2.2 HYPOTHESES
Dans le cadre de cette recherche, à partir de notre revue
de littérature, nous faisons les hypothèses suivantes :
1) premièrement, l'origine sociale influence l'insertion
des diplômés ;
2) deuxièmement, les réseaux de relations
jouent un rôle important dans l'accès aux emplois (effet direct et
indirect) et le recours à ces réseaux peut revêtir
plusieurs formes.
3) troisièmement, le renforcement du diplôme
universitaire par une formation complémentaire (en informatique, en
anglais ou en gestion par exemple) ou par un stage augmente notablement les
chances d'insertion professionnelle.
La vérification de ces hypothèses et l'atteinte
de l'objectif de recherches ci-dessus énoncées appellent la mise
en oeuvre d'une analyse conceptuelle et d'une méthodologie de recherche
appropriée.
2.3 ANALYSE CONCEPTUELLE
Dans cette partie, nous procéderons à une
analyse des concepts : marché du travail, chômage et insertion
professionnelle qui sont au centre de notre étude. Cette
conceptualisation s'avère essentiel car c'est elle qui donne sens
à la méthodologie de recherche qui a été
adoptée.
2.3.1 LE MARCHÉ DU TRAVAIL
La notion de marché renvoie à la dynamique de
l'offre et de la demande, à leur déséquilibre et à
certaines conséquences qui en découlent, c'est-à-dire le
manque d'emploi ou la rareté des travailleurs. Le Robert (2000 : 370)
définit le marché comme un ensemble des offres et des demandes
concernant une catégorie (ou un ensemble) de biens, de services ou de
capitaux. Le marché du travail est composé de deux
éléments qui tendent à s'ajuster l'un à l'autre
pour ainsi être en situation d'équilibre. D'un côté
il y a l'offre et, de l'autre, la demande. Ces deux facettes
complémentaires décrivent respectivement la capacité des
biens pouvant être vendus ou achetés. L'offre d'un bien
représente, selon Claude (1990 : 317) « la quantité de ce
bien qui peut être vendue sur un marché à un prix
donné » tandis que la demande correspond à « la
quantité de bien qu'un acheteur est disposé à
acquérir et qu'il peut payer ». Ainsi, la réponse à
la demande est donnée par l'offre et vice versa.
L'offre et la demande dépendent du point de vue
adopté, en ce sens qu'elles s'interprètent à partir de ce
qui est échangé. Par exemple, du point de vue de l'employeur,
l'offre correspond au temps de travail (ou la compétence) qu'il peut
acheter. La demande quant à elle, émane des individus à la
recherche d'un emploi et correspond à la force de travail qui pourrait
être vendue. Ainsi, l'employeur offre un emploi et le
travailleur en demande un. Du point de vue du travailleur, l'offre
correspond à sa force de travail et/ou ses compétences qu'il vend
aux entreprises : il offre ses services. La demande, dans ce cas-ci, provient
des entreprises et correspond à la demande de main-d'oeuvre. Ainsi, le
travailleur offre son temps et sa force de travail et l'employeur
demande de la main-d'oeuvre (Grenier, 1998).
L'écart entre l'offre et la demande engendre un manque
d'emploi ou une rareté de travailleurs. Dans le premier cas, le
chômage est lié aux faibles ventes des entreprises. Les
employeurs, parce qu'ils ne vendent pas suffisamment, limitent leur recrutement
laissant ainsi certains individus sans emploi. La demande de travail est donc
supérieure à l'offre. Dans le second cas, le
déséquilibre provient du fait que les entreprises ne parviennent
pas à combler les postes disponibles, la main-d'oeuvre étant
déficiente. Ici, l'offre de travail est supérieure à la
demande (Gazier, 1991).
Par ailleurs, les acteurs qui interagissent sur le
marché du travail (les employeurs et les demandeurs) ajustent donc leur
comportement en fonction, d'une part, de ces situations de
déséquilibre et, d'autre part, de leurs besoins et de ceux des
autres. Le comportement des acteurs s'explique, comme le souligne Boudon
(1977), en supposant qu'ils cherchent principalement à servir de
manière satisfaisante leurs propres intérêts en employant
les moyens qu'ils jugent les plus adéquats. Ils se fixent un objectif,
déterminent les moyens susceptibles de les conduire à cet
objectif et choisissent parmi ces moyens le plus avantageux ou celui qu'ils
préfèrent.
En ce qui concerne les diplômés de l'enseignement
supérieur, leur marché est complexe en fonction des types de
formations ou domaine d'études. C'est pourquoi, à défaut
de se diriger vers des marchés spécialisés propres aux
diplômés, lorsque ces derniers sont saturés, ils sont
obligés de s'orienter vers des marchés indifférents
à la formation et à la limite donc plus
indifférenciés.
Même si l'on parle du marché de travail dans son
ensemble, il est apparu très tôt qu'il s'agissait d'une
réalité très différenciée. En effet, comme
le souligne Sales (1997 : 9), la spécialisation universitaire, puis
l'expérience acquise dans un domaine professionnel empêchent de
changer rapidement de filière professionnelle, à cause de la
durée, des coûts et des risques d'un tel changement.
« Ceci conduit, pour aller au delà de la
considération des rigidités des flux d'emploi, à
reconnaître qu'il n'y a pas un marché du travail unifié
pour les agents du savoir formel, mais plutôt de multiples marchés
du travail propres à des filières de formation ou des
sous-ensembles de filières qui d'une certaine façon
reflètent ou transcrivent la balkanisation du savoir formel. Ces
marchés compartimentés sont définis à la fois par
les disciplines et les professions plus ou moins structurées qui leur
sont associées, par les statuts choisis ou obtenus par les individus qui
les placent sur des échelles spécifiques de carrière et de
rémunération, et bien entendu par les types d'organisations qui
emploient des diplômés universitaires en développant des
marchés internes ou externes de qualité primaire ou secondaire.
Pour comprendre en détail cette différenciation du marché
du travail des diplômés universitaires, il faut faire appel
à ce que Sales désigne : comme des trajectoires structurelles
d'emploi (structural job trajectories) tout en tenant compte du type de
rationalité qui caractérise chaque discipline ».
Le marché interne peut être défini comme
étant "les mécanismes d'allocation de la main d'oeuvre internes
aux entreprises, qui définissent l'ensemble des postes, des affectations
et des rémunérations, et les règles de mouvements des
travailleurs dans cet ensemble il s'agit ainsi d'un espace de mobilité
que l'on peut observer surtout dans les grandes firmes, et constitué
d'une séries de règles générales qui
prévalent pour leurs employés, et ne sont donc pas
négociables au coup par coup. Ce sont des filières d'utilisation
et de promotion de la main d'oeuvre, largement déconnectées des
confrontations entre offreurs et demandeurs sur le marché
externe."(Gazier, 1992 : 223).
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