les organisations et gouvernements doivent s'appuyer pour améliorer les politiques éducatives. Il s'agit entre autre de trois principes élaborés pour donner des consignes et directives sur la bonne mise en oeuvre du processus d'éducation. Le premier principe repose sur le respect de l'identité culturelle de l'apprenant en dispensant pour tous un enseignement de qualité culturellement approprié et adapté. Le second englobe le fait que l'apprenant doit disposer des connaissances, des attitudes, et compétences culturelles nécessaires pour qu'il puisse participer activement et pleinement à la vie de la société. Enfin, le dernier principe concerne le fait que l'éducation interculturelle doit dispenser à tous les apprenants les connaissances, attitudes et compétences qui leur permettront de contribuer au respect, à la compréhension et à la solidarité entre individus, groupes ethniques, sociaux, culturels et religieux et nations60(*). Ainsi, de nombreux progrès restent à faire quant à l'aménagement des systèmes éducatifs et dans notre première section, nous verrons la qualité des contenus d'enseignement dispensés aux jeunes. Les conditions dans lesquelles s'effectuent les cours sont loin de répondre aux exigences fixées. Il a de grandes différences en matière d'éducation au niveau quantitatif et surtout au niveau qualitatif. Dans une seconde section, il s'agira de voir que l'accès à l'éducation est très inégal entre les filles et les garçons, qu'il existe encore d'énormes disparités. La destinée est plus compromise chez les filles car elles n'ont pas les statuts qui font d'elles des êtres de droit au même titre que les garçons, on préfère alors leur confier des activités contribuant au fonctionnement quotidien de leur famille, telle que des activités domestiques, de gardiennage (garder les frères et soeurs en bas âge). Section 1: La qualité de l'éducation61(*)Outre l'expérience, l'école est le moyen pour une population d'acquérir des connaissances et des compétences. Il est important de pouvoir savoir si l'apprentissage des enfants en Afrique sub-saharienne permettra demain qu'ils puissent rentrer dans la vie active convenablement. L'accroissement de la qualité de l'éducation est donc aujourd'hui primordial. Selon le Programme d'Analyse des Systèmes Educatifs de la CONFEMEN (PASEC)62(*), il faut retenir une mesure d'évaluation de la qualité d'éducation, celle des acquisitions des élèves à travers des tests exercés dans les disciplines enseignées. C'est donc prendre en compte l'apprentissage des enfants, il s'agit alors, d'analyser le processus d'acquisition. Dans ce programme a été établi un modèle temporel du processus d'acquisition. Ainsi deux catégories de facteurs interviennent dans ce processus. La première catégorie concerne les conditions de scolarisation qui englobent les caractéristiques : des enseignants (formation, ancienneté...), de la classe (taille, mode d'organisation...), de l'école et de son environnement (équipements, zone géographique...). La seconde catégorie correspond aux caractéristiques individuelles de l'élève. Il faut entre autre, prendre en compte les connaissances initiales des élèves et ensuite voir comment ils adaptent celles-ci au cours de l'année d'étude. L'objectif à atteindre est donc d'assurer l'éducation pour tous. D'ici 2015, l'Afrique sub-saharienne connaîtra une augmentation des jeunes à scolariser environ 176 millions d'enfants seront concernés (tableau numéro 3).
En outre, cette volonté d'accroître la scolarisation des enfants, doit passer par le recrutement massif de professeurs (voir tableau numéro 4). Ce sont donc deux éléments liés. Néanmoins, ce qui se passe en Afrique sub-saharienne, est que pour mettre en place les politiques éducatives en adéquation avec l'accroissement des enfants scolarisés, il a fallu embaucher des enseignants à moindre coûts, c'est-à-dire avec une rémunération moins importante que celle des enseignants fonctionnaires. Il s'agit d'enseignants mis en place soit par la fonction publique tels que les professeurs contractuels (ou volontaires) ou par la communauté (maîtres de parents ou communautaires)
Ces enseignants contribuent ils à l'amélioration de la qualité de l'éducation ? Comment améliorer la qualité de l'éducation ? Entre les enseignants fonctionnaires et non fonctionnaires il y a des différences en termes de rémunération, d'expérience et de formation professionnelle. Cependant, il n'y a pas de différence dans les acquis des élèves entre ces deux catégories d'enseignants, les résultats sont donc concordants. En effet, dans les classes africaines, les enseignements pédagogiques sont très basiques, ce qui ne requière pas de niveau élevé de formation académique et initiale. Pour autant, il convient de noter que même si ces caractéristiques des enseignants n'influencent que modérément les acquis des élèves, la formation professionnelle entre autre, peut agir sur ces acquis. Ce qu'il est important de voir, c'est que l'enseignant joue quand même un rôle important dans le processus d'acquisition individuel des enfants, dans la mesure où ce processus varie selon l'enseignant. Il convient aujourd'hui de comprendre qu'il y a de nombreux moyens d'agir sur la qualité de l'éducation en Afrique sub-saharienne. On peut dégager une première partie de moyens d'amélioration de la qualité s'agissant des modes de gestion des systèmes d'instruction. Concernant l'enseignant lui-même, il s'agit d'améliorer sa pédagogie d'où l'importance de sa motivation professionnelle, de son envie d'enseigner et la connaissance de langues d'enseignement. On peut aussi accroître le nombre d'heure d'enseignement mais il y a de nombreux facteurs à prendre en compte, les conditions locales (climatiques et productives) mais cela dépend aussi de l'absentéisme de l'enseignant, du non remplacement de celui-ci ; toute l'amélioration de l'éducation nécessite d'adapter l'organisation scolaire aux conditions locales. La gestion de l'école et la participation des parents dans l'éducation des enfants sont tout aussi essentielles. Dans un second temps, il doit être accordé des moyens en termes d'équipement et de matériel. La particularité de ces moyens est qu'ils engendrent des coûts financiers relativement importants. Il faut pouvoir mettre de côté les mesures qui entraînent des coûts trop élevés et les remplacer par d'autres à plus faibles ressources. Les études du PASEC réalisées montrent qu'il y a des solutions appropriées pour ne pas avoir des coûts excessifs. En termes d'efficacité, c'est l'équipement en livres qui l'emporte. Selon les chercheurs du programme, donner accès à des bibliothèques publiques pourrait être moins coûteux qu'en distribuer, surtout que leur utilisation revêt une importance capitale. La dotation en outils pédagogiques disponibles dans toutes les classes pour éviter d'avoir des classes surchargées, l'amélioration des infrastructures, mais aussi l'enrichissement de l'environnement au niveau culturel, familial, permettent de relever les niveaux généraux de cette population pauvre. Cela passe également par une part non négligeable donnée à la nutrition des enfants pour qu'ils soient dans de bonnes conditions physiques. Au Cameroun, en matière d'éducation, il y a de grandes difficultés liées à une « perception négative » de l'école. Cette conception est négative car elle met en avant les coûts excessifs qu'engagent les familles les plus démunies, les problèmes sociaux en ce qui concerne le mariage précoce des filles. Malgré tous ces problèmes, ce pays à eu la volonté significative d'améliorer le système d'instruction et d'éducation. Une amélioration qui a constitué une des conditions d'éligibilité du pays à l'initiative PPTE63(*), ainsi, pour l'année 2006, l'éducation de base a consacré un budget atteignant les 103,6 milliards de FCFA (environ 158 millions d'euro). Pour autant, la volonté d'amélioration de la qualité de l'enseignement montre qu'il y a d'énormes progrès à réaliser pour parfaire l'apprentissage des élèves mais aussi satisfaire par la suite les exigences du marché du travail en termes de connaissances et de qualifications. En effet, « l'Afrique sub-saharienne, qui a connu une progression considérable, reste cependant à la traîne derrière d'autres régions, avec 30% des enfants en âge d'aller à l'école primaire qui restent non scolarisés. Une forte impulsion devra être donnée au cours des années à venir afin de scolariser tous les enfants et ainsi de leur donner le droit à une éducation de qualité64(*) ». Par ailleurs, il existe encore trop d'inégalités d'accès à l'éducation entre les enfants de sexes différents. Ce sont les filles les plus touchées par ce phénomène, ce problème doit être envisagé comme une autre condition primordiale d'amélioration de l'éducation en Afrique sub-saharienne. * 54 John Daniel, UNESCO, Sous-directeur général pour l'éducation de 2001 à 2004. Il a reçu le Prix d'excellence du Commonwealth of Learning dans le domaine de l'éducation à distance au cours d'une cérémonie organisée à l'occasion du deuxième Pan-Commonwealth Forum for Open Learning qui se tenait à Durban (Afrique du sud), le 1er aoút 2002. * 55 http://www.un.org/esa/socdev/unyin/documents/wyr07_fact_sheet_french.pdf * 56 Conférence mondiale sur l'éducation à Jomtien en 1990 où 155 pays et 150 organisations se sont engagés de garantir l'éducation pour tous en 2000. * 57 http://www.undp.org/french/mdg/basics_ontrack.shtml * 58 Réponse aux défis du développement, ils visent à réduire, la pauvreté, à promouvoir l'éducation, à améliorer la santé maternelle, à faire avancer l'égalité des sexes, à combattre la mortalité infantile, le HIV/SIDA et autres maladies. Ce projet comprend 8 objectifs à atteindre pour l'année 2015. * 59 Rapport entre l'éducation et l'emploi en Afrique Noire, NDAYAMBAJE Jean Damascène, Edition Saint-Paul, Fribourg, 1983, 278 pages. * 60 http://unesdoc.unesco.org/images/0014/001478/147878f.pdf * 61 Travail de recherche appuyée sur une étude tirée du programme PASEC. http://www.confemen.org/spip.php?rubrique3 * 62 Programme d'analyse de la Conférence des Ministres de Education des pays ayant le français en partage (CONFEMEN), crée en 1991, il vise à Ç mettre en relation les aspects quantitatifs et qualitatifs des systèmes éducatifs et de dégager les choix possibles des stratégies éducatives les plus efficaces. È * 63 L'initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) est un dispositif global de réduction de la dette des pays pauvres très endettés qui appliquent des programmes d'ajustement et de réforme appuyés par le FMI et la Banque mondiale. * 64 http://www.undp.org/french/mdg/basics_ontrack.shtml |
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