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L'évolution de la notion d'associé

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par Florent Kuitche et Philippe Mankessi
Université Nice Sophia antipolis - Master II droit économique des affaires 2007
  

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P2) une qualification inopérante dans son application.

Tous les associés ne sont pas des actionnaires ; l'actionnaire n'est qu'une sorte particulière d'associé, celui qui détient les actions, c'est-à -dire des droits sociaux émis par une société par action, qui se signalent par leur négociabilité. L'associé étant le genre et l'actionnaire, l'espèce. Il semble néanmoins possible de conclure que tout actionnaire a la qualité d'associé. L'actionnaire serait un associé dont la seule originalité serait de détenir des droits sociaux négociables.

L'idée a beau être communément admise, l'on peut se demander si l'analyse ne gagnerait pas à être renouvelée. La dévolution des modes de financement par action a contribué à bouleverser les catégories. La diversification des valeurs mobilières, le développement des prises de participation temporaires dans les sociétés (le portage par exemple), l'originalité de plus en plus affirmée des sociétés cotées, conduisent l'actionnaire à se poser des questions existentielles. Etre ou ne pas être associé, telle est la question. Le constat est que les analyses classiques sont périmées et qu'elles doivent être renouvelées. Il faut se rendre à l'évidence que dans les sociétés par action, nombre d'actionnaires ne se retrouvent pas dans la définition classique de l'associé et ce d'autant moins que des évolutions récentes ont contribuées à brouiller les frontières entre les catégories d'associés. Lorsque l'on se trouve en présence d'une société par action, la vérité est que l'affectio societatis de l'actionnaire d'une société dont les titres sont admis à la cote sur le marché boursier est presque toujours inexistante. On est tenté de se demander si l'actionnaire est encore un associé.

Cette inquiétude est devenue plus aigue à mesure que sont apparus de nouveaux modes de financement de sociétés par action. L'actionnaire devient de plus en plus difficile à cerner depuis que l'on voit apparaître des actionnaires à éclipse, qui n'entre dans la société que pour en sortir, ou encore qu'apparaissent de nouveaux titres de financement, qui rendent bien ténue la distinction entre les actions et les obligations.

Certains financiers prennent la qualité d'actionnaire pour réaliser un apport de capitaux propre à une société, sans avoir, à aucun moment, le souhait de participer aux risques de l'entreprise commune. Cette situation se rencontre par exemple, en présence d'un portage, lorsque le porteur acquiert ou souscrit des titres qu'il veut avoir la certitude de céder pour un prix, qui lui permettra de récupérer sa mise et de percevoir une rémunération. La psychologie d'un tel partenaire financier est plus proche de celle d'un prêteur que de celle d'un associé. Il est alors permis de se demander si cet actionnaire, qui refuse de s'exposer aux risques inhérents à toute prise de participation, et qui n'entre dans le groupement qu'avec la certitude de pouvoir en sortir, est bien un associé.

Plus troublant encore est le bouleversement qui résulte de l'apparition de titres de financement qui rendent caduque l'opposition bien tranchée entre ces deux titulaires de titres qui ont la qualité d'associé et ceux qui ne l'ont pas. La frontière entre l'obligation et l'action devient bien perméable lorsque l'on découvre les nouvelles valeurs mobilières dont la loi autorise l'émission. L'exemple de l'épargnant se doit d'être évoqué. Ce dernier n'est pas investi de l'affectio societatis. Il perçoit la société comme un objet de placement et n'a ni le temps, ni la compétence, ni même l'intérêt pour participer à la vie sociale. En dépit des apparences, ce dernier n'est plus traité comme un associé, et ceci, quelque soit la nature juridique des titres qu'il détient. Par ailleurs, l'attitude des investisseurs institutionnels met clairement en évidence que ces derniers n'ont aucun égard pour l'affectio societatis. Ceux-ci n'ont qu'un seul objectif : la maximisation de la plus-value à court terme. Si les résultats de la société mettent en évidence un recul des profits, de même si les objectifs prévisionnels sont moins satisfaisants que prévu, ceux-ci vendront massivement leurs titres.

En effet, « les actionnaires associés en petit nombre, sont vivement intéressés à la marche des sociétés, et les contrôlent pleinement ; les autres, épargnant ou spéculateurs, en très grand nombre, se considèrent comme de simples créanciers de la société, ne sont que des passants »91(*). Il est vraisemblable que l'actionnaire achetant des actions de préférence sans droits de vote, soit moins sensible à la gestion de la société. Entre les divers bailleurs de fonds qui financent l'activité d'une société par action, la summa divisio ne peut plus être établie entre ceux qui sont actionnaires et ceux qui ne le sont pas. Une distinction plus pertinente doit être proposée entre ceux qui sont de véritables associés et les autres. Fort du constat que certains actionnaires entretiennent une proche parenté avec d'autres bailleurs de fonds, qui n'ont pourtant qu'une qualité de créancier, on est tenté de les qualifier d'investisseurs. Les actionnaires ne sont donc tous pas des associés, certains ne sont que des investisseurs. Et il y a lieu de distinguer, parmi les actionnaires, entre ceux qui ont véritablement une âme d'associé et ceux qui se bornent à réaliser un investissement sans avoir une telle ambition.

Une doctrine autorisée a proposé de faire la différence entre ceux qui participent à la gestion de la société, « les actionnaires associés », et ceux qui financent la société : « les actionnaires investisseurs92(*). Dès lors, il semble que les actionnaires acquérant les actions de préférence sans droit de vote soient avant tout « des actionnaires investisseurs », simples bailleurs de fonds et non de véritables associés. Une distinction entre actionnaire investisseur est aujourd'hui reconnue par la jurisprudence, notamment au regard des promesses de rachat à prix plancher. Aujourd'hui il faut s'entendre sur cette idée élémentaire que tous les actionnaires ne sont pas du même bois. Certains sont de vrais associés, d'autres sont de pures investisseurs, c'est-à dire des créanciers qui ne voient dans l'action que l'enrichissement qu'elle va leur procurer et négligent le pouvoir qu'elle pourra leur conférer. L'idée est aisément admissible mais elle reste platonique si l'on se contente d'y voir une variation lexicale propre à mettre de l'ordre dans la catégorie des actionnaires. Voilà pourquoi, il : convient que cette distinction entre l'investisseur et l'associé se traduise par l'élaboration de règles différentes s'appliquant à l'un et à l'autre.

Après ces développements certes non exhaustifs sur la diversification de l'usage fonctionnelle de la notion d'associé, celle-ci n'est plus à prouver. Cependant cette dichotomie entre le conceptuel et le fonctionnel liée à l'évolution de la notion faisant l'objet de notre étude ne conduit -elle pas à sa disparité ?

* 91. G. DAMY, « la remise en cause de la notion classique d'associé : vers une atteinte aux fondements du droit des sociétés », petites affiches, Droit des sociétés, 26 juillet 2007 n° 149, p. 3.

* 92. D.S. SCHMIDT, « les droits de la minorité dans la société anonyme », Sirey, 1970, n° 12.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams