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La délinquance juvénile: comparaison et synthèse

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par Taoufik Bouyablane
Université Hassane II - Mohammadia - Maroc - Licence en droit privé 2006
  

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Deuxième partie

Les multiples facettes et

traitements du phénomène

Chapitre3. Les multiples faces de la délinquance juvénile:

On aura, dans ce chapitre, le temps d'étudier la délinquance juvénile à partir de trois points de vue différents: l'acte (côté "délinquance"), l'auteur (côté "juvénile") et l'impacte de l'acte sur l'auteur.

I. La délinquance juvénile: côté délinquance:

Pour détailler cette partie on aura l'occasion de montrer quelques passages de la définition de la notion de la "vulnérabilité" tirée de la théorie du "choix rationnel du crime", qu'on aura l'occasion de détailler par la suite dans la troisième partie de ce même chapitre.

A. Criminalité par objet:

Aperçu de la situation des pays occidentaux (USA et Canada): "Il ne fait

aucun doute que la quasi-totalité des sociétés occidentales ont connu une augmentation continue et substantielle de la délinquance des adolescents entre le début des années 1960 et la fin des années 1970. Par la suite, la trajectoire de la courbe ascendante s'est stabilisée au début des années 1980 pour décroître ensuite pendant quelques années, cela avant de repartir à la hausse pour atteindre et dépasser légèrement les niveaux antérieurs les plus élevés. Cette tendance récente décrit à la fois la situation aux États-Unis et à Montréal. Ainsi, le taux de délinquance des adolescents de la Communauté urbaine de Montréal est passé de 41 pour 1000 à 61 pour 1000 de 1990 à 1995. Pour leur part, les crimes contre la personne ont suivi une trajectoire récente semblable. Ainsi, les crimes contre les personnes commis par les adolescents québécois ne dépassaient pas la proportion de 10 % de l'ensemble des infractions criminelles qui leur étaient attribuées jusqu'en 1987, oscillant de 6 % à 10 % selon les époques et avec une baisse marquée au début des années 1980. Depuis la fin des années 1980, la proportion que représentent ces crimes augmente considérablement et, en moins de dix ans, elle a doublé, passant de moins de 10 % en 1985 à un peu plus de 20 % de l'ensemble des infractions criminelles des adolescents en 1995. Notons, par contre, une baisse importante en 1996. Si cette baisse se maintient en 1997 ou si la proportion des crimes avec violence se stabilise, la criminalité de violence aura changé d'échelle comme l'ensemble de la délinquance juvénile au cours des années 1960. La trajectoire de la délinquance avec violence est tout à fait semblable aux États-Unis. Son accroissement a débuté au même moment, c'est-à-dire en 1988, et elle est d'une ampleur tout à fait comparable jusqu'en 1995"29.

29 Marc Le Blanc: Professeur titulaire. École de psychoéducation, Groupe de recherche sur les adolescents en difficulté, Université de Montréal. "L'évolution de la violence chez les adolescents québécois: phénomène et prévention"; Revue "Criminologie"; Vol. 32, N°1, 1999.

1. Atteintes contre les personnes:

Certains auteurs ont mis en exergue d'une façon générale l'impacte du style de vie quotidien de mineur sur les chances de sa déviance: s'il sort beaucoup de chez lui, il est plus susceptible d'être agressé, ou plus grave d'être l'agresseur, que s'il est plus casan ier.

Pour bien saisir le contexte de la criminalité marocaine des mineurs faite sur les personnes par rapport aux autres tranches d'age, il serais préférable de jeter un coup d'oeil sur le graphique suivant:

Atteintes contre les personnes par categories d'age

A partir de 35 ans, en constate un fléchissement de cette courbe ascendante avec 6,7 % de détenus pour 4,12 % de la population pénale pour la tranche d'âge de 35 à 40 ans, 7,7 % de détenus pour 7,8 % de l'ensemble de la population pour la tranche d'âge de 40 à 49 ans et enfin 5 % de détenus contre 12 % d'individus pour les personnes âgées de 50 ans et plus.

- 868 homicides volontaires sur 962 sont commis par des personnes âgées de plus de 24 ans, soit 90 % des délits.

- 643 viols sur total de 708 ont été commis par des délinquants âgés de moins de 35 ans, soit 91 %, cette catégorie a également commis 37 % de vols qualifiés.

D'une manière générale, en peut dire que la délinquance contre les personnes est plus violente chez les 25 à34 ans que chez les autres groupes.

2. Atteintes contre les biens:

Atteintes contre les biens par categories d'age.

Les crimes et les délits ont leur âge de prédilection. A titre d'exemple, un vol sur deux est commis par un individu âgé de moins de 24 ans, donc par un mineur30.

Le surprenant dans les statistiques sur les atteintes contre les biens, sont les points communs entre les cibles31 qui sont au nombre de trois, à savoir:

· La valeur;

· La proximité du délinquant éventuel; et

· La vulnérabilité.

Plus un objet a de valeur aux yeux du mineur plus il peut être tentant pour lui. Cette valeur n'est pas forcement marchande -ce qui est pas le cas pour autre catégorie de délinquants-. La proximité est une notion spatio-temporelle. Plus un mineur mal orienté et mal encadré a l'occasion de rencontrer une cible éventuelle pour son action plus il y a de chances que cette action se produise effectivement. Il est souvent noté que le voleur, quelque soit son age, opère généralement dans un secteur qui lui est familier ou non loin de là. La vulnérabilité tient compte du degré de risque d'une cible de se trouver l'objet valable d'une infraction. Par exemple, un pickpocket choisit de s'attaquer à la poche entrouverte et facilement abordable d'une personne manifestement distraite au lieu de s'en prendre à celle difficilement accessible d'une personne apparemment sur ses gardes.

3. Atteintes contre les mceurs:

Atteintes contre les mceurs par categories d'âge

La principale idée qui peut expliquer cette situation (48% pour les mois de 25 ans), est le problème de la frustration. C'est-à-dire qu'une insatisfaction est infligée en permanence par la société qui est naturellement créatrice d'une tension pour le mineur qui la subit.

Il y a plusieurs manières possibles de réagir à une tension de ce genre; le sujet mineur, en répondant à la frustration par le maintien d'une haute intensité des besoins et désires, avec recherche de satisfactions, malgré de forces extérieures opposantes, ne peut que prendre une attitude revendicatrice et de transgression des barrières.

Une frustration de genre psychologique ou/et sexuelle, peut engendrer un acte déviant chez le jeune. En d'autre terme, toute affirmation d'autrui contre lui, toute opposition, toute barrière, toute interdiction est régulièrement et immédiatement

30 Dans le domaine de criminologie la majorité est fixée à 25 ans.

31 Est dite "cible" tout objet ou sujet sur lequel peut se commettre une infraction.

interprété comme une vexation et une injustice, il exprime en même temps son agressivité sous forme de conflits défensifs. Ces frustrations conscientes et inconscientes laissent en lui des traces qui resurgissent sous forme de pulsions de revendications. Il a tendance à vivre toute situation comme une frustration contre laquelle il se défend à l'avance en attaquant le premier.

B. Criminalité par milieu:

Au 31.12.1997, la population rurale (mineurs) représentait 22.4% de la population pénale des mineurs.

12'9%

22'4%

64'7%

Milieu rural

Moyenne agglomeration Grande agglomeration

Milieu d'origine des mineurs ayant quittaient les centres d'observation (1997).

Les citadins, représentaient 64.7% des délinquants mineurs.

Il est à remarquer que cette double disproportion dans la répartition géographique de la délinquance juvénile procède d'un phénomène universel et constant.

1. Criminalité au milieu urbain:

En dehors de la remarque précédente, on constate que le milieu urbain enregistre des taux de criminalité très élevés. L'urbanisation est même le facteur général dont l'action sur la criminalité est le mieux établie. Plus les villes sont grandes plus la criminalité y est développée. Les délinquants issus des grandes agglomérations représentent 72%32 de l'ensemble des citadins condamnés. Ceci nous autorise à affirmer que c'est en réalité moins le milieu urbain ou rural qui est criminogène que les concentrations humaines que l'on y rencontre. Plus un groupe devient important en nombre, plus ses contradictions éclatent et les intérêts de ses membres entrent en conflit entre eux. Dans cette perspective, les grandes villes enregistrent des taux de délinquance plus grands, non pas en égard à leur taille géographique mais parce qu'elles sont surpeuplées.

Les villes industrielles grandissent dans des proportions incontrôlables et incontrôlées. On a assisté ces dernières années à un foisonnement de quartiers périphériques et sub-urbains habités souvent par des nouveaux arrivants toujours plus nombreux et plus démunis. La sécheresse, l'absence ou l'insuffisance d'infrastructures sociales collectives dans les campagnes ont contribué à accélérer le phénomène de l'exode rural du début des années 50, vers les centres urbains et plus particulièrement Casablanca. De même l'ampleur prise par certains centres ruraux

32 Statistiques générales; 31.12.1984.

autonomes a accentué le taux d'urbanisation qui est passé de 20 % en 1960 à 45 % en 1987.

La grande ville détruit le sens du contact avec les autres. Elle crée inévitablement des tensions sociales entre les habitants des grands centres résidentiels et ceux des ghettos de la périphérie ; contradictions qui si elles n'ont pas l'occasion d'éclater souvent, se transforment en une sorte de conflit permanent. Ces quartiers-dortoirs, dont les habitants sont le moteur de la croissance urbaine sans jamais en profiter, regorgent de jeunes inadaptés que l'organisation sociale a contribués dans une large mesure à la manifestation de leur inadaptation.

En plus, la délinquance des villes s'appuie principalement sur la ruse, le stratagème et le subterfuge et accessoirement sur la violence. Les délinquants dans le milieu urbain font preuve d'intelligence, d'organisation et de préparation de leur infraction ; ce qui les rends parfois insaisissables et contribue à gonfler le chiffre noir.

2. Criminalité au milieu rurale:

Dans tous les pays où une étude du phénomène de la délinquance a été faite sous l'angle sociologique, on a remarqué que la criminalité est plus importante dans le milieu urbain que dans le monde rural et qu'elle est moins importante encore dans les petites villes de moins de 100.000 habitants qu'ailleurs, où tout le monde se connaît ou presque et où les relations humaines ne sont pas noyées dans l'anonymat des grandes métropoles ou les immeubles sans âme qui caractérisent la banlieue des grandes villes ou leurs misérables bidonvilles.

Les petites villes ne souffrent pas d'inconvénients connus dans les grandes métropoles. Les contrôles opérés par les forces de l'ordre y sont plus aisés et plus efficaces pour la prévention des crimes. Encor, des constatations statistiques nous a permis d'avancer l'idée que la délinquance dans le milieu rural fait appel surtout à la violence physique et accessoirement à la ruse.

Certains délits ne peuvent pas être commis dans le milieu rural ou dans les petites agglomérations. C'est le cas des vols à l'arrachée, du vol dans les transports urbains aux heures de pointe ou dans les grandes surfaces commerciales. Par contre, le vol ou l'incendie des récoltes, le vol du bétail ou le déplacement des bornes33 de délimitation de propriété et les accrochages qui s'ensuivent ne peuvent être réalisé que dans la campagne.

L'observation du phénomène criminel dans ses structures permet de constater que la criminalité urbaine est plus sophistiquée et plus élaborée que son homologue rurale. Elle fait plus appel à l'intelligence et à la ruse qu'à la force ou à la violence. Cette remarque est valable aussi bien pour la criminalité des hommes que pour celle des femmes. On constate que les ruraux commettent plus de délits violents ou involontaires et moins de délits astucieux que les citadins.

33 Punissable par emprisonnement de 2 à 5 ans et d'une amende de 120 à 1000 DH; Art. 520: Code Pénal.

C. Criminalité par auteur:

Compte tenu que ce sont les voies de fait et les batailles entre groupes d'adolescents plutôt que les vols qualifiés qu'il s'agit avant tout de réduire, les interventions défensives seront fort probablement peu utiles. Il ne s'agit pas d'augmenter la surveillance et de faire des aménagements physiques pour réduire les infractions, comme dans le cas des vols à main armée dans les banques au cours des années 1970 au Canada. Une surveillance policière accrue dans les transports publics et des aménagements physiques (meilleure illumination des couloirs, caméras...) fera peut-être diminuer les agressions dans ces lieux, mais il est aussi fort probable que celles-ci se déplaceront vers d'autres lieux comme la diminution des vols de banques à Montréal par exemple s'est accompagnée d'un accroissement phénoménal des vols chez les dépanneurs.

1. Criminalité individuelle:

criminalité indivivuelle criminalité de group

19%

123;

81%

530;

Parts de criminalité selon les circonstances (Individuelle ou de group); 199838 .

Peu importe que la criminalité soit individuelle ou par group, le secret de l'acte criminel demeure caché derrière d'autres raisons dont les principales restent la rupture de scolarité et la oisiveté qu'elle engendre.

2. Criminalité de group:

En suivant le même principe pour la criminalité individuelle; L'enfant n'a d'autre débouché que la rue. Oisif et sans ressources, la tentation de "franchir le pas" le guette, chaque jour de plus en plus forte. D'autant plus que chez cette catégorie de délinquants, l'infraction n'a pas la même signification que chez les adultes.

Les jeunes se mettent en bandes d'abord pour s'amuser, parce qu'on se sent mieux ensemble. Par jeu plus que par cupidité, ils commettent des petites larcins. Le jeune prend des risques graves en s'exposant aux foudres de la justice pénale sans viser d'autre but qu'épater un copain ou une fille, relever un défi, ou braver un ami. Petit à petit, il prend goût à "L'aventure" et se grise par les sensations fortes que procurent le risque et le sentiment de "l'avoir échappé belle".

34 Journal statistique des établissements de sauvegarde de l'enfance; Edition 1998.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci