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Caractéristiques des atteintes cardiaques au cours de l'immunodéficience liée au VIH en Afrique centrale : évolution naturelle

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par Benjamin LONGO-MBENZA
Université Libre de Bruxelles - Agrégé de l'enseignement supérieur 1996
  

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7.4. DISCUSSION

En Afrique noire, aucun cas d'hypertension artérielle n'a été publié jusqu'à ce jour chez les patients positifs, mais l'hypotension artérielle a été décrite au cours du SIDA à cause de la diarrhée chronique et de la déshydratation du noir (PIOT P. et al., 1993). L'hyponatrémie (fuite excessive urinaire du sodium) et d'autres facteurs peuvent contribuer à l'installation de l'hypotension artérielle au cours du SIDA (VAZIRI N.D. et al., 1985).

Etude préliminaire

La controverse de la présence ou de l'absence de l'hypertension artérielle systémique dans les atteintes rénales du SIDA a plutôt montré un iceberg immergé dans le vaste océan du puzzle-SIDA décrit par des études rétrospectives. Ces dernières études évaluent des patients au stade terminal de l'insuffisance rénale et de l'infection VIH.

Le mérite de la partie préliminaire est d'analyser l'évolution tensionnelle de manière dynamique et pendant longtemps (7 mois d'observation) malgré l'échantillonnage fort réduit à 14 patients (18 patients recrutés au départ).

A ce stade, tous les patients ont présenté un tableau clinique de myopéricardite confirmée par l'échocardiographie. Une endartérite diffuse a été aussi suspectée.

La tachycardie (Fc > 100/min) est permanente chez ces patients comme déjà notée au cours du SIDA du noir africain (MALU K. et al., 1988 ; KAPITA B., 1989). Cette tachycardie peut déterminer l'augmentation du débit cardiaque et favoriser l'élévation tensionnelle. Quoi qu'il en soit, l'hypertension artérielle apparaît au seuil de l'infection VIH et disparait au stade clinique avancé et manifeste du SIDA, peut-être à cause des facteurs hypotenseurs éventuels prouvés dans le modèle animal (FABER J.E. et al., 1984). Des raisons techniques ne nous ont pas permis d'évaluer le rôle du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA). L'accélération de la vitesse de sédimentation de nos patients est liée à l'action de plusieurs facteurs : l'infection VIH, des processus inflammatoires (myopéricardite, endartérite) et affections opportunistes (zona intercostal).

C'est précisément cette accélération de la vitesse de sédimentation qui montre une corrélation très positive avec la tension artérielle au début de l'infection VIH. L'infection VIH déclencherait une réaction systémique post-agressive comprenant la stimulation du système sympathico-adrénergique et du système rénine-angiotensine et surtout la dysfonction endothéliale avec vasoconstriction. La tachycardie et la sudation profuse sont les marques de l'hypertonie sympathicodrénergique chez nos patients. La vasocosntriction détermine une augmentation des résistances périphériques et de la tension artérielle, surtout l'installation de l'hypertension artérielle diastolique. L'hypertension artérielle diastolique a été décrite chez le noir américain au cours du SIDA compliqué de méningite à cryptocoque (PATTY F.H. et al., 1992). Un patient avec tension systolique de 180 mmHg est décédé deux ans après dans un tableau de méningite à cryptocoque. La tension artérielle diastolique à l'admission (Pré-Sida) est positivement correlée à la vitesse de sédimentation.

Dans la cardiomyopathie dilatée, Treasure et al. ont montré que les cellules endothéliales étaient les premières de tout le système cardiovasculaire à présenter une anomalie de la réactivité vasomotrice (vasodilatation) liée à l'endothélium (TREASURE C.B. et al., 1990). Dix de nos 14 patients (71,43%) ont présenté une cardiomyopathie dialtée au cours de l'évolution de leur SIDA.

L'élargissement de la tension différentielle est plus marqué à l'apparition des signes cliniques manifestes de l'infection VIH. Ceci a été noté en dépit de l'absence apparente d'une corrélation entre la tension artérielle différentielle et la vitesse de sédimentation (r = 0,22, p = 0,449).

L'hypertension artérielle transitoire pourrait être liée au conflit immunologique caractéristique du Pré-SIDA du noir africain et ne nécessite pas un traitement anti-hypertenseur. D'autre part, l'infection VIH rend l'hypertension artérielle chronique réfractaire à tout traitement anti-hypertenseur.

Ne pouvant tirer de conclusions valables sur l'étude de la tension artérielle auprès d'un petit échantillon (14 patients), une grande cohorte de 170 patients a servi de matériel d'expérimentation. L'étude préliminaire avait émis l'hypothèse que la tension artérielle serait un facteur potentiel de mauvais pronostic de l'infection VIH.

La grande majortié de patients du groupe contrôle (73,5%) sont restés normotendus en dépit d'une perte rapidement progressive de leur fonction rénale VIH dépendante ; confirmant ainsi certaines études menées aux Etats-Unis d'Amérique (BOURGOIGNIE J.J. et al., 1988 ; BOURGOIGNIE J.J., 1989 ; RAO T.K.S., FRIEDMAN E.A., 1989).

Dans ce même groupe contrôle caractérisé par des lésions rénales associées à l'infection VIH, la proportion de 26,5% de patients trouvés avec une hypertension artérielle transitoire est moins importante que celle observée en Amérique (BOURGOIGNIE J.J. et al., 1988 ; CARBONE et al., 1989). L'hypertension artérielle a été notée chez 39% des patients au stade SIDA à Newx York, patients à majorité noire (96% afro-américains) (CARBONE L. et al., 1989). En dehors du SIDA, la prévalence de l'hypertension artérielle est estimée à 23% des cas de glomérulonéphrite primaire chronique (OROFINO L. et al., 1987). Tous les 83 patients du groupe contrôle ont rapidement évolué vers l'insuffisance rénale à cause de l'HIVAN. L'HIVAN est une forme insolite des lésions rénales caractérisée au cours de l'infection VIH par une protéinurie massive et une progression rapide vers l'insuffisance rénale (CARBONE L. et al., 1989). Cette atteinte rénale du noir africain au stade SIDA confirme la prédisposition raciale du noir à développer l'HIVAN comme déjà rapporté par d'autres auteurs (PARDO V. et al., 1987 ; RAO T.K.S. et al., 1987). La toxicomanie et l'homosexualité, autres facteurs de risques incriminés dans l'HIVAN, n'ont pas été retrouvées chez le noir du Zaïre. L'incidence de l'hypertension artérielle due à la glomérulosclérose et à la néphropathie associée à l'héroïne est 4 à 5 fois plus élevée chez le noir américain que chez d'autres races (FRIEDMAN F.A., RAO T.K.S., 1983 ; ROSTAND S.G. et al., 1982). Le virus VIH et d'autres facteurs de l'environnement auraient probablement induit des variations génétiques du noir au niveau rénal.

L'évolution de la tension artérielle a été suivie de manière régulière pendant plus de 84 mois chez 87 patients infectés par le VIH avec des complications cardiaques (cardiomyopathie dilatée et péricardite liquidienne). Ces 87 patients sont passés au stade SIDA à un âge moyen de 33 ans, âge sans différence significative avec celui du groupe SIDA et rein (36 ans).

Comparé au groupe SIDA et rein, le groupe SIDA et coeur présente une survie médiane plus longue, un nombre absolu des CD4 plus élevé et une proportion plus importante de sujets avec hypertension artérielle transitoire (59,7 %). Cette hypertension artérielle transitoire contemporaine à la période post-immédiate du passage au stade SIDA (durée 6 à 8 mois) est suggestive du rôle direct ou indirect du VIH d'autant plus que la tension artérielle systolique mesurée 6 mois après le passage au stade SIDA montre une corrélation positive avec le nombre des CD4 (r = 0,67) dans le groupe avec cardiopathies - SIDA.

Dans les deux groupes d'étude, malgré la différence des troubles hormonaux liés à l'infection CVIH entre les hommes et les femmes (PIOT et al., 1993), il n'a pas été noté une différence liée au sexe quant à l'évolution de la tension artérielle et à la survie. Le sex ratio de deux cohortes est resté proche de l'unité comme observé dans toutes les études africaines.

La tension artérielle prise 6 mois avant le virage vers le stade SIDA n'a pas exercé une influence prédictive à l'analyse univariée, confirmant ainsi les résultats du chapitre V ayant seulement reconnu le nombre de CD4 > 400/mm3 et la présence de la cardiomyopathie dilatée comme meilleurs facteurs de longue survie au stade SIDA.

Dans la cardiomyopathie dilatée associée à l'infection VIH, à dilatation égale pour les patients noirs du Zaïre VIH positifs (avant SIDA) et déjà au stade SIDA, la dysfonction systolique est présente uniquement chez les patients au stade SIDA (cf. chapitre III). En analysant les données de SOLVD (Studies of Left Ventricular Dysfunction), Konstan a réinsisté sur la réponse neurohormonale devant la dysfonction systolique (KONSTAN, 1992) : le taux plasmatique de noradrénaline, indicateur de la stimulation adrénergique, augmente déjà au stade incipiens de la dysfonction systolique ; l'activité rénine-plasmatique, reflet de l'action du système rénine-angiotensine, augmente aussi chez les patients avec dysfonction systolique. Cette réponse neurohormonale maintiendrait initialement le patient en phase de compensation, et peut exacerber la dysfonction ventriculaire. Cette hyper-réactivité cardiovasculaire est accompagnée d'une élévation aiguë de la tension artérielle au cours du stress (MANUCK S.B., 1990 ; PAGE I.H., 1963).

Une fois la phase post-aggressive résolue (passage au SIDA), la tension artérielle est restée normale chez tous les survivants.

L'hypertension artérielle permanente aurait dû apparaître devant la gravité des lésions rénales observées chez le noir du Zaïre, l'absence de cette hypertension pourrait être expliquée par l'action possible des facteurs antihypertenseurs décrits par d'autres auteurs (GROLLMAB A., 1964 ; GOTHBERG B. et al., 1982 ; CHRISTY I.C. et al., 1992 ; PREWITT R.L. et al., 1979 ; FABER J.E. et al., 1984).

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry