Section 2 : Vérification des
hypothèses et établissement du diagnostic
Paragraphe 1 : Analyse des données et
vérification des hypothèses
A- Analyse des données
· La fréquence de sollicitation des
documents
![](problematique-acces-information-administrative-benin35.png)
Les usagers de l'administration publique béninoise pour
la plupart font recours aux services de l'administration pour leurs besoins
d'information. Très peu le font toujours et une bonne partie quelques
fois. Ceux qui ne font jamais recours à l'administration pour leur
besoin d'information représentent seulement le dixième.
Au regard de ces taux, l'administration n'a pas encore atteint
l'efficience de sa mission de service public. On peut la considérer
comme source potentielle et latente d'informations. A priori, une
écrasante majorité d'usagers devrait toujours ou tout au moins
assez souvent solliciter l'administration pour leur besoin d'information.
· Le canal d'expression du besoin
d'information
![](problematique-acces-information-administrative-benin36.png)
Il est aisé de remarquer que deux tiers des usagers se
voient obligés de se déplacer vers l'administration pour exprimer
leur besoin d'information. Les canaux que permettent les Technologies de
l'Information et de la Communication (TIC) à savoir le
téléphone et le courrier électronique sont très peu
exploités. Par contre la lettre est utilisée par un usager sur
cinq.
L'administration publique béninoise n'est donc pas
encore une administration moderne qui travaille avec le temps. Elle n'est pas
non plus souple et s'enferme dans des procédures longues, lentes,
fastidieuses et souvent inutiles.
· Le niveau de satisfaction des
usagers
![](problematique-acces-information-administrative-benin37.png)
Seul un usager sur dix affirme d'emblée être
satisfait de ses demandes d'information. Près de la moitié estime
être très peu satisfaite et plus d'un usager sur cinq estime
n'être pas du tout satisfait. Cela suppose que le droit à
l'information des usagers n'est pas reconnu et garanti.
· Le délai de satisfaction des
usagers (tableau n°9)
![](problematique-acces-information-administrative-benin38.png)
60% des usagers interrogés estiment être
satisfaits dans un délai supérieur à un mois et moins de
10% le sont aussitôt ; ce qui préjuge que le traitement des
demandes d'information ou de documents administratifs ne connaît pas de
célérité. L'information étant
une « donnée périssable »,
tout débiteur d'information doit faire diligence pour honorer sa
créance envers le créancier en temps réel.
· La réalisation des produits
documentaires (dossiers de presse) ou d'instruments de recherche
(tableau n°10)
![](problematique-acces-information-administrative-benin39.png)
Seul le quart des professionnels interrogés
réalise des produits documentaires et parmi ceux qui les
réalisent, la plupart affirment en faire peu et même très
peu. Il est donc établi que la publication et la signalisation des
informations administratives souffre de régularité quand
même elle est possible. Le défaut de moyens techniques et de
personnel qualifié en est la cause principale.
· La périodicité de
réalisation des produits documentaires (dossiers de presse) ou
d'instruments de recherche (tableau n°11)
![](problematique-acces-information-administrative-benin40.png)
Plus de la moitié des professionnels de l'information
qui réalisent des produits documentaires le font entre 3 et 6 mois. Si
cela ne pose pas de problèmes particuliers aux archives, au niveau des
centres de documentation qui doivent rester dans l'air du temps en accompagnant
les évènements d'importance pour le pays, la
périodicité paraît trop distancée.
A partir des développements précédents,
on se rend compte de la diversité et de l'éparpillement des
textes qui régissent le droit à l'information. L'absence de
codification de ces textes en un document unique entraîne l'ignorance des
textes par les agents de l'administration. En plus de la non sensibilisation
des fonctionnaires sur les droits des usagers en matière d'information,
il n'existe pas une véritable politique nationale d'information. Cette
situation induit des traitements différents d'une administration
à une autre et surtout selon la position sociale du demandeur (selon une
étude effectuée au Sénégal, les ouvriers, les
artisans et les paysans sont les plus exclus de l'accès à
l'information administrative).
De plus, une pratique courante des agents de l'administration
publique béninoise consiste à apposer le cachet
confidentiel sur tous les documents. Le culte du secret et de la
confidentialité ainsi que la forte hiérarchisation du
système administratif provoquent une rétention
systématique de l'information dans les administrations
béninoises. Même les décrets et arrêtés
ministériels qui ne sont juridiquement exécutoires et opposables
qu'après leur publication, sont interdits de diffusion à
l'endroit des usagers.
Les budgets des collectivités
décentralisées qui devraient être, en vertu de la loi et du
principe de transparence, portés à la connaissance des
administrés ne sont pas accessibles aux travailleurs et aux usagers des
Mairies. Les agents de l'administration n'ont pas eux mêmes accès
aux documents qui déterminent les rapports de travail (statuts de la
fonction publique, conventions collectives de travail...) qui les lient
à l'Etat ou aux entreprises publiques et semi-publiques. Les professeurs
et étudiants qui doivent alimenter la recherche ne disposent pas de
données provenant de l'administration. A l'endroit des opérateurs
économiques et investisseurs étrangers par contre, la Chambre de
Commerce et d'Industrie du Bénin (CCIB) et l'Observatoire
Béninois des Opportunités d'Affaires (OBOPAF) font l'effort de
mettre à leur disposition, des informations provenant de
l'administration. Mais face au besoin, cet effort est encore largement
insuffisant.
Quand les internautes béninois, dans leur quête
d`information parcourent les sites web des administrations encore fonctionnels
et mis à jour, grande est leur déception de constater la maigreur
des ressources disponibles qui se limitent généralement à
l'organigramme schématisant l'architecture de l'institution, les photos
de ses dirigeants. Rien de consistant n'est mis en ligne pour satisfaire les
besoins des visiteurs de ces sites.
La Direction du Journal Officiel qui est censée
être une structure importante et même charnière dans la
diffusion de l'information administrative est laissée dans la
vétusté. Cette direction n'est pas en mesure de mettre à
la disposition des usagers une salle de consultation avec le mobilier
adéquat et les conditions optimales d'exploitation. Elle ne dispose pas
encore d'un site web, à l'opposé de la plupart de ses homologues
africains, pour mettre en ligne le contenu de ses parutions bimensuelles.
C'est dans cet environnement d'accès difficile
à l'information administrative que les journalistes multiplient des
tentatives d'investigation dans l'administration en courant le risque
d'accusation pour l'infraction de recel de document administratif. La pratique
du journalisme d'investigation est donc ainsi compromise.
Les enseignants et les étudiants, eux, sont plus
souvent obligés d'abandonner leurs recherches ou de soudoyer les agents
de l'administration.
B- Vérification des hypothèses et
diagnostic établi
Hypothèse N°1 : L'absence de
codification, le défaut de sensibilisation et l'ignorance des textes
font que le droit à l'information du citoyen n'est pas reconnu dans les
Administrations.
Observations : Il ressort des entretiens
avec les agents de l'administration, qu'ils n'ignorent pas totalement le droit
des usagers à l'information. Mais ils ne connaissent pas la
portée et les limites de ce droit. Ce qui les amène à
circonscrire eux-mêmes le champ du droit à l'information des
usagers dans les administrations. Le défaut de sensibilisation est donc,
de toute évidence à la base de la non reconnaissance
intégrale de ce droit.
L'hypothèse est donc dans une large mesure,
vérifiée.
Hypothèse N°2 : Le
défaut de personnel qualifié et de moyens techniques a pour
conséquences l'inexistence, l'insuffisance et le défaut de
vulgarisation des Publications Officielles.
Observations : La lecture des
résultats obtenus à partir du guide d'entretien adressé
aux professionnels de l'information, fait savoir l'existence de publications
officielles dans la plupart des administrations. Cependant, leur forme, leur
contenu et le défaut de large diffusion de la plupart de ces documents
font que leur mission n'est pas efficacement assurée. A cela, il
convient d'ajouter, toujours selon les éléments recueillis
à partir du guide d'entretien que, le manque qualitatif et quantitatif
de personnel et de moyens pour assumer la mission de production et de diffusion
des Publications Officielles.
L'hypothèse N°2 est donc bel et bien
vérifiée.
Hypothèse N°3 : le culte de
la confidentialité et du secret et la forte hiérarchisation du
système administratif entravent l'accès aux documents
administratifs.
Observations : Les usagers de
l'Administration interrogés, situent les causes liées à la
difficulté d'accès aux documents administratifs au culte de la
confidentialité et à la forte hiérarchisation du
système administratif. Ce que confirment certains fonctionnaires. Et
c'est à ce niveau que la plupart pensent qu'il y a quelque chose
à revoir.
L'hypothèse N°3 est donc, elle aussi
vérifiée.
Diagnostic établi
Les problèmes et difficultés liés
à l'accessibilité de l'information administrative au bénin
sont réels et patents. Les données recueillies et
présentées plus haut décrivent la proportion dans laquelle
les usagers de l'Administration publique béninoise croisent des
barrières et surmontent des embûches dans leur quête
d'information ou de documents administratifs.
Les approches de solutions seront donc proposées aux
maux identifiés et répertoriés et des recommandations
formulées aux uns et aux autres, dans le sens de l'amélioration
des rapports Administration-administrés
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