Les obstacles juridiques et institutionnels à l'édification de la société sénégalaise de l'information( Télécharger le fichier original )par Ismaila BA Université Gaston Berger de Saint Louis (Sénégal) - Diplome d'études approndies 2004 |
3°/ - les activités de téléservices« Les téléservices sont des applications des NTIC mises à contribution pour produire, vendre et faire consommer des services dans des espaces séparés parfois par des milliers de kilomètres » .50(*) Les téléservices sont considérés comme l'un des secteurs les plus prometteurs pour l'économie sénégalaise. Ils ont également fait l'objet d'un conseil interministériel spécial en 1998. Les décisions prisent à cette occasion visent à l'adoption d'une tarification appropriée pour l'usage et la mise en oeuvre des industries de service, la création d'un environnement favorable aux projets à haute valeur ajoutée et l'adaptation de la fiscalité de droit commun en vue d'une application au commerce électronique. Malgré ces nombreuses initiatives et mesures d'incitation, les activités de téléservices sont encore peu développées, l'Agence de Régulation des Télécommunications dénombre six opérateurs de téléservices : PCCI, CALL ME, CENTERVALUE, SESI, AFRICATEL AVS. Ce sous développement s'explique par les contraintes liées à l'offre qui dépend des pays développés et de l'organe régulateur du Commerce servi au niveau mondial (OMC). Car la compétition dans les conditions de la mondialisation édictées par l'OMC et son fameux Accord général sur le commerce des services (AGCS) est un leurre pour les pays faibles. Elle permet, sans frais, d'ouvrir les marchés de ces derniers aux produits et services des pays développés tout en donnant à ceux-ci la liberté et les instruments juridiques pour se protéger d'un éventuel retour de bâton. Le cas des centres d'appel est un exemple édifiant à cet égard. Parce que les technologies de l'information et les réseaux de télécommunication leur permettent à présent de se battre « à armes égales » sur de nombreux créneaux, avec souvent de meilleurs avantages comparatifs (coût de main d'oeuvre par exemple), nombre de pays en développement ont investi le secteur des téléservices. Les délocalisations qui en résultent constituent dès lors un sujet de préoccupation majeure dans la plupart des pays du Nord qui voient ainsi un secteur à forte valeur ajoutée s'installer dans des pays jusqu'ici confinés à l'exportation de produits primaires. La révélation par le quotidien français Libération, dans son édition du 27 septembre 2004, que le ministre français de l'Economie et des Finances, M. Nicolas Sarkozy, préparait un projet d'arrêté visant à obliger les fournisseurs de biens et de services utilisant un centre d'appel à faire figurer dans leurs documents publicitaires le nom du pays à partir duquel le service est rendu, et à le décliner au moment du contact téléphonique, a fait trembler bon nombre de responsables des « call center » sénégalais. Certes, suite au tollé suscité par ce projet, en France comme dans les principaux autres pays concernés, le Maroc et la Tunisie notamment, le Premier Ministre français Jean-Louis Raffarin a décidé de reporter l'examen de cet arrêté en 2005. Cependant, tous les analystes sont convaincus que la question n'est que momentanément différée, et que de toute évidence le problème de fond qui concerne la viabilité de certains secteurs de nos économies se pose plus que jamais. Cette alerte montre qu'il est devenu très risqué d'investir massivement dans des créneaux qui sont totalement dépendants des marchés émetteurs et dont l'existence peut être remise en question du jour au lendemain sur la base d'un simple arrêté ministériel. En vérité, la preuve vient encore de nous être administrée que tant que nos efforts de développement reposeront sur des économies extraverties, exclusivement ou presque tournées vers la satisfaction des marchés extérieurs, elles seront à la merci des moindres soubresauts se produisant dans les pays dont elles dépendront. Il ne s'agit pas, bien entendu, de renoncer à exploiter les opportunités offertes par les marchés extérieurs, mais de bien garder à l'esprit qu'il est essentiel de développer et de consolider des produits et des services pour le marché national et le marché sous-régional. D'ailleurs certaines entreprises l'avaient bien compris et se sont positionnées dès le départ sur une offre destinée principalement au marché national et sous-régional, de ce fait elles ont regardé passer l'orage avec sérénité. En vérité, ce n'est qu'en assurant une forte implantation sur leur marché domestique que les entreprises africaines pourront s'attaquer aux marchés extérieurs avec des chances de succès à long terme. Cette responsabilité, incombe bien entendu au secteur privé mais également et avant tout aux dirigeants politiques qui, au-delà des déclarations de bonnes intentions, doivent créer les conditions d'une véritable intégration politique, économique, sociale et culturelle en Afrique pour que le potentiel constitué par l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), la Communauté des états de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et un jour celui de l'Union africaine (UA), bénéficie pleinement au secteur privé africain. En attendant, la leçon devrait être apprise et les conséquences tirées, car si une bataille tactique semble avoir a été gagnée sur ce dossier des centres d'appel, Il faut faire preuve de beaucoup de vigilance et se préparer à des attaques encore plus foudroyantes destinées à nous ôter toute capacité de tirer profit durablement des immenses potentialités liées aux téléservices.51(*) * 50 Définition donnée par le CD-ROM, Bibiorom, Larousse Edition 2003, Op, cit. * 51 Osiris, Batik n° 63, février 2005. |
|