L'exception de copie privée face aux dispositifs techniques de protection des oeuvres( Télécharger le fichier original )par Marjorie PONTOISE Université Lille II - Master 2 pro Droit du cyberespace (NTIC) 2005 |
b) La prohibition d'une utilisation collectiveLa formule utilisée par l'article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle apparaît ambiguë. Littéralement il faudrait la comprendre comme insistant sur la finalité de l'usage : il doit être privé, c'est-à-dire réservé à l'usage personnel du copiste. Mais, et c'est là la signification de « non destiné à l'utilisation collective », même privé, l'usage ne doit pas être collectif. Ainsi, une musique ou un film reproduit ne doivent pas profiter aux membres d'une association, à l'ensemble d'un comité d'entreprise, à un groupe dépassant les proches membres de la famille. En d'autres termes l'usage ne doit pas être professionnel, ni bénéficier à des personnes qui ne sont pas le copiste ou ses proches. Mais celui qui effectue une copie pour ses besoins propres bénéficie de l'exception. Ceci n'est nullement compatible avec l'usage public d'une oeuvre sur l'Internet, même personnel, compte tenu de la multitude d'internautes pouvant y avoir accès. C'est ce qu'à affirmer la jurisprudence à plusieurs occasions15(*) : « attendu qu'en permettant à des tiers connectés sur le réseau Internet de visiter ses pages privées et d'en prendre éventuellement copie, et quand bien même la vocation d'Internet serait-elle d'assurer une telle transparence et une telle convivialité, X. favorise l'utilisation collective de ses reproductions ; [...] qu'il est donc établi que X. a, sans autorisation, reproduit et favorisé une utilisation collective d'oeuvres protégées par le droit d'auteur »16(*). Non seulement pour exercer la prérogative de copie privée il faut répondre aux exigences d'usage privatif et d'interdiction d'utilisation collective, mais le statut et la dénomination du copiste sont encore à définir. c) La détermination du copiste1. DéfinitionLe Code la propriété intellectuelle ignore la notion de consommateur, il ne connaît que la notion de public17(*). La notion de public est connue en propriété littéraire et artistique pour désigner les destinataires des oeuvres. Jusqu'ici le public se contentait d'acheter une oeuvre (quelque soit le support) et accédait à celle-ci tout en profitant d'un certain nombre d'exceptions aux droits exclusifs organisées par le législateur, qui lui permettaient par exemple de faire une citation ou une copie pour son usage privé. En résumé la situation accordait un droit exclusif pour l'auteur (sans lequel l'oeuvre n'aurait pas vu le jour) et des exceptions justifiées par l'intérêt général. Mais l'irruption des mesures techniques de protection a profondément modifié les rapports entre le public et le droit d'auteur. Pour ne pas se perdre dans une confusion terminologique, il s'agira dans un premier temps d'apprécier la différence entre « consommateur » et « public » avant de voir l'impact des mesures techniques de protection sur ceux-ci. * 15 P-Y Gautier, « Pour ou contre le droit de copier des fichiers protégés sur Internet », Dalloz 2000, forum III * 16 TGI Paris 14 août 1996, Sardou, Dalloz 1996, p.41 et JCP E 1996 II 881 * 17 Sauf en matière de logiciel où le Code évoque implicitement la notion « d'utilisateurs ». |
|